Skip to main content

Full text of "Bulletin de la Société archéologique de Nantes et du département de la Loire-Inférieure"

See other formats


çc-  ce 


C    tf   ce 


<ei<K      Ce    C 


CCC     C("<:( 


:<  ce 


CÇ    C?rr 

^e  c 


eâ 


^?<«fe< 
et  ce  < 


>V.v 


£f, 


H  \  VC 

L<ç 

1 

ii 

c  ce 


c  e    c  c/ 

C  Cet; 

ï^>  -5  S 


,C  C 


^~  C  '<cf 
CQ.C  C    C     CC         CC 


ee<  e 

:c<cc< 


ce  <  <3C 


c  ce 


AS 


ce  c 


r  ce  <r 
ce  ' 
ce    ce  « 


c  *<e  cc<  c  < 


(CC    Ce  iC 


R  C  CC  C  ^C  < 


CC<    a   CC    ce  C 


e  ■  e  r  <r 


Ci  C  .r 


L(CC((? 


ce  cc.ee  ec  ce  ce 


<v  <&v  <ce  , 

^cevc   Cf  c   (ce 


g  e-.t 

C-£  ■ 


ex:  c^cccc  ce  ee<€T  ccCCo 


C«?<? 


c        <£" 


<I 


«i£^  eje 


<v 


«:  c  c  c    c 


>f£  ^'"CC?  e      CC  c  C 


(  r  <r  <r  ,'     <r  ïcr  ce 


C<  <^<r  <5  <r   ex:  ce    ç  c   c  ci  -«-     «fec 

SCs-  ÇC^  Cj<     e  c    c  <S    ce       ce   < 


<^re^  <r 


ecce 


Es:  Ce   ■ 


%sMicc  <r 


cr  c 


Cl  cfo.c  <y> 


"^-JS^- 


<T  Ci  C  C    e;  < 


«Te 


jTcr 


^«1 


c>c  ce 


3  ç 

.e.  c 


:  C  <k  C 


CCCC   v  C 


^  cceasr 


«SS- 


^C  CCI" 


(-  CXic 


£C  eexe 


_.  <CCC   ■ 


«o< 


/'''"  <r^ 


^  <   gg 


W  "  ^^  ans 


ce 


~îr# 


Cclcc! 


Ce       r  f  85 


c<r 


Ce    ce* 


XC  ryr. 


SOCIÉTÉ  ARCHÉOLOGIQUE  DE  NANTES 


1881 


BULLETIN 


DB  LA 


r  r 


SOCIETE  ARCHEOLOGIQUE 

DE  NANTES 

ET  DU  DÉPARTEMENT  DE  LA  LOIRE-INFÉRIEURE.      - 


TOME    VINGTIÈME. 

Année  1881. 


NANTES, 
IMPRIMERIE  DE  VINCENT  FOREST  &  EMILE  GRIMAUD, 

PLACE  DU  COMMERCE,  L 


1881 


EXTRAITS 


DES 


PROCÈS-VERBAUX   DES  SÉANCES 


SÉANCE  DU  MARDI  18  JANVIER  1881. 

Présidence  de  MM.  de  Wismes  et  de  la  Laurencie. 

Présents  :  MM.  Seidler,  Aug.  Bacqua,  de  l'Estourbeillon,  Maître, 
Leroux,  de  Rochebrune,  F.  Bougouin,  des  Jamonières,  des  Dorides, 
Mont  fort,  Soullard,  Évelin,  H.  deCornulier,  Le  Romain,  E.  La  Peyrade, 
Malherbe,  l'abbé  Fernand  de  Wismes,  Fabrô,  Gouespel,  comte  de  Bel- 
lisle,  Gôo-Remy,  Flornoy,  Christian  de  Wismes  et  beaucoup  d'autres 
assistants. 

Après  la  lecture  du  procès-verbal,  on  procède  aux  élections  de  MM. 
Bernard  et  Perron.  Ces  messieurs  sont  admis  à  faire  partie  de  la  So- 
ciété, le  premier  comme  membre  résidant,  le  second  à  titre  de  mem- 
bre correspondant. 

Le  tome  dix-huitième  des  Mémoires  de  la  Société  de  statistique, 
sciences  et  lettres  des  Deux-Sèvres  est  déposé  sur  le  bureau  pour 
la  bibliothèque  de  la  Société,  ainsi  que  le  Catalogue  des  livres,  ma- 
nuscrits et  autographes  composant  la  bibliothèque  de  feu  M. 
Adhémar  Sazerac  de  Forges. 

Les  deux  discours  présidentiels  qui  ont  occupé  le  commencement  de 
la  séance,  seront  reproduits  en  tête  de  nos  Bulletins  ;  nous  n'avons 
donc  pas  à  les  analyser  ici.  Constatons  seulement  l'accueil  chaleureux 
qui  leur  a  été  fait  par  toute  l'assistance. 

En  applaudissant  le  portrait  si  fidèlement  tracé  de  M.  le  baron  de 
Wismes,  l'assemblée  a  témoigné  à  la  fois  sa  haute  sympathie  pour 


—  VI  — 

notre  président  d'honneur  et  pour  celui  qui  le  remplace  maintenant 
à  notre  tête. 

Ce  portrait  restera  l'un  des  plus  précieux  feuillets  de  nos  archives  ; 
comme  dans  ces  merveilleuses  enluminures  de  nos  vieux  manuscrits, 
les  couleurs  y  sont  vives  et  délicates,  chaque  touche  y  est  donnée  de 
main  de  maître,  et  dans  cette  œuvre,  d'un  fini  irréprochable,  nous  re- 
verrons toujours  avec  plaisir  celui  qui  a  su  diriger  et  encourager,  pen- 
dant trois  années,  les  travaux  de  notre  Société. 

A  la  suite  de  ces  discours,  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie  passe 
en  revue  les  différents  travaux  dont  notre  Société  va  s'occuper.  — 
Voici  le  texte  de  son  allocution  : 

«  Messieurs, 

«  Je  faillirais  à  mon  devoir  si,  avant  de  passer  aux  communications 
que  vous  promet  l'ordre  du  jour,  je  ne  vous  indiquais  sommairement 
l'état  de  notre  situation  administrative  et  matérielle. 

«  Chez  nous,  vous  le  savez,  un  changement  de  ministère  n'altère 
point  le  programme,  je  veux  dire,  le  pacte  fondamental. 

Eprouvé  par  le  temps,  votre  sage  règlement  sera  maintenu,  au  moins 
selon  son  esprit. 

«  L'impression  de  notre  Bulletin  a  subi  un  retard  fâcheux  ;  elle  est 
encore  entravée  par  de  sérieuses  difficultés  de  composition  5  mais  le 
travail  en  est  poussé  activement,  et  nous  devons  espérer  que  l'année 
1880  suivra  de  près  l'année  1879,  appelée  à  paraître  incessamment  ; 
je  m'en  suis  assuré. 

«  M.  votre  bibliothécaire,  par  mesure  d'ordre,  aura  à  reconstituer  nos 
rayons.  Je  vous  prie  de  vouloir  bien  lui  faciliter  sa  tâche,  en  nous  res- 
tituant les  volumes  qui  sont  encore  entre  vos  mains.  —  L'in- 
ventaire terminé,  tous  seront  à  votre  disposition  comme  par  le  passé. 

«  Nos  finances  économiquement  gérées  nous  permettent  de  satisfaire 
à  des  charges  assez  lourdes  relativement. 

«  La  bienveillante  intervention  du  Conseil  municipal  nous  vaut,  à 
dater  de  la  présente  année,  une  précieuse  augmentation  de  200  francs 
sur  le  chiffre  habituel  de  notre  subvention. 

»  Cette  mesure  généreuse  a  trouvé  d'éloquents  promoteurs  dans 
MM.  A.  Van-Iseghem  et  Dugast-Matifeux,  mes  collègues  à  double  titre, 
et  un  gracieux  accueilprès  de  l'honorable  M.  Lechat,  Maire  de  Nantes. 

»  Seules,  les  bourses  légères  savent  apprécier  la  valeur  d'un  secours 


—    VII  — 

opportun  ;  seules  aussi,  elles  savent  témoigner  mieux  qu'une  platoni- 
que reconnaissance. 

«  Vous  ratifierez,  Messieurs,  cette  affirmation  expérimentale  ;  vous 
m'aiderez  à  justifier  l'attente  d'une  administration  profondément  sou- 
cieuse de  tout  développement  intellectuel  dans  notre  belle  cité.  » 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  description  du  cabinet  de  Samuel 
d'Avaugour,  sire  de  Saffré  en  1625.  Au  début  de  ce  travail,  M.  de 
l'Estourbeillon  donne  l'historique  de  la  maison  de  Saffré  ;  puis  il  passe 
à  linventaire  des  différents  objets  ayant  appartenu  à  Samuel  d'Avau- 
gour. Cette  curieuse  description,  bien  faite  pour  stimuler  au  plus 
haut  point  la  convoitise  d'un  antiquaire,  nous  permet  de  pénétrer 
d'une  façon  presque  intime  dans  la  vie  privée  de  ce  seigneur  du  temps 
de  Louis  XIII.  Sans  doute,  les  armes  prennent  une  large  place  dans  ce 
cabinet  de  travail  :  armes  de  tir,  armes  blanches,  tout  un  arsenal 
défile  devant  nous  ;  mais  dans  cette  collection,  le  côté  intellectuel  n'est 
pas  non  plus  négligé  ;  la  bibliothèque,  composée  de  350  volumes  d'his- 
toire, de  littérature  et  de  religion,  nous  montre,  dans  ce  châtelain,  un 
homme  instruit,  justement  préoccupé  des  question  politiques  et  reli- 
gieuses de  son  temps.  Toutes  les  pièces  de  ce  cabinet  sont  décrites 
avec  soin,  les  armes  surtout,  et  cette  riche  nomenclature  de  termes 
spéciaux,  consacrés  à  l'époque,  a  pour  nous  une  saveur  toute  parti- 
culière, et  pourra  fournir  d'utiles  renseignements  à  nos  modernes  col- 
lectionneurs. 

Après  cette  communication,  M.  Leroux  nous  donne  lecture  de  ses 
notes  sur  Balbek.  Dans  un  récent  voyage  en  Syrie,  M.  Leroux  a  visité 
les  temples  du  Soleil  et  de  Jupiter,  et  les  murailles  cyclopéennes  de 
Balbek.  Les  notes  qu'il  nous  communique  sont  encore  parfumées  de  la 
poésie  de  ces  ruines  grandioses,  et  des  mystérieuses  solitudes  qui  les 
entourent.  Ce  n'est  pas  tout  à  fait  une  étude  archéologique,  notre  col- 
lègue en  convient  lui-même  ;  ses  procédés  diffèrent  essentiellement 
de  notre  méthode  habituelle,  et  le  mètre  ne  s'est  pas  déroulé  souvent 
entre  ses  mains.  Tout  à  son  admiration  enthousiaste,  il  a  vu  et  bien 
vu,  et  ses  attachantes  descriptions  nous  retracent  les  vives  images  de 
ces  splendeurs  à  demi  ensevelies  dans  la  nuit  de  l'histoire. 

Pour  nous,  qui  nous  étonnons  parfois  du  silence  que  les  voyageurs 
et  les  historiens  de  l'antiquité  ont  gardé  sur  nos  monuments  celtiques, 
l'oubli  qui  pèse  sur  ces  gigantesques  chefs-d'œuvre  nous  console  un 
p  eu  de  ce  dédain. 


—   VIII    — 

Parmi  les  énormes  blocs  destinés  aux  constructions  de  Balbek,  une 
pierre,  désignée  par  les  Arabes  sous  le  nom  de  Pierre  du  Midi,  est 
fidèlement  décrite  par  M.  Leroux  :  elle  est  taillée  sur  cinq  de  ses  fa- 
ces ;  sa  longueur  est  de  20  m.  80  sur  1  m.  30  de  haut,  et  5  m.  de  large. 
M.  de  Saulcy  a  calculé  que  pour  ébranler  cette  masse  formidable,  il 
faudrait  les  efforts  réunis  de  plus  de  40,000  hommes,  Quoiqu'il  en  soit, 
cette  pierre  est  inférieure  en  longueur  au  menhir  du  Men-Er-Groegh  ; 
sa  largeur  est  à  peu  prés  la  même,  et  son  épaisseur  seule  présente 
une  notable  différence  ;  mais  le  granit  de  la  Bretagne  est  beaucoup 
plu*  lourd  que  les  calcaires  de  Balbek  dont  M.  Leroux  nous  a  montré 
les  échantillons,  et,  de  plus,  notre  mégalithe  a  été  dressé  debout,  tan- 
dis que  la  Pierre  die  Midi  n'est  pas  encore  séparée  de  la  carrière. 

Ces  notes,  écoutées  avec  le  plus  vif  intérêt,  ont  fait  passer  comme 
un  souffle  imprégné  de  fraîcheur  et  de  poésie,  au  milieu  des  sujets  plus 
arides  de  nos  études,  et  nous  regrettons  vivement  que  la  publication 
de  ces  souvenirs  de  voyage  ne  soit  pas  destinée  à  notre  Bulletin-, 
mais  les  notes  de  M.  Leroux  ne  sont  pas  épuisées,  et  nous  espérons 
qu'il  voudra  bien  nous  donner  quelques  nouvelles  pages,  et,  cette  fois, 
nous  les  J[  abandonner  tout  à  fait. 

L'exhibition  des  armes  de  pierre  et  de  bronze  trouvées  aux  environs 
de  Donges  par  MM.  Georges  et  Pitre  de  Lisle,  termine  la  séance  :  — 
Des  ôpôes,  un  poignard  en  bronze,  une  épingle  à  cheveux,  longue  de 
31  cent.  ;  puis  un  objet  mince  et  tranchant,  de  forme  ovale,  muni  d'un 
manche  également  en  bronze,  et  désigné  par  M.  Alexandre  Bertrand 
souslenom  de  rasoir  ;  enfin,  des  haches  en  plomb  fondues  sur  le  modèle 
des  haches  de  bronze. 

Parmi  les  pierres  polies,  des  hachettes  minces  en  fibrolithe  et  une 
toute  petite  hache,  de  29  millimètres  de  long. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  onze  heures. 

Le  Secrétaire  général, 
Pitre  de  Lisle. 


SÉANCE  DU  MARDI  8  FÉVRIER  1881. 

Présidence  de  M.   le  vicomte  de  la  Laurencie. 

Présents  :  MM.  de  Wisme3,  Van  Iseghem  père,  Gustave  de  la  Brosse, 
Le  Quen  d'Entremeuse,  des  Jamoniôres,  Léon  Maître,  R.  de  Roche- 


—  IX   — 

brune,  Blanchard,  comte  de  l'Estourbeillon,  Bacqua  père,  comte  de 
Bremond  d'Ars,  L.  Petit,  Auguste  Bacqua,  abbé  Gallard,  Évelin,  P.  de 
Lisle. 

M.  le  Président  dépose  sur  le  bureau  les  ouvrages  suivants,  offerts  à 
notre  Société  : 

lo  Répertoire  de  la  Société  de  statistique  de  Marseille.—  Un  seul 
article  de  cette  publication  intéresse  directement  l'archéologie  :  c'est 
la  description  d'une  sépulture  gréco-latine. 

2o  Bulletin  de  la  Société  internationale  de  Berghen. 

3o  Rapports  sitr  les  mesures  à  prendre  pour  la  conservation 
des  monuments  mégalithiques. 

Ces  mesures  sont  de  trois  sortes  : 

Primo,  les  propriétaires  recevraient  une  indemnité  pour  la  conser- 
vation des  mégalithes  qui  se  trouvent  sur  leurs  terres. 

Secundo,  les  communes  se  rendraient  adjudicataires  de  ces  monu- 
ments. 

La  troisième  mesure  consisterait  à  exproprier,  ni  plus  ni  moins, 
les  possesseurs  de  mégalithes,  ou  d'objets  d'art  d'un  intérêt  excep- 
tionnel. 

4°  Les  Procès-verbaux  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et  arts 
de  l'Aveyron,  tome  XII,  contenant  un  très  remarquable  travail  sur  la 
philologie  et  une  étude  sur  une  dent  fossile,  par  Albespy. 

5o  Lettres  de  M.  H.  Martin  à  M.  Alexandre  Bertrand. 

M.  le  Président  demande  que  cette  pièce,  du  plus  haut  intérêt,  soit 
insérée  dans  notre  Bulletin. 

On  procède  ensuite  aux  élections  de  M.  Ch.  Bastard,  présenté  par 
MM.  de  Wismes  et  des  Jamoniôres,  et  de  M.  Gh.  Riardant,  présenté 
par  MM.  le  baron  de  Wismes  et  G.  Seidler. 

Ces  messieurs  sont  admis  à  l'unanimité  à  faire  partie  de  notre  So- 
ciété. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  communication  de  M.  de  Wismes 
sur  sa  visite  à  la  Salmonière.  Après  nous  avoir  dépeint  les  environs 
de  la  Salmonière,  laSôvre  et  ses  capricieux  détours  entre  des  rives  cou- 
vertes de  feuillage  ou  brusquement  taillées  dans  des  rochers  à  pic, 
M.  de  Wismes  nous  fait  remarquer  le  contraste  que  présente  ce  char- 
mant coin  de  terre  avec  les  plaines  monotones  du  lac  de  Grandlieu, 
ou  les  vastes  horizons  des  bords  de  la  Loire.  Le  pays  de  Vertou  est 
bien  un  pays,  un pagus,  d'un  cachet  tout  particulier,  et,  parmi  les  can- 


—   X    — 

tons  si  variés  d'aspect  qui  environnent  notre  Comté  nantais,  ce  déli- 
cieux pays  se  distingue  entre  tous  par  ses  mille  petits  vallons,  ses 
ruisseaux  ombragés  sous  les  fourrés  et  les  grandes  buttes  qui  se 
dressent  çà  et  là  et  dominent  toute  la  contrée. 

Le  caractère,  à  la  fois  gracieux  et  un  peu  mystérieux,  de  ces  ravins 
entourés  de  grands  arbres,  attira  de  bonne  heure  les  religieux  des 
environs.  Le  plus  célèbre  de  tous  est  saint  Martin,  et  sa  vie  miracu- 
leuse jette  seule  quelques  clartés  sur  l'histoire  primitive  de  Vertou. 
M.  de  Wismes  nous  rappelle  les  traits  les  plus  saillants  de  la  vie  de  ce 
saint  fondateur.  Martin  était  le  fils  du  seigneur  de  Rezô.  Après  avoir 
été  ordonné  prêtre  par  l'évêque  Félix,  il  fut  chargé  d'évangéliser  les 
habitants  d'Herbadilla,  ville  luxueuse  et  corrompue,  qui  s'était  fondée 
sur  les  bords  de  la  Boulogne,  après  la  destruction  de  Rezé  par  César. 
L'apôtre  fut  très  mal  accueilli  dans  cette  ville  ;  les  habitants  n'écou- 
tèrent point  ses  pieuses  remontrances,  et  il  ne  trouva  l'hospitalité  que 
chez  une  bonne  femme  et  son  mari,  qui  furent  seuls  à  se  convertir. 

Saint  Martin  quitta  cette  cité  maudite,  emmenant  avec  lui  ses  hôtes  5 
et  à  peine  était-il  sorti  de  la  ville,  que  la  terre  s'entr'ouvrit  et  Herba- 
dilla  disparut  sous  les  eaux  qui  forment  aujourd'hui  le  lac  de  Grand- 
lieu.  La  femme  qui  l'avait  accompagné,  s'étant  retournée,  malgré  les 
injonctions  du  saint,  pour  jeter  un  regard  sur  cet  effroyable  désastre, 
fut  instantanément  changée  en  pierre.  On  la  voit  encore,  à  peu  de  dis- 
tance de  Grandlieu,  sur  une  prairie  qui  borde  la  rivière  de  l'Ognon. 

Saint  Martin  entreprit  ensuite  différents  voyages,  pour  étudier  les 
règles  des  monastères,  et  surtout  les  fondations  de  l'ordre  de  Saint- 
Benoît.  Partout  il  se  rendit  célèbre  par  la  sainteté  de  sa  vie,  et  par 
les  miracles  que  Dieu  lui  permit  d'accomplir. 

De  retour  en  Bretagne,  il  se  rendit  à  Vertou,  où  il  fonda  un  mona- 
stère en  l'honneur  de  saint  Jean-Baptiste.  Cette  abbaye  devint  bientôt 
trop  petite  pour  les  nombreux  religieux  qui  s'y  rendaient,  et  saint 
Martin  établit  une  nouvelle  communauté  à  Durinum,  aujourd'hui  Saint- 
Georges-de-Montaigu.  C'est  en  ce  lieu  qu'il  mourut,  le  24  octobre  589. 

Les  moines  de  Durinum  ayant  refusé  aux  moines  de  Vertou  la  per  • 
mission  d'emmener  le  corps  du  saint,  ceux-ci  l'enlevèrent,  une  nuit 
qu'ils  étaient  chargés  de  veiller  et  de  prier  auprès  du  mort.  Mais,  ar- 
rivés près  de  la  rivière  de  Sèvre,  au  lieu  dit  le  Portillon,  ils  ne  trou- 
vèrent point  de  bateau  pour  passer  sur  l'autre  rive.  Comme  ils  po- 
saient à  terre  le  corps  de  leur  saint  patron,  les  eaux  de  la  Sèvre  se 


—  XI  — 

divisèrent  de  çà  et  de  là,  montrant  la  grève  au  fond  sèche  et  guê- 
able.  Ce  que  voyant,  les  moines  de  Vertou  passèrent  et  incontinent 
les  eaux  se  rejoignirent  derrière  eux,  fermant  le  passage  à  ceux  de 
Durinum,  qui  les  poursuivaient. 

Ce  miracle  étant  divulgué,  grand  nombre  d'infirmes,  de  boiteux, 
d'aveugles  et  de  sourds  se  rendirent  en  pèlerinage  au  tombeau  de 
saint  Martin,  et  s'en  revinrent  guéris. 

Après  avoir  salué  cette  grande  figure  du  vieux  saint  de  Vertou,  M. 
de  Wismes  arrive  à  la  Salmonière.  Un  manoir  en  partie  restauré, 
mais  encore  entouré  de  ses  douves  et  flanqué  de  pavillons,  reliés,  en 
guise  de  courtines,  par  des  murs  et  des  bâtiments,  s'élève  entre  une 
futaie  de  chênes  et  de  vieilles  charmilles.  Au  fond  de  la  cour,  près 
d'une  tourelle  à  fenêtre  ogivale,  s'ouvre  la  grande  salle,  avec  ses  pou- 
tres enluminées,  sa  grande  cheminée  à  baldaquin,  décorée  de  pein- 
tures de  Gustave  Marquerie,  et  ses  vieux  dressoirs  en  bois  de  chêne. 

Tout  auprès  de  la  Salmonière,  on  aperçoit,  au  milieu  d'un  clos  de 
vigne,  une  grande  pierre  debout,  reste  d'un  dolmen  dont  les  débris 
sont  abattus  çà  et  là.  Ce  monument  n'est  pas  le  seul  que  notre  ex- 
cellent collègue  ait  ainsi  sous  sa  garde  :  une  allée  couverte,  située  à 
quelque  cents  mètres  de  là,  dans  la  pièce  des  Lèches,  a  été  trouvée 
par  lui,  il  y  a  quelques  années. 

Puis  la  butte  des  Couteaux,  qui  se  dresse  à  pic  au  dessus  de  la  Se- 
vré, a  dû  servir  de  point  de  défense,  aux  époques  primitives.  Des  silex, 
des  pierres  polies,  des  bronzes,  ont  été  trouvés  près  de  là  par  M. 
Marionneau.  C'est  en  cet  endroit,  sur  le  sommet  même  de  la  butte, 
que  notre  collègue  a  le  projet  d'établir  ses  collections.  En  attendant, 
un  massif  d'arbustes  s'élève  à  l'abri  des  constructions  qui  se  ratta- 
chent au  Moulin  des  Couteaux.  Cette  plantation  n'est  point  une  plan- 
tation ordinaire;  les  jardiniers  qui  ont  travaillé  à  ce  massif  ont  été 
choisis  avec  le  plus  grand  soin.  Baudry,  Marquerie  et  d'autres  illus- 
tres, ont  eu,  avec  notre  cher  président,  l'honneur  de  planter  ces  ar- 
bustes privilégiés. 

L'inspection  de  la  "galerie  de  M.  Marionneau  termine  la  visite  à  la 
Salmonière.  Presque  tous  les  objets  de  cette  collection  ont  été  recueil- 
lis dans  le  canton  de  Vertou,  et  nous  en  avons  le  catalogue  détaillé  au 
tome  XV  de  notre  Bulletin  (p.  317  à  363). 

Mais,  tout  en  réunissant  ces  précieuses  trouvailles,  M.  Marionneau 
n'a  pas  négligé  notre  musée  ;  les  magnifiques  objets  donnés  par  lui  à 


—   XII   — 

l'Oratoire,  sont,  nous  l'espérons  bien,  des  pierres  d'attente  qui  rêver 
ront,  un  jour,  leurs  compagnes  de  Vertou. 

Cette  odyssée  de  quelques  heures,  à  deux  lieues  et  demie  de  notre 
ville,  nous  a  fait  revoir,  avec  un  très  vif  plaisir,  la  sympathique  fi- 
gure de  notre  ancien  président,  encadrée  dans  ce  pays  qu'il  a  tant 
contribué  à  nous  faire  connaître.  Nous  avons  tous  suivi  M.  de 
Wismes  dans  ce  pèlerinage  scientifique  et  amical,  et  notre  seul  regret 
est  de  ne  pouvoir  conserver  ici  toutes  les  charmantes  saillies  de  sa 
narration. 

MM.  Van  Iseghem  père,  Le  Quen  d'Entremeuse  et  Léon  Maître  adres- 
sent à  M.  de  Wismes  plusieurs  questions  sur  Vertou.  M.  Maître  nous 
indique  la  situation  précise  du  monastère  fondé  par  saint  Martin  ;  les 
bâtiments  abbatiaux  occupaient  les  terrains  où  se  trouve  maintenant 
la  maison  de  campagne  de  M.  de  Boury. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  notice  de  M.  Ledoux  sur  l'abbaye 
de  Saint-Gildas.  M.  Léon  Maître  a  bien  voulu  se  charger  d'en  donner 
lecture  à  la  Société. 

Ce  travail  est  fait  avec  beaucoup  de  soin  et  d'érudition.  Il  contient 
un  grand  nombre  de  documents  intéressants  pour  notre  histoire  lo- 
cale, et  la  description  de  la  vieille  église  bénédictine,  avec  ses  pein- 
tures murales  et  ses  portes  en  fer  forgé,  œuvre  des  frères  Girouard 
de  Poitiers.  Puis  des  détails  biographiques  sur  les  abbés  de  Saint-Gil- 
das, et  les  différentes  contestations  élevées  à  propos  de  dîmes,  entre 
l'abbaye  et  le  prieuré  de  Missillac.  Nous  n'avons  point  à  analyser  ici 
cette  étude,  qui  doit  paraître  dans  nos  Bulletins. 

M.  Villers  n'ayant  pas  assisté  à  la  séance,  sa  communication  est 
remise  à  notre  prochaine  réunion. 

L'ônumôration  des  objets  gallo-romains  et  mérovingiens  offerts  au 
Musée  de  Nantes  par  Frédéric  Moreau,  termine  la  séance. 

La  Société  se  sépare  à  neuf  heures  et  demie. 

Le  Secrétaire  général, 
Pitre  de  Lisle, 


SÉANCE  DU  MARDI  8  MARS  1881. 

Présidence  de  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie. 
Présents:  MM.  de  Bejarry,  Seidler,  Riardant,  Bernard,  Léon  Maître, 


—   XIII  — 

Van  Iseghem  père,   des  Jamonières,  Petit,  Le  Quen  d'Entremeuse, 
Lemeignen,  de  l'Estourbeillon,  Hte  Maugras,  de  Lisle. 

M.  le  baron  de  Wismes,  inscrit  à  l'ordre  du  jour,  a  annoncé  par 
lettre  qu'il  ne  pourrait  assister  à  notre  réunion. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

M.  le  président  donne  lecture  d'une  lettre  du  Ministre  de  l'Instruc- 
tion publique,  annonçant  la  publication  d'une  nouvelle  Revue  histori- 
que et  archéologique  ;  tous  les  travaux  des  Sociétés  savantes  seront 
étudiés  et  analysés  dans  ce  recueil  ;  la  rédaction  de  ces  différents 
comptes  rendus  sera  confiée  à  des  hommes  spéciaux,  et  dans  ce  but 
le  Ministre  nous  demande  l'envoi  de  5  exemplaires  de  nos  Bulletins. 

Il  est  décidé  que  nous  ferons  droit  à  cette  demande. 

Une  autre  circulaire  ministérielle  invite  notre  Société  à  envoyer  des 
travaux  et  des  délégués  aux  réunions  qui  se  tiendront  à  la  Sorbonne 
du  20  au  23  avril  1881. 

Sont  déposés  sur  le  bureau,  pour  la  bibliothèque  de  la  Société  : 

lo  Le  Bulletin  de  la  conférence  littéraire  et  scientifique  de  Pi- 
cardie. 

Cette  revue  ne  contient  que  peu  d'articles  concernant  l'archéologie. 

2<>  Prospectus  d'un  Bulletin  épigraphiqîie  de  la  Gaule. 

Autre  prospectus  d'une  Histoire  de  l'Art  chrétien. 

3o  Bulletin  archéologique  du  Vendômois,  contenant  un  curieux 
travail  de  M.  Môricourt  sur  les  légendes  de  ce  pays  ;  —  un  cartulaire 
inédit  de  la  Trinité  de  Vendôme  ;  —  et  la  description  des  fouilles 
d'une  sépulture  gallo-romaine. 

4»  Sociétés  des  Antiquaires  de  l'Ouest.  Une  très  curieuse  décou- 
verte est  signalée  dans  ce  recueil.  On  a  trouvé  dernièrement  à  Poitiers 
une  tombe,  où  la  tête  du  mort  était  enfermée  à  part,  dans  une  châsse 
en  briques,  cimentées  avec  soin;  le  reste  du  corps  gisait  auprès, 
sans  qu'on  eût  pris  les  mêmes  précautions  pour  le  protéger. 

5o  Société  d'émulation  de  la  Vendée.  Une  nouvelle  opinion  re- 
lative à  la  position  de  l'ancien  Portus  Secor,  est  consignée  dans 
une  note  de  M.  l'abbé  Baudry,  notre  regretté  collègue,  et  une  étude 
sur  les  légendes,  croyances,  superstitions  et  dictons  populaires  du 
Bas-Poitou. 

Enfin,  60,  les  tomes 66  et  68  de  l'Annuaire  numismatique-,  deux 
beaux  volumes,  dont  l'intermédiaire,  le  tome  de  1867,  est  encore  à  nous 
parvenir. (Le  volume  de  1866  est  ici  en  double.) 


—   XIY  — 

Après  avoir  passé  en  revue  ces  différentes  publications  en  nous  si- 
gnalant, dans  une  analyse  vive  et  piquante,  les  articles  qui  intéressent 
directement  l'archéologie,  M.  le  président  donne  la  parole  à  M.  Raoul 
de  Rochebrune,  pour  la  lecture  de  son  travail  sur  les  Troglodytes  de 
la  Gartempe.  Après  nous  avoir  décrit  la  situation  de  la  grotte  des 
Cottôs  et  les  circonstances  qui  ont  amené  sa  découverte,  M.  R.  de 
Rochebrune  nous  fait  passer  en  revue  les  divisions  publiées  par  M. 
de  Mortillet,  pour  les  différentes  industries  de  la  pierre  éclatée  et  de  la 
faune  quaternaire. 

Ces  divisions  ont  l'extrême  avantage  de  faciliter  le  classement  des 
objets  primitifs,  armes  et  outils  de  silex,  etc.  ;  elles  permettent,  en 
outre,  de  désigner  par  un  seul  nom  tout  un  ensemble  de  formes  assez 
variées. 

Elles  ont  le  tort  très  grand  de  vouloir  généraliser  des  observations 
locales,  et  de  les  étendre,  sous  le  nom  d'âge  et  d'époque,  à  des  régions 
où  l'industrie  de  la  pierre  a  suivi  une  tout  autre  marche. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  première  idée  de  ce  classement  est  due  à  M. 
Lartet.  Le  savant  explorateur  des  cavernes  du  Midi  avait  remarqué 
dans  ses  fouilles  que  la  présence  de  certaines  espèces  de  mammifères 
coïncidait  avec  l'emploi  de  formes  spéciales  dans  les  outils  de  silex;  il 
établit,  sur  ce  rapprochement,  un  système  de  classification  très  ingé- 
nieux, mais  qui  ne  peut  s'appliquer  régulièrement,  en  dehors  de  cer- 
taines limites.  Ainsi,  en  Bretagne,  le  seul  gisement  que  nous  possé- 
dions, le  Mont-Dol,  devrait  appartenir,  d'après  les  innombrables  osse- 
ments de  mammouths  qu'on  y  a  découverts,  à  l'époque  la  plus  ancienne, 
au  type  du  Saint-Acheul.  Il  n'en  est  rien;  tous  les  instruments  en  silex 
recueillis  dans  ce  gisement,  sont  de  formes  moustériennes,  et  quelque- 
fois même  d'un  type  plus  récent.  D'un  autre  côté,  les  trouvailles  de 
M.  Dupont,  en  Belgique,  sont  venues  bouleverser  les  divisions  par  trop 
méthodiques  de  l'école  nouvelle. 

En  somme,  il  y  a  aujourd'hui  une  tendance  marquée  à  laisser  de 
côté  les  4  époques  du  Saint-Acheul,  du  Moustier,  de  Solutré  et  de  la 
Madeleine,  pour  réduire  ces  catégories  à  deux  grandes  périodes.  L'une, 
caractérisée  par  la  présence  des  animaux  antédiluviens,  par  la  strati- 
fication des  argiles  dans  nos  vallées  et  par  l'emploi  exclusif  des  armes 
de  pierre.  La  deuxième  période,  contemporaine  des  animaux  seule- 
ment émigrés  de  nos  climats,  coïncide  avec  les  dépôts  du  lœss  et 
l'usage  des  outils  en  os.  C'est  le  classement  aujourd'hui  adopté  à  Saint- 


—  XV   — 

Germain  par  M.  A.  Bertrand,  et  suivi,  nnpeu  à  regret,  il  est  vrai,  par 
M.  de  Mortillet. 

M.  R.  de  Rochebrune  nous  décrit  ensuite  les  différents  mammifères 
dont  il  a  recueilli  les  ossements  dans  la  grotte. 

C'est  toujours  avec  un  certain  étonnement  que  nous  retrouvons, 
dans  nos  campagnes,  le  lion,  le  rhinocéros,  hôtes  habituels  des  contrées 
plus  sauvages.  Il  n'est  pas  moins  surprenant  de  retrouver,  côte  à  côte, 
les  ossements  des  animaux  des  pays  froids  et  de  la  zone  équatoriale  ; 
et  ce  phénomène  singulier  n'a  pas  encore  été  expliqué  d'une  manière 
plausible. 

M.  de  Rochebrune  insiste  sur  les  caractères  différentiels  qui  sépa- 
rent les  espèces  quaternaires  des  actuelles.  Ainsi,  l'éléphant  primige- 
nius,  le  mammouth,  plus  rapproché  de  l'éléphant  d'Asie  que  de  la  race 
du  continent  africain,  diffère  encore  beaucoup  du  premier  par  le  dé- 
veloppement extraordinaire  de  ses  défenses.  Comme  le  fait  très  ju- 
dicieusement observer  notre  collègue,  il  est  impossible  que  le  porteur 
de  la  gigantesque  défense  recueillie  dans  la  grotte  des  Cottes  ait  pu 
entrer  vivant  dans  cette  caverne. 

Parmi  les  beaux  objets  de  silex  que  M.  de  Rochebrune  nous  commu- 
nique, nous  remarquons  des  pièces  lancéolées,  taillées  à  grands  éclats 
et  d'une  forme  très  pure  ;  elles  appartiennent  à  la  première  période. 
D'autres,  de  l'époque  du  renne,  sont  éclatées  avec  un  soin  minutieux 
et  finement  retouchées.  Des  pointes  en  os,  d'un  beau  poli  et  bien  effi- 
lées vers  le  bout,  et  une  gravure  sur  pierre  représentant  trois  ani- 
maux vus  de  profil,  complètent  cette  exhibition. 

La  lecture  de  la  seconde  partie  du  travail  de  M.  de  Rochebrune 
est  remise  à  la  prochaine  séance. 

M.  Hippolyte  Maugras  offre  à  la  Société  un  petit  vase  en  terre  ru- 
gueuse, un  peu  rétréci  au-dessous  de  l'orifice,  et  qui  a  été  trouvé 
dernièrement  dans  les  terres  du  cimetière  de  Vieillevigne. 

Au  nom  de  l'assemblée,  M.  le  président  remercie  notre  collègue  de 
son  aimable  présent.  L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  lecture  des 
fouilles  du  tumulus  de  la  Roche,  en  la  commune  de  Donges,  par 
MM.  G.  et  P.  de  Lisle. 

La  voie  ferrée  sépare  actuellement  deux  mégalithes,  situés  à 
une  petite  distance  du  bourg  de  Donges.  L'une  de  ces  pierres  est  un 
menhir,  connu  sous  le  nom  de  la  Galoche  de  Gargantua  ;  l'autre 
est  une  table  de  dolmen.  Au  dire  des  gens  du  pays,  la  table  que  nous 


—  XVI    — 

voyons  maintenant  au  bord  de  la  voie,  était  posée  jadis  sur  le  menhir 
et  servait  de  pièce  à  cette  gigantesque  galoche.  Mais  il  advint  que 
Gargantua,  avisant  de  l'autre  rive  cette  mirilique  amusette,  se  mit  à 
lancer  ses  palets  par-dessus  la  Loire,  tant  et  si  bien,  qu'au  dernier 
coup,  la  pièce  fut  renversée  et  que  le  palet  qui  l'avait  abattu,  vint 
tomber  au  milieu  de  la  Gagnerie  du  Prieur,  où  on  la  voit  encore  ac- 
tuellement. Ce  palet,  à  demi  enseveli  sous  les  terres  du  tumulus  de  la 
Roche,  sert  de  table  à  une  crypte  dolménique,  précédée  d'une  allée 
couverte. 

Les  fouilles  de  cette  tombelle  ont  mis  à  jour  de  nombreuses  po- 
teries, parmi  lesquelles  quatre  vases  en  terre  rouge  et  brune,  ornés 
de  bandes  de  dessins,  des  couteaux  en  silex,  des  pierres  polies  ayant 
servi  de  molettes  ou  de  broyons,  des  ossements,  du  charbon  et  une  très 
jolie  pendeloque  en  agathe  transparente. 

Le  fait  le  plus  curieux  que  nous  ait  révélé  cette  fouille,  est  la  pré- 
sence, dans  la  galerie  couverte,  de  plusieurs  foyers  funéraires  indi- 
quant un  certain  nombre  de  sépultures.  En  effet,  cette  allée  est  si 
étroite,  qu'il  est  impossible  qu'on  y  ait  transporté  les  cadavres  des 
morts  et  les  vases  qui  les  accompagnaient.  D'un  autre  côté,  les  sup- 
ports sont  extrêmement  faibles,  par  rapport  à  la  lourdeur  des  blocs 
qui  servent  de  couverture.  En  enlevant  ces  tables  pour  descendre  les 
morts  dans  la  galerie,  on  eût  infailliblement  détruit  l'équilibre  du  mo- 
nument. Il  a  donc  fallu  que  ces  sépultures  fussent  faites  en  même 
temps.  Cette  rencontre  de  plusieurs  morts  dans  le  même  sépulcre  fait 
songer  à  ce  passage  où  César  décrit  les  coutumes  sanglantes  des  ha- 
bitants de  la  Gaule,  égorgeant,  aux  funérailles  d'un  chef,  les  amis  et 
les  plus  proches  parents  du  défunt. 

M.  R.  de  l'Estourbeillon  remet  ensuite  à  la  Société  un  cachet  de  M. 
de  la  Tullaye,  archidiacre  de  la  Môe,  offert  au  Musée  archéologique 
par  M.  le  comte  Alfred  de  la  Tullaye.  La  séance  est  terminée  par  la  lec- 
ture d'une  jolie  pièce  de  vers  ayant  pour  titre  :  L'amour  devenu 
avocat.  Cette  poésie,  d'un  tour  galant  et  badin,  aurait  été  trouvée 
dans  la  collection  des  archives  du  Port-d'Or,  parmi  les  pièces  manus- 
crites des  ducs  de  Lorge  (?)  Toutefois,  et  malgré  les  accointances  de 
ce  morceau  avec  la  poésie  du  XVIIIe  siècle,  nous  laisserons  jusqu'à 
plus  ample  informé,  un  large  point  de  doute  sur  son  origine. 

La  séance  est  levée  à  neuf  heures  et  demie. 

Le  Secrétaire  général, 
Pitre  de  Lisle. 


—   XVII  — 

SÉANCE  DU  MARDI  5  AVRIL  1881. 

Présidence  de  M.   le  vicomte  de  la  Laurencie. 

Présents  :  MM.  Ch.  Riardant,  Octave  de  Rochebrune,  baron  de 
Wism'es,  de  Bejarry,  Van  Iseghem  père,  Léon  Maître,  Petit,  Le  Quen 
d'Entremeuse,  de  la  Brosse,  J.  Rousse,  François  Bougouin,  Montfort, 
comte  de  l'Estourbeillon,  Anizon,  H.  Maugras,  Raoul  de  Rochebrune, 
P.  de  Lisle  et  plusieurs  membres  arrivés  durant  le  cours  de  la  séance. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

On  procède  à  l'élection  de  MM.  Stanislas  Gahier  et  Fraboulet.  Ces 
messieurs  sont  admis,  à  l'unanimité  des  votants,  à  faire  partie  de  notre 
Société. 

M.  le  président  donne  lecture  du  programme  qui  nous  a  été  adressé 
par  la  Société  française  d'archéologie,  pour  le  congrès  qui  doit  se  réu- 
nir à  Vannes,  le  28  juin  prochain. 

Les  sujets  qui  seront  traités  dans  cette  session,  présentent  un  très 
vif  intérêt,  et  il  est  à  désirer  que  beaucoup  de  membres  répon- 
dent à  l'appel  qui  leur  est  adressé. 

Sont  déposés  sur  le  bureau,  pour  la  bibliothèque  de  la  Société  : 

lo  Bulletin  de  la  Société  scientifique  et  historique  de  la  Cor- 
rèze,  tome  111,  Ire  livraison  ; 

2»  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Picardie,  1880. 
No  1  ; 

3°  Revue  historique  et  archéologique  du  Maine,  1880.  Trois  fasci- 
cules ; 

io  Bulletin  d'archéologie   chrétienne  de  M.  de  Rossi,   édition 
française,  3e  série,  5e  année. 

5»  Rapport  de  la  Commission  impériale  archéologique,  pour 
l'année  1877.    Saint-Pétersbourg; 

6>>  Le  chronomètre  préhistorique  du  bassin  de  Penhouët,  par 
M.   René  Kerviler  ; 

7o  Pierre  Brissot,  professeur  de  philosophie  à  la  Sorbonne,  par 
M.  G.  Merland. 

L'assemblée,  par  la  voix  de  son  président,  remercie  notre  hono- 
rable collègue  de  l'envoi  de  sa  notice. 

8«  Un  prospectus  de  l'intéressante  étude  de  M.  l'abbé  Grégoire  sur 
le  diocèse    de  Nantes.  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie  propose  l'ac- 

o 


—   XVIII   — 

quisition  de  cet  ouvrage  pour  la  bibliothèque  de  la  Société.  Cette  pro- 
position est  acceptée. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  seconde  partie  des  notes  de  M.  R. 
de";Rochebrune  sur  les  Troglodytes  de  la  Gartempe.  M.  R.  de  l'Estour- 
beillon  donne  lecture  de  ce  travail. 

Après  avoir  enlevé,  dans  la  caverne  des  Gottés,  les  premières  cou- 
ches qui  couvraient  le  sol,  M.  R.  de  Rochebrune  découvrit  un  amas 
de  fougères  et  de  mousses  décomposées,  étendues  sur  une  grande  par- 
tie de  la  surface  de  la  grotte,  où  elles  formaient  une  sorte  de  litière. 
Des  outils  de  toutes  sortes,  des  pointes,  des  lames,  des  tarauds,  des 
flèches,  étaient  épars  çà  et  là  sur  cette  couche. 

Les  innombrables  éclats  de  silex  mêlés  à  ces  outils  proviennent  évi- 
demment de  la  fabrication  de  ces  pièces  dans  l'intérieur  de  la  caverne. 
La  grotte  des  Gottés  était  donc  tout  à  la  fois  un  lieu  de  refuge  et 
un  atelier. 

Les  objets  recueillis  à  ce  niveau  sont  tous  du  type  des  Eysies. 

Au-dessous  de  ce  gisement  se  trouvait  une  couche  de  sablon,  que 
les  fouilles  ont  mise  à  découvert  dans  toutes  les  parties  de  la  grotte. 

Plus  bas,  les  terres  devenaient  molles  et  moins  compactes.  Ce  nou- 
veau gisement  ainsi  nettement  séparé  de  l'étage  magdalénien,  con- 
tenait des  pièces  d'un  type  tout  différent;  de  larges  pointes,  taillées 
à  grands  éclats,  des  tètes  de  lances,  plates  d'un  côté  et  finement  re- 
touchées sur  les  bords  ;  en  somme,  les  spécimens  du  type  moustié- 
rien  le  plus  pur. 

Les  sondages  pratiqués  au-dessous  de  ce  niveau  n'ont  pas  encore 
rencontré  le  roc  ;  mais  les  nouvelles  fouilles  que  M.  de  Rochebrune  doit 
entreprendre  sur  ce  point,  nous  apprendront  sans  doute  si  l'industrie 
humaine  est  également  représentée  à  cette  dernière  limite. 

Remarquons  ici  que  le  type  de  Solutré,  intermédiaire,  d'après  les 
théories  actuelles,  entre  le  magdalénien  et  le  moustiérien  n'a  pas  été 
rencontré  dans  ces  fouilles. 

Après  la  lecture  de  ce  travail,  M.  Léon  Maître  nous  communique 
une  très  curieuse  étude  sur  les  localités  portant  le  nom  de  Paradis. 
Ce  nom,  d'après  une  observation  faite  par  M.  l'abbé  Cochet,  servirait 
à  désigner  les  premières  nécropoles  chrétiennes  dans  nos  contrées. 
Le  Paradis  serait  le  champ  du  repos,  le  cimetière  entourant  les  basi- 
liques de  l'époque  mérovingienne  et  par  conséquent,  les  pièces  qui  por- 
tent ce  nom  renfermeraient  de  curieux  vestiges  de  cette  époque.  M. 


—   XIX  — 

Maître  demande  que  des  fonds,  prélevés  sur  notre  budget,  soient 
destinés  à  des  fouilles  sur  quelques-uns  des  points  connus  sous  lu 
nom  de  Paradis. 

Un  grand  nombre  de  communes  en  Loire-Inférieure  possèdent  des 
localités  de  ce  nom,  et,  par  une  coïncidence  assez  frappante,  autour 
do  ces  points,  on  retrouve  souvent  de  très  anciennes  fondations  reli 
gieuses,  des  chapelles,  des  maladreries. 

La  communication  de  M.  Léon  Maître  est  chaleureusement  accueillie 
et  les  fonds  demandés  pour  les  fouilles  seront,  sans  aucun  doute,  ac- 
cordés par  le  Comité. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  les  notes  de  M.  le  baron  de  Wismes 
sur  les  ouvrages  adressés  à  la  Société.  Nous  n'avons  pas  à  analyser 
ici  cette  piquante  communication,  écoutée  avec  un  véritable  plaisir 
par  toute  l'assistance.  Notre  Bulletin  publiera  une  bonne  partie  des 
notes  que  M.  de  Wismes  a  si  ingénieusement  cueillies  dans  les  annales 
de  nos  sociétés  correspondantes. 

A  la  fin  delà  séance,  M.  de  Bejarry  nous  transmet  quelques  ren- 
seignements sur  une  coutume  assez  curieuse  des  paysans  du  Poitou. 

Lorsque,  dans  une    famille,   la  sœur  cadette  se  marie  avant  l'aî- 
née, celle-ci  est  obligée,  le  jour  des  noces,   de   recevoir   une    que- 
nouille et  un  fuseau  et  de  se  mettre  à  filer.  M.  de  Bejarry  nous  cite,  en 
terminant,  quelques  strophes  d'une  ancienne   chanson  [où  il   est    fait 
allusion  à  cet  usage. 

La  séance  est  levée  à  neuf  heures  et  demie. 

Le  Secrétaire  général, 
Pitre  de  Lisle. 


SÉANCE   DU  MARDI  10  MAI  188L 

Présidence  de  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie. 

Présents:  MM.  Bacqua,  Riardant,  abbé  Grégoire,  Van  Iseghem 
père,  baron  de  Wismes,  Petit,  abbé  Gallard,  Anthime  Menard,  Léon 
Maître,  Fraboulet,  Evellin,  H.  Maugras,  P.  de  Lisle. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté,  après  une 
rectification  demandée  par  M.  le  président,  au  sujet  de  l'allocation 
destinée  aux  fouilles  des  cimetières  mérovingiens  portant  le  nom  de 
Paradis.  Il  est  décidé,  en  effet,  qu'une  somme  sera  prélevée  sur  notre 


—   XX  ~ 

budget  pour  les  fouilles  que  la  Société  doit  entreprendre,  mais  aucun 
chiffre  n'a  été  attribué  jusqu'ici  à  un  but  spécial. 

A  ce  propos,  M.  de  Wismes  fait  part  à  la  Société  d'un  projet  qui 
lui  a  été  suggéré  par  notre  collègue,  M.  Marionneau.  Le  cimetière  mé- 
rovingien de  Vertou  n'a  pas  été  complètement  exploré.  M.  Marion- 
neau entreprendrait  volontiers  sur  ce  point  de  nouvelles  recherches, 
et  le  produit  de  ces  fouilles  serait  offert  par  lui  à  notre  musée.  Cette 
proposition  est  vivement  accueillie  par  la  Société. 

M.  le  président  dépose  ensuite  sur  le  bureau,  pour  la  bibliothèque 
de  la  Société,  les  ouvrages  reçus  dans  le  courant  du  mois.  Ce  sont  .- 

1°  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Picardie,  1880,  No  4; 

2«  Bulletin  de  la  Société  scientifique,  historique  et  archéolo- 
gique de  la  Corrèze.  T.  III,  Ire  livraison  ; 

3°  Annales  de  la  Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  du  dé- 
partement de  la  Loire,  T.  XIV,  année  1880  ; 

4<>  Bulletin  de  la  Commission  des  Antiquités  ; 

5°  Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France  ;  magni- 
que  volume,  orné  de  planches  ; 

6<>  Société  archéologique  de  Bordeaux,  T.  VI,  2e,  3»,  et  4e  de 
1879; 

7°  Bulletin  archéologique  et  historique  de  la  Société  archéo- 
ogique  de  Tam-et-Garonne,  1er,  2e,  3e,  et  4e  trimestres  1880  ; 

8o  Enfin,  une  charmante  brochure,  intitulée  :  Saint-Nazaire  et  le 
bassin  de  Penhouët,  offerte  à  la  Société  par  M.  G.  Bastard.  Nous  re- 
viendrons sur  ce  travail,  dans  une  prochaine  séance  ;  en  attendant,  le 
président  remercie,  au  nom  de  la  Société,  M.  G.  Bastard  de  son  ai- 
mable envoi. 

Une  lettre  du  Ministre  de  l'Instruction  publique  accuse  réception 
des  exemplaires  de  nos  annales,  envoyés  pour  la  nouvelle  Revue 
scientifique  des  Sociétés  savantes.  Après  cette  énumôration,  la  So- 
ciété apprend  avec  le  plus  vif  plaisir  la  nomination  de  notre  collègue, 
M.  Kerviler,  comme  ingénieur  en  chef  des  Ponts  et  Chaussées. 

A  l'ouverture  de  la  séance,  M.  Bacqua  père  donne  lecture  d'une 
très  intéressante  critique  de  l'ouvrage  de  M.  Ternink:  l'Artois  sou- 
terrain. 

Des  explorations,  poursuivies  avec  un  zèle  infatigable,  et  cela  de- 
puis près  d'un  demi-siècle,  ont  fourni  à  l'auteur  de  ce  travail  d'in- 
nombrables sujets  d'étude.   M.  Ternink  a  divisé  son  œuvre  en  quatre 


—  XXI   — 

parties,  correspondantes  aux  périodes  préhistorique,  gauloise,  gallo- 
romaine  et  mérovingienne.  Il  insiste  sur  le  caractère  incertain  et  mal 
défini  de  la  première  période,  désignée  à  tort  sous  le  nom  d'âge  de  la 
pierre,  l'usage  des  instruments  de  pierre  après  l'ère  chrétienne  étant 
aujourd'hui  parfaitement  démontré. 

Il  établit  ensuite,  pour  la  deuxième  période,  des  distinctions  très 
nettes  entre  les  sépultures  des  races  germaine  et  gauloise.  Les  Ger- 
mains brûlaient  leurs  morts,  les  Gaulois  les  ensevelissaient.  Dans  la  troi- 
sième période,  l'incinération  devient,  avec  la  conquête  romaine,  un 
usage  presque  général  ;  elle  disparaît  avec  l'établissement  du  christia- 
nisme dans  les  Gaules.  C'est  à  cette  dernière  période,  contemporaine 
de  nos  premiers  rois,  que  se  rattache,  suivant  M.  Ternink,  l'établisse- 
ment des  maladreries.  Il  divise  cette  phase  archéologique  en  deux 
parties,  l'une  caractérisée  par  le  travail  des  bijoux,  des  émaux  cloison- 
nés, et  l'absence  de  sarcophages  monolithiques  ;  l'autre,  beaucoup  plus 
riche  au  point  de  vue  du  travail  d'orfèvrerie  ;  il  cite  les  tombes  de 
Lens  et  d'Arras  comme  ayant  fourni  les  plus  beaux  spécimens  de 
l'art  que  saint  Eloi  mit  en  honneur  parmi  ses  contemporains. 

Quelques  critiques  sont  adressées  en  terminant  sur  l'entassement 
un  peu  désordonné  des  matières  passées  en  revue  dans  les  4  volumes 
de  Y  Artois  souterrain. 

L'assemblée,  par  la  voix  de  son  président,  remercie  M.  Bacqua  de 
sa  communication. 

M.  Maître  fait  observer  que,  contrairement  à  l'opinion  émise  par  M. 
Ternink,  les  maladreries  ont  présenté,  du  moins  dans  notre  Comté  nan- 
tais, des  traces  de  l'industrie  romaine. 

La  parole  est  ensuite  donnée  à  M.  l'abbé  Grégoire,  inscrit  à  l'ordre 
du  jour,  pour  son  Monasticon  nantais,  statistique  des  communautés  re- 
ligieuses établies  au  diocèse  de  Nantes  avant  1790. 

Ce  travail  n'est  que  la  seconde  partie  de  l'ouvrage  de  M.  Grégoire; 
dans  la  première,  l'auteur  étudie  spécialement  les  différentes  pa- 
roisses  du  diocèse. 

M.  l'abbé  Grégoire  insiste,  en  commençant,  sur  ce  fait,  qu'au  sud  de 
la  Bretagne,  et  particulièrement  sur  les  rives  de  la  Loire,  les  moines 
n'ont  point  précédé  les  évoques;  saint  Friard,  saint  Hermeland,  ont 
reçu  leurs  missions  des  évoques  Félix  et  Pasquier,  et  les  ermitages 
qu'ils  ont  fondés  peuvent  être  considérés  comme  les  premiers  établis 
sements  monastiques  dans  le  pagus  Nannetensis.  Contrairement  à  ce 


—  XXII  — 

qui  s'est  passé  dans  les  autres  parties  de  l'Armorique,  ce  ne  sont  pas 
non  plus  les  émigrés  bretons,  qui  ont  fait  fleurir  parmi  nous  la  divine 
semonco  do  la  parole  de  Dieu,  et  notro  sol  peut  revendiquer,  à  bon 
droit,  l'honneur  d'avoir  donné  lui-même  naissanco  à  ces  maisons  saintes, 
refuges  de  la  prière,  de  la  charité  et  de  la  science. 

Cette  première  éclosion  des  fondations  religieuses  avait  à  peine  dé- 
veloppé ses  germes  féconds  que  l'ouragan  du  Nord  vint  glacer  et  flé- 
trir ces  jeunes  pousses.  Mais,  avec  les  XII"  et  XIIIc  siècles,  une  nouvelle 
sève  monte  et  se  développe;  c'est  le  temps  des  saint  Bernard,  des  saint 
Dominique  et  des  Robert  d'Arbrissel,  l'âge  d'or  de  l'Eglise  française. 
Puis,  ces  institutions  se  propagent  et  se  multiplient,  suivant  les  besoins 
de  l'époque.  Enfin,  au  dernier  siècle,  notro  diocèse  compte  58  commu- 
nautés religieuses,  dont  23  occupent  notre  ville  de  Nantes. 

Après  cet  aperçu,  M.  l'abbé  Grégoire,  sur  la  demande  de  l'assistance, 
donne  lecture  de  deux  de  ses  études  particulières  sur  les  établisse- 
ments de  notre  diocèse. 

L'importance  de  ce  travail  et  la  précision  des  faits  consignés  dans 
ces  notices,  font  émettre  le  vœu  que  le  Monasticon  de  M.  Grégoire 
soit  inséré  dans  les  Bulletins  de  notre  Société. 

M.  de  Wismes,  tout  en  appréciant  hautement  l'intérêt  et  la  portée 
de  ce  recueil,  regrette  qu'une  notice  succincte,  donnant  un  abrégé  de 
l'historique  de  chaque  communauté,  ne  soit  pas  placée  en  tête  de  ces 
différents  articles. 

M.  le  président,  d'accord  en  cela  avec  M.  l'abbé  Grégoire,  objecte  la 
difficulté  de  cette  adjonction;  les  articles  comprenant  les  paroisses  et 
les  communautés  sont  au  nombre  de  plus  de  300  ;  ce  serait  imposer  à 
l'auteur  une  tâche  extrêmement  longue  et  difficile,  et  qui  sortirait  un 
peu  de  son  travail. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  l'exhibition  d'une  série  d'eaux-fortes 
représentant  les  antiquités  de  la  ville  de  Rouen.  M.  Hippolyte  Maugras 
a  bien  voulu  confier  à  notre  Société  une  précieuse  collection  de  gravu- 
res extraites  d'une  publication  intitulée.-  Rouen  illustré.  Ces  charmants 
dessins,  plein  de  finesse  et  de  goût,  font  passer  sous  nos  yeux  les  pa- 
lais de  la  Renaissance,  les  églises  du  Moyen  Age,  et  toutes  les  merveil- 
leuses richesses  de  la  vieille  cité  normande. 

Après  cette  exhibition,  M.  le  baron  de  Wismes  communique  a  la 
Société  une  sorte  de  médaillon  en  cuivre  qui  servait  jadis  à  orner  un 
cierge  pascal.  Sur  ce  bouton  On  voit,  gravé  en  relief,  un  ange  empor- 


—   XXIII  — 

tant  dans  ses  bras  Yâme  d'un  défunt.  Cet  objet  date,  selon  toute  pro- 
babilité, du  XVIe  siècle.  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie  cite  un  exemple 
d'allégorie  semblable  figurée  dans  un  bas-relief  de  l'église  Saint- 
Hilaire  de  Poitiers  et  appartenant  au  Xle  siècle. 

Après  ces  communications,  la  séance  est  levée  à  neuf  heures  et 
quart. 

Le  Secrétaire  général, 
Pitre  de  Lisle. 


SÉANCE  DU  MARDI  7  JUIN  1881. 

Présidence  de  M.  H.  Lemeignen,  vice-président. 

Présents  :  MM.  Petit,  de  l'Estourbeillon,  Huette,  Vân  Iseghem  père, 
abbé  Grégoire,  Alcide  Leroux,  Perthuis,  Merland  père,  Montfort,  Fra- 
boulet,  Riardant,  baron  de  Wismes,  de  Lisle. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

A  l'ouverture  de  la  séance,  M.  le  président  nous  apprend  la  triste 
nouvelle  de  la  mort  de  notre  êminent  collègue  M.  B.  Fillon. 

M.  le  président  rappelle  ensuite  la  perte  regrettable  de  l'excellent 
maître  de  chapelle  de  l'église  cathédrale  de  Nantes.  M.  Martineau 
était  un  fervent  admirateur  de  la  belle  et  grande  musique  ;  il  faisait, 
en  quelque  sorte,  de  l'archéologie  musicale,  et  sa  maîtrise  laissera  de 
bons  et  heureux  souvenirs  dans  notre  ville. 

M.  le  baron  de  Wismes  ajoute  que  le  beau  cantique:  Catholique  et 
Breton  toujours,  dont  l'air  est  devenu  si  rapidement  populaire 
en  France,  avait  été  mis  en  musique  par  M.  Martineau. 

On  procède  ensuite  à  l'admission  de  deux  nouveaux  membres:  M. 
Môresse,  en  qualité  de  membre  titulaire,  et  M.  l'abbé  Josnin,  à  titre 
de  membre  correspondant.  Ces  messieurs  sont  admis,  à  l'unanimité,  à 
faire  partie  de  la  Société  archéologique. 

M.  de  l'Estourbeillon  nous  rend  compte  des  fouilles  qu'il  vient  de 
faire,  avec  M.  Léon  Maître,  aux  lieux  dits  Le  Paradis  en  Pont-Saint- 
Martin,  et  dans  la  commune  de  Rezô.  Sur  le  premier  point,  le  résul- 
tat a  été  négatif;  mais,  entre  Rezô  et  les  Sorinières,  dans  une  loca- 
lité qui  porte  le  nom  des  Ruines,  nos  collègues  ont  fait  ouvrir  un 
tranchée  où  de  nombreux  objets  romains  ont  été  mis  à  découvert  : 

lo  Une  monnaie  romaine,  présentant  au  droit  le  buste  de  Cris- 


—  XXIV   — 

pina  Augusta  ;  au  revers,  une  Pomone  debout.  Ce  bronze  est  couvert 
d'une  très  belle  patine  et  sa  conservation  est  parfaite. 

2°  Deux  petits  fragments  d'objets  en  fer,  dont  l'un  est  effllé  et  ter- 
miné par  un  bouton,  comme  l'extrémité  d'un  fleuret. 

3o  Une  poterie  percée  de  trous,  ayant  sans  doute  servi  de  tamis  ou 
de  passoire. 

M.  de  l'Estourbeillon  nous  fait  ensuite  une  autre  communication  sur 
les  anciennes  forges  de  la  commune  d'Avessac.  Quatre  établissements 
de  ce  genre  ont  été  étudiés  jusqu'ici  par  notre  collègue. 

Le  premier  sur  le  tertre  de  la  Bodiniôre,  versant  ouest  ;  nombreuses 
scories,  débris  de^vieilles  murailles. 

Le  deuxième  au  port  de  Renihel,  à  l'extrémité  de  l'ancien  cbemin  de 
Saint-Clair  à  Beslô,  à  l'embouchure  de  l'Ihel,  près  de  la  pierre  dite  du 
Grand-Guillaume. 

Le  troisième  au  clos  des  Melleresses,  à  l'extrémité  de  l'ancien  che- 
min du  Pont-ês-Chevaliers,  à  Murain.  Nombreuses  scories  et  débris 
de  fer  forgé  ;  emplacement  visible  de  la  forge.  Parallélogramme  de 
10  à  15  m.  de  long,  sur  6  à  8  de  large. 

Enfin  le  quatrième,  au  Port-Rolland,  au  bas  du  coteau,  à  l'embou- 
chure du  Don,  près  de  l'ancien  chemin  d'Avessac  à  Massôrac. 

M.  le  président  communique  à  l'assemblée  le  prospectus  d'une  pu- 
blication intitulée  :  Trésor  archéologique  de  V Armorique  occiden- 
tale. Ce  recueil  contiendra  de  magnifiques  planches  cbromolithogra- 
phiées,  reproduisant  les  armes  de  pierre  et  de  bronze  et  les  bijoux  en 
or  les  plus  curieux  des  collections  bretonnes.  M.  le  baron  de  Wismes 
demande  que  la  Société  veuille  bien  souscrire  à  cette  intéressante  pu- 
blication. Cette  proposition  est  prise  en  considération  et  adressée  au 
Comité. 

M.  le  président  nous  entretient  ensuite  d'une  vente  de  magnifiques 
tapisseries  qui  vient  d'avoir  lieu,  ces  temps  derniers.  La  plupart  de 
ces  tentures  ont  été  malheureusement  enlevées  pour  Paris  ;  toutefois 
une  superbe  tapisserie  de  Beau  vais,  représentant  une  chasse  sous 
Louis  XIV,  a  été  achetée  par  un  de  nos  concitoyens,  M.  Fernand 
Crouan.  Ces  pièces  provenaient  d'un  château  des  environs  de  Redon. 

Après  ces  différentes  communications  archéologiques,  l'ordre  du 
jour  appelle  la  continuation  de  la  lecture  du  Monasticon  nantais  par 
M.  l'abbé  Grégoire. 

Une  faible  partie  de  ce  travail  est  soumise  à  notre  examen  ;  l'auteur 


—  XXV   — 

a  détaché  de  son  vaste  recueil  ses  études  sur  les  communautés  de  Bu- 
zay,  des  Dominicains  de  Nantes,  des  Carmélites  et  du  Refuge.  Les 
renseignements  très  curieux  qu'il  nous  communique  sur  ces  différents 
établissements  sont  écoutés  avec  un  véritable  intérêt. 

La  parole  ensuite  est  donnée  à  M.  le  comte  de  l'Estourbeillon,  pour  la 
lecture  du  voyage  d'un  seigneur  breton  en  Italie,  en  1678.  Nous  n'es- 
saierons pas  d'analyser  ici  l'odyssée  piquante  et  tant  soit  peu  burles- 
que du  baron  de  Levarez  ;  nous  l'avons  suivi  du  reste  d'un  peu  loin 
et  seulement  à  l'aide  du  mémoire  détaillé  de  ses  dépenses  dressé  par 
son  intendant.  Cette  relation,  très  intime  parfois,  sans  être  aucune- 
ment sentimentale,  a  gaiement  terminé  la  soirée. 

La  séance  a  été  levée  à  neuf  heures  et  demie. 

Le  Secrétaire  général, 
Pitre  db  Lisle. 


SÉANCE   D'INSTALLATION    DU   NOUVEAU   BUREAU 


ALLOCUTION  DE  M.  LE  Bon  DE  WISMES 


PRESIDENT    SORTANT. 


Sed  fugit  interea,  (agit  irreparabile  tempus. 

Le  temps  fuit,  il  fuit,  l'irréparable  qu'il  est,  disait,  il  y  a  bien  des 
siècles,  ce  poète  aimable  parmi  les  aimables,  grand  parmi  les  grands, 
que  l'on  nomme  Virgile,  et  combien  d'autres  ont  répété  après  lui  cette 
mélancolique  pensée! 

Assurément,  chers  collègues,  s'il  est  permis  encore  à  notre  époque 
de  faire  une  citation  latine,  c'est  bien  à  un  président  d'arcbôologie. 

—  Mais  pourquoi  celle-ci  plutôt  qu'une  autre,  et  ne  semble-t-elle 
pas  venir  comme  au  début  de  ce  discours  pour  y  porter  une  ombre  ? 
Ab  !  c'est  qu'au  moment  de  quitter  la  présidence  de  votre  Société,  je 
m'étonne,  presque,  de  la  rapidité  avec  laquelle  en  a  passé  pour  moi  le 
triennat.  —  Je  crois  encore  me  voir,  je  l'avoue,  au  jour  où  vous  m'en 
accordâtes  le  grand  et  sérieux  honneur.  —  Et  toutefois,  en  réalité,  en 
y  réfléchissant,  pourquoi  ce  triennat  m'aurait-il  paru  long  ?  Nulle 
pierre  ne  s'est  rencontrée  sur  mon  chemin,  nulles  épines,  nulles  em- 
bûches ne  sont  venues  arrêter,  retarder  notre  route,  nos  travaux  ; 
il  semble  qu'un  vent  favorable  se  soit  levé  dès  l'origine  pour  me  pous- 
ser vers  le  but,  et  j'y  suis  arrivé  presque  sans  m'en  apercevoir,  sou- 
tenu par  votre  amitié,  par  votre  bon  vouloir,  l'oreille  enchantée  par 
vos  excellents  travaux,  le  cœur  satisfait  d'un  si  libéral  concours,  et 
mon  intelligence  s'élevant  de  plus  en  plus,  en  vous  écoutant,  vers  les 
solides  régions  du  vrai  et  du  beau. 

Mais  tout  a  sa  fin  ici-bas,  mon  beau  rêve  est  achevé,  mon  trône  est 
renversé,  mon  sceptre  brisé  ;  le  souvenir  seul  va  m'en  demeurer;  et 


—   XXVIII   — 

j'aurais  d'autant  plus  mauvaise  grâce  à  m'en  plaindre,  que  cette  loi 
du  triennat  par  laquelle  vous  appeliez  tous  les  trois  ans  de  nouveaux 
présidents  a  votre  tête,  c'est  moi-même  qui  l'ai  provoquée. 

Il  est,  en  effet,  de  l'intérêt  de  la  Société  d'appeler  successivement  à 
cet  honneur  ceux  qui,  par  leur  bon  vouloir,  leur  zèle,  leur  assiduité, 
leurs  connaissances  ou  d'autres  mérites  divers,  lui  en  paraissent  les' 
plus  dignes.  C'est  à  cette  loi  qu'après  l'habile  architecte,  M.  Nau, 
dont  la  direction  plus  longue  fut  antérieure  à  cette  modification  de 
nos  règlements,  vous  avez  dû  successivement  des  présidents  tels 
que  M.  le  vicomte  de  Kersabiec,  si  doux,  si  bienveillant,  à  la 
plume  élégante,  facile,  à  l'érudition  variée  ;  —  M.  l'abbé  Gahour,  le  si 
bon,  le  si  digne,  et  aussi  le  si  savant  en  nos  vieilles  légendes  de  saints 
locaux  ;  —  M.  Galles,  l'intendant  militaire,  l'explorateur  le  plus  cé- 
lèbre des  tumulus  du  Morbihan,  et  qui,  comme  président,  a  laissé  des 
souvenirs  qui  ne  s'effaceront  jamais  ;  —  enfin,  M.  Charles  Marion- 
neau,  à  la  fois  artiste,  littérateur,  archéologue,  et  qui  unissait,  dans 
une  mesure  si  heureuse  et  si  parfaite,  la  douceur  et  l'aménité  de  la 
race   ligôrine  à  l'aimable  vivacité  méridionale. 

Vous  me  permettrez  ici  d'ajouter,  mes  chers  collègues,  et  si  je  ne 
le  faisais  pas,  vous  m'en  prieriez,  que  s'il  ne  les  fait  point  oublier,  car 
la  bonté,  la  vertu,  la  science  ne  s'oublient  pas,  le  président  que  vous 
venez  d'élire  à  ma  place  était  bien  digne,  sous  tous  les  rapports,  de 
venir  augmenter  le  brillant  catalogue  présidentiel  que  je  viens  de 
dresser.  En  nommant  M.  Jules  de  la  Laurencie,  la  mémoire  me  revient 
invinciblement  de  ce  La  Tour  d'Auvergne  qui,  comme  lui,  officier  et 
dévoué  par  l'épée  à  la  défense  de  la  patrie,  consacrait  ses  loisirs  à 
étudier  notre  vieille  langue  et  nos  vieux  monuments.  —  C'est  ainsi, 
entre  autres,  vous  ne  l'avez  pas  certes  oublié,  mais  je  tiens  à  vous  le 
rappeler  ,  que  M.  Jules  de  la  Laurencie,  à  l'époque  où  les  hasards  de 
la  vie  des  camps  l'avaient  fixé  pour  quelque  temps  à  Aiguës-Mortes, 
frappé  de  l'aspect  tout  oriental  de  cette  ville  près  de  laquelle  saint 
Louis  s'embarqua  le  28  août  1248,  pour  Damiette,  avec  ses  chevaliers 
croisés,  l'étudia  avec  le  soin  de  l'archéologue  et  le  coup  d'œil  du  mi- 
litaire, ce  qui  lui  permit  de  nous  faire,  au  sujet  de  cette  vieille  cité 
féodale  de  la  Camargue,  un  peu  oubliée,  une  des  meilleures  confé- 
rences que  nous  ayons  entendues. 

Ancien  militaire,  M.  de  la  Laurencie  a  retenu  de  sa  noble  carrière 
le  don  de  la  parole  suffisamment  autoritaire,  si  nécessaire  pour  diri- 


—   XXIX   — 

ger  une  Société,  et  il  y  joint  ces  qualités  naturelles  de  courtoisie  et 
d'aménité  qui,  elles,  peuvent  se  perfectionner  par  la  pratique  des  hom- 
mes mais  ne  s'acquièrent  pas.  —  J'ajoute  enfin,  ayant  la  preuve  ré- 
cente à  l'appui,  que  sa  parole  aussi  a  le  don  de  la  persuasion. 

Croyez-vous,  mes  chers  collègues,  alors  que  tous  les  conseils  mu- 
nicipaux, en  présence  de  toutes  les  demandes  qui  les  assiègent,  de- 
viennent de  plus  en  plus  difficiles  pour  ouvrir  les  cordons  de  leurs 
escarcelles  ;  croyez-vous  qu'il  fût  aisé  d'obtenir  de  notre  Conseil  mu- 
nicipal de  voir  presque  doublée  l'allocation  qu'il  nous  faisait  depuis 
quelques  années  ?  C'est  cependant  ce  qui  vient  d'avoir  lieu,  et  c'est 
surtout  aux  bons  efforts  de  M.  de  la  Laurencie,  soutenu  d'ailleurs  par 
plusieurs  de  nos  collègues,  c'est  aux  chaleureuses  paroles  qu'il  a  pro- 
noncées en  notre  faveur  an  sein  de  notre  Conseil,  que  nous  devons 
cette  bonne  fortune  inespérée.  Au  nom  de  tous,  j'en  remercie  celui 
qui  va  si  dignement  me  remplacer,  et  je  pense  accomplir  un  devoir 
en  en  remerciant  aussi  le  Conseil. 

Le  choix  d'un  vice-président  dans  une  Société  comme  la  nôtre, 
où  la  présidence  ne  peut  se  perpétuer,  n'est  pas  indifférent.  11  est  rare 
que  le  vice-président  ne  soit  pas  à  son  tour  promu  à  la  présidence  ;  — 
or,  je  le  crois  fermement,  la  Société  a  fait  un  excellent  choix  en  éle- 
vant à  cette  dignité  M.  Henri  Lemeignen,  qui,  depuis  trois  années, 
remplissait  avec  un  zèle  si  intelligent  les  fonctions  de  secrétaire  de 
nos  séances.—  Si  M.  Lemeignen  ne  nous  a  pas  souvent  donné  de  tra- 
vaux personnels  dans  cette  dernière  période,  c'est  que  ses  doubles 
fonctions  d'avocat  et  de  professeur  de  droit  absorbent  presque  tous 
ses  instants,  et  il  va  de  soi  qu'avant  de  s'occuper  d" archéologie, 
science  charmante,  variée,  et  qui  peut  suffire  à  occuper  les  loisirs 
de  ceux  qui  en  ont  ;  qu'avant,  dis-je,  doivent  passer  les  devoirs  plus 
sérieux  et  plus  impératifs  de  la  carrière  adoptée. 

Notre  nouveau  secrétaire  des  séances,  M.  Pitre  de  Lisle  du  Dré- 
neuf,  a  fait  ses  preuves  comme  secrétaire  du  Comité.  Il  était  donc, 
s'en  étant  montré  plus  que  digne,  naturellement  désigné  à  devenir 
secrétaire  de  nos  séances  ;  c'est  ce  qui  a  eu  lieu.  J'aurai  à  reparler  de 
ce  jeune  savant  en  rappelant  un  peu  plus  loin  les  principaux  travaux 
des  membres  de  la  Société  depuis  trois  ans. 

Enfin,  mes  chers  collègues,  avec  M.  Régis  de  l'Estourbeillon,  comme 
secrétaire  du  Comité,  Arthur  des  Jamonières,  comme  secrétaire-ad- 
joint, René  Blanchard,  comme  bibUothécaire-archiviste,  Louis  Petit, 


—    XXX   — 

commo  trésorier,  Van-Isoghem  pôro,  Charles  Seidler,  Anizon,  Maître, 
de  la  Nicolliôre  et  Henri  de  Cornulier,  vous  avez  achevé  de  constituer, 
on  n'en  saurait  douter,  un  ensemble  parfait  pour  diriger  noblement  et 
prudemment  les  destinées  de  notre  Société  loin  des  ôcueils  et  dans 
les  conditions  de  succès  les  plus  favorables. 

Mais,  pendant  que  je  m'arrête,  c'était  plus  qu'un  droit,  c'était  un 
devoir,  à  louer  les  vivants,  devoir  que  je  reprendrai  tout  à  l'heure,  je 
crois  entendre  et  j'entends  en  effet  des  voix  qui,  de  l'autre  côté  de  la 
tombe,  me  font  un  touchant  appel  et  me  crient  :  Et  nous,  nous  qui 
comptions  parmi  vos  membres,  qui  nous  intéressions  à  vos  travaux, 
qui  parfois  y  prenions  part,  qui  aimions  la  Société  comme  une  petite 
patrie  au  milieu  de  la  grande,  nous  auriez-vous  déjà  oubliés  ?  Quoi  ! 
dans  cette  séance  où,  comme  Antée  touchant  la  terre,  la  Société 
Archéologique  semble  reprendre  un  nouvel  élan  pour  continuer  de 
prospères  destinées,  n' auriez-vous  pas  pour  nous  quelques  bonnes 
paroles  ?  —  Ce  sera,  nous  le  sentons,  comme  un  dernier  adieu,  mais 
cet  adieu  de  nos  collègues,  dont  beaucoup  furent  nos  amis,  ne  nous 
le  refusez   pas. 

Non,  chers  défunts,  telle  n'est  pas  mon  intention  ;  il  y  a  plus,  si  je 
ne  puis,  naturellement,  aborder  cette  partie  de  ma  tâche  sans  une  om- 
bre de  tristesse,  il  m'est  doux,  cependant,  ce  m'est  une  précieuse  sa- 
tisfaction de  trouver  cette  occasion  de  m'entretenir  encore  de  vous,  et 
de  vous  faire,  pour  quelques  moments  trop  courts,  comme  revivre 
par  la  pensée  aux  yeux  et  dans  la  mémoire  de  nos  collègues. 

Les  décès,  toutefois,  j'ai  hâte  de  le  dire  à  la  Société,  n'ont  pas  été 
très-nombreux  pendant  cette  période  triennale.  Ce  n'est  pas  un  bre- 
vet de  longue  vie  de  faire  partie  d'une  Société  archéologique  —  mal- 
heureusement —  car  alors  combien  voudraient  en  être  !  —  mais  ce 
n'est  pas  non  plus  un  arrêt  de  mort.  —  Nous  avons  perdu  cinq  de  nos 
confrères  ;  plusieurs  périodes  semblables  avaient  été  un  peu  plus  fu- 
nestes. —  Ces  confrères  sont  M.  l'abbé  Dubois,  M.  l'abbé  Berthault, 
curé  de  Basse-Goulaine,  M.  le  docteur  Mahot,  M.  Blanchard-Mervau, 
ancien  avocat,  et  M.  le  docteur  Foulon.  Il  n'est  que  juste  de  com- 
mencer par  accorder  à  celui-ci  un  pieux  souvenir,  car  il  est  le 
seul  de  ces  défunts  regrettés  qui  ait  pu  suivre  habituellement  nos 
séances,  et  cela  pendant  un  grand  nombre  d'années. 

La  perte  de  M.  le  docteur  Foulon,  mes  chers  collègues,  sera  encore 
longtemps  sentie  parmi   nous.  —  Sous  beaucoup  de  rapports,  et  sur- 


—  XXXI    — 

tout  sous  celui  de  la  vibration  de  la  vie  et  de  la  pensée,  il  ne  sera  pas 
remplacé.  Quand  les  circonstances  de  ma  vie,  —  permettez-moi  ce 
souvenir  personnel  —  me  Axèrent  à  Nantes,  un  peu  après  1810,  il  y 
avait  un  groupe  d'artistes  et  de  lettrés,  quelques-un  déjà  dans  la  force 
de  l'âge,  mais  la  plupart  en  pleine  effloirescence  de  jeunesse,  groupe 
avec  lequel  mes  propres  goûts  ne  tardèrent  pas  à  me  lier  ;  —  je  pour- 
rais vous  y  nommer,  par  un  rapide  souvenir,  M.  Evariste  Colombel, 
les  deux  Guéraud,  M.  Antbime  Menard  et  M.  Menard  le  sculpteur,  M. 
Suc,  dont  le  ciseau  a  créé  la  statue  célèbre  de  la  petite  mendiante, 
honneur  de  la  collection  de  notre  collègue  M.  Bacqua,  M.  Eugène 
Lambert,  qui  se  délassait  par  de  charmantes  poésies  des  sévères 
travaux  de  la  magistrature,  M.  Benjamin  Fillon,  qui  s'y  joignit  un 
peu  plus  tard,  ainsi  que  M.  Parenteau,  et,  pour  faire  court,  notre 
regretté  confrère,  M.  Foulon.  —  Vif,  pétillant  d'esprit,  ouvert  d'ima- 
gination, parlant  de  tout,  sachant  de  tout,  ce  jeune  Breton  breton- 
nant  —  M.  Foulon  était  du  pays  de  Josselin  —  nous  éblouissait  véri- 
tablement ;  nous  comptions  beaucoup  sur  lui,  et  telle  était  la  force 
réelle  de  cet  esprit,  en  quelque  sorte  de  puissance  magnétique, 
que  quand  M.  Foulon  fut  enlevé  par  la  mort  à  l'âge  de  70  ans, 
nous  y  comptions  encore.  —  Cette  force  même  fut,  peut-être,  ce  qui 
l'empêcha  de  produire  autant  que  nous  l'avions  espéré.  Savant, 
lettré,  épris  des  arts,  notre  regretté  confrère  crut  pouvoir  tout  con- 
naître, et  il  se  dispersa  en  étendue,  dispersit.  —  11  a,  du  reste,  mar- 
qué sa  trace  en  plus  d'une  voie,  —  et,  laissant  même  de  côté  ses  tra- 
vaux sur  la  politique,  publiés  en  1871,  fruits  d'une  généreuse  pensée 
pour  la  rénovation  de  la  France,  nous  vous  rappellerons  entre  autres, 
mes  chers  collègues,  deux  excellents  mémoires  archéologiques,  l'un  sur 
les  télégraphes  chez  les  anciens,  l'autre  sur  les  meules  préhisto- 
riques ;  —  puis  encore,  et  surtout,  citons  un  charmant  travail  sur 
Transon,  le  charcutier  désormais  de  par  lui  quasi  immortel. 

Cet  homme,  supérieur  par  son  instruction  à  la  plupart  des  personnes 
de  sa  condition,  avait,  un  des  premiers  après  la  Révolution,  recueilli 
et  sauvé  de  nombreuses  épaves  du  grand  naufrage  où  avaient  sombré 
tant  d'objets  d'art  et  de  précieuses  reliques  en  tous  genres.  —  Notre 
confrère  avait  connu,  apprécié,  fréquenté  Transon,  et  il  nous  a  redit 
et  peint  avec  une  verve  piquante,  qui  ne  se  dément  pas  d'un  bout  à 
l'autre  de  son  récit,  l'homme,  ses  mots  et  ses  collections.  —  Il  y  a  peu 
d'années,  je  vous  aurais  dit  qu'il  semblait,  à  lire  ce  récit,  entendre  une 


—    XXXII   — 

conversation  de  notre  confrère  comme  sténographiée  ;  aujourd'hui, 
nous  avons  une  comparaison  plus  juste  encore  ;  l'Américain  Edison, 
en  inventant  le  téléphone,  nous  l'a  fournie.  —  Oui,  véritablement,  cher 
Foulon,  à  lire  ces  pages  si  spirituelles,  si  pleines  d'originalité,  de  verve 
et  d'entrain,  on  croit  encore  vous  entendre,  et  avec  quel  charme!  — 
car  vous  étiez  un  inimitable  causeur.  —  Le  saviez-vous  suffisamment, 
et  si  vous  le  saviez,  pourquoi  ne  pas  nous  avoir  donné  plus  souvent 
de  pareilles  pages  ? 

Nous   allons  maintenant,  mes   chers  collègues,  vous  entretenir  un 
moment  de  M.  Siméon  Berthault,  curé  de  Basse-Goulaine,  dont  le  nom 
était  revenu  plus  d'une  fois  au  cours  de  nos  séances,  tant  pour  l'in- 
térêt qu'il  nous  portait  que  pour  les  travaux  éclairés  qu'il  faisait   exé- 
cuter dans  sa  paroisse,  sous  l'inspiration  des  progrès  archéologiques 
de  notre  époque.  Né,  croyons-nous,  dans  le  pays  de  Bourgueil,  en  Tou- 
raine,  mais  d'une  famille  d'origine  nantaise,  il  était  venu  jeune  dans 
notre   diocèse,  et  avait  été  élevé  au   sacerdoce  en  1849.  Il  fut,    peu 
après,  envoyé  au  poste  assez  difficile  de  vicaire  au  Croisic.  La  popu- 
lation de  nos   petites  villes  de  mer  est    fort    mélangée,   fort   di- 
verse :   bourgeois,   marins,  paludiers,  il  faut  plaire  à  tous,  se  faire  à 
tous.  M.  Berthault  y  réussit   dans  une  rare  mesure,  si  bien  qu'on  hé- 
sita longtemps  à  le  ravir  à  l'adoration  de  toute  la  population.  —  On 
dut  cependant  lui  confier  un  jour  un  poste  plus  élevé,  et  il  fut  nom- 
mé, en  1866,  curé  de  Basse-Goulaine.  L'église  de  cette  paroisse  était 
dans  un  état   de  délabrement  plus  complet  encore  que  son  voisin  le 
magnifique  castel,  auquel  s'attache  le  souvenir  d'une  héroïne,  Yolande, 
et  le  nom  d'une  de  nos  premières  familles.  —  M.  Fabbê  Berthault  ré- 
fléchit, consulta  et  jugea   avec  raison  qu'il  était  d'une  meilleure  éco- 
nomie de  reconstruire  une  nouvelle  église  que  de  tenter  une  restau- 
ration difficile  et  d'un  résultat  peu  certain.  —  Gomment    en  trouva- 
t-il  les  moyens  ?  Il  y  a  là  de  ces  secrets  qu'ont  déjà  trouvés  bien  des 
fois  —  c'est  leur  honneur  —  des  prêtres  zélés  dans  notre  département. 
Nous  croyons  savoir,  toutefois,  que  l'influence  et  le  crédit  de  M.  Sta- 
nislas de  la  Laurencie,  maire  alors  de  Basse-Goulaine,  et  frère  de  mon 
honorable  successeur,  lui  apportèrent  une  aide  puissante.  Cette  église, 
que  nous  ne  connaissons  point  personnellement,  est,  nous  a-t-on   dit, 
réussie.  Rien  d'étonnant,  car  M.  l'abbé  Berthault  aimait  les  arts  et  se 
connaissait  dans  tous,  aussi  bien  en  musique  qu'en  peinture,  en  sculp- 
ture qu'en  architecture.—  On  nous  a  cité  comme  un  trait  intéressant, 


—   XXXIII   — 

ingénieux 'et  neuf,  la  pensée  qu'il  mit  à  exécution  de  faire  repré- 
senter dans  les  vitraux  les  stations  du  Chemin  de  la  Croix. 

Un  des  jours  heureux  de  la  vie  de  M.  Berthault,  un  de  ces  jours  qui 
récompensent  de  bien  des  peines  et  des  fatigues,  fut  celui  où  Mgr 
Fournier,  qui  avait  posé  la  première  pierre  de  la  nouvelle  église,  en 
novembre  1873,  vint  la  consacrer,  le  2  mai  1877,  peu  de  jours  avant  le 
départ  de  ce  prélat  d'immortelle  mémoire,  pour  ce  voyage  de  Rome, 
dont  on  ne  devait  nous  rapporter  que  sa  glorieuse  dépouille. 

Mais  il  était  dans  les  décrets  du  Seigneur  que  M.  l'abbé  Berthault, 
son  oeuvre  accomplie,  n'en  jouirait  pas  cependant  pendant  longtemps. 
Atteint  dès  lors  d'une  maladie  de  cœur,  il  fut  enlevé  le  7  décembre 
1878,  mûr  pour  le  ciel,  mais  jeune  encore  peur  ce  qu'un  prêtre 
de  ce  mérite  aurait  pu  accomplir;  —il  avait  à  peine  56  ans.  — 
C'était,  selon  tous  ceux  qui  l'ont  connu,  un  homme  plein  d'intel- 
ligence et  d'esprit,  bon  affectueux  et  simple  ;  il  aimait  à  se  pro- 
mener dans  sa  paroisse,  causant  jusqu'avec  les  plus  humbles  de  ses 
ouailles,  entrant  dans  leurs  chaumières,  s'intéressant  à  leurs  travaux, 
à  leurs  besoins,  bénissant  leurs  enfants,  secourant  les  malheureux, 
et  se  faisant  aimer  de  tous;  —  bref,  une  nature  à  la  fois  riche  et  rare. 

On  l'a  enterré  dans  l'église  neuve  qui  est  son  œuvre,  dans  le  chœur, 
devant  l'autel. 

Nous  devons  à  sa  bienveillance  et  à  l'entremise  de  son  digne  ami, 
notre  éminent  collègue,  M.  l'abbé  Cahour,  le  don  pour  notre  Musée 
d'une  belle  statue  de  sainte  Anne,  avec  la  Vierge  et  l'Enfant  Jésus, 
statue  qui  était  dans  le  jardin  de  la  cure. 

M'est-il  permis  d'ajouter  que  c'est  un  de  nos  plus  zélés  collègues, 
M.  l'abbé  Meynier,  vicaire  à  Chantenay,  qui  a  remplacé  M.  l'abbé 
Berthault  comme  curé  de  Basse-Goulaine.  —  Il  eût  été  difficile  de 
mieux  choisir. 

De  M.  l'abbé  Siméon  Berthault  à  M.  l'abbé  Adolphe  Dubois,  qui  le 
suivit  bien  peu  de  mois  après  dans  la  tombe,  le  transition  est  toute 
naturelle  :  —  tous  deux  ont  combattu  le  bon  combat. 

Ceux  de  nos  collègues  que  pare  encore  cette  fleur  charmante  qu'on 
nomme  la  jeunesse,  n'ont  point  dû  connaître  M.  l'abbé  Dubois  ;  sa 
santé  l'avait  fait  depuis  longtemps  se  retirer  dans  sa  famille,  à  Pont- 
château.  Mais  ceux  qui,  comme  moi,  s'honorent  d'avoir  été  les  fonda- 
teurs de  cette  Société,  en  1845,  et  ceux  qui  nous  y  ont  suivis  de  près, 
ne  sauraient  avoir  oublié  ce  prêtre  si  digne,  d'aspect  si  distingué,  de 

c 


—    XXXIV    — 

rapports  à  la  fois  si  réservés  et  si  courtois.  Ces  qualités  qui  s'accor- 
daient chez  lui  avec  de  grandes  vertus  ecclésiastiques,  qui),  avait 
montrées  d" abord  comme  membre  de  la  Société  de  Saint-Sulpice,  puis 
comme  vicaire  de  Saint-Clément,  le  firent,  dès  l'âge  de  32  ans,  en 
1837,  choisir  par  Mgr  de  Guérines  comme  secrétaire-général  de  notre 

Evêchô. 

Mgr  de  Hercé  n'apprécia  pas  moins  que  Mgr  de  Guérines  M.  l'abbé 
Dubois,  et  lui  conserva  les  mêmes  fonctions.  Peu  après  la  mort  de  ce 
digne  évoque,  en  1849,  M.  l'abbé  Dubois  jugea  à  propos  de  se  retirer 
d'un  poste  honorable  et  élevé,  il  est  vrai,  mais  auquel  ses  forces  ne 
suflisaient  plus.  Il  ht  encore  apprécier  pendant  quelques  années  son 
caractère  et  ses  talents,  notamment  comme  membre  de  l'Administra- 
tion des  hospices  et  de  la  Commission  des  prisons,  jusqu'au  moment 
où,  sentant  de  jour  en  jour  ses  forces  décliner  et  les  inhrmitôs  reve- 
nir et  s'accroître,  il  se  retira  de  notre  ville,  où  on  ne  l'apercevait 
plus  qu'à  de  rares  intervalles. 

Né  à  la  Patelière,  commune  de  Paulx,  dans  le  canton  de  Machecoul, 
le  7  octobre  1805,  d'un  père  qui  avait  combattu  avec  honneur  dans  les 
armées  vendéennes,  M.  l'abbé  Dubois,  décédé  en  avril  1879,  à  Pont- 
château,  était  dans  sa  Tie  année.  Il  avait  reçu  la  prêtrise  en  1830,  des 
mains  de  l'illustre  prélat  de  Paris,  Mgr  de  Quélen.  —  Il  s'en  est  donc 
fallu  de  bien  peu  qu'il  pût  célébrer  ses  noces  d'or,  cet  honneur  et  ce 
bonheur  souverains  à  la  fois  de  la  vie  d'un  prêtre. 

M.  l'abbé  Dubois  avait  toujours  eu  un  goût  très  vif  pour  l'archéo- 
logie, comme  pour  tout  ce  qui  touchait  aux  choses  de  l'esprit  et  de 
l'intelligence  ;  les  arts  surtout  étaient  sa  passion  ;  il  n'était  pas  de 
vente  de  livres,  gravures,  objets  d'art,  dans  notre  ville,  où  on  ne  le  vit, 
—  je  parle  bien  entendu  d'un  temps  déjà  éloigné,  —  où  on  no  le  vît,  dis- 
je,  aux  premiers  rangs,  choisissant  avec  discernement  et  achetant 
avec  intelligence  ;  les  gravures  surtout  étaient  pour  lui  l'objet  d'une 
véritable  passion.  —  Que  sont  devenues  ses  collections  ?  —  Habeni 
sua  fat  a. . .  a  dit  le  poète. 

Quelques  mots  seulement  sur  nos  collègues,  MM.  Blanchard-Mervau 
et  le  docteur  Mahot,  car  je  ne  veux  point,  chers  collègues,  abuser  de 
votre  patience  à  m' entendre  ni  de  vos  moments.  --  Esprit  sage,  orné, 
judicieux,  M.  Blanchard-Mervau  était  un  de  ces  hommes  marqués  d'un 
cachet  original  très  personnel  qu'on  n'oublie  pas.  Reçu  avocat  en 
1841,  inscrit  au  barreau  en  ISii,  il  n'honorait  pas  moins  sa  profession 


—   XXXV    — 

d'avocat  que  M.  le  docteur  Maliot  la  sienne.  —  M.  Mahot  était  un  des 
plus  brillants  élèves  de  l'illustre  docteur  Fouré,  sorte  d'Hippocrate 
dont  l'histoire  de  la  médecine  à  Nantes  aura  le  droit  de  se  montrer 
justement  flore.  M.  Mahot  avait  recueilli  de  son  maître  une  méthode 
régulière,  sage  et  savante  dans  la  pratique,  et  le  don  d'inspirer  à  ses 
malades  une  confiance  absolue.  —  11  joignait  à  ces  mérites  les  qualités 
d'un  homme  aimable  et  bon,  digne  de  toute  espèce  d'estime  et  de  con- 
sidération. 

Je  croyais  avoir  achevé  cette  funèbre  liste  de  nos  pertes,  quand 
une  nouvelle  m'est  donnée,  chers  collègues,  qui  me  surprend  et  m'at- 
terre comme  un  coup  de  foudre  :  notre  excellent  confrère,  M.  Amédée 
Mercier,  un  de  ces  hommes  dont  on  devient  comme  un  vieil  ami  sitôt 
qu'on  les  connaît,  M.  Amédée  Mercier  est  mort  à  Poitiers  le  6  de  ce 
mois,  à  peine  âgé  de  52  ans.  —  C'était  un  vrai  savant,  et  avec  cela 
quelle  simplicité  !  quelle  modestie  !  —  Né  au  Bourg-Dun,  dans  la 
Seine-Inférieure,  il  avait  fait  ses  études  au  collège  du  chef-lieu  de 
l'arrondissement,  Yvetot.  Il  devint,    fort  jeune   encore,  professeur  à 

I 

Pontivy,  où  il  resta  longtemps  et  se  maria.  Puis,  en  1873,  il  fut 
nommé  professeur  de  quatrième,  à  Nantes,  au  Lycée,  après  avoir 
passé  ses  agrégations  de  grammaire  et  d'histoire  à  Paris.  —  En  1878, 
il  fut  chargé  de  la  classe  de  troisième,  et  enfin,  en  mai  1880,  fut  élevé 
à  celle  de  rhétorique.  Quelque  important  que  soit  ce  poste,  dans  la 
hiérarchie  universitaire,  M.  Mercier,  comme  si  déjà,  sentant  les 
atteintes  de  la  maladie  qui  devait  peu  après  l'emporter,  il  eut  voulu 
prouver  qu'd  était  capable  d'atteindre  un  jour  les  positions  les  plus 
hautes  de  sa  noble  profession,  M.  Mercier  voulut  passer  l'examen  du 
doctorat  ès-lettres,  et  son  examen  fut  pour  lui  un  vrai  triomphe. 
Aussi  lui  offrit-on  presque  immédiatement  une  chaire  de  Faculté. 
Toulouse  désirait  vivement  l'avoir,  et  M.  Félix  Robiou,  le  savant  pro- 
fesseur de  la  Faculté  de  Rennes  et  son  ancien  confrère,  lit  tout  au 
monde  aussi  pour  l'attirer.  Mais  notre  collègue  préféra  Poitiers,  où  on 
lui  confia  le  cours  de  littérature  ancienne,  tout  à  fait  dans  ses  goûts, 
et  par  son  passé  de  professeur  et  par  une  direction  naturelle  de  son 
esprit  vers  l'étude  des  langues.  —  Vous  vous  souvenez,  mes  chers 
collègues,  des  belles  études  que  M.  Mercier,  associant  parfois  à  ses 
recherches  son  jeune  et  érudit  élève  M.  Régis  de  l'Estourbeillon,  nous 
communiqua  sur  les  origines  diverses  des  populations  de  nos  contrées, 
sur  leurs  mélanges,  leurs  alliances,  les  influences  diverses  qui  ont  agi 


—   XXXVI   — 

sur  elles,  et  cela,  surtout,  d'après  les  noms  de  lieux  et  une  étude 
approfondie  des  divers  idiomes  celte,  latin,  roman  et  d'autres  peut- 
ôtre  encore.  —  Ces  travaux,  aussi  savants  qu'ingénieux,  qui  portaient 
avec  eux  leur  démonstration,  nous  les  écoutions  et  les  admirions,  les 
considérant  comme  une  vraie  bonne  fortune  et  dignes  des  académies 
de  premier  ordre.  —  Hélas  !  nous  devions  être  presque  seuls  à  jouir 
des  travaux  de  M.  Mercier.  —  Je  me  trompe,  il  restera  de  lui  comme 
son  testament  ses  deux  belles  thèses  de  doctorat. 

Vous  ne   m'en  voudrez  pas,  mes  bons  collègues,  si  je  crois  encore 
devoir  ajouter  un  nom  à  ceux  de  ces  chers  défunts,  mais  il  me  pren- 
drait comme  un   remords  de  ne  pas   adresser  au  moins  un  court  et 
funèbre  adieu  à  un  honorable  antiquaire,   qui,  sans  faire  précisément 
partie  de  notre  Société,  était  lié  avec  la  plupart  de  ses  membres,  les 
aidait  de  ses  conseils  éclairés,  et  a  plus  d'une  fois  contribué  à  l'enri- 
chissement de  nos  collections,  je  veux  parler  de  M.  Hubin  delà  Rairie. 
Habile  dessinateur,  ayant  beaucoup   voyagé,  beaucoup   vu,  beaucoup 
acquis,  c'était,  selon  tous  les  hommes  impartiaux,  le  plus  fin  connais- 
seur en  antiquités  de  notre  ville.  —  Il  appréciait    peu   le   moderne, 
le  moyen  âge  lui-même  n'était  pas  son  étude  ni  son  objet    de  prédi- 
lection ;  il  daignait  accueillir  la  Renaissance  avec  quelque  indulgence  ; 
mais  quand  il  tenait  en  main  quelque  fragment  de  belle  antiquité  grec- 
que et  vous  en   exaltait   les  mérites  souverains,  les  yeux  s'ouvraient, 
pour  ainsi  dire,  l'âme  s'exaltait  avec  la  sienne,  et,  pour  un  moment,  on 
eût  voulu  revivre  dans  la  ville  de  la  grande  Minerve  Athéné,  au  temps 
des  Phidias  et  des    Praxitèle.  La  mémoire   de  cet  homme  aimable  et 
distingué  demeurera  ineffaçable  dans  mon  cœur,  vous  me  pardonnerez, 
mes  chers  collègues,  de  vous  en  avoir  entretenus  un  moment.  —  L'é- 
loge est  chose  si  douce  à  faire  !  —  Aussi  me  sera-t-il  encore  permis, 
je  l'espère,  avant  de   clore  ce  discours   et  de  descendre  du  fauteuil 
présidentiel,   de  rappeler  à  grands  traits   quels  furent  les  travaux 
principaux  qui  ont  honoré  cette  période  de  vos  annales. 

M.  l'abbé  Cahour,  ce  nom  vient  bien  naturellement  le  premier  sous 
ma  plume,  a  continué  le  cours  de  ses  belles  études  hagiographiques 
sur  les  saints  de  notre  diocèse,  semblable  en  cela  à  un  antiquaire  qui, 
par  ses  soins  habiles  et  savants,  rendrait  tout  leur  lustre  à  de  vieilles 
médailles.  On  sent  que  chez  notre  collègue  le  cœur  et  la  foi  condui- 
sent la  plume  et  encouragent  des  recherches  souvent  longues  et  dif- 
ficiles. C'est  ainsi  que  dans  la  séance  du  2  juillet  1878,  il  nous  a  lu  une 


—   XXXVII  — 

notice  pleine  d'intérêt  sur  le  prieuré  de  Saint-Lupien,  près  Rezô.  — 
Ce  saint,  tout  local,  et  qui  nous  appartient  bien,  nous  l'ignorions,  la 
plupart  d'entre  nous,  absolument,  déguisé  qu'il  était  depuis  longtemps 
sous  le  nom  de  saint  Lucien.  Désormais,  c'est,  sans  conteste,  saint 
Lupien  de  Rezé  qu'il  faudra  dire.  —  L'bistoire  de  sa  vie  n'est  pas 
considérable,  mais  elle  est,  du  moins,  authentique.  Grégoire  de  Tours 
nous  apprend,  en  effet,  qu'il  vivait  au  IVe  siècle,  fut  baptisé  par 
saint  Hilaire  de  Poitiers,  mourut  encore  revêtu  des  habits  blancs  de 
son  baptême,  qu'alors  on  portait  pendant  huit  jours,  et  fut  enterré  à 
Rezô.  Ce  fut  bien  probablement  dans  la  chapelle  à  laquelle  M.  l'abbé 
Gahour  vient  de  restituer  son  nom  exact.  Des  miracles,  apprenons- 
nous  encore  de  saint  Grégoire  de  Tours,  ne  tardèrent  pas  à  se  mani- 
fester à  son  tombeau,  et  la  ferveur  des  peuples  continua  pendant 
longtemps  à  y  conduire  des  pèlerins.  —  D'intéressants  dessins  de  nos 
confrères  MM.  Van-Iseghem  père  et  Louis  Petit  accompagnèrent  cette 
belle  étude,  que  M.  l'abbé  Gahour  termina  par  le  vœu  que  la  chapelle 
de  saint  Lupien  soit  bientôt  achevée  de  réparer  et  rendue  au  culte, 
vœu  que  nous  partageons  tous  naturellement. 

Avec  M.  de  Lisle  du  Dréneuf  nous  poursuivons  de  bien  neuves  et 
curieuses  investigations  dans  le  domaine  du  préhistorique.  Non  seule- 
ment il  fouille  des  dolmens  vierges  et  jusqu'à  lui  presque  inconnus, 
mais  il  semble  que  notre  collègue  ait  comme  un  don  de  double  vue 
pour  retrouver  dans  nos  contrées  les  traces  des  populations  qui  ont 
précédé  celles  des  dolmens  et  ne  se  servaient  encore  que  de  la  pierre 
non  polie.  Nous  suivons  ses  travaux  et  ses  heureuses  découvertes 
avec  le  plus  constant  intérêt. 

M.  Pocard-Kerviler,  l'émment  ingénieur  de  Saint-Nazaire,  nous  a 
moins  donné  que  dans  la  période  précédente, —  on  ne  rencontre  pas 
toujours  des  ports  préhistoriques,  —  mais  il  fait  partie  de  notre 
Société,  il  en  est  une  des  gloires,  et  nous  avons  bien  le  droit  de  le  félici- 
ter de  son  infatigable  production  dans  le  quadruple  domaine  des  scien- 
ces, des  arts,  des  lettres  et  de  l'archéologie.  Ses  biographies,  entre  au- 
tres, des  Bretons,  membres  de  l'Académie  française,  sont  des  œuvres  du 
plus  vif  intérêt  et  de  la  plus  haute  valeur.  —  Nous  tenons  aussi  à  si- 
gnaler ici  un  excellent  travail  sur  les  chaires  religieuses  extérieures 
de  nos  contrées,  publié  dans  la  belle  Revue  illustrée  de  la  Bretagne, 
fondée  par  M.  Monnier.  —  Une  place  à  quelqu'une  des  grandes  Acadé- 
mies de  Paris  réclamera  un  jour  M,  Pocard-Kerviler. —  En  attendant, 
il  a  été  décoré  en  1878. 


—  XXXVIII  — 

M.  Gustave  Blanchard,  d'Herbignac,  noua  a  donné  deux  travaux, 
fruits  de  longues  recherches  et  d'observations  incessantes  et  patiem- 
ment recueillies.  La  lecture  de  ces  travaux  est  de  celles  qui  ont  été  en- 
tondues  avec  le  plus  d'attention  et  d'intérêt.  L'un  de  ces  travaux  est 
intitulé:  Le  Dialecte  breton  de  Vannes  au  pays  de  Guérande  \  le 
second:  De  quelques  usages  anciens  conservés  au  pays  g ntérandais . 
Si  le  premier  est  plus  savant  peut-être,  l'autre  est  pour  nous  d'un  prix 
«ncore  plus  estimable.  Oh!  qu'il  est  temps,  en  effet,  de  recueillir  tous 
ces  usages  si  curieux,  si  pittoresques,  si  philosophiques  souvent  d'in- 
tention pour  qui  sait  les  comprendre,  qui  différenciaient  autrefois  les 
races  les  unes  d'avec  les  autres. 

—  Quelques  années  encore,  et  ceux  de  ces  usages  qui  ont  pu  demeu- 
rer, auront  aussi  disparu  pour  faire  place  à  la  plus  déplorable  unifor- 
mité. —  Déjà  M.  Blanchard  en  a  vu  disparaître  beaucoup  du  pays  qu'il 
nous  raconte,  mais  il  y  connaît  encore  les  cris  épouvantables,  les  lamen- 
tations, les  gémissements,  les  larmes  sur  les  tombes  à  la  façon  des 
barbares  ou  des  Celtes,  nos  ancêtres,  cris  qui  s'éteignent,  larmes  qui 
se  sèchent,  comme  par  enchantement,  aussitôt  qu'on  a  repassé  le  seuil 
du  cimetière;  —  il  y  entend  encore,  par  contre,  des  cris  de  joie  dans 
les  festins  et  dans  les  danses,  cris  qui  jetteraient  plutôt,  par  leur  vio- 
lence, la  terreur  dans  le  cœur  de  ceux  qui  en  ignoreraient  la  signification. 
—  C'est  encore  le  Celte  que  M.  Blanchard  retrouve  dans  les  luttes,  les 
danses,  les  chants.  Vous  avez  entendu  cette  lecture,  mes  chers  collè- 
gues, au  moins  la  plupart  d'entre  vous  ;  je  m'estimerais  heureux  si  ce 
que  je  vous  en  ai  rappelé  vous  engageait,  comme  moi,  à  la  relire. 

M.  Léon  Maître  nous  a,  entre  autres  communications,  montré  les  hos- 
pices, les  léproseries  du  moyen  âge  nous  guidant  pour  retrouver  les 
voies  romaines,  et  celles-ci  à  leur  tour  nous  aidant  à  retrouver  les 
asiles  hospitaliers  de  nos  pères.  C'est  un  travail  neuf,  d'une  haute  éru- 
dition et  d'une  grande  portée,  digne  en  un  mot  du  savant  archiviste  de 
notre  département,  que  a  Société  académique  vient  de  mettre  à  sa  tête. 

M.  Amédée  de  Bejarry  nous  a  plusieurs  fois  conduits  dans  le  fond 
des  bocages  vendéens  et  nous  y  a  montré  des  monuments  bien  curieux 
et  jusqu'à  lui  non  décrits  ou  décrits  incomplètement,  les  uns  de  l'âge 
de  la  pierre,  les  autres  des  premiers  siècles  chrétiens.  — M.  Amédée  de 
Bejarry  est  un  de  nos  plus  anciens  fidèles  et  l'on  formerait  presque  un 
volume  des  excellents  travaux  que  ce  modeste,  attentif  et  savant  ex- 
plorateur du  Bas-Poitou  nous  a  donnés. 


—   XXXIX   — 

Avec  M.  l'abbé  Dominique,  nous  nous  sommes  transportés  beaucoup 
plus  loin,  en  Ecosse,  en  Irlande,  en  Danemark  et  même  encore  plus 
loin,  presque  au  bout  de  notre  monde,  jusqu'aux  îles  Fidgi.  —  Savant 
dans  la  langue  anglaise,  fils  d'un  pore  très  érudit,  riche  lui-même 
d'aptitudes  et  de  connaissances  très  variées,  notre  bon  confrère  aime 
à  nous  initier  aux  mythes,  aux  légendes,  aux  croyances  des  divers  peu- 
ples. —  Sous  ce  rapport,  son  travail  sur  Odin,  ce  personnage  à  la  fois 
historique  et  mythologique  des  religions  et  des  cosmogonies  du  Nord, 
est  surtout  remarquable. 

Fort  réclamé  —  il  a  le  droit  de  s'en  glorifier—  par  toutes  les  Sociétés 
et  publications  savantes  de  notre  ville,  M.  de  la  Nicollière-Teijeiro  no 
nous  oublie  pas,  cependant,  et  tout  en  donnant  de  temps  à  autre  quel- 
ques bons  documents  sur  la  ville,  dont  il  est,  on  le  sait,  l'éminent  ar- 
chiviste, c'est  surtout  sur  les  vastes  mers  océaniques  qu'il  aime  à  nous 
faire  suivre  nos  braves  marins  bretons,  et  à  nous  raconter  leurs  ex- 
ploits. 

Un  de  nos  plus  jeunes  membres,  mais  marqué  au  front  de  l'étoile  des 
heureux,  M.  Raoul  de  Rochobrune,  fils  de  notre  plus  célèbre  graveur 
d'architecture  contemporain —est-il  besoin,   mes  chers  collègues,  de 
vous  le  désigner  par  son  prénom  d'Octave?  —  M.  Raoul  de  Rochebrune 
nous  a  fait  part  de  deux  magnifiques  découvertes  ;  découvertes,  je  puis 
le    dire,  de   grand  et  premier   ordre.   Dans  son    jardin   même,    en 
Vendée,  des  travaux  de  culture  ayant  fait  sortir  de  terre  quelques  dé- 
bris antiques,  M.  de  Rochebrune  fît  exécuter  une  fouille  qui  amena  au 
jour  la  sépulture  entière  d'un  légionnaire  romain,   enterré  avec  toute 
son  armure;  ce  fut  probablement  un  des  derniers  soldats  qui  défendi- 
rent au  loin  l'indépendance  de  la  mère  patrie.  Assurément,  nous  Gau- 
lois, Armoricains  ou  Celtes,  nous  avons  bien  le  droit  de  ne  voir  dans 
ces  milices  romaines  que  des  envahisseurs  de  notre  pays,  mais  on  ne 
peut  cependant  s'empêcher  d'admirer  la   fidélité  de  ces  hommes  qui, 
même  au  loin,  semblaient  deviner  le  moindre  geste  de  leur  César  et  lui 
porter  obéissance,  et  d'estimer  à  la  plus  haute  valeur  la  sévère  disci- 
pline qui  les  avait  formés  et  leur  avait  fait  conquérir  l'univers.  —  En 
tout  cas,  archéologiquement  parlant,  l'ensemble  de  cette  rare  panoplie 
est  d'un  extrême  intérêt  ;  le  casque,  surtout,  d'une  extraordinaire  con- 
servation, est  une  pièce  à  peu  près  unique. 

Il  semble  que  la  chance  aurait  dû  en  rester  là,  au  moins  pendant  un 
certain  délai,  pour  notre  jeune  confrère,   mais    non,  à  peine  avait-il 


—  XL  —  | 

fini  de  publier  sa  découverte,  qu'il  rencontrait,  non  plus  tout  à  fait 
chez  lui,  mais  chez  un  parent,  dans  la  Vienne,  une  caverne  préhisto- 
rique des  plus  importantes  ;  je  vous  l'ai  dit,  M.  de  Rochebrune  est 
marqué  de  l'étoile.  —  Presque  toutes  les  époques  des  temps  primitifs 
sont  représentées  dans  cette  caverne  en  nombreux  et  magnifiques 
échantillons.—  Il  s'y  trouve  jusqu'à  une  défense  de  mammouth,  et, 
objet  plus  rare  encore  peut-être,  de  ces  ossements  de  rennes  où  l'art  de 
nos  vieux  ancêtres  s'est  essayé  à  nous  retracer  les  images  des  êtres  de 
la  création  avec  lesquels  ils  vivaient.  —  M.  de  Rochebrune  a  bien 
voulu  nous  donner  les  prémices  de  sa  découverte  qui  nous  vaudra  de 
lui,  plus  tard,  un  important  travail  dont  nous  le  remercions  à  l'avance. 

Dans  notre  dernière  séance,  et  comme  le  bouquet  de  cette  période 
pendant  laquelle  j'ai  eu,  mes  chers  collègues,  l'honneur  de  vous  prési- 
der, nous  avons  entendu,  avec  un  intérêt  pour  ainsi  dire  concentré, 
une  étude  de  notre  ôminent  agent-voyer  en  chef  du  département,  M. 
Eugène  Orieux,  sur  la  campagne  de  César  chez  les  Vônôtes.  Pendant 
de  longs  siècles,  on  avait  toujours  cru  que  cette  campagne  avait  eu 
lieu  dans  le  Vannetais  actuel,  sur  la  rive  droite  de  la  Vilaine,  et  que 
la  célèbre  bataille  sur  la  côte  armoricaine,  que  César  nous  a  décrite 
avec  tant  de  soin  et  un  si  légitime  orgueil,  s'était  livrée  dans  la  mer 
du  Morbihan,  quand  une  nouvelle  théorie  a  tenté,  il  y  a  quelques  an- 
nées, de  déplacer  toute  cette  campagne  et  de  la  rapprocher  de  l'embou- 
chure de  la  Loire,  sur  la  rive  droite  de  ce  fleuve.  —  Surpris  de  cet 
étrange  système,  paradoxal  au  plus  haut  chef,  selon  lui,  et  comme 
effrayé  des  progrès  qu'il  faisait  rapidement  parmi  les  savants,  historiens 
ou  géographes, M.  Orieux  a  jugé  qu'il  était  temps  de  lui  couper  court,  et 
dans  un  langage  très  sobre  et  très  ferme,  le  texte  de  César  soigneuse- 
ment serré  dans  son  argumentation,  préparé  d'ailleurs,  comme  un  pe- 
tit nombre  peuvent  l'être,  par  ses  aptitudes  d'esprit  personnelles  et 
par  sa  carrière,  aux  études  topographiques,  il  me  paraît  y  avoir  réussi. 
La  liberté  de  la  réponse  est  d'ailleurs  toujours  sauve. 

Que  vous  dirai-je  encore,  mes  chers  collègues  ?  que  vous  rappelle- 
rai-je?  Vous  le  voyez,  la  matière  est  riche.  L'oserai-je  dire,  mais  vous 
doutiez- vous  vous-mêmes  de  la  masse  du  travail  que,  semblables  à  l'a- 
beille qui  produit  peu  à  peu  son  miel  annuel,  vous  aviez  accumulée 
dans  notre  ruche  archéologique  ?  —  Je  voudrais  m'arrêter  pour  ne  pas 
trop  prolonger  ce  discours  d'adieu,  et  cependant  ne  serait-il  pas  juste 
de  vous  remémorer  au  moins  par   leurs  noms  MM.  Evellin,  Merland, 


—   XLI   — 

de  la  Borderie,  Petit,  Maugras,  MM.  les  abbés  Grégoire  et  Gallard,  M. 
le  comte  de  Breraond  d'Ars,  M.  F.  Ledoux,  M.  le  docteur  Anizon,  et 
j'en  devrais  peut-être  ajouter  d'autres  qui  nous  ont  fait  d'intéres- 
santes communications. 

Je  dois  aussi,  je  crois,  quoi  qu'il  m'en  coûte,  car  le  moi  est,  dit-on, 
haïssable,  me  présenter  un  moment  devant  vous,  non  plus  comme  pré- 
sident, mais  comme  travailleur,  ne  fût-ce  que  de  profil.  Je  le  dois,  car 
c'est  mon  meilleur  moyen  de  vous  parler  de  mon  excellent  ami,  M. 
Charles  Seidler,  et  de  notre  si  digne  et  si  savant  conservateur  du 
Musée,  M.  Fortuné  Parenteau,  qui  ne  m'est  pas  moins  cher.  —  Je 
laisse  de  côté,  en  ce  qui  me  concerne,  quelques  causeries  que  l'intérêt 
du  sujet  a  bien  voulu  vous  faire  accueillir  avec  bienveillance,  l'une 
notamment  sur  un  curieux  coffret  de  cuir  gravé,  au  mythe  de  la  li- 
corne, si  en  faveur  chez  nos  pères,  —  et  une  autre  sur  de  précieux 
bas-reliefs  manichéens  en  ivoire,  découverts  près  de  la  Cathédrale,  et 
j'aborde,  sans  plus  tarder,  la  communication  qui  va  m' amener  à  M. 
Seidler.  —  Dans  un  travail  que  je  publiai,  il  y  a  quelques  années, 
dans  vos  annales,  intitulé  :  Le  Tumulus  des  trois  Squelettes,  près 
Pomic,  je  donnai  le  dessin  d'une  rare  inscription  découverte  dans 
un  des  caveaux  de  ce  tumulus,  et  soutins,  contrairement  à  l'opinion  de 
plusieurs  antiquaires  de  Morbihan,  contrée  où  existent  un  certain 
nombre  d'inscriptions  analogues,  que  le  moment  arriverait  où  on  par- 
viendrait à  les  déchiffrer.  —  Or,  voilà  qu'un  jour,  la  vue  des  inscrip- 
tions de  la  Lybie,  vaste  contrée  entre  Constantine  et  l'Egypte,  vint 
me  donner  raison.  Nos  inscriptions  étaient  presque  analogues,  il 
fallait  voir  dans  la  plupart  de  leurs  signes  des  lettres  et  non  des  fi- 
gures, et  l'on  était  d'accord  sur  la  dénomination  de  presque  toutes 
ces  lettres.  Comme  celles  de  la  Lybie,  les  inscriptions  de  nos  dolmens 
étaient  du  phénicien  un  peu  déformé,  du  phénicien,  c'est-à-dire  la 
plus  ancienne  des  langues  écrites,  peut-être,  si  l'égyptien  ne  lui  avait 
donné  naissance,  comme  l'a  démontré  mon  cousin  et  ami,  le  vicomte 
Emmanuel  de  Rougé,  dans  un  splendide  mémoire  publié  seulement 
depuis  sa  mort  et  dont  l'autorité  n'est  contestée  par  personne.  —  Or, 
mes  chers  collègues,  il  eût  fallu  voir  avec  quelle  ardeur  M.  Seidler, 
saisissant  cette  idée  de  la  langue  de  nos  inscriptions,  idée  approuvée 
aussi  par  M.  Parenteau,  la  développa,  l'illustra,  pour  ainsi  dire,  par 
des  tableaux  comparatifs,  faisant  même  venir  à  grands  frais  des  ou- 
vrages de  prix  de  divers  pays  pour  mieux  l'étudier  et   lui  donner  la 


—    XLII    — 

valeur  d'une  démonstration  sans  réplique  !  —  Vous  le  voyez'  mes 
chers  collègues,  vous  ne  m'en  voudrez  pas,  j'étais  bien  obligé  de 
vous  rappeler  ma  découverte. 

Je  dois  encore  vous  rappeler  ici  que,  grâce  à  vos  généreuses  libéra- 
lités, de  nouvelles  fouilles  entreprises  par  moi  dans  le  pays  de  Pornic, 
cette  fois  du  côté  de  la  Bernerie,  furent  couronnées  d'un  assez  grand 
succès  de  découvertes  ;  je  ne  m'en  vante  nullement,  c'est  là  affairo 
de  chance.  Mais  votre  musée  s'est  enrichi  des  heureuses  trouvailles 
résultats  de  ces  fouilles,  et  elles  ont  acquis  comme  un  lustre  double 
placées  dans  les  belles  vitrines  que  l'invincible  persévérance  de  notre 
conservateur  a  enfin  obtenues  du  Conseil  général,  et  que  notre  êmi- 
nent  collègue,  M.  Bourgerel,  a  dessinées  et  su  faire  exécuter  avec  tant 
de  goût. 

Assurément  notre  musée  manque  peut-être  encore  un  peu  d'aspect 
comme  élégance,  comme  miroitage  à  la  vue,  mais  quelle  différence 
toutefois  avec  ce  qu'il  était  encore  il  y  a  peu  d'années  !  Tel  qu'il  est, 
et  il  n'a  pas  dit  son  dernier  mot,  la  cité  a  le  droit  de  s'en  enorgueillir  ; 
s'il  n'est  pas  tout  à  fait  le  premier,  il  est  du  moins  un  des  premiers 
de  France,  surtout  par  la  variété  de  ses  richesses  ei  l'intérêt  incom- 
parable de  plusieurs.  —  La  Société  y  a  certes  contribué,  et  grande- 
ment ?  toutefois,  sachons  être  justes,  notre  bon  collègue,  M.  Paren- 
teau,  en  peut  être  considéré  comme  presque  le  créateur.  —  Ne  le 
quittons  pas  ce  collègue  si  éminent,  si  dévoué,  un  des  premiers  numis- 
mates de  notre  pays,  sans  rappeler  que,  comme  membre  de  la  So- 
ciété, il  nous  a  fait  plus  d'une  fois  de  bien  intéressantes  communi- 
cations, dont  une,  entre  autres,  remplie  d'heureux  aperçus  sur  le  culte 
du  veau  d'or  chez  tous  les  peuples. 

Nous  avons  donc  parcouru  cette  période  de  la  vie  de  notre  Société, 
je  ne  dirai  pas  sans  gloire,  le  mot  serait  excessif,  mais,  du  moins, 
nous  ne  l'avons  pas  parcourue  sans  honneur.  —  Continuons,  mes  chers 
collègues,  élevons  nos  âmes,  sursum  corda,  élevons-les  par  le  travail 
vers  l'amour  de  l'humanité.  Quand  elle  est  belle  dans  le  passé,  le  passé 
qui  est  surtout  notre  domaine,  on  l'admire  ;  —  quand  elle  est  mau- 
vaise, quand  le  laid  y  fait  tache,  on  la  plaint  mais  on  l'aime  toujours, 
et  tirons  de  ces  défaillances  momentanées  des  leçons  et  des  conseils 
pour  l'en  garer  dans  l'avenir.  Jeunes  gens  surtout  qui  m'écoutez, 
jeunes  adeptes,  vous  la  force  future  de  notre  œuvre,  que  ce  soit  là 
votre  plus  cher  but  ;  les   études  de  votre  esprit  se  trouveront  ainsi 


—   XLIII   — 

d'accord  avec  les  aspirations  de  votre  cœur  ;  et  vous  qui  avez  fondé 
avec  moi  cette  Société,  il  y  a  un  tiers  de  siècle,  et  qui  voyez  s'éloi- 
gner dans  l'horizon  du  passé  et  de  l'arrière  du  navire  les  jours  de 
votre  jeunesse,  et  même  ceux  de  votre  virilité,  recueillez  en  votre 
esprit  cette  belle  pensée  d'un  écrivain  moderne  :  «  La  science  est  une 
chose  jeune,  elle  suppose  la  fraîcheur  de  l'âme,  et  quand  elle  remplit 
la  vie,  elle  empêche  de  vieillir.  » 

LE  Bon  DE  WlSMES. 


ALLOCUTION 


PRONONCEE 

A    LA    SÉANCE    D'INSTALLATION 

DU  NOUVEAU  BUREAU 
18  JANVIER  1881 


»  ...  Je  me  comparerais  à  ce  Tioyen 
»  qui  mérita  la  protection  d'une  Déesse, 
»  seulement  parce  qu'il  la  trouva  belle.  » 
Montesquieu. 


Messieurs  et  chers  Collègues, 

Je  suis  bien  mal  préparé  à  l'honneur  de  diriger  votre  savante  com- 
pagnie. 

D'impérieuses  circonstances  en  dédoublant  ma  vie,  pour  ainsi  dire, 
m'ont  tenu  depuis  deux  ans  trop  à  l'écart  de  vos  intéressantes  réu- 
nions ;  devenu  ainsi,   et  par  force  majeure,   l'un  des   moins  assidus 
peut-être  de  vos  collaborateurs,  je  me  croyais  des  droits  indiscutables 
et  nouveaux  à  en  demeurer  le  plus  indigne  de  toute  distinction. 

Tel  n'a  pas  été  votre  sentiment;  et  vos  libres  suffrages  se  sont 
groupés  sur  mon  nom,  quoique  j'eusse  pris  la  précaution  de  les  dé- 
cliner. 

Fallait-il,  après  coup,  persévérer  dans  cette  voie  ?. . .  Etais-je  rece- 
vable  à  élever  le  conflit  dans  notre  pacifique  milieu  ?. . .  Ne  devais-je 
pas,  plutôt,  selon  le  conseil  des  amis  que  j'ose  compter  parmi  vous, 
oublier  ma  personne,  écarter  des  scrupules  malheureusement  motivés, 
et,  secondant  vos  desseins,  m'incliner  devant  votre  verdict? 

Je  me  suis  arrêté  à  ce  dernier  parti. 

Vous  avez  jugé  que  je  pouvais  être  de  quelque  utilité  dans  ces  fonc- 
tions délicates  où,  depuis  trente-cinq  années,  mes  vaillants  prédéces- 
seurs, rivalisant  d'urbanité,  de  tact,  de  zèle,  de  notoriété  et  de  savoir, 


—    XLVI    — 

ont  emporté  dans  leur  retraite  une  part  égale  de  notre  vive  gratitude; 
si  aventurée,  je  le  crois,  que  soit  votre  confiance  ;  si  lourd  que  me 
paraisse  l'héritage,  je  ne  mesurerai  pas  la  peine  quand  vous  marquez 
ma  place  aux  avant-postes,  et  j'accepte  le  difficile  mandat  dont  vous 
avez  daigné  m'investir. 

J'accepte  surtout  le  témoignage  de  vos  sympathies,  Messieurs  et 
chers  Collègues  ;  vous  m'offrez  là  un  joyau  d'un  grand  prix:  je  vous  en 
suis  profondément  reconnaissant. 

Maintenant,  et  à  l'heure  où  nous  allons  signer  comme  un  contrat  de 
fidélité  pour  une  période  de  trois  ans,  une  Olympiade  à  peu  de  chose 
près,  souffrez  que  je  précise  nettement  le  caractère  de  nos  situations 
respectives  : 

La  fortune  scientifique  est  de  votre  côté  ;  du  mien,  un  dévouement 
absolu  à  la  cause  et  à  l'indépendance  de  notre  Association;  mais,  à 
cela  se  borne  mon  apport  ;  car,  à  rencontre  de  l'insinuation  louangeuse 
de  M.  le  baron  de  Wismes,  le  temps  m'a  manqué  jusqu'ici  pour  me 
constituer  une  dot  archéologique  convenable  :  c'est  là  le  point  noir  de 
notre  commun   horizon. 

Puisse  la  franchise  de  cet  aveu  m' attirer  ce  soir  votre  bienveillante 
attention,  et,  dans  l'avenir,  votre  concours  le  plus  indulgent  I 

Me  serait-il  permis  d'en  découvrir  les  gracieuses  prémices  dans  le 
soin  que  vous  avez  mis  à  choisir  les  correctifs  indispensables  de  mon 
insuffisance  :  comment  désigner  autrement  les  éminents  collègues 
dont  je  me  vois  entouré  ? 

Que  de  garanties  d'éclectisme,  quelle  source  d'impulsions  vives  et 
réfléchies  à  la  fois  ne  trouvé-je  point  dans  la  composition  du  Comité 
central,  notre  Sénat  à  nous,  n'est-il  pas  vrai  ?  et  où  l'expérience, 
l'esthétique,  unies  à  un  esprit  toujours  jeune,  me  montrent,  dans  M. 
Henri  de  Gornulier,  le  successeur  judicieusement  acclamé  du  docte  et 
bon  abbé  Gahour  ? 

Ici,  parmi  mes  assesseurs  ordinaires,  quel  bonheur  pour  moi  de 
rencontrer  d'abord  :  notre  vénérable  Trésorier,  M.  Petit ,  la  clef  de 
voûte  d'un  système  financier  fort  modeste,  mais  que  son  habile  et  cor- 
recte gestion  a  préservé  et  préservera  longtemps,  je  l'espère,  de  ces 
crises  néfastes  au  milieu  desquelles,  (il  y  a  là  sans  doute  une  exagéra- 
tion historique),  on  a  vu  crouler  autrefois  le  crédit  de  républiques  et 
d'empires  puissamment  établis. 

Ensuite,  votre  aimable  Vice-Président,  M.  Lemeignen,  votre  Biblio- 


—    XL  VII    — 

tliécaire,  vos  Secrétaires  »,  tous  si  bien  placés  dans  l'estime  de  notre 
ville,  si  assurés  de  celle  du  monde  savant  où  de  précoces  et  remarqua- 
bles publications  leur  ont  acquis  un  rang  enviable,  et  nous  fournis- 
sent de  justes  éléments  de  fierté  locale. 

Là,  nous  dépassant  par  la  sûreté  et  la  variété  de  ses  connaissances, 
hésiterais-je  à  saluer  mon  excellent  compatriote  de  Vendée,  le  conser- 
vateur, l'âme,  devrais-je  dire,  de  notre  splendide  musée  de  l'Ora- 
toire, l'arbitre  de  toute  contestation  archéologique,  le  numismate 
obligeant  autant  que  distingué  ?  J'ai  nommé  M.  F.  Parenteau. 

En  vérité,  Messieurs  et  chers  Collègues,  pouvais-je  mieux  inaugu- 
rer l'exercice  de  mon  autorité  triennale  qu'en  me  faisant  l'écho 
de  vos  désirs  unanimes,  et  en  souhaitant  de  tout  cœur,  à  cette 
pléiade    d'élite,  une  sincère  et  chaleureuse  bienvenue  ? 

A  côté  de  ce  devoir,  l'un  des  plus  agréables  de  ma  charge,  se  pré- 
sente une  obligation  flatteuse,  mais  inéluctable  et  assurément  au- 
dessus  de  mes  forces  ;  j'essaierai  néanmoins  de  m'en  acquitter. 

J'aurais  presque  voulu  en  reculer  encore  F  accomplissement,  jaloux 
de  prolonger  par  cet  artifice  la  Présidence  magistrale  de  M.  le  baron 
de  Wismes. 

Oui,  cher  et  honorable  maître,  il  s'agit  de  vous  donner  acte  de  votre 
discours  d'adieu,  ou  plutôt,  de  l'admirable  travail  que  vous  venez  de 
nous  lire  ;  il  s'agit  de  noter  le  point  précis  où  je  puis  bien  occuper 
ce  siège  respectable,  mais  non  vous  y  remplacer  ;  de  fixer  cet  instant 
fugitif  oU  le  Passé,  illustré  par  vos  réels  succès,  et  l'Avenir  incertain 
qui  m'incombe,  tous  deux,  ce  soir,  rattachés  au  Présent,  vont  échan- 
ger une  dernière  et  affectueuse  étreinte. 

Interprète  de  notre  Société,  j'ai  à  traduire  les  hommages  et  regrets 
dont  chacun  de  nous  vous  prie  d'accepter  l'expression. 

Vous  ne  nous  avez  ménagé  ni  votre  temps,  ni  vos  fatigues  ;  chef 
obéi  de  notre  petite  phalange  nantaise,  vous  en  êtes  toujours  resté 
le  premier  soldat  ;  jamais  nul  ne  vous  vit  déserter  la  mêlée  ;  nos  vic- 
toires furent  votre  œuvre  légitime,  au  moins  dans  une  notable  pro- 
portion, et  par  vous,  enfin,  resplendit  d'un  nouvel  éclat  cette  auréole 
au  centre  de  laquelle  je  vois  briller,  avec  le  vôtre,  les  noms  de  vos 
nobles  devanciers. 

(*)  Bibliothécaire  :  M.   Blanchard. 

Secrétaire  général  :  M.  de  Lisle  du  Dréncuf.  —  Secrétaire  du  Comité  :  M.leC"  de 
l'Eslourbeillon.  —  Secrétaire-adjoint:  M.  A.  des  Jamonicrcs. 


—    XLVIII    — 

Plus  favorisé  que  votre  humble  serviteur,  vous  avez  apporté  au 
fauteuil  présidentiel  des  titres  dont  rémunération  seule  transportera 
de  joie  votre  biographe  futur. 

Ils  forment  cette  partie  de  vous-même  qu'il  vous  faut  aujourd'hui 
abandonner  à  mon  entière  disposition  ;  je  les  rappellerai  brièvement 
du  reste,  mais,  ce  sera  mon  tribut  personnel  de  respectueuse  con- 
sidération offert .-  —  A  l'historien  consciencieux  du  Maine,  de  l'Anjou 
et  de  la  Vendée  ;  —  au  philosophe  indulgent  ;  —  à  l'homme  libéral, 
bien  qu'un  excès  de  générosité  native  l'expose  à  méconnaître  quel- 
ques-unes de  nos  imperfections  contemporaines,  je  ne  voudrais  pas 
dire  sociales  ;  —  au  conteur  humoristique,  intarissable  autant  que 
spirituel  ;  —  à  l'archéologue  heureux,  le  mot  est  de  vous,  il  me  sem- 
ble ;  bref,  à  l'appréciateur  émérite  de  toutes  les  productions  de  l'es- 
prit. 

Dénoncerai-je  en  vous,  par  surcroît,  le  collectionneur,  le  chercheur 
passionné,  l'annotateur  infatigable  ? 

Qui  vous  disputerait,  cher  maître,  la  possession  intime  des  hommes 
et  des  choses  de  notre  province  ;  qui,  mieux  que  vous  ne  le  faites,  en 
saisit  ou  résume  le  côté  saillant,  et  prépare  ainsi  le  canevas  d'une 
vaste  et  curieuse  encyclopédie  bretonne  ? 

Vous  montrerai-je  trouvant  dans  votre  labeur  incessant  cet  aiguil- 
lon irrésistible  :  l'attrait,  que  décuple  votre  prodigieuse  mémoire  ? 

Serait-ce  par  hasard  à  cette  faculté  si  développée,  qu'en  véritable 
Protée  littéraire,  vous  emprunteriez  ces  genres  divers  où  vous  excel- 
lez :  classique  ou  académique  le  matin,  romantique  à  une  autre  heure, 
et  réaliste. . .  par  occasion  ? 

N'est-ce  point  là  simplement  l'indice  de  votre  exubérance  artisti- 
que ;  car,  par-dessus  tout,  vous  êtes  artiste  ;  artiste  dans  la  plus  large, 
dans  la  meilleure  acception  du  terme. 

Où  prenez-vous,  en  effet,  le  temps  d'entretenir  votre  délicieux 
crayon,  origine  et  cause  de  votre  critique  incontestée  dans  ce  vivi- 
fiant domaine  de  la  peinture  et  de  la  sculpture  ? 

Enfin,  j'ai  failli  l'oublier,  à  quel  moment,  de  grâce,  pouvez-vous  ba- 
diner avec  la  plus  rieuse  des  muses,  puisque  (l'indiscrétion  me 
coûte)  la  poésie  légère  vous  retient  encore  à  ses  genoux  ? 

J'avais  raison,  vous  le  voyez,  de  prétendre  naguère  que  vous  aviez 
résolu  le  problème  étrange  d'associer  une  rare  universalité  à  tout  un 
monde  de  spécialités. 


—    XL1X    — 

Je  vous  écoutais  â  l'instant  dans  le  compte  rendu  si  complet  des 
fertiles  années  de  votre  présidence,  et  mon  esprit,  je  l'avoue,  flottait 
entre  l'attention  due  à  vos  paroles  et  la  crainte  de  vous  voir  épuiser 
le  sujet  :  je  comptais  sans  votre  modestie. 

Elie  vous  a  fait  laisser  dans  une  ombre  regrettable  quelques  points 
de  détail;  je  vous  remercie  de  me  fournir  de  la  sorte  la  possibilité  de 
glaner  sur  votre  propre  terrain  ;  il  y  va,  à  mon  sens,  de  l'intérêt  gé- 
néral de  notre  attentif  auditoire. 

Vous  souvient-il,  cher  maître,  je  n'oserais  l'affirmer,  du  magnifi- 
que et  trop  rapide  coup  d'oeil  jeté  par  vous  sur  l'ensemble  des  "tra- 
vaux archéologiques  accomplis,  ou  à  la  veille  de  se  produire,  au 
moment  où  vous  receviez  ici  le  gouvernail   de  notre   chère  Société  ? 

Vous  souvient-il  de  la  bonhomie  avec  laquelle,  aplanissant  les  obs- 
tacles, combattant  les  préjugés,  semant  même  de  fleurs  les  routes  de 
l'Oratoire,  vous  invitiez  à  grossir  nos  rangs  tous  les  hommes  de 
bonne  volonté,  jeunes  ou  l'ayant  été,  oisifs  ou  non,  savants  ou  désireux 
d'apprendre  ? 

Quel  joli  tableau  vous  avez  exposé  ce  jour-là?...  Que  d'érudition 
vraie,  que  de  trésors  de  lecture,  de  réflexion  et  d' à-propos  amoncelés 
dans  ces  pages  synoptiques  !  que  de  savoir-faire,  entre  nous,  dans 
cette  leçon  substantielle  et  concise  ! 

Je  l'ai  souvent  relue  ;  je  la  relis  toujours  avec  plaisir,  et  toujours  il 
me  paraît  également  présomptueux  de  prétendre  à  mieux  dire,  ou 
aussi  bien  que  vous. 

Ce  morceau  de  genre  est  une  petite  perle  ;  en  la  retirant  de  son 
écrin  pour  la  réunir  à  sa  sœur  cadette,  votre  revue  bénédictine  de 
tout  à  l'heure,  je  dois  avoir  cédé  à  une  heureuse  inspiration;  toutes 
deux  sont  inséparables,  en  effet,  et  leur  place  est  indiquée  d'avance  en 
tête  de  votre  premier  volume  de  mélanges  où  les  abritera  cet  exergue 
créé  pour  elles  :  «  Multa  paucis.  » 

Parlez-vous  comme  vous  écrivez  ?. . .  J'inclinerais  â  le  croire  ;  car> 
si  votre  plume  enfante  des  modèles,  vous  possédez  le  secret  de  ces 
conférences  originales  et  nourries  dont,  sans  contredit,  vous  êtes, 
parmi  nous,  le  principal  dispensateur. 

Pour  avoir  revêtu  fréquemment  cette  forme  familière,  votre 
coopération  aux  travaux  de  notre  Compagnie  n'en  a  été  que  plus  ac- 
tive. 

Vous  avez,  je  le  répète,  le  don  de  la  causerie,  de  celle  de  bon  aloi, 

d 


—    L    — 

«le  la  causerie  profitable  :  si  ce  mot  a  vieilli,  il  rend  ma  pensée,  et 
j'appliquerais  volontiers  à  vos  dissertations  habituelles  sur  l'archéolo- 
gie ce  vers  connu  de  Boileau  : 

«  C'est  avoir  profité  que  de  savoir  s'y  plaire  (*).  » 

D'ailleurs,  Messieurs  et  chers  Collègues,  n'est  pas  causeur  qui  veut, 
hélas  !  Ce  charmant  talent  n'est  plus  guère  de  notre  temps,  et  bien 
qu'il  réclame  un  régime  d'exception,  il  n'en  faut  pas  moins  remonter 
à  cent  ans  et  au  delà  en  arrière,  pour  le  retrouver  dans  son  plein  épa- 
nouissement. 

Alors,  savoir  causer  n'était  pas  le  contingent  accidentel  d'une  bonne 
éducation  française,  c'en  était  surtout  le  signe,  le  complément  obli- 
gatoire, selon  l'expression  à  la  mode  aujourd'hui  ;  aussi,  quand  un 
étranger,  après  avoir  séjourné  dans  notre  beau  pays,  se  prenait  à 
citer  un  homme  à  la  fois  poli  et  agréable  causeur,  a  écrit  quelque 
part  Sainte-Beuve,  tenez  pour  certain  qu'il  s'agissait  d'un  Français  ; 
d'une  de  ces  «  merveilles  de  la  création  » ,  se  fût  lyriquement  ex- 
clamé lord  Stanhope,  devant  qui  tous  nos  bons  aïeux  eussent  trouvé 
grâce  s'il  eussent  possédé  : 

»  ...  Un  grain  du  sens  pratique  dévolu  aux  races  du  Nord .'...  » 

Le  mot,  vous  le  sentez,  trahit  son  origine  ;  il  n'est  pas  sans  malice, 
mais  nous  aurions  tort,  peut-être,  de  déclarer  qu'il  porte  complète- 
ment à  faux. 

Eh  bien!  ce  petit  «  grain  pratique  »,  c'est  encore  votre  lot,  cher 
baron  de  Wismes  ! 

Il  a  franchi  avec  vous  les  sévères  portiques  de  notre  grave  Sor- 
bonne?  et  si  vous  y  avez  lu  et  causé  «  merveilleusement  »,  vous  avez 
largement  contribué,  ainsi  que  MM.  René  Kerviler,  Gahour  et  Marion- 
neau,  à  nous  rapporter  de  précieux  titres  de  noblesse  :  la  médaille  ôt 
le  grand  prix  de  mille  francs  ! . . . 

Évoquer  ce  souvenir,  et  maîtriser  la  tentation  de  résumer  ces  in- 
comparables découvertes,  effectuées  sous  le  patronage  de  notre  So- 
ciété, pendant  les  années  1875  et  1876  ;  garder  le  silence  sur  ces  noms 
hautement  réputés  aujourd'hui,  et  demain  célèbres,  à  coup  sûr, 
Messieurs  et  chers  Collègues,  c'est  pour  moi,  je  ne  le  cache  pas,  faire 

OSat.  litt. 


—   LI    — 

de  nécessité  vertu,  mais  ce  soin  particulier  appartenait  en  propre  à  M 
le    baron  de   Wismes. 

Car,  de  ce  concours  de  1877,  de  ces  luttes  courtoises  auxquelles  du 
moins  je  puis  ici  me  permettre  une  allusion,  notre  savant  Président 
est  revenu  chargé  de  dépouilles  opimes  arrachées  par  lui  au  tumulus 
"des  trois  Squelettes». 

Il  a  bien  voulu  nous  le  rappeler,  il  n'y  a  qu'un  moment,  pour  satis- 
faire à  d'impartiales  exigences  de  situation. 

Il  était  donc  strictement  juste  que  sa  voix  si  compétente  vînt  sup- 
pléer la  mienne,  et  répondre  à  vos  désirs  en  retraçant  cette  phase  bril- 
lante de  nos  annales. 

L'historique  de  ces  mémorables  fouilles  de  Pornic  vous  est  sans  doute 
connu. 

Il  est  inséré  in  extenso  dans  le  tome  XVe  de  notre  Bulletin,  et  parti- 
cipe à  la  valeur  réellement  exceptionnelle  de  ce  magnifique  volume  (*). 
Je  n'analyserai  pas  ce  document,  dont  l'éminent  M.  Ghabouillet  a 
tenu  à  constater  l'importance  en  termes  décisifs  et  élogieux  (**).  Je 
dirai  simplement  qu'à  la  clarté  du  style,  à  l'attachement,  à  l'émotion 
qu'inspire  son  récit,  M.  le  baron  de  Wismes  a  su  joindre  cette  modéra- 
tion conjecturale  à  peu  près  inconnue  aux  premiers  adeptes  du  pré- 
historique. Et  en  cela,  l'auteur  n'est  pas  seulement  resté  fidèle  aux 
lois  de  notre  époque,  qui,  on  le  sait,  excluent  impitoyablement  les 
théories  préconçues  ou  spéculatives;  il  s'est  aussi  arrêté,  bien  involon- 
tairement, j'imagine,  devant  les  obstacles  quasi  infranchissables  que 
rencontrent  les  explorateurs  de  nos  mégalithes. 

L'objet  de  leurs  investigations  minutieuses  ne  saurait  effectivement 
se  limiter  à  la  description  de  la  construction  proprement  dite,  et  du 
mobilier  funéraire  qu'elle  renferme  :  il  est  facile  d'obtenir  ce  premier 
résultat  ;  mais  il  est  autrement  ardu  de  statuer  sur  l'origine,  sur  l'âge 
des  dolmens,  sur  leur  dispersion  singulière  en  des  régions  si  éloignées 
les  unes  des  autres,  si  dénuées  à  l'époque  de  moyens  de  communica- 
tions ;  et,  chose  plus  étonnante,  sur  les  ressemblances  indiscutables  of- 
fertes par  ces  mystérieux  édifices. 


(*)  Lire  notamment  les  mémoires  de  premier  ordre  de  MM.  l'abbé  Cabour:  Baptistère 
primitif  delà  cathédrale  de  Nantes;  René  P.-Kerviler:  le  Port  de  S'-Nazaire  ;  Cb.  Marion- 
neau  :  Collection  archéologique  de  Vertou,  etc.,  etc. 

(**)  Bulletin,  tome  J7;  1"  et  2<  sem.  1878. 


—  lu  — 

A  ces  questions  pendantes,  et  j'en  passe  avec  intention,  que  d'hypo- 
thèses opposées  ! 

Pour  quelques-uns  le  hasard  a  tout  fait;  —le  jugement  ici  est  un 
pou  sommaire  ;  —  pour  d'autres,  il  y  a  dans  ce  phénomène  architectu- 
ral la  manifestation  d'une  même  conception  issue  des  analogies  de 
l'intelligence  humaine,  et  apparaissant  en  temps  voulu,  malgré  la  dif- 
férence des  milieux,  la  variété  des  circonstances;  —  ceux-ci  attrihuent 
la  distribution  incohérente  des  mégalithes  tantôt  aux  migrations,  tan- 
tôt au  refoulement  d'un  peuple  unique,  la  souche  Noômique,  peut-être; 
ceux-là,  et  M.  de  Mortillet  à  leur  tête,  je  crois,  protestent  avec  force 
raisons  contre  la  valeur  ethnologique  de  ces  monuments,  et  y  trouvent 
non  l'œuvre  d'une  nation  voyageant  à  travers  les  agglomérations  pri- 
mitives sans  rien  perdre  de  ses  mœurs  et  de  ses  habitudes  propres, 
mais  la  résultante  du  développement  progressif  d'une  civilisation  com- 
municative. 

En  définitive  et  jusqu'à  ce  jour,  soit  que  notre  imagination  se  com- 
plaise â  entasser  les  siècles  sur  ces  pierres  témoins  de  la  période 
néolithique;  soit  que  nous  nous  perdions  à  la  recherche  de  la  race  qui 
a  pu  jeter  un  pareil  défi  à  sa  postérité  ;  soit  qu'avec  M.  Fergusson  nous 
adoptions  l'opinion  que  les  mégalithes  sont  de  date  relativement 
récente  ;  plus  nous  cherchons  la  certitude,  plus  l'obscurité  redou- 
ble.— Quel  que  soit  le  talent  des  adversaires  dans  ce  nébuleux  débat, 
la  contradiction  y  règne  en  souveraine  maîtresse  et  rend  impossible 
toute  généralisation    synthétique., 

Les  signes  lapidaires  nous  dévoileront-ils  le  premier  ou  le  dernier 
mot  de  l'énigme? 

Aurons-nous  cette  heureuse  fortune  d'avoir  découvert  un  guide  se- 
courable  dans  ce  nouveau  fil  d'Ariane  tissé  de  vieux  Phénicien,  dont 
M.  le  baron  de  Wismes  caressait  amoureusement  tout  à  l'heure  la 
trame,  hélas!  si  fragile?...  ou  devrons-nous,  à  bout  d'efforts,  ins- 
crire au  fronton  de  nos  dolmens  le  sinistre  avertissement  que  le  chan- 
tre immortel  de  la  Divine  Comédie  plaçait  aux  portes    de  l'Enfer  ?. . . 

C'est  là,  Messieurs,  un  des  secrets  de  l'avenir  ;  mais,  écartons  ce 
soir  les  présages  lugubres  ;  comme  l'Enfer,  d'ailleurs,  les  pierres  des 
vieux  âges  sont  probablement  remplies  d'excellentes  intentions...  es- 
pérons-le ;  l'espérance  est  douce  à  l'archéologue,  le  doute  pénible  et 
votre  Président  n'a  qualité  ici   que  pour  encourager. 

Mettez-vous  donc  à  l'œuvre,  Messieurs  et  chers  Collègues,  ou  plutôt, 


—  LUI  — 

assurés  de  nombreux  lendemains  (ce  souhait  m'est  bien  permis) ,  con- 
tinuez à  nous  apporter  ces  matériaux  divers  que  votre  prévoyance 
éclairée  sauve  de  l'oubli  ou  préserve  des  injures  du  temps.  —  Ne  vous 
contentez  pas  d'assister  à  nos  séances,  veuillez  aussi  faire  une  bonne 
propagande  en  faveur  de  cette  maison  hospitalière. 

«  Les  sages  de  l'antiquité,  rapporte  Montesquieu,  recevaient 
«  leurs  disciples  sans  examen  et  sans  choix  ;  ils  croyaient  que 
«  pour  être  philosophe,  c'était  assez  d'avoir  du  goût  pour  la 
«  philosophie.  » 

Eh  bien  !  Messieurs,  imitez  les  sages  de  l'antiquité  ;  vous  pourriez 
rencontrer  de  moins  bons  modèles. 

Essayez  pour  l'archéologie  ce  qui  a  donné  de  si  bons  résultats  pour 
la  philosophie  ;  puis,  car  il  faut  tout  prévoir,  passez  au  besoin  con- 
damnation sur  le  goût  .-  cette  faculté  est  perfectible  et  se  modifie  avec 
le  temps  et  l'exemple. 

Invitez  donc,  sans  y  regarder  de  trop  près,  invitefc  vos  amis  à  venir 
parmi  nous. 

Ils  y  trouveront  un  délassement  salutaire,  après  les  fatigues  et  les 
mécomptes  de  la  lutte  quotidienne  pour  la  vie  ;  en  maniant  avec  nous 
cette  poussière,  ces  vestiges  des  générations  d'autrefois,  ils  y  gagne- 
ront peut-être  de  voir  d'un  peu  plus  haut  les  misères  et  la  fragilité  de 
l'humaine  espèce,  et,  à  ce  petit  sentiment  d'aigreur  né  du  froissement 
de  bien  des  intérêts,  succédera  dans  leur  cœur  cette  propension  à 
l'indulgence,  aux  concessions,  sans  laquelle  l'homme  s'isole,  puis  dé- 
choit, et,  selon  la  mélancolique  pensée  de  Pascal,  «  reste  égaré  dans 
ce  canton  détourné  de  la  nature.  » 

Vte  J.  DE  LA  LAURENCIE. 


LE  CABINET  DE  TRAVAIL 


D'UN   SEIGNEUR    BRETON,    EN    1625 


(SAMUEL  D'AVAUGOUR,  SEIGNEUR  DE  SAFFRÉ) 


armi  les  nombreux  historiens  qui  étudient  et 
s'efforcent  de  mettre  en  lumière  tous  les  souvenirs 
et  les  nombreux  vestiges  du  passé,  la  plupart  s'at- 
tachent à  reproduire  les  grandes  lignes,  les  faits 
principaux  de  notre  histoire  nationale  et  s'occupent 
souvent  fort  peu  du  côté  intime  de  la  vie  de  nos  ancêtres. 
Or,  s'il  ne  peut  rentrer  dans  le  cadre  d'un  grand 
historien  de  rechercher  tous  les  détails  de  notre  histoire 
locale,  ou  la  vie  domestique  de  nos  aïeux  ;  ce  doit  être  en 
revanche,  il  me  semble,  un  devoir  pour  nous  autres  archéo- 
logues de  ne  rien  négliger  pour  faire  connaître  tant  de  faits 
nouveaux  et  intéressants  qui  appartiennent  aussi  bien  à  l'ar- 
chéologie qu'à  l'histoire,  et  en  sont  toujours  le  complément 
aussi  indispensable  que  naturel. 

Que  de  notions  curieuses  ne  pouvons-nous  pas,  en  effet, 
trouver  dans  la  description  d'un  château  du  Moyen-Age  ou  des 
objets  qui  servaient  journellement  à  nos  pères?  Il  y  a  là  toute 
une  série  de  découvertes  et  d'études  à  faire,  et  c'est  à  ce  point 
de  vue  que  je  présenterai  aujourd'hui  ce  petit  travail,  qui 
pourra  donner  une  idée  du  genre  de  vie  et  des  occupations 
1881  i 


quotidiennes  d'un  grand  seigneur  au  commencement  du 
XVII'  siècle. 

En  compulsant,  il  y  a  quelque  temps,  les  magnifiques 
archives  de  la  Châtellenie  de  Saffré,  que  son  aimable  proprié- 
taire, M.  Bretaud-Billou,  avait  eu  l'obligeance  de  mettre  à 
ma  disposition,  je  découvris  dans  les  intéressants  Dials  de  la 
Châtellenie  un  grand  nombre  de  notes  curieuses  sur  ses 
anciens  seigneurs,  et  en  particulier  sur  l'importante  famille 
d'Avaugour. 

L'une  d'entre  elles  fera  le  sujet  de  cette  courte  notice. 

La  seigneurie  de  Saffré,  ancienne  bannière  du  comté  nan- 
tais, appartint  à  l'origine  à  des  seigneurs  qui  en  portaient  le 
nom.  Messire  Alain  de  Saffré  la  possédait  en  1220,  et  en  1360 
nous  la  voyons  entre  les  mains  de  Foulques  de  Saffré,  marié 
à  Philippote  de  Laval,  dont  le  fils,  Alain  III  de  Saffré,  épousa 
l'héritière  de  Sion.  —  Les  sires  de  Saffré  portaient  pour 
armes  :  d'azur  à  trois  croizettes  fleurdelysées  d'or  au  chef  de 
même,  d'après  un  sceau  de  1395  (1).  —  Elle  passa  ensuite 
successivement  dans  l'importante  maison  <le  Tournemine 
(armes  :  Ecartelé  d'or  et  d'azur.  Devise  :  Aultre  n'auray)  (2) 
par  le  mariage  de  Jeanne  de  Saffré  avec  Jean  II  de  Tourne- 
mine  vers  1406  ;  dans  celle  d'Annebaud  (armes  :  de  gueules 
à  la  croix  de  vair)  (3)  par  le  mariage  de  Claude  d'Annebaud, 
amiral  de  France,  ami  et  confident  du  roi  François  Ier,  avec 
Françoise  de  Tournemine,  dame  de  la  Hunaudaye,  en  1527; 
—  puis  dans  celle  de -Laval,  par  suite  de  l'échange  que  Jean 
de  Laval,  frère  aîné  de  Pierre  de  Laval,  seigneur  de  Monta- 
filaut,  premier  mari  de  Françoise  de  Tournemine,  dame  de  la 
Hunaudaye,  fit,  le  11  avril  1542,  de  la  terre  des  Huguetières 
au  duché  de  Retz,  avec  celle  de  Saffré,  dont  il  avait  déjà 
l'usufruit  depuis  la  mort  de  son  frère  (4).  Mais  cette  dernière 
maison  ne  la  garda  pas  longtemps,  car  Jean  de  Laval,  devenu 


(1)  Potier  de  Courcy,  Armoriai  de  Bretagne,  t.  II. 

(2)  Idem. 

(3)  P.  Anselme.  Dictionnaire  de  la  Noblesse. 

(4)  Titres  de  Saffré. 


—  3  — 

propriétaire  de  Saffré  au  commencement  de  1542,  céda  cette 
terre  par  contrat  du  5  juin  de  la  même  année  «  à  Hault  et 
Puissant  Seigneur,  Messire  Loys  d'Avaugour,  seigneur  de 
Kergroays,  Vay,  le  Bois-Rouaud,  etc.  » 

A  cette  époque,  les  guerres  de  religion  menaçaient  de 
plonger  la  France  dans  une  complète  anarchie,  et  ce  ne  fut 
pas  sans  vicissitudes  que  les  sires  d'Avaugour,  alors  protes- 
tants fanatiques,  parvinrent  à  sauvegarder  leur  importante 
châtellenie.  —  A  la  fin  de  mars  1590,  le  prince  de  Dombes  qui 
venait  de  prendre  Châteaubriant,  assiégea  et  prit  en  quelques 
jours  le  château  de  Saffré.  Trois  ans  plus  tard,  en  1593,  il  dut 
subir  encore  une  garnison,  composée  de  quinze  hommes 
d'armes  que  le  duc  de  Mercceur  avait  envoyés  pour  l'occuper 
et  qui  y  vécurent  pendant  plusieurs  mois  au  dépens  des  reve- 
nus et  des  produits  des  terres  (1).  —  Néanmoins,  en  1599, 
après  l'abjuration  d'Henri  IV  et  son  passage  à  Nantes,  Messire 
Charles  d'Avaugour,  fils  de  René  d'Avaugour  et  de  Renée  de 
Plouër  et  petit-fils  de  Louis  d'Avaugour,  acquéreur  de  Saffré, 
quitta  le  château  de  Beauvoir  en  Bas  Poitou,  dont  il  avait 
été  nommé  gouverneur  après  la  prise  de  cette  place  par  le  roi 
de  Navarre  en  1588  et  vint  fixer  sa  principale  résidence  au 
château  de  Saffré  (2).  —  Il  put  alors  lui  donner  tous  ses 
soins  et  laisser  plus  tard  à  sa  mort,  au  mois  d'août  1613, 
cette  belle  terre  en  assez  bon  état ,  comme  nous  l'indiquent 
les  nombreux  baux  et  marchés  transcrits  au  Dial  de  cette 
époque. 

Il  eut  pour  héritier  son  fils  aîné,  haut  et  puissant  seigneur, 
messire  Samuel  d'Avaugour,  alors  sous  la  tutelle  de  sa  mère 
dame  Renée  de  la  Chapelle.  — Nous  savons,  par  le  témoignage 
de  ses  contemporains,  qu'à  peine  âgé  de  vingt-deux  ans, 
celui-ci  était  déjà  un  vaillant  guerrier  et  un  habile  straté- 
giste.  Louis  XIII  lui  ayant  confié,  le  10  avril  1622,  la  mission 


(1)  Bibliothèque  de  Nantes.  —  Notes  sur  l'arrondissement  de  Châteaubriant, 
recueillies  par  MM.  Verger  et  Chevas  en  1846. 

(2)  Annuaire  de  la  Société  d'Emulation  de  la  Vendée,  année  1860.  —  L'Ile  de 
Riez,  par  M.  Mourain  fie  Sourdeval. 


de  diriger  les  travaux  d'occupation  et  de  défense  de  l'ile  de 
Riez  en  Poitou,  dans  son  expédition  contre  le  prince  Benja- 
min de  Rohan-Soubise,  il  s'en  acquitta  si  bien,  que  ce  fut 
en  grande  partie  grâce  à  ses  conseils  et  à  son  habileté  que  le 
roi  réussit  dans  son  attaque  (1). 

Or  c'est  la  description  du  cabinet  de  travail  de  ce  dernier- 
seigneur  que  nous  donne  noble  homme  Pierre  Hamon,  notaire 
de  la  juridiction  de  Satfré,  et  c'est  de  lui  que  nous  nous  occu- 
perons spécialement  aujourd'hui. 

Issu  d'une  des  plus  puissantes  familles  de  Bretagne,  messire 
Samuel  d'Avaugour,  seigneur  de  Saffré,  Vay,  Kergroays,  le 
Bois-Rouaud,  etc. ,  appartenait  à  la  branche  des  seigneurs  de 
Courtalain,  du  nom  d'Avaugour,  puisnés  de  la  branche  du 
Parc,  qui  tirait  son  origine  de  Guillaume  d'Avaugour,  sei- 
gneur du  Parc,  frère  de  Henri,  quatrième  du  nom,  baron 
d'Avaugour,  comte  de  Penthièvre,  et  troisième  fils  de  Henri, 
troisième  baron  d'Avaugour,  et  de  Marie  de  Brienne,  dame 
de  Beaumont  (2). 

Bien  que  le  rôle  de  réformation  de  la  Noblesse  de  1668,  au 
rapport  de  M.  de  la  Bourdonnays,  le  fasse  mourir  jeune,  il 
put  cependant  jouir  plusieurs  années  de  la  seigneurie  de 
Saffré,  et  s'y  faire  hautement  estimer  de  ses  voisins  et  de  ses 
vassaux.  Nous  voyons  en  effet  figurer  son  nom  en  tête  des 
actes  inscrits  au  Dial  depuis  le  14  juin  1620,  jusqu'au 
16  mars  1633,  c'est-à-dire  pendant  une  période  de  treize  ans. 
Il  vécut  donc  au  moins  jusqu'à  l'âge  de  trente-deux;  car 
nous  savons  qu'il  resta  sous  la  tutelle  de  sa  mère  Renée 
de  la  Chapelle,  depuis  la  mort  de  son  père  en  1613  jusqu'à  sa 
majorité  en  1620,  époque  à  laquelle  nous  trouvons  pour  la 
dernière  fois  dans  le  Dial,  des  aveux  rendus  à  la  dame 
de  la  Roche-Giffart.  Ce  ne  fut  qu'alors  qu'il  put  entrer  en 
possession  de  ses   domaines.  Quoi  qu'il  en  soit ,  au    mois 


(1)  Dictionnaire  de  la  Société  d'Emulation  de  la  Vendée,  A.  1860.  —  L'Ile  ds 
Riez,  par  M.  Mourain  de  Sourdeval.  — 

(2)  Réformation  de  1"  Noblesse  de  Bretagne.  Tome  I. 


d'avril  1625,  Samuel  d'Avaugour  résidait  à  son  château  de 
Saffré,  et  voici  la  curieuse  description  de  son  cabinet  de  tra- 
vail que  nous  donne  le  Dial  de  cette  année. 

Mémoire  et  description  de  ce  qui  se  trouve  dans  le  cabinet 
hault  et  puissant  seigneur  monsieur  Samuel  d'Avaugour, 
chevalier,  seigneur  de  Kergroays,  Vay,  Saffré,  etc.  Le  26me 
d'avril  1625  : 

En  premier  : 

Une  grande  arquebuse  de  quatre  à  cinq  pieds. 

Une  aultre  de  trois  pieds. 

Une  petite  escopette  et  ung  pistolet. 

Une  petite  carabine. 

Une  grande  arquebuse  de  huict  pieds  de  long  à  pans. 

Ung  pistolet  fort  petit,  façon  de  Vitré. 

Une  autre  grande  arquebuse  de  six  pieds. 

Une  arquebuse  de  cinq  pieds  à  pans. 

Une  aultre  ayant  le  canon  tout  à  brins  de  jour  et  à  la  façon 
des  fabricants  de  Châteaubriant. 

Plus  deux  canons,  l'un  rond  avec  un  fil  de  long,  l'aultre  à 
pans. 

Neufs  vieilles  arquebuses  de  quatre  à  cinq  pieds,  dont  le 
page  en  a  une,  le  cavalier  une  aultre. 

Six  carabines  neufves,  à  la  façon  des  fabriques  de  Châ- 
teaubriant. 

Une  grosse  carabine  à  pans. 

Trois  vieilles  carabines  dont  Beaulieu  (l'un  des  notaires  de 
la  juridiction  de  Saffré)  en  a  une. 

Trois  petites  escopettes  dont  il  y  a  deux  vieilles  et  une 
neufve,  façon  de  Sedan. 

Quatre  paires  de  pistolets,  savoir  :  Une  paire  de  Vitré,  à 
demy  pan  et  demy  rond,  aveg  deux  fourneaux  de  cuivre,  sans 
escarcelles.  —  Deux  paires ,  façon  de  Sedan,  l'une  estant  plus 
petite  que  l'autre,  à  fourneau  et  canon  noir;  l'autre  paire 
estant  plus  grande,  sans  coullant,  à  canon  rond  avecq  le  four- 
neau de  cuivre  et  des  escarcelles.  —  Une  autre  paire  à  canon 
rond  avecq  les  fourneaux  et  escarcelles. 


—  6  — 

11  y  a  en  oultre  lesdites  quatre  paires  :  Une  aultre  pistolet 
de  chasse,  façon  des  Essards,  avec  son  fourneau  de  cuivre,  et 
ung  petit  pistolet  de  poche. 

Neufs  mails  de  cinq  luires,  plus  ung  mail. 

Trois  grands  gresliers  et  celui  de  Monseigneur. 

Ung  autre  petit  greslier. 

Le  bâton  de  chasse  de  Monseigneur. 

Quatre  lances;  l'une  dorée  à  fleurs;  l'autre  verte  avec  des 
lou  (sic);  l'aultre  verte  à  fleurs;  l'aultre  de  bois  simple- 
ment. 

Trois  bastons  pour  tenir  la  bague. 

Un  grand  coutelas  d'assier  de  Damas,  avecq  des  gardons 
argentés,  ciselés,  façon  de  Potin  (1). 

Une  espée  de  chasse,  la  garde  de  bronze  et  d'argent  doré, 
façon  de  Durtal. 

Une  espée  de  deuil,  dont  monseigneur  de  Chavagnes  (2)  a 
donné  la  lance  qui  a  esté  montée  à  garde  de  deuil,  façon  à  la 
Bouteville. 

Une  grande  espée  de  duel  à  coquille  noire. 

Une  espée  à  garde  de  Milan,  montée  par  Potin,  à  Paris.  — 

Une  espée  à  paroids  dorés  de  Hollande. 

Une  petite  espée  de  Hollande,  argentée  vive,  donnée  par 
Monseigneur  de  Mauves  (3). 

Une  espée  noire. 

Une  espée  dorée  toute  vive,  donnée  par  Monseigneur  de 
Lesparre  (4). 


(1)  Célèbre  armurier  de  l'époque. 

(2)  Joachim  Descartes,  conseiller  au  parlement,  seigneur  de  Chavagnes,  en  Sucé. 
Armes  :  d'argent  au  sautoir  de  sable  accompagné  de  4  palmes  de  sinople. — 

(3)  Pierre  de  Catinat,  conseiller  au  parlement  de  Paris,  seigneur  de  Mauves,  au 
diocèse  de  Séez,  ancienne  Seigneurie  des  comtes  de  Mortagne.  Armes  :  d'argent  à  In 
croix  de  gueules,  chargée  de  9  coquilles  d'or.  —  (P.  Anselme,  dict.  de  la  Noblesse, 
tome  IX,  p.  652).  — 

(4)  Antoine  II  de  Grammont,  fils  de  Philibert  de    Grammont  et  de  Diane  d'An- 
douins,  dite  la  belle  Corisande,  baron  de  Lesparre,  chevalier  des  ordres  du  Roi,  vice- 
roi  de  Navarre,   gouverneur  et  maire  perpétuel  de  Bayonne,  créé  duc  et  pair  le  13 
décembre  1643,  mort  en  août  1644.  —  (P.  Anselme,  Dict.  de  la  Noblesse,  tome  VII 
p.  390).  — 


_  7  — 

Une  espée  ordinaire  à  coquille  noire. 

Une  aultre  espée  argentée  à  munie  de  lion. 

Une  espée  damasquinée,  avecq  argent  en  rapport,  donnée 
par  monseigneur  de  Crapado,  seigneur  de  l'Echasse  (5). 

En  deuxième  : 

Un  luth,  avecq  son  étui  fermant  à  clef. 

Deux  globes  et  une  sphère. 

Un  pupitre  fermant  à  clef. 

Un  damier  avecq  les  dames. 

Ung  grand  cabinet  vert  où  il  y  a  de  très  grandes  armoires 
à  trois  étages. 

Ung  cabinet  de  sapin  à  deux  grandes  fenestres. 

Ung  petit  cabinet  d'Allemagne. 

Quatorze  boulles  de  monseigneur. 

Ung  jeu  de  quilles  avecq  ses  boulles. 

Un  coffre  bahut. 

Quatre  escabeaux  brisés,  couverts  de  cariges  blancs,  avecq 
de  grands  luisants  rouges  et  bleus. 

Deux  chaises  brisées,  couvertes  de  mesme  étoffe  que  lesdits 
escabeaux. 

Ung  escran. 

Une  grande  escritoire  dorée,  avecq  sa  couverture  de  crin 
rouge,  doublée  de  serge. 

Une  boiste  de  sapin  à  mettre  les  triés. 

Une  table  avecq  ung  tapis  et  ung  aultre  tapis  de  cuir  par 
dessus. 

Ung  lict  en  serge  bleue  avecq  ung  grand  luisant  rouge  et 
bleu  ;  une  couverte  bordant. 

Une  aultre  couverte  catalane  blanche  avecq  un  lict  dessous, 
garni  d'une  couverte  blanche. 

Ung  matelas  et  une  paillasse. 


(5)  François  Angier,  baron  de  Crapado  et  de  Lohéac,  seigneur  de  l'Echasse  et  de 
la  Chauvelière,  marié  à  D.  Renée  de  la  Corbinaye.  Armes  :  écartelé  au  premier  et 
dernier  quartier  d'argent  vairé  d'azur,  qui  est  Angier  ;  aux  2  et  3  de  gueules  à  la 
i:roix  d'argent,  qui  est  Corbinaye.  —  (Vitraux  de  l'église  He  Joué  en  i 76 i ,  par  M.  l'abbe 
Ouillotin  rie  Corson.)  — 


_  8  — 

Lue  petite  table  sur  laquelle  on  met  les  manteaux  avecq 
ung  tapis  vert,  jaune  et  rouge.  » 

Tel  était  l'ameublement  du  cabinet  du  sire  de  Saffré  en 
1625.  —  A  première  vue,  bien  des  gens  pourraient  peut-être 
demeurer  fort  surpris  à  la  lecture  d'un  semblable  inventaire. 
Peut-être  même  seraient-ils  tentés  d'y  voir  la  description  d'un 
petit  arsenal,  plutôt  que  celle  d'un  cabinet  de  travail  ;  cepen- 
dant il  n'y  a  point  lieu  de  s'en  étonner  si  l'on  se  rappelle  qu'à 
cette  époque,  tout  seigneur  faisait  pour  ainsi  dire  sa  vie  du 
métier  des  armes,  et  que  les  guerres  religieuses  de  la  fin  du 
XVIe  et  du  commencement  du  XVIIe  siècle  vinrent  apporter 
un  regain  d'humeur  guerrière  à  tous  ceux  que  leur  rang 
élevé  mettait  dans  la  nécessité  de  prendre  fait  et  cause  pour 
un  parti. 

Pour  nous,  cette  description  devient  une  source  de  rensei- 
gnements qui  ne  sont  pas  sans  valeur.  —  Si  les  armes  de  ce 
temps  n'avaient  pas  la  perfection  de  celles  de  nos  jours,  du 
moins  elles  ne  le  leur  cédaient  en  rien  pour  le  fini  du  travail 
et  la  trempe  du  métal.  Les  lames  de  Milan  et  de  Tolède  étaient 
renommées  dans  toute  l'Europe,  et  la  nomenclature  du  Dial  de 
Saffré  nous  montre  que  Samuel  d'Avaugour  possédait  dans 
sa  panoplie  les  meilleures  armes  de  son  temps. 

Les  arquebuses  qui  y  figurent  au  nombre  de  dix-sept,  et  les 
escopettes  au  nombre  de  quatre,  étaient  les  armes  les  plus 
usitées  sous  les  règnes  d'Henri  IV  et  de  Louis  XIII.  L'arque- 
buse se  faisait  partir  avec  une  mèche  ou  un  rouet  se  bandant 
avec  une  clef,  et  pouvait  lancer  1  once  7/8  de  plomb,  avec 
autant  de  poudre.  —  L'escopette  qui  portait  généralement 
à  cinq  cents  pas,  n'était  qu'un  genre  d'arquebuse  perfectionné; 
elle  se  mettait,  le  plus  souvent,  en  bandoulière,  et  servit  beau- 
coup sous  Henri  IV  à  l'armement  de  la  cavalerie  française. 
Mais  les  carabines  surtout,  qui  n'y  sont  point  oubliées,  étaient 
encore  presque  une  nouveauté.  Elles  inauguraient  alors  les 
svstèmes  de  fusils  à  canon  rave,  et  leur  nom  lui-même,  tiré 
du  radical  arabe  «  Karab,  l'arme  par  excellence,  »  indique 
assez  quel  prix  on  y  attachait.  —  Bien  que  messire  Samuel 


—  9  — 

d'Avaugour  en  possédât  onze,  il  est  probable  qu'elles  de- 
vaient être  encore  assez  rares  chez  les  châtelains  de  cette 
époque.  — Quant  aux  quatre  grêliers  indiqués,  c'étaient  d'an- 
ciennes pièces  d'artillerie  qu'on  chargeait  de  balles  et  de 
ferrailles.  Il  est  vraisemblable  qu'elles  étaient  destinées  à  la 
défense  du  château,  et  servirent  à  cet  usage  lorsqu'il  fut 
assiégé  en  1590. 

Enfin,  il  n'est  peut-être  pas  sans  intérêt  de  savoir  aussi, 
grâce  à  cet  inventaire,  à  quelles  fabriques  d'armes  s'appro- 
visionnaient nos  seigneurs  bretons.  On  aime  à  se  rappeler 
que  deux  villes  bretonnes,  Châteaubriant  et  Vitré,  avaient  su 
acquérir  une  juste  réputation  pour  leurs  fabriques  d'armes, 
tandis  que  de  petits  bourgs  du  Poitou  et  de  l'Anjou,  comme 
les  Essarts  et  Durtal,  ne  craignaient  pas  aussi  de  lutter  avec 
des  villes  comme  Sedan,  d'une  renommée  bien  plus  ancienne 
pour  leur  industrie. 

Si  maintenant  nous  passons  aux  autres  objets  mentionnés 
dans  la  description  de  Pierre  Hamon,  nous  voyons  qu'ils  ne 
constituent  pas  un  ameublement  de  beaucoup  différent  des 
nôtres.  Le  lit,  composé  d'une  paillasse,  d'un  matelas  avec 
quelques  couvertures  ordinaires  et  un  grand  luisant  rouge  et 
bleu,  ce  que  nous  appellerions,  nous,  une  courte-pointe, 
ressemblait  fort  à  nos  lits  d'aujourd'hui,  et  n'était  peut-être 
qu'une  couchette  de  repos.  —  Quelques  grandes  armoires, 
dans  le  cabinet  vert,  servant  à  mettre  le  linge  ou  les  vêtements  ; 
deux  cabinets  ou  espèces  de  buffets  à  compartiments,  rempla- 
çant nos  secrétaires  actuels  ;  deux  petites  tables  recouvertes 
de  tapis,  l'une  pour  mettre  les  manteaux,  l'autre  ornant  le 
milieu  de  la  pièce;  un  pupitre  et  quelques  chaises,  voilà,  en 
somme,  cet  ameublement  fort  simple,  auquel  venait  s'ajouter 
deux  globes,  une  sphère,  un  écran,  ornant  la  cheminée,  sans 
doute,  tandis  que  près  de  la  fenêtre  le  luth  solitaire  attendait 
que  le  châtelain  de  céans  vint  chercher,  dans  ses  accords, 
une  diversion  à  ses  inquiétudes,  ou  une  distraction  après  les 
fatigues  du  jour. 

Mais  ce  n'est  pas  tout,  et  cette  description  ne  serait  pas 


10  — 

complète,  si  nous  laissions  de  côté  un  objet,  qui,  avec  les  armes, 
devait,  sans  contredit,  tenir  la  place  d'honneur  dans  le  cabinet 
de  travail  de  Samuel  d'Avaugour.  —  11  s'agit  de  la  bibliothè- 
que, qui  ne  comprenait  pas  moins  de  300  volumes,  et  dont 
le  notaire  Pierre  Hamon  nous  donne  le  catalogue  détaillé 
dans  le  dial  de  Saffré.  —  Histoire,  littérature  ancienne,  litté- 
rature moderne,  sciences,  polémique  religieuse,  presque 
toutes  les  branches  de  l'érudition  y  étaient  représentées  au 
moins  par  quelques  volumes,  qui  nous  témoigent  hautement 
que  les  châtelains  de  Saffré  étaient  alors  des  seigneurs  lettrés. 
—  De  plus,  les  romans,  les  contes,  les  nombreux  ouvrages  de 
poésies  légères  que  l'on  y  rencontre  à  chaque  pas,  viennent  nous 
révéler  aussi  cette  galanterie  du  XVIe  siècle,  dont  tout  homme 
bien  élevé  se  faisait  alors  pour  ainsi  dire  un  point  d'honneur, 
et  qui,  en  inspirant  à  chacun  le  goût  des  choses  de  l'esprit, 
devait  produire  bientôt  les  cénacles  littéraires  du  XVIIe  siècle, 
tel  que  l'Hôtel  de  Rambouillet.  —  Mais  il  ne  nous  est  point 
permis  de  faire  ici  de  ces  collections  une  sèche  et  froide  ana- 
lyse. L'énumération  de  Pierre  Hamon  est  à  elle  seule  plus 
éloquente  que  tous  les  résumés  que  nous  en  pourrions  faire,  et 
nous  aimons  mieux  lui  laisser  l'avantage  bien  mérité  de  nous 
faire  parcourir  lui-même  les  rayons  de  cette  bibliothèque  que 
sans  sa  diligence,  nous  ne  serions  point  à  même  d'apprécier 
aujourd'hui. 

«  Ensuilt  l'énumération  de  ce  qu'il  y  a  dans  la  bibliothèque 
de  monseigneur  Samuel  d'Avaugour  : 

1.  Les  tableaux  de  Philos-        1.  Les  images  ou  tableaux  de 

trate.  platte  peinture  des  deux  Phi- 

lostrate, mises  en  français  par 
Biaise  de  Vigenere.  Paris,  1609 
ou  1614,  in-folio,  flg. 

2.  Moralles  de  Plutarque. 

3.  Vies  de  Plutarque.  2-3.  Ces  deux  ouvrages  com- 

prennent probablement  les  œu- 
vres complètes   de  Plutarque 


—  11  — 

dans  la  traduction  de  Jacques 
Amyot  ? 

4.  Œuvres  du  Laurens.  4.  Probablement  les  œuvres 

de  Honoré  du  Laurens,  né  en 
1554,  à  Tarascon,  d'abord  ar- 
dent ligueur,  puis  archevêque 
d'Embrun,  mort  àParis  en  1612. 
On  a  de  lui  un  traité  sur  l'Hé- 
noticon  ou  édit  de  Henri  III, 
1588,  in-8.,  et  le  discours  et 
rapport  de  la  conférence  de 
Surène,  in-8.,  imprimé  à  Paris 
en  1595. 

5.  Calendrier  de  l'Histoire. 

6.  Œuvres  de  Sénèque.  6-  La  plus  belle  et  la  plus 

ancienne  édition  des  œuvres 
de  Sénèque  a  été  publiée  à  Na- 
ples,  en  1475.  Seneca  (Lue 
Ann.),  opéra  omnia.  Napoli,  Mo- 
ravus,  1475,  in-folio  à  46  lignes 
par  page.  —  Mais  il  s'agit  ici 
probablement  des  œuvres  de 
Senecque,  translateez  de  latin 
en  francoys,  par  maistre  Lau- 
rens, de  premier  fait.  (Au  verso 
du  dernier  feuillet).  Imprimés 
à  Paris  pour  Anthoine  Verard, 
marchant  et  libraire,  demeu- 
rant à  Paris,  en  la  rue  Saint- 
Iacques,  près  petit  pont...  pet. 
in-fol.  goth.  à  2  col.  de  40  lign., 
etc.  On  regarde  cette  édition 
comme  parue  de  1500  au  20  sep- 
tembre 1503.  —  Peut-être  est- 
ce  encore  l'édition  in-fol.  de 
1585,  RonifeapudB.  Gçassium, 


—  12 


Histoire  de  Josèpho. 


8.  Inventaire  général  de 
l'Histoire  de  France  3 
par  Jean  de  Serre. 


9.  Une  grande  Bible. 
10.  Œuvres  de  la  Framboi- 
sière. 


11.  Organum  d'Aristote. 


ou  celle:  Lutetise-Parisiorum, 
1607  seu  1619. 

7.  Les  éditions  les  plus  an- 
ciennes et  les  plus  remarqua- 
bles sont  de  1475,  1534  et  1544. 

8.  Serres  (Jean  de)  (Serra- 
nus),  historiographede  France 
et  célèbrecalviniste.  Inventaire 
général  de  l'histoire  de  France, 
par  Jean  de  Serres.  —  Paris, 
Saugrain  1596.  2  vol.  in-16. 
Cet  ouvrage  eut  de  nombreuses 
continuations. 

10.  Framboisière  (Nicol.  - 
Abraham  de  la),  médecin  con- 
nusouslenomdeFrambesarius, 
né  à  Guise,  dans  le  16e  siècle, 
fit  imprimer  à  Paris,  en  1606  : 
La  description  de  la  Fontaine 
minérale  du  Mont-d'Or.  1  vol. 
in-8.,  et  dans  la  suite  plusieurs 
autres  traités. 

11.  Les  éditions  les  plus  an- 
ciennes et  dont  l'exemplaire  de 
Samuel  d' Avaugour  devait  faire 
partie,  sont  celles:  1°  de  1536, 
pet  in-8.  Venetiis  in  sedibus 
Barth.  Zanetti,  œre  et  diligen- 
tia  J.  Fr.  Trincanelli;  2°  de 
1584.  Organum  gr.  et  lat.,  Jub. 
Pacius  recensuit.  Morgiis  1584, 
in-4.  3°  La  même,  réimprimée 
à  Francfort  en  1592,  in-8;  dans 
la  même  ville,  en  1597,  et  à 
Genève,  en  1605.  in-4,  avec 
variante. 


13  — 


12.  La  République  de  Sleidan. 


13.  Histoire  de  Bretagne*  de 
d'Argentré. 


14.  La  Broue,   De  la   Cava- 

lerie. 

15.  Les  Ambassades  et  Négo- 

ciations du  cardinal  du 
Perron. 

16.  L'Histoire   de    Navarre* 

d'André  Favyn. 

17.  Traité  de  l'Agriculture, 

d'Olivier  de  Serres. 


18.  Mystères  d'Iniquitez*  par 
Duplessis-Mornay. 


12.  Sleidan  (Jean),  néà  Sleide, 
près  de  Cologne,  en  1506,  vint 
en  France  en  1517,  mort  luthé- 
rien en  1556.  Il  a  laissé  une 
histoire  en  26  livres.  Elle  porte 
ce  titre  :  De  statu  religionis  et 
reipublica ,  Carolo  quinto  Cœ- 
sare,  commentarii.  Argento- 
rati,  Windelin  Rihelius,  1555. 
in -fol. 

13.  La  première  édition 
avait  été  publiée  en  1582,  in- 
folio. —  Il  est  probable  que  cet 
exemplaire  en  faisait  partie. 

14.  Broue  (Salomon  de  la). 
La  Cavalerie  française.  Paris, 
1602,  in-fol. 

15.  Davy  (Jacques),  cardinal 
du  Perron.  La  collection  de  ses 
ouvrages  forme  trois  volumes 
in-fol.  Paris,  1622. 

16.  Favyn  (André).  Paris, 
1612,  in-fol. 

17.  Serres,  sieur  du  Pradel 
(Olivier  de).  Théâtre  d'agricul- 
ture et  mesnage  des  champs. 
Paris,  Jamet  Mettayer,  1600, 
in-fol. 

18.  Mornay  (Philippe  de), 
seigneur  du  Plessis-Marly.  — 
Le  Mystère  de  l'iniquité  ou  His- 
toire de  la  Papauté,  etc.  Sau- 
mur,  par  Thomas  Portau,  1611, 
in-fol. 


19.  Commentaires  sur  les  six 
livres  de  Moïse.,  par  Jean 
Calvin. 


—  14 


20.  Les    quarante-sept    Ser- 
mons de  Calvin. 


21 .  Commentaires  oralins  sur 

les  actes  des  apostres. 

22.  La  République,  de  Bodin. 


23.  Pétri    martyris    Floren- 
tine Loci  communes. 


24.  Répooxse  à  Vêvêque  d'É- 
vreux,  par  Du  Plessis- 
Mornay. 


25.  Discours    de    Pontus    de 
Thyard. 


20.  Plusieurs  recueils  des 
Sermons  de  Calvin  ont  été 
imprimés  à  Genève  chez  Fr. 
Estienne,  1562.  Le  détail  s'en 
trouve  dans  l'Histoire  littéraire 
de  Genève,  par  Senebier,  I, 
256.  Un  de  ces  recueils  est  celui 
de  1565,  pet.  in-8. 


22.  Bodin  (Jean).  Les  six 
livres  de  la  République.  La 
première  édition  fut  imprimée 
en  1576,  in-fol.,  à  Paris.  Il  y 
en  eut  depuis  de  nombreuses 
éditions,  en  1577,  1578,  in-fol. 
en  1577,  à  Lausanne,  in-fol., 
etc.,  etc. 

23.  Martyr  (Pierre),  né  à 
Florence  en  1500,  mort  à  Zu- 
rich en  1562.  —  Loci  commu- 
nes Theologici,  1624, 3  vol.  in- 
fol. 

24.  Cette  réponse  devait  faire 
partie  des  Mém.  de  Duplessis- 
Mornay,  de  1572  à  1589  (99). 
(La  Forest)  1624-25,  2  vol.  in-4 
ou  de  ceux  de  1600-1623  réunis 
plus  tard  à  Amsterdam  par 
Louys  Elzevir  en  1651-52,  2 
vol.  in-4. 

25.  Thyard  ou  Tyard,  sei- 
gneur de  Bissy  (Pontus  de).  — 
Discours  philosophiques  de 
Pontus  de  Tyard.  Paris,  l'An- 
gelier,  1587,  in-4. 


15  — 


26.  Deux    tomes   du    Trésor 

politique. 

27.  Les  États  et  Empires  du 

Monde. 

28.  Œuvres  de  Corneille  Ta- 

cite. 


29.  Histoire  de  Scauderberg. 

30.  Histoire  de  Baiart  {Ba- 

il ard). 


31.  Carlo  Teli  (sic).  Délie  for- 

tificatione. 

32.  Girollomo   Maggi.    Délie 

fortificatione. 


33.  Le    livre   de    toutes    les 

cartes  de  France. 

34.  Regola  delli  cinque  ordini 

d'architectura,   di  Gia- 


28.  La  plus  ancienne  édition 
qui  parut  incomplète  est  celle 
in-fol.  de  1468 en  1470.  Venet... 
per  Vindelinum  de  Spira.  —  Il 
y  en  eut  depuis  de  nombreuses 
éditions,  notamment  en  1480, 
1515,  1517,  1527,  1534,  1607. 
Il  s'agit  peut-être  ici  de  cette 
dernière,  donnée  après  la  mort 
de  Juste  Lipse.  Antuerp.,  ex 
officina  plantin,  1607,  in-fol. 

—  La  première  édition  des 
Œuvres  de  Tacite,  revue  par 
ce  savant,  est  celle  d'Anvers, 
Chr.  Plantin,  1574,  in-8. 

30.  Peut-être  Histoire  des 
gestes  du  preux  et  vaillant 
chevalier  Bayard,  dauphinois. 

—  Lyon,  Pierre  Rigaud,  1602, 
pet.  in-8. 


32.  Maggi  (Jérôme),  célèbre 
ingénieur,  a  publié  de  nom- 
breux ouvrages ,  notamment 
un  traité  des  Fortifications,  en 
italien,  1589,  in-fol. 


34.    Vignola   (Giacomo  Ba- 
rozzi  da).  Regola  delli  cinque 


16 


como    Barozzi 
trnola. 


da    Yi- 


35.  La  Perspective,  de  Samuel 

Marollois. 

36.  Lamaniere de  bastir pour 

toutes  sortes  de  per- 
sonnes, par  Pierre  Le- 
muet,  architecte. 

37.  La  perspective,  de  Jean 

VreJen  (sic),  triée,  cor- 
rigée et  augmentée  par 
Samuel  Marollois. 

38.  Un  livre  de  Fortification, 

sans  intitule, par  Samuel 
Marollois. 


39.  Le  somptueux  apparat  de 

la  cité  de  Bresse. 

40.  La  Fortification  de  Buona 

Sutto  Lorini  florentini. 

41.  Corona  militare  d'Ales- 

sandro  Capo  Bianco. 

42.  La    Castrametation     du 

Prince  d'Orange. 

43.  La  Milice  romaine,  par 

Flavius  Vegece. 


ordini  d'architectura  (sans  lieu 
ni  date,  mais  1563),  in-fol. 
L'ouvrage  a  été  réimprimé  à 
Venise  en  1570,  en  1582,  et  en 
1596. 


36.  Une  seconde  édition  a 
paru  chez  Langlois,  dict.  Char- 
tres, en  1647,  in-fol.  —  C'est 
l'un  de  nos  meilleurs  ouv. 
français  sur  l'architecture. 


38.  La  Fortification,  ou  Ar- 
chitecture militaire,  tant  offen- 
sive que  défensive,  par  Sam. 
Marollois,  etc.  Amst.  Janssen 
(sic),  in-fol. 


43.  Vegetius  (Flavius).  Les 
premières  éditions  de  l'Epi- 
tomerei  militaris  sont  l'édition 
in-fol.  donnée  à  ce  que  l'on 
croit  à  Utrecht,  vers  1473,  par 
Ketelaer  et  Ger.  de  Leempt,  et 
celles  données  à  Paris  avec  les 


17  — 


caractères  de  Csesaris  de  StoL, 
et  à  Cologne,  vers  1474-78,  par 
Nie.  Gotz. 


44.  La    Fortification    d'Erar 

(sic). 

45.  Architectura  militare,  di 

Bull  a  (sic). 

46.  Commentaires  de  César. 


47.  Le  Trésor  des  Cartes,  par 

Henri  Laurent. 

48.  La  Nature  et   Diversité 

des  Poissons,  par  Pierre 
Belon. 


49.  Trois  tomes  des  Ellemans 
du  Clidc,  en  françois 
(Eléments  d'Euclide). 


50.  Commentaires  de  Mont- 
lac. 


46.  Il  a  été  donné  de  nom- 
breuses éditions  de  César,  avant 
l'époque  de  l'Inventaire  ;  la  plus 
ancienne  est  de  1469. 


48.  Belon  (Pierre).  La  nature 
etdiversîtez  despoissons,  repré- 
sentez au  plus  près  du  naturel. 
Paris,  Ch.  Estienne,  1555,  ïn-4 
obi.,  fig.  en  bois. 

49.  Les  plus  anciennes  édi- 
tions sont  les  suivantes  :  l°Ba- 
zilea,  Hervagius,  1533,  in-fol.; 
2°  Romae,  Ant.  Bladus  asula- 
nus,  1545,  2  tomes  en  1  vol. 
pet.  in-8;  3°  Romse,  ex  typ. 
medicea  (1594),  in-fol.;  4°  Pi- 
sauri,  1572  ou  1619  ;  5°  Romre 
Grassus,  1589,  2  vol.  in-8.  — 
Il  s'agit  sans  doute  ici  du  n° 
3,  4  ou  5. 

50.  Montluc  (Biaise  de).  Com- 
mentaires, etc.  Bourdaux,  Sim. 
Millanges,  1592,  in-fol.  Le 
même  ouvrage  a  été  imprimé 
depuis  à  Paris,  chez  Sonnius, 
en  1594,  in-8.,  et  chez  J.  Ber- 
jon,  1617,  in-8. 


1881 


18 


51.    Histoire    de  l'empereur 
Tamerlan. 


52.  Traitié  tragique  des  hom- 
mes illustres. 
53    Histoire  de  notre  Temps. 

54.  Aimable  accusation. 

55.  Discours   divers*    de  La 

Noue. 


56.  Le  soldat  françois. 

57.  Discours  militaires,  de  La 

Noue. 

58.  Trois  tomes  De  la  Sagesse, 

de  Charron. 


59.  L'Odyssée  d'Homère. 


51.  Il  s'agit  ici  sans  doute 
de  l'histoire  de  Tamerlan,  ra- 
rissime, écrite  en  espagnol  par 
un  des  trois  ambassadeurs  que 
lui  envoya  Henri  III,  roi  de 
Castille  en  1403,  laquelle  fut 
publiée  à  Séville  en  1582,  in- 
fol. 


53.  Imprimée  nouvellement. 
M.D.LXX,  petit  in-8. 

'  55.  La  Noue  (Franc,  de  la). 
Discours  politiques  et  militai- 
res. Genève,  1587,  pet.  in-4. 
Une  autre  édition  fut  donnée  à 
Bâle  en  1587,  pour  Fr.  Forest, 
in-8.;  et  une  autre  pet.  in-8., 
en  1588,  dont  le  titre  porte  : 
imprimé  nouvellement. 

57.  Comme  ci-dessus,  au 
n°  55. 

58.  Charron  (Pierre).  De  la 
Sagesse,  trois  livres.  —  Bour- 
deaux,  Millanges,  1601,  in-8., 
de  772  pages.  Deux  autres  édi- 
tions ont  été  publiées  à  Paris 
en  1604  et  1607. 

59.  Plusieurs  éditions  paru- 
rent avant  l'époque  de  l'inven- 
taire-, celle-ci  pourrait  être 
celle  de  1582,  gr.  Parisiis,  apud 
Steph.  Prevosteau,  in-4.,  ou 
celle  qui  porte  la  marque  de 


—  19  — 


60.  Téollogye  (sic)  naturelle. 

61.  Trois  tomes  des  Œuvres 

de  Sénèque. 

62.  Ellemans   (sic)   de    logi- 

que. 

63.  Essai  de  Michel  de  Mon- 

taigne. 


Conrad  Neobar.   Paris,    petit 
in-8.,  1541. 

61.  Voir  ci-dessus,  au  n°  6. 


64.  Les  vies  des  hommes  illus- 
tres, de  Plutarque,  en 
deux  tomes. 


65.  Vies  de  Plutarque. 

66.  Panégyrique,  par  M.  de 

Primerose,  au  Roy  d'An- 
gleterre. 

Vie  du  compte  Dessaix 
(sic)  (cle  d'Essex). 

Le  Mercure  françois. 


63.  De  nombreuses  éditions 
ont  été  données  avant  l'époque 
de  cet  inventaire,  notamment 
en  1580,  1582,  1588,  1593, 
1595,  1617,  etc. 

64.  Peut-être  est-ce  l'édi- 
tion très  rare,  donnée  :  Romse 
Udalricus  Gallus  (circà  1470). 
2  vol.  gr.  in-fol.  et  composée 
par  J.-A.  Campano. 

65.  Voir  ci-dessus  le  n°  3. 


67 


68 


69.  Coustumes  de  Bretagne, 
par  Bouchard. 


68.  Le  Mercure  françois  ou 
suite  de  l'histoire  de  la  paix, 
commençant  à  l'année  1605, 
pour  suite  du  septennair  de 
Gayet.  Paris,  1611  et  années 
suivantes.  Il  en  parut  25  vol. 
jusqu'en  1643. 

69.  Coutumes  et  constitu- 
tions de  Bretaigne.  Rennes, 
1484,  le  26  mars,  pet.  in-8. 
goth.  ff.  non  chiffrés.  24  1.  par 
page.  La  souscription  indique 
qu'elle  fut  imprimée  à  Rennes, 
par  Bellesculée  et   Josses  ;   et 


•20  — 


70.  Coustumes  de  Bretaigne, 
par  d'Argentré. 


71.  Conférence  de  la  coutume 

de  Paris  avec  les  autres 
coutumes  de  France,  par 
George  Fortin. 

72.  Trois  livres  de  VHistoire 

de  France,  par  Mathieu. 


73.  Inventaire  gênerai  de 
l'histoire  de  France,  par 
de  Serres. 

74.  Un  petit  livre  de  VHistoire 

de  France. 

75.  Histoire  mémorable   des 

choses  advenues  en 
France,  de  l'an  1547 
jusqu'en  1588. 

76.  Trois  livres  de  VHistoire 

Romaine,  de  Tite-Live. 


«  visitée  et  correctée  par  Jac- 
ques Bouchart  ,  greffier  de 
parlement  et  maistre  Allain 
Bouchart. 

70.  Les  commentaires  sur  la 
coutume  de  Bretagne ,  par 
Bertrand  d'Argentré,  parurent 
en  1582,  in-folio. 


72.  Mathieu  (Pierre).  11  s'a- 
git sans  doute,  de  «  l'Histoire 
de  la  mort  déplorable  de  Hen- 
ry IV,  ensemble,  un  panégyri- 
que et  un  discours  funèbre. 
Paris,  Ve  Guillemot,  1611  et 
1612,  in-fol.  et  pet.  in-8.,  »  et 
de  «  l'Histoire  de  Louis  XI  et 
des  choses  mémorables  adve- 
nues en  Europe  durant  22  an- 
nées de  son  règne.  Paris,  P. 
Métayer,  1610,  in-fol.  » 

73.  Voir  ci-dessus  n°  8. 


75.  Peut-être:  Histoire  des 
pièces  curieuses  de  1544  à  1588 
(97).  A  Hedin,  1603,  in-8  de 
794  pages.  D'autres  éditions 
avaient  paru  en  1595  et  1599. 

76.  De  nombreuses  éditions 
ont  paru  avant  l'époque  de 
l'inventaire. 


—  21  — 


77.  Histoire  des  troubles   de 

Hongrie  par  Genille. 

78.  Histoire  des  Indes ,   par 

Gomara. 


79 >  Le  Miroir  du  monde  j  par 
Lu  Violette. 


80.  Discours  de  V Estât  de  la 

France. 

81.  La  Vie  des  Bourbons. 

82.  Traitié  de  la  Cour. 
Les  mémoires  de  du  Bel-' 

lav. 


78.Gomara(Franc.Lopezde). 
Historia gênerai  de  laslndias... 
Anvers,  Mart.  Nucio  ou  J. 
Steelsio,  1552  ou  1554,  pet. 
in-8.  On  possède  encore  l'édi- 
tion iii-fol.  donnée  à  Saragosse 
en  1552,  «en  casa  de  Agustin 
Millan,»et  celle  publiée  à  Paris 
par  Bernard  Turrisan,  à  la 
boutique  d'Aide,  etc.,  1569, 
pet.  in-8.,  de  258  ff.  de  texte, 
G  ff.  prél.  et  12  pour  la  table, 
etc. 

79.  Le  Miroiter  du  monde, 
nouvellement  imprimé  à  Ge- 
nesve.  —  Cy  finist  le  Mirouer 
du  monde.  Imprimé  à  Genesve 
par  maistre  Jacques  Vinian, 
l'an  de  grâce  Mil.  ccccc  et  xvij, 
pet.  in-4. 


83 


84.  Le  tableau,  de  l'Inconstan- 
ce, par  Pierre  de  Langre. 


83.  Les  Mémoires  de  Martin 
du  Bellay,  seigneur  de  Langey, 
ont  été  imprimées  à  Paris.  P- 
l'Huillier,  1569,  in-fol.  Puis  en 
1571,  in-8,  pour  la  même  li. 
Mairie,  et  en  1572  et  1582,  à 
Paris,  in-fol.,  chez  Thomas 
Périer,  etc. 


99    


85.  Lettres  du  cardinal  d'Os- 

sat. 

86.  I/Escurie     de     Frédéric 

Grison  ou  Grisou  (sic). 

87.  Observation  de  la  France. 

88.  Histoire  de  France. 

89.  Secret    des   finances    de 

France. 

90.  Œuvres      héroïques      de 

Henri  IVe. 

91.  Œuvres   du  Vair,   garde 

des  sceaux  de  France. 

92.  Journal  d'Henri  III. 


93. 


94. 


95. 

90. 


La  pucclle  Jeanne  d'Or- 
léans. 


Ménioii  'es  6/ Estât  du  sieur 
de  Villeroy,  en  5  volu- 
mes. 


Recueil  des  pièces  curieu- 
ses de  France. 

L'Histoire  de  Louis  on- 
ziesme,  par  de  Serres. 


85.  Lettres  d'Arnaud,  cardi- 
nal d'Ossat.  Paris,  1598,  2  vol. 
in-4,  et  5  vol.  in-12. 


91 .  Guillaume  du  Vair,  chan 
celier  de  France,  né  en  155G, 
mort  vers  1621. 

92.  Journal  des  choses  ad- 
venues pendant  le  règne  de 
Henri  III.  Paris,  1621,  in-4. 

93.  Probablement  i  Histoire 
admirable  de  Jeanne  la  Pucelle. 
Lyon,  Rigaud,  1550  ou  1560, 
in-8. 

94.  Villeroy  (Nicolas  deNeuf- 
ville,  seigneur  de).  Mémoires 
d'estat  (1567  à  1604  et  suite  jus- 
qu'à 1621).  1"  partie.  Paris, 
Chevalier,  1622,  in-4.  Réim- 
primées à  Sedan,  en  1622,  et 
sur  la  copie  de  Sedan  en  1623 , 
in-8  ;  2e  partie  par  Du  Mesnil- 
Basire,  Paris,  Sam.  Thibaut, 
1223,  6  vol.  in-8,  etc. 


96.  L'un  des  nombreux  ou- 
vrages de  Jean  de  Serres,  his- 
toriographe de  France,  publié 


-  23  — 

vers  la  fin  du  16e  siècle.  Voir 
ci -dessus  n°  8. 

97.  D'aultres  secrets  de  na-        97.  Les  éditions  les  plus  cu- 

ture.  rieuses  de  cet  ouvrage  sont  les 

suivantes:  Paris,  1504,  in-4 
goth.;  imprimé  à  Paris,  par 
Philippe  Le  Noir,  libraire,  sans 
date,  in-4  goth.;  idle  xim  iour 
du  moys  de  juing  mil  ve  et 
xxiiii,  in  4  goth.;  enfin,  celle 
imprimée  à  Paris,  pour  Jehan 
Treperel,  demeurant...  en  la 
rue  Neufve-Nostre-Dame. . .  le 
xvii  iour  du  moys  daoust  mil 
v.  c.  et  xxvii,  pet.  in-4  goth., 
etc. 

98.  Histoire  de  dom  JanCas-        98   Historia  de  los  reges  go- 

tillan.   (sic)    (Julian  del     dos  que  venieron  de  la  scythia 
Castillo).  cle  Eur0pa  contra  el  emperio 

romano,  y  a  Espana,  etc.,  par 
Julian  del  Castillo.  En  Madrid, 
1624,  in-fol. 

0'.).  Les    Heures   prdues  ou        99.  Nous  ne  connaissons  sous 
Bonasse.  ce  ^re  que  .  Les  Heures  per- 

dues de  B.  0.  M.,  cavalier  fran- 
çois,  dans  lequel  les  esprits 
mélancoliques  trouvent  des 
remèdes  propres  à  dissiper 
ceste  fâcheuse  humour.  S.  L. 
1615,  in-12. 

100.  Jérusalem  régnante. 

1  f  )  1 .  Glo  ire  d,esa  n  ■'  iens  (sic) . 

102.  Catholicon d'Espagne.  102.  C'est  ici  sans  doute  l'é- 

dition qui  porte  ce  titre  :  Catho- 
licon d'Espagne,  et  la  tenue  des 
Estats  de  Paris,  par  Messieurs 


24  — 


103.  Fragment    contre    Ma- 

chiaveL 

104.  L' Eloquence  français,'. 

105.  Leçons,  par  Antoine  du 

Verdier. 


106.  Considérations   sur    1rs 

censures  du  Pape 
Paul  V  contre  la  Répu- 
blique de  Venise. 

107.  Jugement  du  synode  na- 

tional des  Églises  ré- 
formées du  Païs-Bns 
contre  les  Arméniens. 

108.  Uadvertissement      aux 

Juifs. 

109.  L'Institution  deVEucha- 

ristiej  par  Du  Plessis- 
Mornay. 


delà  S.  Union:  avec  le  testa- 
ment d'icelle,  le  tout  reveu  et 
augmenté  de  nouveau.  Turin, 
par  T.  Garabiaco,  1594,  in-8 
de  184  p.  —  Les  autres  éditions 
portent  en  plus  au  titre,  les 
mots  :  Satyre  menippée. 


105.  Verdier  (Antoine  du), 
historiographe  de  France,  né 
en  1544,  à  Montbrisson,  mort 
en  1000.  Son  principal  ouvrage 
est  :  Les  diverses  leçons  d'An- 
toine du  Verdier,  sieur  de  Vau- 
privas,  gentilhomme  forésien 
et  ordinaire  de  la  maison  du 
roi ,  suivant  celles  de  Pierre 
Messie.  Un  gros  vol.  in-8 , 
Tournon,  1616.  —  Cinq  éditions 
en  avaient  été  données  de  1577 
à  1616. 


100.  De  l'Institution,  usage 
et  doctrine  du  S.  Sacrement 
de  l'Eucharistie  en  l'Église  an- 


25  — 


110.  Traité  de  V Église. 

111.  Dialogue  contre  la  plu- 

ralité des  religions. 
112    De  V Athéisme. 

113.  Devis    d'un    Catholique 

et  d'un  Politique. 

114.  Deux  livres  de  VHistoire 

ecclésiastique . 


115.  Amendement  de  la   Vie 

par  la  Foi. 

116.  Traictè  de  la  participa- 

lion  du  corps  de  N.-S. 
Jésus-Christ. 

117.  Catalogue  des  docteurs 

de  l'Église. 

118.  Traictè    de    la    Sainte 

Cène,  par  Sainte  Alde- 
o-onde. 


119.  La  Voguation  (sic)  de 
Pasteurs ,  par  du  Mou- 
lin. 


tienne,  etc.,  le  tout  en  quatre 
livres.  La  Rochelle,  Hierosme 
Haultin,  1598,  pet.  in-4 ,  en 
dernière  édition  revue  par 
l'auteur,  1599,  pet.  in-8 ,  en 
seconde  édition,  Th.  Portau , 
1604,  in-fol. 


114.  Hist.  ecclésiastique  'les 
églises  réformées  au  royaume 
de  France,  de  1521,  par  Théod. 
de  Bèze.  Elle  fut  continuée 
jusqu'en  1563  et  forma  3  vol. 
iu-8,  Anvers  (Genève)  15B'>. 


118.  Sainte  Aldegonde  (Phi- 
lippe de  Marnix,  sieurduMont), 
disciple  de  Calvin,  né  en  1538, 
mort  en  1598.  —  Ses  princi- 
paux ouvrages  ont  été  impri- 
més à  Anvers  et  à  Leyde. 

119.  Moulin  (Pierre  du).  Théo- 
logien protestant,  né  dans  le 
Vexin  en  1568,  mort  à  Sedan 
en  1658.  —  L'un  des  nombreux 


26  — 


120.  HomélieSj  composées  par 
Arnauld. 


121. 

122. 
123. 
124. 
125. 
126. 


1 


27, 


128. 


Apolloggc  (sic)  pour  lu 
Sainte  Cène,  par  du 
Moulin. 

Sermons  sur  le  livre 
cl' Est  lier. 

Défense  de  la  vraie  et 
pure  Doctrine . 

Dispute  d'un  François  et 
d'un  Romain. 

Livre  contre  la  Transub- 
stantiation. 

Le  Purgatoire  des  CJi ré- 
tiens. 

Copie  d'une  Lettre  en- 
voyée à  l'évêquc  d'An- 
gers. 

Moïcns  d'Abus  (sic). 


ouvrages  de  cet  auteur  fécond, 
édité  vers  la  fin  du  XVIe  siècle. 

120.  L'une  des  nombreuses 
compositions  du  fameux  Robert 
Arnauld  d'Andilly,  né  à  Paris 
en  15S9,  mort  en  1674,  et  cé- 
lèbre par  sa  vie  solitaire  à 
Port-Royal  des  Champs. 

121.  Voir  ci-dessus  n°  119. 


L29.  Apollogye  (sic). 


128,  Moyen  d'abus,  entre- 
prises et  nullitez  du  rescrit  et 
de  la  bulle  de  Sixte  Ve  en  date 
du  mois  de  sept.  1585,  etc.,  par 
un  catholique,  apostolique  ro- 
main, mais  bon  François  et 
très  fidèle  subiect  de  la  cou- 
ronne de  France  (Pierre  du 
Belloy).  Cologne,  de  l'imprim. 
d'Hermann  Iobin,  1586,  pet. 
in-8  de  8  f.  prélimin.  et  313  p. 

129.  11  s'agit  ou  de  «  l'Apo- 


—  27  — 


130.  Trois  livres  des  Médita- 

tions chrestiennes,  par 
Du  Plessis-Mornay. 

131.  Traictè    du    Sacrement 

de  la  Sainte  Cène,  par 
sainte  Aldegonde. 
13.2.  Six   Sermons   du   sieur 
Primerose. 

133.  La  Trompette  de  Sion, 

par  Primerose. 

134.  Response  à  la  profession 

de  foy  de  la  Religion 
réformée. 

135.  L'Amour  divin,  par  du 

Moulin. 

136.  Traictè  de  l'Église. 

137.  Traictè   pour    oster    la 

crainte  de  la  mort. 

138.  Sermons,    par    Samuel 

Durand. 

139.  Traictè  de  la  Messe  et 


logie  contre  le  traité  de  Madrid 
d'entre  le  très  chrestien  roy  et 
Charles  esleu  empereur  (sans 
lieu  ni  date,  vers  1519),  in-4 
go  th.  de  4  f.  avec  fig.  en  bois,  » 
ou  bien  de  «  l'Apologie,  ou  dé- 
fense de  l'honorable  sentence 
et  très  juste  exécution  de  Ma- 
rie Stuard,  royne  d'Ecosse, 
traduit  de  l'anglais.  Imprimé 
nouvellement,  1588  (ou  suivant 
l'original  imprimé  à  Londres), 
pet.  in-8. 

130.  Discours  et  méditations 
chrestiennes,  par  Phil.  de  Mor- 
nay.  Saumur,  Th.  Portau,  1611 
et  1612,  2  vol.  in-12. 

131.  Voir  ci-dessus  n°  118. 


135.  Voir  ci-dessus  n°  119 


—  28 


de  la  Transubstantia- 

tion. 
140.  Apollogye  (sic)  pour  le 

serment  de  Fidélité. 
111.    Mémoires      de     Nofrr 

temps. 


142.  Réponse  à  la  profession 

de  Foi  publiée  contre 
ceux  de  la  Religion  ré- 
former. 

143.  Traictédela  SainteCène, 

par  du  Plessis-Mornay. 


144.  Leçons  catholique*. 
1  15.  Conférence     entre 
Moulin  et  Caijet. 


du 


146.  Les  principaux  abus  de 
la  Messe. 


141.  Ouvrage  fort  rare,  im- 
primé vers  la  fin  du  XVIe  siè- 
cle. Peut-être  le  même  ouvrage, 
sous  un  autre  titre,  que  l'his- 
toire de  Notre  temps.  Imprimé 
nouvellement  MDLXX,  pet.  in-S 
de  25  f.,  prélim.,  808  p.  de 
texte  et  4  f.  pour  la  table  des 
matières. 


143.  C'est  sans  doute  ici  l'édi- 
tion de  Th.  Portau,  1604,  in- 
fol.  ou  2e  édition. 

145.  Moulin  (Pierre  du).  Voir 
nu  119.  —  Cayet,  d'abord  mi- 
nistre protestant  de  Catherine 
de  Bourbon,  sœur  d'Henri  IV, 
puis  catholique  en  1595;  né  à 
Montrichard  en  1525,  mort 
docteur  en  Sorbonne  et  profes- 
seur d'hébreu  au  collège  royal 
en  1610.  Il  a  publié  de  nom- 
breux ouvrages,  entre  autres 
les  Chronologies  Novennaire 
et  Septennaire,  à  Paris,,  en 
1608  et  1605. 


29  — 


147.  Les  saintes  Affections. 

148.  Rescript  de  George  l'A- 

postre. 

149.  Testamento     noro     del 

seignor  nostro  Jesu- 
Christo  s  traduto  cla 
Giovanni  Teodati  (sic). 

150.  Discours  de  L'Espine. 


151.  Consolation     de     l'Ame 

fidelle. 

152.  Saintes  prières  pour  pré- 

paration à  jeusne. 

153.  Méditations,  par  Samuel 

Durand. 

154.  Recueil  de  plusieurs  ha- 

rangues. 

155.  Histoire  de  Godefrov. 


156.  UArioste. 


150.  Lespine  (J.  de).  Dis- 
cours du  vray  sacrifice  et  du 
vrai  sacrificateur  ;  etc.  Lyon, 
J.  Saugrain,  1563,  in-8  de  24  p. 
Une  autre  édition  avait  été 
donnée  à  Lyon  en  1562,  et  il 
en  parut  une  troisième  en 
1564,  pet.  in-8,  ne  portant  ni 
date,  ni  lieu  d'impression. 


155.  Godefroy  (Denys),  né  à 
Paris  en  1549,  mort  en  Alle- 
magne en  1621.  Il  s'agit  ici  de 
l'Histoire  de  Charles  VI,  Louis 
XII  et  Charles  VIII,  qu'il  édita 
lui-même. 

156.  Les  plus  anciennes  édi- 
tions du  Roland  furieux  de  Lo- 
dovico  Ariosto  (l'Arioste),  sont 
de  1516, 1521, 1524, 1526, 1527, 
1532,  1536,  1542,  1545,  etc., 
etc. 


30  — 


157.  Trajano  BoccaJ'mi. 


158.  Imagini  delU  Dei  anti. 

chi. 

159.  Considération  d' Estai. 

160.  Los  travalos  diPersiles. 

et  Sigismonda. 

161.  Dianne  (sic)  de  Monte- 

mavor. 


162.  Discorsi  di  Polo  Paruta. 


163.  Dictionnaire  italien,  la- 

tin et  français. 

164.  Discorsi  polit  ici.. 

165.  Tesoro  politiquo. 

166.  Lettera  Ysabella  Andre- 

ini  (sic). 


157.  Boccalini  (Trajan) ,  aut 
teur  satirique ,  né  à  Lorette, 
en  1556,  mort  à  Venise,  en  1613. 
—  Il  a  été  publié  de  lui  entres 
autres  ouvrages  :  S.  Ragguagli 
di  Parnasso  di  Trajano  Bacca- 
lini.  Venez,  1612-13,  ovvero 
1614.  2  vol.  in-4.  —  Les  cent 
premières  nouvelles  et  avis  du 
Parnasse,  etc.,  trad.  de  FItal. 
par  Th.  Fougasses.  Paris,  1615, 
in-8. 


161.  La  Diane  de  George  de 
Montemayor,  trad.  d'espagnol 
en  Français.  Paris,  Nie.  Bon- 
l'ons,  1587,  3  part,  en  1  vol. 
pet.  in-12.  —  Deux  autres  édi- 
tions ont  paru  en  1603  et  1623. 

162.  Paruta  (Paul) ,  noble 
vénitien,  né  en  1540,  mort  en 
1598.  —  Ses  discours  politiques 
ont  paru  à  Venise,  en  1599, 
in-4. 


166.  Andreini  (Isabelle),  née 
en  1562,  morte  en  1604.  Célè- 
bre comédienne,  dont  la  pièce 
d'Adam,  1613,  in-4,  a,  dit-on, 


—  31 


1G7.    Tragi   comedia    cœles- 

tia. 
168.  La  Fiameta  de  Jan  Bo- 

casse  (sic). 


1G9.  Consolations  de  Nervèze. 


donné  à  Milton   l'idée  de  son 
Paradis  perdu. 


168.  Les  éditions  les  plus 
anciennes  et  les  plus  remar- 
quables de  la  Fiamette  de  Bo- 
cace,  sont  celles  de  1480,  1491, 
1497,  1532,  1585,  etc. 

169.  Nervèze  (A.  de).  L'un 
des  romans  publiés  par  cet  au- 
teur ;  les  principaux  furent, 
réunis  plus  tard  sous  ce  titre  : 
Amours  diverses ,  divisées  en 
dix  histoires.  Paris ,  du  Bray, 
1611,  Spart,  pet.  in-12. 


170.  Deux  livres  de  fortifica- 

tion escriptsàlamaiii. 

171.  Un  dictionnaire  la  tin . 
Tesoro  politique. 
Grammatica  italia  (sic). 
Les  mémoires  de  messire 

Philippes   de  Commy- 
nes. 


172. 
173. 
174. 


175.  Secundo  seneno  de  la  di- 

vina  settimana. 
170.  Jérusalem  libérât  a,  del 

ïorquato  Tasso. 


174.  Les  éditions  des  mé- 
moires de  Philippe  de  Commi- 
nes,  antérieures  à  notre  inven- 
taire, sont  de  1524, 1525, 1528, 
1539  et  1560. 


176.  Les  éditions  de  la  Jé- 
rusalem délivrée  du  Tasse  sont 
très  nombreuses  ;  les  plus  re- 
marquables de  celles  qui  ont 
précédé  notre  inventaire  sont 
les  suivantes  :  Parma  ,  per 
Erasmo  Viotto.,  1581,  in-4;  — 
Venise,  per  Domenico  Gavalca- 


32  — 


177.  Horlando  (sic)  furioso. 

17.S.  Dictionnaire  des  quatre 
langues  française*  Es- 
pagnole ,  Italienne  et 
Flamande.    . 

179.  Deux  livres  de  lettres  et 

de  compliments  simples. 

180.  Aminta,    favola   Bosca- 

reccia. 


181.  Le  Fov.illoux. 


182.  Pastorftdo. 


183.  P.  Sererini. 


lupo  a  instantia  di  Marco  An- 
tonio Malaspina.  1580,  in-4.  ; 
Uoma,  1G07,  in-24,  etc. 

177.  Voir  ci-dessus,  n°  150. 


180.  Le  Tasse.  Aminta  favola 
Boscareccia.  In  vinegia  (presso 
Aldo),  1581,  pet.  in-8.  Cette 
édition  très  rare,  la  première 
de  cette  pastorale,  porte  une 
dédicace  datée  du  20  décembre 
1580. 

181.  Fouilloux  (Jacques  du), 
auteur  d'un  ouvrage  sur  la 
vénerie.  Les  éditions  les  plus 
connues ,  antérieures  à  notre 
inventaire,  sont  de  1585  et  de 
1606.  Paris,  in-4. 

182.  Tragicomôdiepastoralle 
en  5  actes  et  en  vers,  par 
Guarini,  jouée  en  1585.  —  Elle 
a  eu  un  grand  nombre  d'édi- 
tions. 

183.  Severini  (Pierre),  né  en 
Danemarck,  en  1540,  célèbre 
médecin  du  temps.  — 11  a  écrit: 
Idea  medicina  philosophie  ex 
doctrine  paracelsi,  Hippocratis 
et  Galeni,  Basilee,  1571,  in-4. 
Epistola  pro  Theophrasto  Pa- 
racelso,  Basilese,  1572,  in-8. 


33  - 


184.  Epi  très  de  Cicéron. 


185.  Sentences  de  Cicéron. 

18G.  Dictionnaire  latin. 

1 87 .  Dictionnaire  français . 

188.  Consolation  de  Cicéron. 

189.  La  vye  (sic)  de  Virgile. 

190.  JustiLipsupoliticorum. 

doctrina. 


191.  Colloguya  Ramo  (sic). 

192.  Deliciœ  galliœ. 

193.  Deliciœ    Podenicœ     ou 

Padenicœ. 

194.  Armide. 

195.  Sermons  de  VEvêque  de 

Bitonte  (sic). 

196.  Salustina. 

197.  Traicté  de  V Antéchrist > 

par  Lambert. 


198.  Dao?  livres  de  «  Dispu- 
tatio  dénatura  logicœ.  » 


184.  Le  nombre  considérable 
d'éditions  des  différentes  œu- 
vres de  Cicéron,  données  avant 
l'époque  de  notre  inventaire,  ne 
nous  permet  pas  de  les  énumé- 
rer  ici.  Mais,  peut-être,  s'agit- 
il  de  l'édition  célèbre  des  «  Epis- 
tres  familières  de  Cicéron  , 
traduites  en  francois,  par  Es- 
tienne  Dolet.  Lyon,  Dolet  ou 
J.  de  Tournes,  1549,  in-16. 


188.  Voir  ci-dessus  n°  184. 

190.  Lipse  (Juste),  né  àlsch, 
prés  de  Bruxelles,  en  1547,  mort 
en  1606.  Son  traité  de  poli- 
tique, publié  vers  la  fin  du 
XVIe  siècle,  est  l'un  de  ses  prin- 
cipaux ouvrages. 


197.  L'un  des  écrits  de  Fran- 
çois Lambert,  cordelier  d'Avi- 
gnon, disciple  de  Luther,  né 
en  1487,  mort  en  1538. 


1881 


—  34  — 


199.  Sentences  d'Erasme. 


200.  Epilome  adagiorum. 

201.  Calepin. 

202.  Livre  cVAnalomie. 

203.  Tranquillité   de    Vâme, 

par  Sénèque. 

204.  Trois  livres  des   délices 

de  la  poésie. 

205.  Trois  livres  des  œuvres 

de  Téophile  (sic). 


20G.  Le  cabinet  des  vers  saly- 
riques. 


207.  Les  satyres  de  Régnier. 


199.  Erasmus  roterodamus 
(Desiderius).  Les  œuvres  com- 
plètes d'Erasme  ont  été  publiées 
par  Beatus  Rhenanus.  Bàle, 
Jérôme  Froben,  1540,  in-fol. 

200.  L'un  des  ouvrages  d'E- 
rasme. Voir  ci-dessus,  n°  199. 


203.  Voir  ci-dessus,  n°  G. 


205.  Théophile ,  surnommé 
Viaud  ,  poète  français ,  né  à 
Clérac,  en  1590,  mort  en  1626. 
On  a  de  lui  un  traité  de  l'im- 
mortalité de  Pâme;  Pyrame  et 
Thisbé,  trag.;  Socrate  mourant, 
trag.;  Pasiphaé,  trag.;  et  di- 
vers recueils  de  poésies.  Ses 
œuvres  parurent  en  1618. 

206.  Le  cabinet  satyrique , 
ou  recueils  de  poésies  gail- 
lardes de  ce  temps,  composées 
par  Sigognes,  Régnier,  Motin, 
etc.  Paris,  Billaine,  1618,  in-12, 
de  703  pp.  —  Cet  ouvrage  fut 
réimprimé  en  1620. 

207.  Régnier  (Mathurin).  La 
plus  ancienne  édition  de  ses 
satyres  est  celle  de  1608.  Paris, 
du  Bray,  in-4.  La  suivante 
étant  de  1642,  c'est  un  exem- 
plaire  de    celle   de   1608  que 


35 


devait  posséder  Samuel   d'A- 


•208.  Trois  livres  des  Œuvres 
de  du  Bellay. 


209.  Livre  de  Marot. 


210.  Les  Premières    Œuvres 
de  Philippe  Desportes. 


211.  Aminte  pastoral) 'e. 

212.  Illiade  d'Homère. 

213.  Deux  livres  de  la  Muse. 


vaugour. 


208.  Du  Bellay  (Joachim).  — 
Ses  œuvres  françoises  parurent 
à  Paris,  chez  Fed.  Morel,  en 
1569,  in-8.,  et  en  1584,  pet. 
in-12.  —  D'autres  éditions  en 
furent  données  à  Rouen,  chez 
George  L'Oyselet,  1592  et  1597, 
pet.  in-12. 

209.  Marot  (Clément).  De 
nombreuses  éditions  de  Marot 
parurent  avant  l'époque  de 
notre  inventaire.  La  plus  an- 
cienne est  celle  de  1 532.  Paris, 
Pierre  Roffet,  pet.  in-8.  —  On 
croit  qu'il  en  existe  une  de 
1530. 

210.  Desportes  (Philippe). 
Les  premières  œuvres.  Paris, 
par  Marner  t  Pâtisson,  1600,  pet. 
in-8.  Une  des  plus  belles  édi- 
tions de  ses  œuvres  poétiques. 
Une  autre  édition  in-4.  sortit 
de  l'imprimerie  Robert  Es- 
tienne,  en  1576. 

211.  Voir  ci-dessus,  n°  180. 

213.  La  Muse  folâtre  (le  1er, 
le  2e  et  le  3e  livre  de) ,  re- 
cherchée des  plus  beaux  esprits 
de  ce  temps.  Rouen,  1603,  3 
tomes  en  un  vol.  in-24.  —  D'au- 
tres éditions  furent  données  en 
1609,  1615,  1621,  à  Rouen,  3 
vol.  in-24,  et  à  Paris,  en  1607, 


36  — 


214.  Les    Enseignements    de 
Baïf. 


215.  Les  Advenlures  de  Flo- 

ride. 

216.  Les    Œuvres   de  Pierre 

Ronsard. 


217.  Elégie  de  Ronsard. 

218.  Les   Muses    Francoises. 


219.  Le  Cabinet  du  Rimenr. 

220.  Le  Chevalier  François. 

221 .  Biaisons  (sic). 


222.  Formulaire  curieux  d 'es- 

crire  les  missives. 

223.  Traité  des  vrais  et  faux 

pasteurs. 


chez   Jean  Fuzy,   2   part,    en 
1  vol.  in-12. 

214.  Baïf  (Jean  Ant.  de). 
Les  mimes,  enseignemens  et 
proverbes  de  Jan  Antoine  de 
Baïf,  reveus  et  augmentez  en 
cette  dernière  édition.  Paris, 
par  Mamert  Pâtisson,  impri- 
meurs du  Roy,  chez  Robert 
Estienne,  1597,  pet.  in-12.  Une 
autre  édition  fut  donnée  à 
Toulouse  en  1612,  et  une  autre 
à  Tournon  en  1619. 


216.  Les  œuvres  de  Pierre 
Ronsard  parurent  à  Paris  en 
1604,  10  tomes  en  5  vol.,  pet. 
in-12,  et  en  1623,  chez  Nicolas 
Buon,  2  vol.  in-fol. 

217.  Voir  ci-dessus. 

218.  Les  Muses  Francoises 
ralliées  de  diverses  parts  par 
Despinel.  Paris,  1599,  1  vol. 
pet.  in-12. 


221.  Plusieurs  ouvrages  dif- 
férents ont  été  publiés  sous  ce 
titre;  et  nous  ne  saurions  par- 
suite  déterminer  celui  dont  il 
est  ici  question. 


Ôi     — 


224.  Les    Epithètes    de    La- 
porte. 


225.  Les  Œuvres  de  Bouchet. 


226    Les  amours  de  la  Belle 
du  Luc  (sic). 

227.  Les  amours  d'Hèlaine  de 

Marie  (sic). 

228.  Les  six  livres  de  Mario 

de  Guignola  (sic). 

229.  L'Endyrnion     de  Gom- 

baud. 


230.  Trésor  des  Malades. 

231.  Dialogue    du    désordre 

qui  est  à  présent    au 
monde. 

232.  1/ Argenis  de  Jean  Bar- 

clay. 


224.  On  possède  plusieurs 
éditions  de  cet  ouvrage,  entre 
autres,  une  édition  imprimée 
à  Paris  chez  G.  Buon,  au  clos 
Bruneau,  en  1580. 

225.  Bouchet  (Jean)  et  Bou- 
chet (Guillaume)  ont  écrit  vers 
cette  époque ,  des  ouvrages  de 
galanterie  fort  nombreux.  11 
est  assez  difficile  de  déterminer 
ici  duquel  il  s'agit. 


229.  Gombauld  (Jean  Ogier 
de).  Célèbre  poète,  l'un  des 
premiers  membres  de  l'Acadé- 
mie Française,  né  vers  1570, 
mort  en  1666.  Ses  principaux 
travaux  sont  :  Aconce,  trag.  ; 
Cydippe;  Les  Danaïdes ;  Endy- 
mion  et  divers  recueils  de 
poésies. 


232.  Barclay  (Jean),  né  à 
Pont-à-Mousson  en  1582,  mort 
en  1621.  L' Argenis  cité  ici,  est 
sans  doute  la  plus  ancienne 
édition  de  cet  ouvrage  et  peut- 


—  38  — 


."),"',r> 


33.  Théagène  et  Car  idée. 


234 


Deux   livres   des   Méta- 
morphoses d'Ovide. 


235. 

236. 

237. 
238. 


239. 
240. 
241. 

242. 


les  adventures  de  Po- 
lyxène. 

Description  de  la  Peste. 

Pratique  chrestienne. 

Lettre  mystique  concer- 
nant la  conspiration 
dernière  contre  le  prin- 
ce Maurice. 

Abjuration  des  hérésies 
de  La  Rochelle. 

Traité  des  vrais  et  faux 
pasteurs. 

Les  Lamentations  de 
Jérémie  mises  en  vers 
françois. 

Trente  -  deux  demandes 
proposées  j  par  le  père 
Cotton. 


être  une  édition  inconnue  jus- 
qu'alors. 

233.  Les  amours  de  Théa- 
gène  et  Chariclée,  célèbre  ro- 
man d'Héliodore,  romancier 
grec  du  IVe  siècle.  La  première 
édition  en  fut  donnée  à  Bâle 
en  1534,  in-4.  La  traduction 
d'Amyot,  1547,  in-fol.,  et  1549 
et  1559,  in-8.,  a  été  souvent 
réimprimée. 

234.  Il  a  paru  beaucoup 
d'éditions  des  Métamorphoses 
avant  l'époque  de  cet  inven- 
taire. Les  principales  sont  de  : 
1475,  1480,  1557,  1566,  1567, 
1570,  1579,  1583. 


238.  Il  s'agit  peut-être  ici  de 
Maurice,  Electeur  de  Saxe,  né 
en  1521,  mort  en  1553. 


242.  Cotton  (Pierre),  célèbre 
jésuite,  confesseur  d'Henri  IV 
et  de  Louis  XIII,  né  en  1564, 
mort  en  1626.  —  Ses  principaux 


—  à 


°9 


243. 

244. 

245. 


Réponses   au   sieur    Du 

Plessis. 
Consolation  des  malades. 
Anti-Joseph. 


246. 


24" 


248. 

-2  il). 


Dix  petits  livres  de  mu- 
sique de  Guesdon,  et 
quatre  de  Boni. 

Les  (tiTise*  héroïques  de 
Claude  Paradin. 


Deux  livres   d'Ellemans 

(sic)  de  Logique. 
Sa'yrr  Menippée,  de  la 

vertu    du    Catholicum 

d'Espagne. 


ouvrages  sont  :  Le  traité  du 
sacrifice  de  la  messe  ;  des  ser- 
mons, 1617,  in-8;  et  la  lettre 
déclaratoire  de  la  doctrine  des 
jésuites,  1610,  in-8. 


245.  L' Anti-Joseph,  ou  bien 
plaisant  et  fidèle  narré  d'un 
ministre  de  la  religion  préten- 
due ,  vendu  publiquement  à 
Clerac,  ville  d'Agenois,  ayant 
été  enfermé  dans  un  coffre  par 
une  honeste  dame  de  la  dite 
ville  ,  à  laquelle  il  faisait 
l'amour.  —  Suivant  la  copie 
imprimée  à  Agen,  1615,  pet. 
in-8. 


247.  Paradin  (Claude).  De- 
vises héroïques.  —  Lyon,  Jan 
de  Tournes,  et  Guill.  Gazeau, 
1557,  in-8.,  de  261  pages.  Une 
autre  édition  in-16  a  paru  à 
Anvers  chez  Plantin,  en  1561. 
et  un  autre  in-8  à  Paris,  1621 . 


249.  11  s'agit  ici,  sans  doute, 
soit  de  l'édition  de  Paris,  M.  D. 
XCIlI,pet.  in-8.,  ou  de  l'édition 
de  1593,  in-12.  —Voir  ci-dessus 
n°  102. 


—  40  — 


250.  Histoire  de  notre  temps, 
par  Paradin. 


251.  Un  livre  d'armoiries  es- 

cript  à  la  main. 

252.  Journata  (sic)  de  Boccace. 


253.  Trois  livres  non  escript s. 

254.  Un  livre  de  Luth. 

255.  Epiire  Dorée. 

256.  Sermons  de  Samuel  Du- 

rant. 

257.  Sermons  par  Du  Moulin. 

258.  Bénéfice  commun. 

259.  Résolution   des    doubles 

de  V Eglise  réformée  et 
de  V Eglise  romaine. 

260.  L'Amant  ressuscité. 

261 .  Les  Œuvres  de  F.  Rabe- 

lais. 


250.  Paradin  de  Cuiseaulx 
(Guil.).  Histoire  de  nostre 
temps  (depuis  l'avènement  de 
François  Ier  jusqu'en  1558.) 
Lyon,  de  Tournes  ou  Michel, 
1558,  in-16.  Deux  autres  édi- 
tions en  ont  été  données  :  à 
Paris,  1556,  in-16,  et  chez 
Ruelle,  1568,  in-12. 


252.  Le  Décamcron,  connu 
aussi  sousle  nom  «  des  journées 
de  Boccace.  » 


262.  Quatre  livres  des  Adven- 

tures  de  Floride. 

263.  Le    Rétablissement    de 
Troyes  (sic). 

264.  Consolation    envoyée    à 


257.  Voir  ci-dessus,  n°  119. 


261.  Les  éditions  les  plus  an- 
ciennes et  les  plus  remarqua- 
bles des  oeuvres  de  F.  Rabelais 
sont  celles  de  1553,  1556,  1558. 
Lyon,  Jean  Martin,  pet.  in-8, 
1559,  1564, 1567,  1573,  1586. 


41 


Madame    la    duchesse 
de  Mercœur. 

265.  Les  Larmes  de  Philippe 

du  Plessis-Mornay. 

266.  Traité    de    l'Enchante- 

ment. 


267.  Les  Epitrcs  amoureuses, 
d'Aristenète. 


268.  La  Conférence  entre  les 

sieurs  d'Estrade  et  Che- 
vrolière,  jésuitesj  con- 
tre les  sieurs  Petit  et 
Saget,  ministres. 

269.  Le  Soldat   François  en 

colère. 

270.  Les  Amours  du  baron  de 

l'Espine. 

271.  Deux  livres  des  Amants 

fortunés. 

272.  Le  Sacrifice  d'Abraham . 


273.  Les  Epistres  de  Cicéron. 

274.  L'Heureuse  Alliance  3  par 

le  sieur  du  Bouchet. 

275.  L'Amante  tuée  par  son 

Amant. 


265.  Voir  ci-dessus,  n°  24. 

266.  Traité  de  l'enchante- 
ment qu'on  appelle  vulgaire- 
ment le  nouement  de  l'esguil- 
lette,  etc.  —  La  Rochelle,  par 
Hiérosme  Haultin,  1591,  in-8. 

267.  Aristenète,  auteur  grec, 
mort  l'an  358  de  J.-C.  La  pre- 
mière édition  de  ses  lettres  ou 
poésies  erotiques  est  de  1566, 
in-4. 


272.  Le  sacrifice  d'Abraham, 
à  huyt  personnages,  etc.,  avec 
privilège  accordé  à  Gilles  Pa- 
quot ,  (en  date  du  14  juin 
1539),  pet.  in-8. 

273.  Voir  ci-dessus  n°  184. 


' 


276.  Les  Quatrains  du  sieur 
de  Pibrac. 


277.  Recueil  de  plusieurs  es- 

cripts  publiés  contre  les 
Jésuites,  depuis  la  mort 
de  Henry  le  Grand. 

278.  Les  Amours  diverses  du 

sieur  Menaige. 

279.  Le    vray     et    parfait 

Amour. 

280.  La  Teseide,  de  Boccace. 


281.  Les  Amours  de   Damon 

et  de  Caroline. 

282.  Les    Traverses   de    Cir- 

ant lie. 

283.  Un  nouveau    Testament 

Doré. 


276.  Pibrac  (Guy  du  Faur, 
seigneur  de  Pibrac).  Les  qua- 
trains du  sieur  de  Pibrac.  De 
la  manière  civile  de  se  com- 
porter pour  entrer  en  mariage 
avec  une  demoiselle.  Amst., 
Vànder  Haghen,  in-8.  La  pre- 
mière édition  parut  à   Paris, 

1574,  in-4.   Il  en   parut   plu- 
sieurs autres,   notamment   en 

1575,  1583  et  1584. 


280.  Il  parut  un  certain 
nombre  d'éditions  de  cet  ou- 
vrage. La  plus  ancienne  est  de 
1475.  Ferrarise  Augustinus 
(Garnerius),  1475,  in-4.  — 
Peut-être  l'exemplaire  cité  fai- 
sait-il partie  de  l'édition  pu- 
bliée à  Paris,  chez  L'Angelier, 
1597,  in-12,  une  des  dernières 
avant  l'époque  de  notre  inven- 
taire. 


—  43 


284.   Traité  de  l'Antéchrist, 
par  Nicolas  Vignier. 


285. 


286. 


287. 


2? 


Sermon  de  Jean  Calvin 
sur  les  epîtres  à  Timo- 
thèe  et  à  Tite. 

Commentaires  de  Jean 
Calvin  sur  l'harmonie, 
ou  Concordance  des 
trois  Evangélistes  saint 
Marc,  saint  Luc  et  saint 
Mathieu,  avec  les  Com- 
mentaires sur  saint  Jean 
l'Evangéliste,  et  sur  les 
actes  des  Apôtres. 

Sermon  de  Calvin  sur 
VEpître  aux  (râlâtes. 

Institution  de  Jehan  Cal- 
vin. 


289.  Défiances  des  Téorèmes 

par  Chenillet  (sic). 

290.  Serinons  de  Jean  Calvin 

sur  VEpître  aux-  Ephé- 
siens. 

291.  De  la  Participation  dît 

corps  et  du  sang  de 
Nostre  S.  J.  C,  par 
Nicolas  Vignier. 

292.  Le   Catéchisme  des  Jé- 

suites, ou  Examen   de 


284.  Vignier  (Nicolas),  né  en 
1530,  mort  en  1595.  Médecin 
et  historiographe  de  France. 
Le  Traité  de  l'Antéchrist  est 
un  de  ses  ouvrages  les  moins 
célèbres. 

285.  Voir  ci-dessus  n°  20. 


286.  Imprimé  à  Genève,  par 
Conrad  Badins,  1561,  2  vol. 
in-8. 


"287.  Voir  ci-dcssns  n°  20. 


L'Institution  de  Jean 
Calvin  a  eu  de  fréquentes  ré- 
impressions. Les  principales 
éditions  sont  celles  de  1540, 
1553, 1559  et  1562. 


290.  Voir  ci-dessus  m  20. 


291.  Voir  ci-dessus  n°  284. 


292.  De  Bôze  (Théodore),  né 
à    Vezelay   en    1519,   mort   tà 


44  — 


leurs    doctrines ,    par 
Théodore  de  Bèzc. 


293.  Sermon  sur    la  Résur- 

rection de  N.  S.  J.  C. 

294.  Prières  et  Consolations, 

par  Daniel... 

295.  Introductione  ab  antica 

Republica  Romana. 

296.  Teodori  Bizelli. . 

297.  Epistola  magistri    Pas- 

saventi. 

298.  La  Muso  de  Parnasso. 

299.  L'art  de   composer   les 

bataillons,  par  L . . . 

300.  La  confut ation  de  Sponde 

et  de  Bellarmin. 


301 .  Trois  livres  de  l'hisloria 
Guicchardini. 


302.  lconologia  Sezaripa  (sic) 

303.  Justina. 

304.  D  offense    de    la   liberté 

chrestienne. . .  par  Geor- 
ges l'Apostre. 


Genève  en  1605.  Disciple  et 
successeur  de  Calvin  ;  il  a  com- 
posé beaucoup  d'ouvrages  pro- 
testants. 


300.  S-ponde  (Henri  de),  né 
en  1568,  mort  en  1643,  ou 
plutôt  Sponde  (Jean),  frère  du 
précédent,  mort  en  1595,  après 
avoir  abjuré  le  Calvinisme.  — 
Bellarmin  Robert  (cardinal  de), 
né  en  1542,  mort  en  1621.  Ses 
principaux  ouvrages  ont  été 
publiés  à  Cologne  en  1619.  3 
vol.  in-fol. 

301.  Guicchardin  (François), 
né  en  1482,  mort  en  1540,  a 
composé  une  histoire  de  l'Italie 
de  1490  à  1534  en  20  livres 
(Florence,  1561,2  vol.  in-8.). 


-   45  — 

Enfin,  il  conviendrait  d'ajouter  à  cette  longue  liste,  environ 
quinze  ouvrages  dont  les  noms  sont  complètement  effacés,  ou 
que  leurs  titres  altérés  rendent  absolument  méconnaissables. 

Après  une  semblable  énumération,  on  ne  peut  s'empêcher 
de  songer  aux  vicissitudes  des  choses  humaines  et  de  déplorer 
amèrement  la  perte  de  pareils  trésors.  Que  sont  devenus  tous 
ces  volumes  rares,  tous  ces  jolis  exemplaires  d'éditions 
curieuses,  qu'un  bibliophile  de  nos  jours  payerait  au  poids 
de  l'or.  Brûlés,  perdus,  ou  délaissés  peut-être,  dans  quelque 
grenier  poudreux  ou  dans  quelque  cave  humide,  servant  de 
pâture  quotidienne,  aux  rongeurs  et  aux  vers;  voilà  sous 
quel  aspect  nous  pouvons  les  envisager  aujourd'hui!  —  Hélas! 
tout  passe  et  disparaît  sous  les  coups  du  temps  et  sous  le  flot 
des  révolutions;  mais  nous,  humbles  chercheurs,  qui  passons 
notre  vie  à  reconstituer  sans  cesse  ces  collections  qu'avaient 
créées  nos  pères,  et  qu'un  jour  d'orage  a  balayé  sans  retour, 
nous  suivons  avec  amour  les  moindres  traces,  les  plus  légers 
souvenirs  de  ces  pensées  qui  furent  leurs,  éprouvant  alors  une 
joie  nouvelle  à  être,  sinon  les  continuateurs,  du  moins  les 
imitateurs  fidèles  d'une  oeuvre  noblement  commencée.  — 
C'est  là  un  motif  sérieux  de  reconnaissance  envers  l'obscur 
Notaire  qui  nous  a  conservé  ce  précieux  catalogue,  et  c'est  un 
devoir  pour  nous  de  l'en  remercier  ici. 

Samuel  d'Avaugour  n'avait  que  vingt-sept  ans,  quand 
Pierre  Hamon  inscrivait  au  Dial,  l'inventaire  de  sa  bibliothèque, 
et  cependant  si  l'on  considère  et  le  nombre  de  ses  ouvrages  et 
leur  choix  remarquable,  l'on  ne  peut  s'empêcher  de  recon- 
naître, qu'une  telle  bibliothèque  devait  être  fort  rare  en 
province  à  cette  époque  et  que  son  possesseur  savait  déjà 
allier  dignement  l'érudition  d'un  lettré  à  la  bravoure  d'un 
grand  capitaine.  —  Aussi  combien  ne  devons-nous  pas 
regretter  que  la  Providence  ne  lui  ait  pas  permis  de  parcourir 
longtemps  la  noble  voie  qu'il  s'était  tracée  dès  sa  jeunesse.  — 
Si  sa  bibliothèque  a  tout  l'air  de  n'être  encore  qu'une  œuvre 
en  formation,  il  est  probable  que  s'il  avait  vécu  plus  âgé,  il 
eût  continué  à  y  recueillir  de  nouvelles  richesses,  à  la  meubler 


-  46  — 

encore  davantage,  des  auteurs  anciens  qui  y  sont  un  peu  rares 
et  à  se  procurer  au  fur  et  à  mesure  de  leur  apparition  comme 
il  l'avait  fait  jusqu'alors,  tout  ouvrage  utile  et  digne  de 
figurer  dans  la  bibliothèque  d'un  véritable  amateur.  C'est 
dans  l'âge  mur,  en  effet,  et  surtout  dans  la  vieillesse  qu'on  a 
besoin  de  cette  nourriture  intellectuelle  qui  devient  pour 
l'homme,  une  consolation  et  une  force  au  milieu  des  luttes 
de  la  vie,  et  c'est  alors  surtout  que  l'on  s'aperçoit  mieux  de  la 
profonde  vérité  de  cette  parole  du  poëte  : 

Un  livre  est  un  ami  qui  ne  change  jamais  (1  ). 

Nous  venons  de  voir  passer  sous  nos  yeux  tous  les  détails 
du  cabinet  de  travail  du  châtelain  de  Saffré;  d'arrêter  nos 
regards  sur  chacune  de  ces  particularités  qui  demeurent,  en 
quelque  sorte,  comme  une  traduction  des  pensées  humaines; 
après  cela,  quelles  pouvaient  être,  dès  lors,  les  occupations 
journalières  d'un  tel  homme?  Maintenant  que  nous  sommes 
initiés  à  ses  goûts,  à  ses  aspirations,  à  son  caractère,  ne 
pouvons-nous  pas,  désormais,  pénétrer  plus  avant  dans  le 
champ  ordinaire  de  sa  vie  intime,  et  déchirer  ce  voile  dont 
nous  n'avions  fait  que  soulever  un  côté?  —  Après  les  fatigues 
de  la  guerre  et  les  longs  mois  passés  à  la  cour,  où  devaient 
l'appeler  son  rang  et  sa  naissance  illustre,  il  est  vraisemblable 
que  Samuel  d'Avaugour,  devait  se  trouver  heureux  de  venir 
chercher  de  temps  en  temps  quelques  jours  de  repos,  au 
milieu  du  calme  de  la  campagne  et  de  l'affection  de  ses  vassaux. 
—  Les  chasses,  les  promenades  équestres,  les  jeux  de  bague, 
fort  en  honneur  alors,  peut-être  était-ce  là  des  exercices 
suffisants  pour  charmer  ses  loisirs,  et  souvent  capables  de 
remplir  sa  journée.  Mais  les  travaux  de  la  raison  et  de 
l'intelligence,  doivent  avoir  aussi  une  large  part  clans  la  vie 
d'un  homme  instruit;  les  avantages  que  procure  une  éducation 


(1)  Jules  Janin. 


—  47  — 

soignée  ont  besoin  d'être  utilisés  sans  cesse;  l'esprit  à  soif  de 
se  faire  jour,  de  marcher  encore  de  plus  en  plus  vers  la 
lumière;  de  se  manifester  autour  de  lui,  et  c'est  sous  ce  point 
de  vue  que  nous  préférons  de  beaucoup  nous  représenter 
Samuel  d'Avaugour. 

Sa  bibliothèque  nous  le  révélait  déjà  tout  à  l'heure  comme 
un  amateur  véritable  et  parfaitement  au  courant  du  mouve- 
ment littéraire  de  son  époque,  le  Dial  ajoute  encore  qu'il  était 
considéré  comme  un  seigneur  aussi  affable  qu'expérimenté. 
—  Il  aimait  à  pratiquer  cette  hospitalité  bretonne,  si  cordiale 
et  si  renommée,  et  il  en  usait  d'autant  plus  largement,  que 
son  influence  et  ses  richesses,  lui  assignaient  alors  sans 
conteste,  un  des  premiers  rangs  parmi  la  Noblesse  du  Comté 
Nantais. 

Les  Seigneurs  se  donnaient  volontiers  rendez-vous  au 
château  de  Saffré,  où  ils  étaient  toujours  sûrs  de  trouver  : 
«  bon  agréement  et  bon  accueil  »  ;  et  celui-ci  était 
devenu ,  en  quelque  sorte ,  le  point  de  ralliement ,  le  lieu 
constant  de  réunion  de  tout  ce  que  cette  partie  de  la 
Bretagne  comptait  alors  de  gens  instruits  et  distingués.  — 
Les  familles  de  Rohan  ,  Descartes  de  Chavagne  ,  deMonterfll , 
de  Lanvaulx  ,  de  Mantauban  du  Goust,  de  L'Estourbeillon 
de  la  Savinais  ,  d'Entragues  ,  de  la  Chapelle  de  la  Roche- 
Giffart  ,  de  la  Muce-Ponthus  ,  de  Lire,  de  Chamballan,  de 
Larlo  ,  de  Vay,  de  Carduel ,  de  Champagne ,  du  Hardaz  , 
étaient  les  hôtes  particulièrement  familiers  ,  de  «  ces  bonnes 
vesprées  ,  passées  en  gais  amusements  ou  discussions  prouf- 
fitables.  »  —  Il  y  a  de  là  bien  loin  aux  théories  chagrines  et 
envieuses  de  certains  esprits  de  nos  jours  ,  qui  prétendent 
donner  ,  à  nos  ancêtres  ,  des  leçons  d'éducation  et  de  savoir- 
vivre  ;  le  châtelain  de  Saffré  nous  est  une  preuve  nouvelle  , 
qu'au  milieu  de  bien  des  catastrophes  ,  il  n'est  guère  de 
siècle  qui  n'ait  possédé  ses  oasis  de  paix  et  de  lumière. 

Enfin,  si  l'on  en  juge  par  les  nombreux  actes  transcrits  au 
Dial,  l'agriculture,  sous  son  heureuse  influence,  était  alors 
fort  prospère  au  pays  de  Saffré.  De  cette  façon,  il  sut  aider 


—  48  - 

aussi  au  bien-être  de  ceux  que  la  Providence  avait  placés  au 
dessous  de  lui,  et  c'est  également  avec  un  plaisir  bien  vif,  que 
nous  aimons  a  le  voir  par  la  pensée  s'occupant  dans  son 
i :abinet  de  travail  de  l'administration  de  ses  domaines,  ou 
mieux  encore  arrêtant  lui-même,  après  quelque  grave  étude, 
les  secours  qu'il  fera  distribuer  le  lendemain  aux  indigents 
de  la  paroisse,  comme  nous  l'indique  une  longue  liste 
transcrite  au  Dial,  sous  ce  titre  aussi  simple  qu'éloquent  : 
«  Liste  dos  Pauvres  que  secourt  Monseigneur  de  Saffré.  » 

De  L'ESTOURBEILLON. 


ODIN  L'HOMME 

ÉTUDE   HISTORIQUE   ET   LITTÉRAIRE 


Messieurs, 

Derrière  chacune  des  innombrables  divinités  des  Olympes 
païens,  se  cache-t-il  un  homme,  une  abstraction  de  l'esprit,  ou 
simplement  un  mythe  de  quelque  phénomène  de  la  nature? 
Question  difficile  et  complexe  dont  la  solution  est  encore  à 
donner. 

De  nos  jours,  une  école  d'érudits  a  pris  à  tâche  de  réduire 
les  conceptions  mythologiques  au  seul  mythe  solaire.  D'après 
ces  savants,  l'Iliade  elle-même,  ce  chef-d'œuvre  de  la  poésie 
humaine,  ne  serait  que  le  magnifique  développement  de  l'ado- 
ration de  la  nature,  et  en  particulier  de  son  vivificateur  et  roi, 
le  soleil. 

D'autres,  et  cette  opinion  a  de  beaucoup  la  priorité  d'âge, 
considèrent  les  dieux  et  les  demi-dieux  de  la  fable  comme  le  ré- 
sultat de  l'apothéose  d'hommes  illustres,  bienfaiteurs  de  l'huma- 
nité ou  ses  tyrans,  dont  l'existence  se  perd  dans  la  nuit  des 
temps.  Les  divinités  qui  ne  rentrent  pas  dans  cette  catégorie, 
seraient  la  personnification  de  vertus  et  de  vices,  ou  d'autres 
êtres  de  raison  chers  à  l'homme  ou  abhorrés  de  lui.  Telle  est  la 
thèse  mythologique  qui  a  instruit,  en  l'amusant,  notre  enfance. 

Sans  épouser  systématiquement  l'une  ou  l'autre  de  ces  hypo- 
thèses, émettant  même  l'opinion  qu'elles  doivent  être  étudiées 
parallèlement,  parce  que  ni  l'une  ni  l'autre  ne  renferme  la  vérité 

4 


-  50  - 

exclusive,  nous  avons  le  désir,  dans  ces  quelques  pages,  de 
vous  présenter  la  divinité  principale  de  la  théogonie  Scandinave, 
dépouillée  des  vêtements  merveilleux  que  lui  a  prêtés  la  fable  et 
de  vous  parler  d'Odin  VJiommc,  tel  que  nous  le  font  concevoir 
quelques  récentes  études. 

Retracer  brièvement  ce  que  l'on  croit  savoir  de  son  histoire  ; 
esquisser,  dans  ses  grandes  lignes  et  son  esprit,  la  religion  du 
Nord  dont  il  fut  le  fondateur  ;  puis,  clore  cette  notice  par  la  tra- 
duction d'une  poésie  anglaise  fraîchement  publiée,  et  formant 
sous  ce  titre  :  Odm  V homme,  le  prologue  d'un  recueil  de  légende 
saxonnes  où  brillent  des  beautés  de  premier  ordre  ;  tel  est  notre 
dessein,  heureux  si  nous  intéressons  quelques  instants  votre 
docte  compagnie. 

Il  fut  une  race  du  Nord  que  les  aigles  rom  aines  ne  purent 
jamais  étouffer  dans  leurs  serres.  Cette  race,  que  les  conquérants 
du  monde  appelaient  dédaigneusement  les  barbares,  était  com- 
me un  arbre  vigoureux  dont  le  tronc,  planté  aux  forêts  de  la 
Germanie,  étendait  ses  rameaux  et  répandait  ses  semences  au  loin, 
sur  les  plages  du  Danemark,  de  la  Suède  ,  de  la  Norwège,  de  la 
Grande-Bretagne. 

Les  malheurs  qui  avaient  frappé  la  race  des  Teutons-Scandi- 
naves avaient  été  pour  eux  l'origine  d'une  merveilleuse  destinée. 

Le  christianisme,  en  conquérant  la  Grèce,  allait  conquérir 
l'àme  du  monde.  En  devenant  le  maître  de  Rome,  il  allait  trou- 
ver accès  dans  toutes  ces  vastes  régions,  subjuguées  par  les  armes 
romaines,  percées  de  voies  romaines,  gouvernées  par  la  loi  ro- 
maine. Mais  les  civilisations  de  la  Grèce  et  du  Latium  avaient, 
l'une  comme  l'autre,  corrompu  leur  voie  ;  elles  s'étaient  plongées 
dans  les  séductions  de  l'orgueil,  de  la  sensualité  et  des  jouissan- 
ces matérielles.  Elles  étaient  ainsi  devenues  incapables  de  rendre 
justice  aux  conceptions  élevées  et  pures  du  christianisme. 

Ce  sens  dont  elles  manquaient,  la  race  des  barbares  seule, 
vierge  du  contact  des  perversions  raffinées  d'une  société  en  déca 
dence,  pouvait  le  leur  donner.  Errant  a  travers  des  climats  in- 
cléments, sous  des  dieux  d'airain,  ces  hommes  de  fer  avaient 


-  51   - 

conservé  une  simplicité  et  une  pureté  de  mœurs  qu'on  ne  ren- 
contrait plus  ailleurs.  Enrichie  par  l'union  de  cet  élément  nou- 
veau aux  trésors  de  l'intelligence  grecque  et  de  la  jurisprudence 
romaine,  la  vraie  religion  dont  les  premières  semences,  fécondées 
du  sang  divin,  ont  été  confiées  au  sol  étroit  de  la  Palestine,  pourra 
étendre  ses  rameaux  sur  toutes  les  plages  du  monde.  Si  la  race 
des  Barbares  avait  été  versée  dans  les  sciences  et  les  arts  de  la 
Grèce,  si  elle  s'était  revêtue  du  manteau  doré,  mais  trompeur,  de 
la  civilisation  romaine,  elle  aurait  participé  à  la  corruption  de  ces 
peuples.  Peut-être,  dans  ce  cas,  le  progrès  de  la  société  par  les 
idées  chrétiennes  ne  se  serait-il  pas  réalisé,  et  le  monde  n'aurait 
vu  ni  les  merveilles  de  la  foi  du  moyen  âge,  ni  les  splendeurs 
intellectuelles  de  l'âge  moderne.  Ce  que  l'avenir  réserve  de  déve- 
loppement et  de  perfectibilité  à  la  société  humaine  aurait  été 
frappé  de  mort  dans  son  germe.  Il  était  nécessaire  que,  dans 
quelque  région  du  globe,  la  civilisation  fût  retardée,  afin  d'y  pré- 
parer un  remède  aux  abus  de  cette  civilisation,  et  qui  sait  si  ce 
n'est  pas  là  toujours  le  plan  providentiel  ?  Qui  peut  dire  que  l'his- 
toire de  Rome  ne  sera  pas  notre  histoire  ?  Oui,  les  races  dont 
nous  avons  coutume  de  déplorer  l'état  social  primitif  ou  arriéré, 
sont  peut-être  en  réserve  pour  une  œuvre  semblable,  comme  des 
plantes  que  le  jardinier  laisse  dans  un  sol  infécond,  afin  de  les 
transporter  plus  tard  dans  un  plus  riche  terrain,  où  elles  trouveront 
une  sève  merveilleuse. 

Mais  quelle  est  l'histoire  connue  de  ces  peuples  dont  la  voca- 
tion était  si  grande  ?  Comment  furent-ils  préparés  à  la  remplir  ? 
La  réponse  à  ces  questions  se  trouve  renfermée  dans  une  tradi- 
tion dont  l'importance  historique  est  évidente  et  qui,  cependant, 
a  été  jusqu'à  ces  jours  peu  appréciée,  et  est  encore  peu  connue. 

Une  tradition  antique  et  célèbre  dit  Mallet  dans  ses  Antiquités 
du  Nord,  (Northern  Antiquities),  confirmée  par  les  poèmes  de 
tous  les  peuples  septentrionaux,  par  leurs  chroniques,  leurs  insti- 
tutions et  leurs  coutumes  jusqu'à  ce  jour,  nous  apprend  qu'un 
personnage  extraordinaire,  nommé  Odin,  régnait  autrefois  dans 
le  Nord. 


—  52  — 

Ces  témoignages  se  résument  tous  dans  celui  de  Snorri, 
le  vieux  chroniqueur  norvégien,  et  dans  les  commentaires  et  les 
explications  qui  y  furent  ajoutés  par  Tophœus. 

La  République  romaine  était  arrivée  au  plus  haut  point  de  sa 
puissance.  Tout  le  monde  connu  était  soumis  à  ses  lois,  quand 
un  événement  imprévu  lui  suscita  d'innombrables  ennemis,  au 
sein  des  forêts  de  la  Scythie,  et  sur  les  rives  du  Tanaïs. 

Mithridate,  fugitif  devant  les  aigles  romaines,  avait  conduit 
Pompée,  acharné  à  sa  poursuite,  dans  ces  régions  sauvages. 
L'espoir  du  monarque  vaincu  était  d'armer  contre  l'ambition 
romaine  toutes  les  hordes  barbares  voisines  de  son  empire,  dont 
la  liberté  était  menacée  par  les  triomphes  des  conquérants.  Il  y 
réussit  d'abord,  mais  ces  peuplades  auxquelles  faisaient  défaut 
J'unité,  les  armes,  la  discipline  et  la  tactique,  furent  bientôt 
forcées  de  lâcher  pied  devant  le  génie  stratégique  de  Pompée. 
Un  de  leurs  chefs  se  nommait  Odin.  Il  commandait  le  peuple 
d'OEsir  dont  le  territoire  devait  se  trouver  entre  le  Pont-Euxin 
et  la  mer  Caspienne.  Sa  capitale  était  Asgard  ;  on  y  adorait 
un  Dieu  suprême,  fameux  dans  tous  les  pays  d'alentour.  Odin, 
ayant  réuni  sous  sa  bannière  la  jeunesse  de  son  peuple  et  celle 
des  peuples  ses  voisins,  se  mit  en  marche  vers  le  nord  et  l'ouest 
de  l'Europe,  soumettant  en  passant  tous  les  pays  qu'il  traversait 
et  leur  donnant  pour  chef  quelqu'un  de  ses  enfanfs. 

Beaucoup  de  familles  souveraines  du  Nord  passent  pour  des- 
cendre des  fils  d'Odin.  Ainsi,  Horsa  et  Hengist,  chefs  saxons  qui 
firent  au  Ve  siècle  la  conquête  de  la  Bretagne,  comptaient  Odin 
ou  Wodin  au  nombre  de  leurs  ancêtres.  Il  en  était  de  même  des 
autres  princes  anglo-saxons  et  de  la  plupart  de  ceux  de  la  Basse- 
Germanie  et  du  Nord. 

Gibbon,  se  départant  ici  quelque  peu  de  son  scepticisme  habi- 
tuel, reproduit  cette  tradition  en  termes  presque  identiques,  avec 
des  réserves  toutefois,  sur  l'authenticité  de  plusieurs  points.  Voici 
son  opinion  :  «  On  suppose  qu'Odin  était  chef  d'une  peuplade 
barbare  qui  habitait  sur  le  bord  du  lac  Mœotis,  jusqu'à  ce  que  la 
chute  de  Mithridate  et  les  victoires  de  Pompée  vinssent  menacer  le 


—  53  — 

Nord  de  la  servitude.  Ce  prince  à  demi  sauvage,  cédant,  la  rage 
au  cœur,  à  un  ennemi  trop  puissant  pour  lui  laisser  l'espoir  de 
le  vaincre,  conduisit  sa  tribu  hors  des  frontières  de  la  Sarmatie 
asiatique  jusque  dans  la  péninsule  de  Suède,  avec  le  noble  des- 
sein de  former,  dans  cette  retraite  inaccessible,  un  peuple  qui, 
dans  la  suite  des  temps,  pût  prendre  sur  Rome  la  revanche  de  ses 
revers.  Déjà  il  voyait  dans  l'avenir  ses  invincibles  Goths,  bouil- 
lonnant d'un  fanatisme  belliqueux,  s'élancer  en  hordes  innom- 
brables des  terres  arctiques,  pour  châtier  les  oppresseurs  de  l'hu- 
manité. Malgré  les  obscurités  de  l'Edda,  il  est  possible  de  repré- 
senter Odin  comme  le  Mahomet  du  Nord,  fondateur  d'une  reli- 
gion adaptée  à  son  climat,  à  son  peuple,  et  surtout  à  ses  desseins 
de  vengeance.  » 

Selon  l'auteur  du  Dictionnaire  de  la  Mythologie  des  peuples 
du  Nord  (*),  Odin  était  fils  d'un  roi  de  Perse  nommé  Friedleif,  qui 
régnait  sur  le  pays  de  Godheim  et  dont  la  capitale  était  Asgard. 
Fuyant  devant  les  Romains,  il  vint  avec  ses  Asas  (Asiatiques) 
fonder  dans  l'île  de  Fionie  la  ville  d'Odins-Ei  (île  d'Odin),  qui 
s'appelle  encore  de  nos  jours  Odinsée. 

Suivant  la  légende,  il  envoya  à  la  cour  de  Gylfe,  roi  de  Suède, 

une  chanteuse  habile  nommée  Gefion,  qui  charma  tellement  le 

monarque,  qu'il  donna  à  Odin  une  partie  de  ses  états  pour   s'y 

établir. 

D'après  Snorri  (2),  les  deux  frères  d'Odin,  Vili  et  Vi,  sont  des  per- 


(>)  L.-M.  Noirot,  1832. 

(s)  Snorri  Sturleson,  mort  en  1241,  composa  le  plus  récent  des  deux 
recueils  qui  portent  le  nom  tfEddas.  L'Edda  de  Snorri  se  nomme  aussi 
VEdda  en  prose  par  opposition  a  l'Edda  ancienne.  La  première  est  une 
compilation  mythographique,  sorte  de  dictionnaire  de  la  légende  Scandi- 
nave. Elle  comprend  trois  parties  :  une  exposition  doctrinale  en  forme  de 
dialogue,  un  lexique  des  locutions  employées  par  les  Scaldes,  enfin  un  traité 
de  grammaire  et  de  prosodie  Scandinave. 

La  seconde,  de  beaucoup  la  plus  célèbre,  est  une  collection  de  poèmes 
et  de  fragments  de  poèmes  recueillis  au  onzième  siècle  par  l'Islandais 
Semund.  Le  plus  important  de  ces  poèmes  est  la  Foluspa,  récit  génésia- 


—  54  — 

sonnages  historiques,  qui  gouvernaient  à  sa  place  pendant  ses 
absences.  Schoning,  Suhm,  Grœter,  Saxo,  partagent  ces  opi- 
nions, au  sujet  de  la  réalité  de  l'existence  d'Odin  et  de  ses  frères. 

Le  nom  même  d'Odin  semble  nous  fournir  une  présomption, 
sinon  une  preuve,  de  l'origine  orientale  de  ce  personnage  il- 
lustre. Il  offre,  en  effet,  une  analogie  frappante  avec  le  Codant  des 
Samskrits,  le  Coda  des  Perses,  et  le  Votan  des  Mexicains,  surtout, 
si  nous  considérons  les  altérations  de  ce  nom  en  différents  idiomes: 
Wodan  en  Germanie,  Voden  en  Angleterre,  Woda  chez  les  Sla- 
ves, Guodarij  Godan,  Guodeucn,  Vuothcn,  Oden,  chez  différents 
autres  peuples. 

De  nombreux  clans,  sur  les  deux  rives  de  la  Baltique,  furent 
subjugués  parla  valeur  invincible  d'Odin,  par  son  éloquence  irré- 
sistible, et  par  la  terreur  de  la  puissance  magique  qui  lui  était 
attribuée.  La  foi  nouvelle  qu'il  avait  propagée  au  loin  durant  sa 
longue  et  heureuse  carrière,  il  voulut  la  confirmer  par  le  sacrifice 
volontaire  de  sa  vie.  Méprisant  l'homme  qui  se  laisse  affaiblir 
par  la  maladie  ou  la  décrépitude  sénile,  il  voulut  mourir  comme 
il  convient  à  un  soldat.  Devant  les  Swèdes  et  les  Goths  assemblés 
avec  solennité,  il  se  fit  avec  son  glaive  neuf  blessures  mortelles, an- 
nonçant desa  voix  mourante  qu'il  se  rendait  au  ciel,  pour  y  pré- 
parer le  grand  festin  des  héros  dans  le  palais  du  dieu  de  la 
guerre. 

La  religion  fondée  par  Odin  avait  conservé  beaucoup  des  plus 
pures  traditions  du  monde  primitif.  Elle  enseignait  l'existence 
d'un  Dieu,  maître  de  l'univers,  à  qui  tout  est  soumis,  à  qui  tout 
obéit  ;  c'est  ainsi  que  Tacite  caractérise  cette  Divinité  suprême. 
La  mythologie  islandaise  la  nomme  l'Auteur  de  tout  ce  qui  existe; 
l'Etre  éternel,  vivant  et  redoutable,  Celui  dont  le  regard  plonge 


que  et  apocalyptique,  vision  confuse  et  terrible  de  l'origine  et  de  la  des- 
truction du  monde.  Le  Hava-Mal  est  un  poème  sententieux  contenant  les 
adages  de  la  sagesse  sc;mdinave.  Citons  enfin  le  Chant  de  Rig,  poème  poli- 
tique et  historique,  dont  les  vers  chantent  la  succession  des  trois  races  qui 
ont  peuplé  la  Scandinavie. 


-  55  — 

dans  les  lieux  les  plus  secrets,  Celui  qui  ne  change  jamais.  La 
religion  Scandinave  lui  attribuait  un  pouvoir  infini,  une  science 
sans  limite,  une  justice  incorruptible.  Elle  défendait  à  ses  sec- 
tateurs de  le  représenter  sous  une  forme  corporelle.  Elle  ne  son- 
geait pas  à  renfermer  son  culte  dans  une  enceinte  de  murailles. 
C'étaient  les  bois  immenses,  les  forêts  vierges,  avec  le  ciel  pour 
voûte,  qui  servaient  de  temples  aux  enfants  d'Odin.  Là,  Dieu  ré- 
gnait dans  le  silence  mystérieux  de  la  nature,  et  ses  adorateurs 
se  sentaient  remplis  d'une  vague  et  sainte  terreur.  De  sa  divini- 
té suprême  émanait  un  nombre  presque  infini  de  déités  et  de 
génies  subalternes,  dont  chaque  partie  du  monde  visible  était  la 
demeure  et  le  temple.  Offrir  à  Dieu  des  sacrifices,  l'invoquer  par 
des  prières,  ne  point  nuire  à  autrui,  être  intrépide  dans  les  com- 
bats, tels  étaient  les  seuls  préceptes  moraux  déroulant  de  la  doc- 
trine d'Odin.  La  croyance  en  une  vie  future  en  était  le  couron- 
nement. L'idée  de  la  Providence  y  était  plus  nette  et  plus  domi- 
nante que  dans  les  autres  religions  du  Nord.  C'est  dans  la  mytho- 
logie de  l'Islande  que  nous  retrouvons  le  monument  le  plus 
complet  et  le  plus  précieux  de  la  doctrine  Scandinave. 

Il  est  facile  cependant  de  reconnaître,  sous  ce  vêtement  reli- 
gieux jeté  par  Odin  sur  son  armée  d'émigrés,  le  souvenir  d'une 
croyance  plus  ancienne,  plus  pure,  que  les  fugitifs  avaient  rappor- 
tée de  leur  patrie  asiatique.  Tandis  que  le  peuple,  superstitieux 
comme  toutes  les  foules,  multipliait  de  plus  en  plus  ses  divinités, 
les  grands  et  les  sages  conservaient  le  Monothéisme  de  leurs 
prêtres  orientaux.  «  Je  jure,  disait  devant  l'assemblée  du  peuple 
Earold  Harfraga,  premier  roi  de  la  Norvège  unifiée,  je  jure,  et 
prends  l'engagement  le  plus  solennel  de  ne  jamais  offrir  de 
sacrifice  aux  dieux  qu'adore  la  foule,  mais  à  Celui-là  seul  qui  a 
créé  le  monde  et  tout  ce  que  nous  y  admirons,  a 

Ce  qui  distingue  le  plus  la  religion  des  Scandinaves  des  autres 
religions  connues,  est  cette  idée  de  la  destruction  et  de  la  mort 
qui  doit  frapper  tous  les  dieux  inférieurs  et  Odin  divinisé  lui- 
même,  dans  un  combat  suprême  contre  l'Etre  unique  et  tout- 
puissant  qui  remportera  sur  eux  la  victoire. 


-  56  - 

Ce  dogme  des  Eddas  était-il,  comme  l'ont  prétendu  des  savants 
anglais,  une  sorte  de  prophétie  de  la  victoire  du  vrai  Dieu  sur 
le  paganisme  ?  Cette  opinion  est  au  moins  agréable  à  des  cœurs 
chrétiens,  si  elle  ne  peut  être  scientifiquement  établie. 

Nous  ne  pouvons  résister  à  la  tentation  de  citer  un  fragment 
des  chants  sacrés  de  l'Edda  racontant  ce  terrible  combat  des 
dieux  et  des  héros,  et  le  triomphe  du  Tout-Puissant  qui  le  ter- 
mine. La  scène  se  passe  dans  la  plaine  de  Vigrid. 

«  L'âge  de  fer  finira  par  le  fer.  Les  dieux,  les  héros,  les  hommes 
qui  ont  vécu  dans  l'impiété  et  la  haine  du  Dieu  suprême,  se  heur- 
teront dans  une  plaine  que  rougira  leur  sang.  Ce  jour-la,  les  forêts 
delà  terre  périront  desséchées  ;  les  étoiles  tomberont  de  la  voûte 
céleste  ;  le  chien  ailé  qui,  de  siècle  en  siècle,  chasse  le  soleil  avec 
acharnement,  l'atteindra  enfin  pour  le  dévorer.  Le  frêne  sacre 
Ygdrosil,  dont  les  branches  ombragent  le  ciel,  dont  la  racine 
plonge  au  plus  profond  des  Enfers,  dont  les  feuilles  portent  écri- 
te la  destinée  de  chaque  homme,  et  les  rameaux  celle  des  empi- 
res qui  font  trembler  le  monde,  laissera  tomber  son  fruit  avant 
sa  maturité. 

«  Midgard,  le  serpent  monstrueux  dont  les  vastes  replis  contien- 
nent l'Océan  dans  ses  bornes,  se  réveillera  de  son  long  sommeil. 
Il  s'agitera  avec  fureur,  et  la  mer,  libre  de  toute  entrave,  se  pré- 
cipitera, comme  une  montagne  liquide,  sur  les  continents 
qu'elle  engloutira.  Sur  ces  ondes  furieuses,  on  verra  voguer 
Naglfar,  le  vaisseau  fantôme,  dont  les  membrures  sont  faites  avec 
les  ongles  des  morts,  dont  les  voiles  sont  tissues  de  ténèbres  et 
dont  les  trois  Parques  tiennent  le  gouvernail.  Quand  vous  ver- 
rez approcher  ce  sinistre  navire,  sachez-le,  la  fin  sera  proche  ! 

«  Soudain,  on  entendra  sonner  Gjallar,la  trompette  céleste,  que 
jamais  n'ouïrent  les  dieux  ni  les  mortels.  Dans  la  salle  enchantée 
du  palais  de  Valhalla,  les  dieux  sont  assis  à  leur  divin  ban- 
quet. Au  son  de  la  trompette,  ils  se  lèveront  soudain,  revêti- 
ront leurs  armures  d'or,  s'élanceront  sur  leurs  chars  rapides. 
A  leur  tête,  marche  le  chef  de  l'armée  des  dieux,  Odin,  qui  fut 
notre  roi.  A  sa  droite  s'avance   Thor,  dont  la  massue    fend 


-  57  — 

comme  la  foudre  le  sommet  des  montagnes  et  brise  les  plus 
durs  rochers.  » 

Le  livre  sacré,  après  après  avoir  décrit  la  bataille  en  termes 
remplis  d'une  sauvage  poésie,  nous  fait  assister  au  dénouement 
de  ce  drame  gigantesque. 

«  Avant  que  le  ciel  inférieur  qni  abrite  les  palais  du  Valhalla 
ait  étendu  sa  voûte,  déjà  Muspell,  le  troisième  ciel,  l'ardent  Em- 
pyrée,  se  perdait  dans  l'infini  de  l'espace,-  Muspell,  le  trône  sans 
limites  de  cette  divinité  suprême,  qui  n'eut  point  de  commence- 
ment et  ne  connaîtra  point  de  fin.  Ce  Dieu,  entouré  d'une  armée 
d'esprits  célestes,  dont  les  ailes  voilent  la  lumière  de  sa  face, 
viendra  au  jour  du  jugement  des  dieux  et  des  hommes,  purifier 
le  monde  par  le  sang  et  le  feu. 

«  A  cette  heure  fatale,  Bifrost,  le  pont  aux  couleurs  de  l'arc-en- 
ciel  qui  unit  le  firmament  à  la  terre,  volera  en  éclat.  Les  mu- 
railles de  cristal  de  l'Empyrée  s'écrouleront  sur  la  terre,  et  les 
Enfants  de  lumière  fouleront  aux  pieds  leurs  ruines. 

«  Un  seul  rayon  de  feu,  jaillissant  du  casque  dont  le  front  du 
Tout-Puissant  s'ombrage,  frappera  le  champ  de  bataille,  et  nul 
ne  pourra  en  supporter  l'atteinte.  Dans  la  flamme,  périra  la  race 
des  Géants.  Dans  la  flamme,  disparaîtront  et  Odin  et  les  dieux 
émanés  de  sa  divinité.  Dans  la  flamme,  s'écroulera  le  palais  de 
Valhalla  et  avec  lui  les  montagnes  de  glace  de  Jotunheim.  On 
les  verra  se  fondre  et  s'abîmer  dans  les  vagues  ardentes.  Tout 
périra  par  le  feu.» 

Alors  s'ouvrira  le  règne  de  la  paix  et  du  bonheur.  La  prophé- 
tie de  Voluspa  ou  de  la  Vola  (')  nous  le  décrit  en  termes  suaves: 

«  On  verra  surgir  du  sein  de  la  mer  une  autre  terre  plus  belle 
et  plus  verdoyante,  avec  de  riches  guérets  où  le  froment  croîtra 
sans  semences  et  sans  labour.  Vidas  et  Vali  survivront  à  la  cata- 
strophe. Ni  les  flots  déchaînés,  ni  les  flammes  de  Surtur,  ne  pour- 


(0  La  Vola  ou  Vala  était  une  prophétesse  qui  prédisait  l'avenir  des  en- 
fants nouveau-nés. 


•     —  58  - 

ront  les  atteindre.  Ils  habiteront  dans  la  plaine  d'Ida  on  s'élevait 
autrefois  la  cité  d'Asgard.  Baldur  arraché  à  la  mort  et  Hodur, 
son  meurtrier  involontaire,  y  trouveront  aussi  un  refuge.  Ils 
s'assiéront  et  converseront  ensemble  de  leur  ancien  état,  et  des 
périls  auxquels,  seuls  de  leur  race,  ils  ont  échappé.  » 

Une  analogie  frappante,  explicable  seulement  par  le  fait  de  la 
migration  des  sujets  d'Odin,  rattache  les  doctrines  élevées  de  la 
religion  Scandinave  à  celles  de  l'ancienne  Perse.  «  On  sait,  écrit 
Blackweil,  éditeur  des  Antiquités  du  Nord,  que  les  Scandinaves 
sortirent  d'un  pays  asiatique.  Leur  doctrine  est  en  beaucoup  de 
points  semblable  à  celle  des  Mages.  Zoroastre  avait  enseigné  que 
le  conflit  entre  la  lumière  et  les  ténèbres,  le  bon  et  le  mauvais 
principe,  Ormuzd  et  Ahriman,  durerait  jusqu'au  dernier  jour  du 
monde.  Alors  le  bon  principe  se  réunirait  au  Dieu  suprême  dont  il 
émane,  le  mauvais  serait  vaincu  et  enchaîné,  les  ténèbres  dissipées, 
et  le  monde,  purifié  par  une  conflagration  universelle,  deviendrait 
un  séjour  de  lumière  et  de  gloire  dans  lequel  le  mal  n'aurait  plus 
d'accès.  »  Nous  avons  vu  dans  le  Voluspa  Scandinave  la  même 
doctrine  en  termes  à  peine  différents. 

La  religion  persane  du  Zend-Avesta  était  calculée  pour  former 
un  peuple  énergique,  observateur  d'unemoralepure.  Ainsi  en  était- 
il  du  système  religieux  d'Odin.  L'un  et  l'autre  de  ces  cultes  offrait 
le  spectacle  d'une  lutte  continuelle.  A  l'origine,  c'était  la  lutte  entre 
les  deux  principes,  le  bien  et  le  mal.  Peu  à  peu,  la  pureté  de  ce 
dogme  s'altéra.  Plusieurs  siècles  avant  l'Hégire  d'Odin,  la  religion 
persane  avait  déjà  dégénéré.  A  la  vérité,  ses  Mages  avaient  con- 
servé les  anciennes  traditions.  Ce  furent  elles  qui  les  conduisi- 
rent plus  tard  à  la  crèche  de  Bethléem,  mais  le  vulgaire  était  in- 
fluencé par  les  séductions  de  la  poésie  grecque,  et  élevait  des 
temples  comme  en  élevait  Athènes. 

Cette  dégénérescence  religieuse  s'observa  plus  évidemment  en- 
core dans  la  branche  Scandinave  séparée  du  tronc  oriental.  L'idée 
decette  lutte,  d'abard  tout  immatérielle,  qui  faisait  le  fond  delà 
théologie  Scandinave  comme  de  celle  de  Zoroastre,  fut  bientôt 
transportée  dans  des  régions  moins  élevées.  Bientôt,  ce  ne  fut  plus, 


—  59  — 

pour  le  peuple,  la  lutte  entre  deux  principes  surnaturels,  mais  le 
conflit  entre  les  forces  brutales  de  la  nature  et  une  loi  supérieure 
inconnue.  Par  degrés,  cette  notion  s'abaissa  et  se  matérialisa  en- 
core. Il  ne  resta  plus,  dans  l'esprit  delà  multitude,  que  l'idée  domi- 
nante de  la  guerre  de  race  à  race,  de  tribu  à  tribu,  de  clan  à 
clan.  De  là,  le  tempérament  essentiellement  belliqueux  des  hom- 
mes du  Nord. 

Telle  est  l'origine,  telles  furent  les  croyances  des  compagnons 
et  des  descendants  d'Odin,  telle  fut  cette  race  de  fer  destinée, 
dans  les  desseins  de  la  Providence,  à  être  le  fléau  des  nations 
amollies,  et  en  même  temps  à  leur  communiquer,  par  son  contact 
et  la  transfusion  de  son  sang  purifié  parmi  les  glaces  du  Nord,  un 
levain  de  vigueur  et  de  jeunesse,  qui  les  rendît  capables  du  grand 
œuvre  de  la  civilisation  chrétienne. 

Bornons  ici  cette  étude.  Les  deux  Eddas,  les  poèmes  my- 
thiques des  Scaldcs,  la  mythologie  de  l'Islande  (4),  le  Zend-Avesta, 
offriront  a  ceux  qui  voudraient  la  poursuivre,  tous  les  documents 
qui  nous  font  connaître  le  culte  des  Teutons-Germaniques  et  les 
traditions  de  leur  origine  orientale. 

Nousavons  encore, selon  notre  promesse,  à  donner  une  traduction, 
la  première,  croyons-nous,  en  langue  française, —  de  la  poésie  inti- 
tulée Odin  V homme,  par  laquelle  M.  Aubrey  de  Vere  ouvre  son  re- 
cueil de  Légendes  des  Saints  Saxons,  si  rempli  d'une  connaissance 
approfondie  des  antiquités  du  Nord.  Ce  sont  les  adieux  d'Odin  à 
sa  patrie  désormais  soumise  au  joug  des  Romains.  Lui  et  son 
peuple  préfèrent  l'exil  au  servage.  La  rage  au  cœur,  préparant  la 
vengeance  dont  se  chargera  Alaric  (2),  quatre  cents  ans  après,  ils 
vont  s'enfoncer  dans  les  déserts  du  Nord,  jusqu'à  l'heure  mar- 
quée par  Dieu  pour  l'accomplissement  de  leurs  desseins. 


(*)  Sagas  Islandaises. 

(2)  Jornandès  affirme  que  les  Goths  sont  venus  de  la  Scandinavie,  qu'il 
appelle,  comme  on  le  sait  :  officina  gentium,vagina  nationum.  Paullus  Far- 
nefridi  en  dit  autant  des  Longobards  ou  Lombards. 


60  - 


ODIN  L'HOMME 

Prends  ces  tablettes,  Chiron  mon  messager,  porte-les  à  l'en- 
vahisseur !  Va  !  hàte-toi  !  Leur  seul  aspect  brûle  mes  yeux 
comme  le  feu!  Tuas  vaincu,  Pompée!  Que  nous  reste-t-il? 
Rien  ! . . .  que  la  vengeance  !  Une  vengeance  comme  jamais  race 
humaine  n'en  a  rêvé  !  Une  vengeance  lente,  mais  sûre  ! . . .  Pom- 
pée, je  t'abandonne  ma  patrie  !  Quatre  jours  encore,  j'aurais  pu 
tenir  dans  ces  montagnes  ;  le  cinquième,  elles  eussent  été  en 
ton  pouvoir.  Mon  regard  plonge  au  delà  des  limites  de  la  nuit 
qui  s'approche.  Il  me  faut  quatre  siècles.  Alors  sonnera  l'heure 
de  ma  vengeance  ! 

De  quoi  se  vante  la  reine  maudite  de  l'Occident  ?  J'entends 
le  son  de  ses  trompettes  qui  annoncent  sa  victoire  !  Voici  ce 
que  dit  Rome  :  «  J'ai  étendu  mon  empire  jusqu'aux  confins  de 
la  terre.  Le  fer  de  mes  soldats  a  fait,  sur  le  champ  de  bataille 
qu'ils  ont  foulé,  une  riche  moisson  d'or.  Nous  avons  soutenu 
des  luttes  de  géants.  Nous  avons  arrosé  de  nos  sueurs  les  rives 
où  s'élevait  Carthage.  Les  javelines  des  Gaulois  se  sont  teintes  de 
notre  sang.  Mais  ce  temps  est  passé.  Des  jours  plus  heureux  se 
sont  levés  pour  moi  !  La  couche  où  je  repose  s'étend  par  delà 
les  ondes  de  la  Mer  Intérieure.  Le  murmure  des  nations  qui 
fléchissent  le  genou  autour  d'elle,  y  charme  mon  sommeil. 
L'azur  des  climats  embaumés  verse  sur  elle  ses  splendeurs. 
Les  brises  qui  ont  caressé  les  sommets  de  l'Atlas  et  les 
neiges  de  l'Olympe,  la  rafraîchissent  doucement.  Désormais, 
mon  pied  foulera  des  sentiers  enchanteurs.  Baignez-le  de  vos 
ondes,  fontaines  de  la  Perse  !  Vallons  de  la  Syrie,  tout 
ombragés  de  roses,  endormez-moi  de  vos  parfums  !  Rochers 
du  Caucase,  que  vos  échos  harmonieux  me  renvoyant  adoucies 
les  clameurs  de  mes  guerriers,  favorisent  la  rêverie  et  les  songes 
de  Rome  !  Je  vous  envoie  Pompée,  mon  général  !  Il  ramènera 
dans  mes  murs  Odin  chargé  de  chaînes  ! » 

Odin  chargé  de  chaînes  !...  0  Rome  !  qu'Odiu  soit  ton  captif 


—  61  — 

ou  ta  victime,  le  Dieu  qu'il  sert  saura  susciter  cent  autres 
Odin  ! 

Un  jour,  le  royal  fondateur  de  la  ville  aux  sept  collines,  debout 
près  de  son  Augure  qui  offrait  un  sacrifice,  remarqua  un  vol  de 
douze  corbeaux  se  dirigeant  vers  les  montagnes  Albaines.  C'était 
l'emblème  de  douze  siècles  de  gloire  accordés  à  Rome  par  les 
destins.  Huit  sont  écoulés,  il  n'en  reste  que  quatre  ! 

Je  vous  salue,  oiseaux  sacrés  que  la  nuit  engendra  !  Dé- 
sormais, sur  mes  enseignes,  on  verra  figurer  votre  sinistre  image, 
hôtes  mélancoliques  de  la  tour  qui  s'écroule,  êtres  néfastes  dont 
le  sûr  instinct  vous  révèle  au  loin  les  champs  de  carnage  ! 

Oui,  il  me  faut  quatre  siècles!...  Alors  sonnera  mon  heure!... 
Je  dis  mon  heure,  car  mon  peuple  et  moi  ne  faisons  qu'un!... 

Peuple  chéri,  race  sacrée  !  Depuis  ma  tendre  enfance,  ta  gloire 
n'a-t-elle  pas  fait  le  sujet  de  mes  méditations?  N'ai-je  pas  rap- 
porté à  ton  bonheur  tout  ce  que  j'ai  rencontré  de  grand  et  de 
beau,  partout  où  me  conduisait  mon  cœur  jaloux  de  ta  puissance? 
C'est  pour  toi,  que,  simple  et  ignorant  encore,  j'enviais  les  lingots 
d'or  entassés  dans  les  sanctuaires  de  Suze  et  d'Ecbatane!  Insensé 
que  j'étais  !...  Bientôt,  à  Athènes,  je  foulai  le  sol  qu'avait  foulé 
Platon.  J'aurais  voulu  t'en  rapporter  les  gloires  de  l'intelligence 
et  les  chefs-d'œuvre  inspirés  de  Phidias  !  Insensé!...  Aujourd'  hu 
Athènes  a  perdu  sa  liberté,  Athènes  est  dans  les  fers  !... 

Plus  tard,  Mithridate  m'envoya  à  Rome,  en  mission  confiden- 
tielle pour  étudier  de  près  les  secrets  de  ce  gouvernement,  son 
plus  dangereux  ennemi.  J'aurais  voulu,  ô  mon  pays,  te  donner 
cette  législation  guerrière,  qui,  de  la  puissante  République,  faisait 
un  vaste  camp!  Insensé,  insensé  encore  une  fois!...  Ah!  je  ne 
tardai  pas  à  voir  tout  ce  qu'il  se  cachait  de  corruption  intestine 
sous  le  masque  de  ces  lois.  Rome,  comme  l'empire  des  Perses, 
s'effondrait  rongée  par  le  luxe  et  la  mollesse. 

Aujourd'hui,  l'œil  fixé  sur  l'étoile  polaire  de  ma  juste  ven- 
geance, je  dois  guider  mon  peuple,  à  travers  de  sombres  épreuves, 
vers  un  brillant  avenir.  Mes  frères  d'armes,  vous  êtes  braves,  vous 
êtes  forts.  Seul,  le  parfum  de  vos  vallées  peut  amollir  vos  cœurs, 


-  68  - 

et  corrompre,  avant  son  épanouissement,  le  bouton  qui  contient 
comme  une  fleur  votre  destinée  future. 

Je  vous  conduis  au  loin.  La  fortune  vous  a  trahis  sur  le  champ 
de  bataille,  mais  vous  n'avez  pas  perdu  la  liberté!  Je  vous  con- 
duis, non  point  vers  le  Sud,  aux  rives  de  l'Euphrate,  non  point 
vers  l'Orient,  aux  régions  où  le  soleil  se  lève,  non  point  vers 
l'Occident,  vers  Rome  et  l'esclavage. 

Salut,  terres  du  Nord!  Salut,  forets  sans  limites,  baignées  par 
des  océans  sans  nom  !  Iles  montagneuses,  couronnées  de  neiges 
éternelles,  et  vous,  volcans  qui  vomissez  la  flamme,  je  vous  salue! 

Il  me  faut  quatre  siècles!... 

Je  le  connaisse  Nord  si  redouté  !  Un  jour,  je  m'enfonçai  dans 
ses  déserts.  Je  venais  de  voir  tomber  à  mes  pieds  la  douce  fleur 
qui  embellissait  ma  vie;  je  n'avais  plus  d'épouse!  Celte  mort 
brisa  tous  mes  liens.  Je  me  sentis  précipité  contre  le  sein  de  fer 
de  la  vie  humaine.  Je  sortis  de  cette  épreuve  comme  on  s'éveille 
d'un  rêve;  le  malheur  avait  fait  de  moi  un  homme!  Mon  peuple  aura 
aussi  son  réveil!  Il  ne  se  reposera  plus  à  l'ombre  des  myrtes; 
il  n'aura  pour  siège  que  les  rochers  glacés.  Sa  couche  sera  la 
pierre  nue.  De  la  force!...  Il  me  faut  un  peuple  fort/  Je  ne  veux 
pas  des  fantaisies  courageuses  d'un  cœur  de  femme;  je  veux 
des  cœurs  d'airain  fermés  à  toute  pitié  pour  eux-mêmes.  La  vie 
la  plus  rude  sera  pour  eux  comme  le  vin  généreux  qui  réjouit 
les  forts.  La  mort  des  champs  de  bataille  leur  paraîtra  la  fin  la 
plus  naturelle  et  la  plus  noble  de  l'existence.  Toute  leur  crainte 
devra  être  de  mourir  sans  blessure,  et  de  perdre  ainsi  leur  place 
au  banquet  des  héros»  Ils  passeront  les  froides  nuits  d'hiver 
couverts  seulement  de  leur  bouclier  de  bois. 

L'enfant,  sur  un  léger  esquif,  se  jouera  des  vagues  de  l'Océan; 
le  plaisir  de  l'adolescent  sera  de  glisser  rapide  comme  le  vent,  sur 
les  pentes  abruptes  des  collines  neigeuses,  jetant  aux  échos  les 
éclats  perçants  de  son  rire.  Le  père,  voyant  le  sang  couler  des 
veines  de  son  fils,  murmurera  à  son  oreille  :  «  Enfant,  pense  à 
notre  revanche  !  Que  ton  fils  soit  encore  plus  stoïque  et  plus 
endurci  que  toi  !  » 


-  63  - 

Il  me  faut  quatre  siècles!.  .  L'homme  se  développe  lentement 
dans  ce  climat  de  glace.  La  mort  y  est  la  hideuse  nourrice  de 
la  vie.  C'est  la  mort  qui  berce  les  nouveau-nés.  Pourquoi  tous 
les  loups  que  nous  rencontrons  dans  les  forêts  ont-ils  des  mem- 
bres si  nerveux?  C'est  que  les  louveteaux  faibles  ne  vivent  pas. 
Ainsi  en  est-il  des  hommes  du  Nord,  ainsi  en  est-il  des  races 
énergiques. 

Noir  sapin,  mon  arbre  favori,  lève  ton  front  jusqu'aux  nues 
sur  tes  montagnes  glacées,  et  laisse  le  palmier  se  flétrir  aux  ar- 
deurs du  soleil  du  Midi  ! 

Vous  n'aurez  point  de  maisons  construites  avec  la  pierre, 
vous  n'élèverez  point  de  temples  aux  charpentes  de  cèdre.  Là 
où  surgit  un  temple,  se  forme  bientôt  une  cité.  Les  cités,  vous 
les  mépriserez  ;  vous  habiterez  au  sein  des  forêts,  famille  par 
famille.  Chacun  de  vous  vivra  du  fruit  de  sa  chasse  dans  le  bois, 
ou  de  sa  pêche  dans  les  lacs  aux  ondes  azurées. 

Point  de  sanctuaires  où  brille  l'or!  Le  Dieu  inconnu  n'y  des- 
cend jamais;  ce  Dieu,  que  la  Perse  dans  ses  jours  de  gloire,  al- 
lait chercher  sur  les  hauts  lieux,  sur  les  cimes  des  montagnes. 
Vous  partagerez  avec  la  Perse  le  trésor  des  vérités  sacrées,  des 
plus  nobles  inspirations  que  l'homme  ait  connues,  ou  qu'il  puisse 
connaître,  à  moins  que  le  Maître  du  monde  ne  vienne  en  per- 
sonne enseigner  l'humanité.  Priez  comme  priaient  les  Mages  et 
demandez  au  ciel  de  favoriser  votre  vengeance.  Laissez,  jusqu'à 
ce  jour  terrible,  Rome  adorer  en  paix  ses  idoles  et  les  dieux 
qu'elle  a  volés  à  ses  vaincus  ! 

0  mon  peuple!  je  te  vois  d'année  en  année  plus  endurci  par 
la  souffrance  !  Les  maux  qui  écrasent  les  faibles  seront  pour 
toi  des  bienfaits.  Il  s'est  vu  des  hommes  qui,  s'empoisonnant 
chaque  jour,  devenaient  insensibles  au  poison.  Nourrissez-vous 
de  peines  et  de  douleurs  !  Que  les  bêtes  féroces  vous  menacent 
de  leur  rage  !  Que  la  glace  et  le  feu  vous  infligent  tour  à  tour 
leurs  tortures  ! 

Vous  ne  posséderez  point  de  richesses  ;  avec  les  richesses 
viennent  les  besoins  et  les  besoins  sont  une  servitude. 


—  64  — 

Aiguisez  vos  épieux  avec  les  os  des  poissons  ou  les  pierres  du 
sol,  mais  qu'ils  ne  vous  servent  jamais  d'appui  !  Je  ne  veux  point 
former  une  nation.  Je  veux  former  une  race,  qui  ne  s'amuse  point 
aux  jeux  des  hommes  d'Etat.  Je  veux  l'homme  tel  que  le  fit  Dieu  : 
l'homme  qui,  seul  parmi  les  créatures,  marche  le  front  levé 
vers  le  ciel.  Cet  être  pétri  d'argile,  je  le  rendrai  dur  comme  la 
pierre,  dur  comme  le  diamant,  à  force  de  le  polir  par  les  frotte- 
ments incessants  de  la  souffrance.  Ainsi,  les  vagues  de  la  mer 
finissent  par  rendre  unis  et  brillants  les  cailloux  grossiers  du 
rivage. 

L'homme  doit  se  contenter  d'être  ;  il  n'est  pas  né  pour  avoir. 
Il  ne  doit  attendre  d'autre  héritage  que  celui  de  la  vertu,  qu'il 
peut  conquérir  et  reconquérir  à  son  gré.  Là,  est  la  seule  vraie 
grandeur  !  Vous  vous  partagerez  en  tribus  et  non  point  en  na- 
tions. Des  rois  vous  guideront  ;  de  grands  rois  aux  grandes  en- 
treprises. Us  domineront  sur  leurs  sujets,  comme  ces  hautes  voiles 
que  le  marin  déploie,  au  sommet  des  mats,  et  qui  se  gonflent  de 
toutes  les  fureurs  de  la  tempête.  Ils  mourront  pour  leurs  peuples. 
Je  mourrai  pour  le  mien  quand  mon  œuvre  sera  achevée,  mais 
pas  une  heure  avant. 

Le  roi  bandit  qui  fonda  Rome  la  maudite  disparut  dans  un 
orage.  Pour  moi,  mes  fils  me  verront  mourir,  mourir  capable  de 
marcher  à  leur  tête  jusqu'à  mon  dernier  soupir.  Celui-ci  ne 
sera  point  une  plainte  !  Ils  me  verront  et  ils  diront  :  «  Cet 
homme  qui,  dans  sa  longue  marche,  a  traversé  cent  chaînes  de 
montagnes,  il  n'était  pas  Dieu,  mais  le  prophète  de  Dieu  pour  les 
pays  du  Nord.  Il  distribua  aux  autres  des  couronnes;  pour  lui, 
sa  seule  couronne  fut  l'amour  de  son  peuple.  » 

Il  me  faut  quatre  siècles  i . . .  Sur  votre  chemin,  vous  trouverez 
des  races  sauvages.  Pour  vous,  soyez  des  barbares,  mais  des  sau- 
vages, non  !  Écrasez  les  peuples  avilis,  de  crainte  qu'ils  ne  vous 
écrasent  eux-mêmes.  Vous  ne  sauriez  les  ennoblir  et  les  relever. 
Il  faut  que  leur  destinée  s'accomplisse.  Terribles  à  vos  ennemis, 
soyez  fidèles  à  vos  amis!  Soyez  justes.  Aimez  la  vérité.  Respectez 
le  foyer  de  la   famille,  car,  sachez-le,  il  est  le  sanctuaire  d'un 


—  65  — 

Dieu.  Respectez  les  prêtres,  les  rois,  les  bardes,  les  vierges,  les 
femmes  dont  les  flancs  ont  porté  des  héros.  Ce  sont  là  les  cinq 
cordes  de  la  lyre  harmonieuse  de  Dieu.  Renversez  sous  les  coups 
de  vos  lances  cette  divinité  idiote  que  Rome  appelle  le  dieu 
Terme  :  ce  dieu  absorbé  dans  son  sommeil,  qui  ne  régne  que 
sur  les  insensés.  La  terre  est  à  Dieu,  et  non  point  à  l'homme. 
Il  la  donne  à  celui  dont  la  valeur  la  mérite.  Un  jour  viendra 
peut-être  où  l'on  n'entendra  plus  le  fracas  des  combats,  où  les 
hommes  braves  et  vertueux  régneront  triomphants  dans  la  paix. 
Un  jour  viendra  peut-être  où  le  long  hiver  des  terres  arctiques 
se  changera  en  un  vert  printemps.  Là  où  s'étendaient  de  froids 
et  noirs  marécages,  on  verra  jaunir  des  moissons  dorées.  Dans 
les  déserts  peuplés  de  rennes  errants,  s'élèveront  des  cités  et 
des  trônes.  On  n'y  verra  point  des  nations  comme  celles  qui  se 
partagent  aujourd'hui  le  monde,  mais  des  nations  sages  et  pures. 
Il  leur  sera  permis  de  bâtir  des  temples  et  d'adorer  la  Vérité 
suprême,  si  tant  est  que  la  vérité  se  dévoile  jamais  à  l'homme  sur 
la  terre.  Elles  pourront  se  donner  des  lois  équitables,  si  tant  est 
que  la  justice  règne  jamais  dans  les  tribunaux  des  hommes. 

Dans  ces  régions  élevées,  où  habite  l'espérance  humaine,  s'é- 
tend une  plaine  immense,  le  champ  d'épreuves  de  la  vertu. 
C'est  là  que  tout  les  peuples  se  disputeront  un  jour  la  palme 
•comme  des  lutteurs  jaloux.  Sur  ces  hauteurs  étincelantes 
de  lumière,  le  Dieu  suprême  que  révèrent  nos  pères,  mais 
pour  lequel  Rome  n'a  pas  d'autel,  est  assis  sur  son  trône 
sublime.  Des  millions  d'esprits  célestes  tempèrent,  du  battement 
de  leurs  ailes,  les  rayons  aveuglants  qui  s'échappent  de  son  visage, 
et  le  souffle  brûlant  des  vents  qui  se  jouent  dans  sa  majestueuse 
chevelure.  Quand  sonnera  l'heure  terrible  où  doivent  être  jugés 
et  les  dieux  et  les  hommes,  cette  Déité  souveraine  frappera  dans 
sa  colère  ceux  qui  ont  blasphémé  son  nom  et  la  terre  sera  pu- 
rifiée. 

Mes  fils,  quand   vous  apprendrez  que  ce  Dieu  redoutable  se 
lève,  revêtu  de  sa  robe  de  justice  ;  quand  vous   verrez  dans 
l'Orient  le  ciel  rougir  par  le  reflet  sanglant  de  ses  vêtements  de 
1881  5 


—   66    - 

vengeance,  sachez  que  le  glas  de  Rome  est  près  de  retentir.  Ar- 
rêtez-vous et  écoutez  !...  Quand  vous  entendrez  le  son  de  la 
trompette  céleste,  en  avant,  fils  d'Odin,  en  avant!  Quittez  vos 
sauvages  forêts  et  vos  neiges  éternelles  !  En  avant,  franchissez  l'Is- 
ter,  le  Rhin,  et  le  Rhône  impétueux.  La  Mœsie,  la  Thrace,  l'Illyrie, 
ribérie,  la  Gaule,  deviendront  votre  proie.  Mais  c'est  sur  Rome 
surtout  que  vous  devez  vous  acharner.  Celui  qui  vous  conduira 
sous  ses  murs  ne  rêve  point  le  pillage.  C'est  une  mission  qu'il 
remplira,  mission  sublime  et  terrible,  qui  justifiera  le  meurtrier 
et  purifiera  la  main  dans  le  sang  même  qu'elle  versera  !  Lève- 
toi,  fléau  de  Dieu,  l'heure  de  la  vengeance  a  sonné  ! . . . 

Cette  heure,  je  la  connais,  je  l'attends.  Alors  l'œuvre  d'Odin 
sera  accomplie.  Alors  le  nom  d'Odin  pourra  rentrer  dans  les  noirs 
abîmes  de  l'oubli  ! . . . 

Adieu,  mont  Ararat  !  Que  de  fois,  par  un  soir  d'été  calme  et 
lumineux  comme  aujourd'hui,  petit  enfant,  adolescent,  homme 
mûri  par  les  maux  de  la  vie,  je  me  suis  plu  à  contempler  ta  cime 
enflammée  par  les  dernières  splendeurs  du  soleil  couchant  !  Adieu, 
adieu  pour  jamais  !...  Ta  légende  nous  apprend  que,  il  y  a  bien 
des  siècles,  la  race  de  l'homme,— quelques  survivants  du  déluge 
emportés  par  ses  flots, —  descendirent  le  long  de  tes  flancs  pâles 
pour  repeupler  le  monde  désert.  Tu- contemples  aujourd'hui  un 
spectacle  pareil.  Tu  vois  une  race  battue  par  la  tempête,  insen1 
sible  à  ses  propres  maux,  allant  à  travers  les  ruines  des  empires  ; 
où  ?  ils  ne  le  savent  pas,  et  cependant  leur  cœur  est  sans  terreur. 
Vois  ce  peuple  qui  s'exile,  passer  là-bas,  aux  confins  de  la 
vallée  !  On  dirait  une  procession  funèbre  en  longs  habits  de  deuil 
qui  se  meut  lentement,  lentement  comme  ton  ombre,  ô  Ararat, 
ton  ombre  qui  s'étend  vers  l'Orient  a  mesure  que  descend  le 
soleil.  Ainsi,  de  notre  gloire,  il  ne  reste  que  l'ombre,  image  d'un 
grand  peuple  qui  dédaigne  la  mort.  En  avant  vers  le  Nord  !... 
Quels  que  soient  les  décrets  du  destin,  nous  resterons  des  hommes  ; 
nous  ne  serons  jamais  des  bêtes  fauves  chargées  d'or  !  Viens, 
ô  longue  nuit  de  l'exil,  toi  dont  les  ténèbres  vont  envelopper  mon 
cœur  !  Tu  verras  se  lever  une  glorieuse  aurore 


i 


67  — 


PRINCIPAUX  OUVRAGES  CONSULTÉS 

Mallet's  Northern  antiquities. 

T.  A.  Blackwel,  editor  of  Mallet's  works. 

Gibbon,  the  Décline  and  fall  ofthe  Roman  Empire. 

The  prose  Edda,  Snorri. 

M.  Kemble,  Hislory  ofthe  Anglo-Saxons. 

Aubrey  de  Vere,  Legends  ofthe  Saxon  saints. 

Migne,  Dictionnaire  des  Religions. 

Suède  et  Norvège,  par  Lebas,  de  l'Institut,  1838. 

Résumé  de  l'histoire  du  Danemark,  par  Lami,  1824. 

Dictionnaire  de  la  Mythologie  des  peuples  du  Nord,  par  Louis 
Noirot,  1832.  (Cabinet  de  M.  le  baron  de  Wismes.) 

Littérature  et  voyages,  par  J.-J.  Ampère,  1833. 

Parmi  les  meilleurs  ouvrages  sur  cette  matière  que  l'on  peut 
également  consulter  avec  fruit,  mais  que  nous  regrettons  de  n'a- 
voir pas  eus  à  notre  disposition,  nous  citerons  : 

Le  poème  des  Dieux  du  Nord,  OEhlenschlœger  (4); 

Le  dictionnaire  de  la  Mythologie  Scandinave,  de  Nyerup  ; 

L'Histoire  du  Paganisme  dans  le  Nord  de  l'Europe,  par  Franz 
Mo  ne. 

L'Alcuna,  de  Légir. 

Le  Traité  de  la  Mythologie  des  peuples  teutoniques  et  slavons, 
de  M.  Tkany. 

Olaus  magnus,  Historia  gentium  septentrionalium  ,-  in  Eddam 
lslandiœ. 

Loccenius,  Antiquitates  Sueo-Gothicœ. 
Wormius,  Commentarius  de  linguâ  runicâ  (Muséum  regium 
Danicum). 

Abbé  J.  Dominique. 


(*)  Voir  surtout,  parmi  les  œuvres  du  dramaturge  danois,  le  poème  inli- 
lé  :  La  mort  de  lialder.  '      * 


UNE    ARME    HISTORIQUE 


EN    PIERRE    POLIE 


Messieurs, 

La  hache  on  pierre  polie  qui  est  exposée  sous  vos  yeux  a  servi  à 
combattre  les  Français  descendus  en  Nouvelle-Calédonie,  lors  de 
l'expédition  de  1853. 

D'après  le  rapport  qui  nous  a  été  adressé  à  ce  sujet  par  M.  le 
docteur  André  Ganolle,  attaché  comme  chirurgien  de  marine  à 
l'armée  expéditionnaire,  le  tranchant  de  cette  belle  pierre  verte 
aurait  été  plus  d'une  fois  rougi  dans  le  sang  de  nos  compatriotes. 
Elle  était  alors  entre  les  mains  d'un  chef  des  tribus  Canaques, 
Aliki-Kaï,  dont  le  nom  est  devenu  fameux  à  l'époque  de  la  con- 
quête, et  qui  s'est  distingué  contre  nous  au  combat  de  Ka- 
naola. 

«  Ce  chef,  nous  écrit  M.  A.  Canolle,  a  laissé  dans  la  guerre 
contre  les  Français  une  réputation  légendaire  de  bravoure  féroce. 
Au  dire  des  Calédoniens  de  son  époque,  il  se  précipitait  sur  la 
première  victime  de  son  casse-tête  et  se  peignait  le  corps  du 
sang  fumant  de  son  ennemi  palpitant  encore.  » 

Le  fils  de  ce  chef,  Ka-Kié,  se  soumit,  neuf  ans  plus  tard,  à  la 
domination  française  et  devint  notre  allié  en  1862.  C'est  de  lui 
que  M.  le  docteur  Canolle  a  obtenu,  à  un  prix  relativement  très 
élevé,  l'arme  soumise  a  votre  examen. 

La  pierre  ronde  de  cette  hache  d'armes  est  taillée  dans  une 
roche  extrêmement  dure,  la  néphrite  (*).  Voici,  d'après  M.  Damour, 
la  composition  minéralogique  de  cette  roche  : 


(*)  Elle  se  trouve  par  filons  dans  les  terrains  primaires  et  notamment  les 
micaschistes  cristallins,  très  abondants  dans  la  Nouvelle-Calédonie. 


—  70  — 

Silex 50  centièmes. 

Magnésie  .......  23       — 

Chaux 13       — 

Oxyde  ferreux  . .  07       — 

L'alumine,  l'oxyde  de  chrome  et  des  matières  volatiles  com- 
plètent les  parties  données  par  cette  analyse  chimique  (l). 

Cette  pierre,  transparente  sur  les  bords,  est  veinée  de  ban- 
des d'un  beau  vert  clair,  alternées  de  marbrures  d'un  blanc  lai- 
teux; elle  a  été  polie  avec  soin,  de  façon  à  enlever  presque  toutes 
les  dépressions  de  la  surface.  Sa  forme  est  celle  d'une  lentille  ou 
d'une  grosse  loupe,  un  peu  aplatie  sur  un  des  côtés  de  la  cir- 
conférence; vis-à-vis  la  partie  droite  du  tranchant,  deux  trous, 
habilement  forés  dans  la  pierre,  servent  à  faire  passer  les  corde- 
lettes qui  assujettissent  l'arme  dans  son  manche.  Ce  dernier  est  en 
bois  de  fer,  très  lourd  et  très  solide  ;  à  l'une  de  ses  extrémités  on 
a  creusé  une  encoche  de  2  à  3  centimètres  dans  laquelle  la 
hache  est  enchâssée  entre  les  deux  trous  parallèles.  Un  lambeau 
d'étoffe  entoure  ce  manche,  et  des  ficelles,  teintes  en  rouge  d'ocre, 
viennent  croiser  autour  du  bois  et  forment  à  la  base  une  sorte  de 
renflement  ou  de  houppe,  qui  devait  empêcher  l'arme  de  s'échapper 
des  mains  dans  un  combat. 

«  Les  ornements  qui  entourent  le  manche  de  cette  hache,  nous 
dit  M.  Canolle  dans  le  rapport  que  je  continue  à  citer,  sont 
composés  d'une  laine  spéciale  ou  poil,  qui  se  trouve  sur  le  ventre 
d'une  immense  chauve-souris  nommée  Roussette  et  qui  mesure 
1  m.  20  d'envergure.  Ces  animaux  sont  très  abondants;  à  cer- 
taines heures  de  la  soirée,  on  en  voit  voler  jusqu'à  30  ou  40  à 
la  fois.  Vous  remarquerez  que  le  manche  du  casse-tête  est  en- 
touré de  calicot.  Si  cette  pièce  européenne  dépare,  à  nos  yeux, 
l'arme  de  luxe  du  guerrier  canaque,  pour  le  chef  et  ses  crain- 
tifs admirateurs,  c'était  un  témoignage  de  plus  de  supériorité  et 
de  suprême  élégance.  Vous  savez,  en  effet,  que  la  coupe  du  vê- 
tement des  Canaques  est  des  plus  élémentaires,  puisqu'elle  n'est 

(*)  Voir  Société  archéologique  de  Nantes.  Damoub. 


—  71  — 
autre  que  la  peau  dont  le  Créateur  les  a  enveloppés  ;  il  n'y  a  de 
variété  que  dans  la  couleur.  » 

«  Quant  au  mode  de  polissage  employé  pour  unir  ces 
pierres,  il  est  primitif  comme  les  individus,  et  vous  rencontrez 
souvent  dans  leurs  interminables  flâneries  des  sauvages  usant 
une  pierre  contre  une  autre.  J'estime  que  pour  faire  une  simple 
pierre  de  fronde,  il  faut,  étant  donnée  la  paresse  du  Calédonien, 
environ  deux  mois.  Aussi  ces  projectiles  ne  sont-ils  que  très 
rarement  lancés;  les  naturels  préfèrent  charger  leurs  frondes 
avec  des  pierres  moins  parfaitement  arrondies,  mais  qui  se  trou- 
vent partout.  » 

Il  y  a  un  siècle  à  peine  que  la  Nouvelle-Calédonie  est  connue 
de  nous.  Cook  la  découvrit  eu  1774  (4).  Depuis,  elle  resta  long- 
lemps  sans  être  visitée  par  les  Européens.  Ses  habitants,  réduits 
naguère  encore  à  vivre  en  plein  âge  de  la  pierre,  sont  cruels 
farouches  et  peu  intelligents  pour  subvenir  aux  besoins  de  la  vie. 
Toutefois,  ils  cultivent  la  terre  ;  leur  nourriture  serait  même  ex- 
clusivement végétale,  s'ils  n'avaient  l'atroce  coutume  de  man- 
ger de  la  chair  humaine.  Si  l'antropophagie  pouvait  avoir  une 
excuse,  les  Calédoniens  auraient  à  invoquer  l'absence  d'ani- 
maux indigènes  dans  l'île  qu'ils  habitent. 

M.  André  Canolle  m'a  également  remis  un  sac  en  filet,  garni 
de  32  pierres  de  frondes,  rapporté  par  lui  de  la  Nouvelle-Calé- 
donie. 

Ces  projectiles  ont  la  forme  d'une  olive;  leur  longueur 
moyenne  est  de  6  à  8  c.  sur  2/12  à  3  c.  de  diamètre  au  centre, 
les  deux  bouts  sont  effilés,  sans  être  tout  à  fait  pointus. 

Le  sac  est  en  corde,  et  les  mailles  du  filet  ressemblent  assez 
à  notre  point  de  carrelet.  Les  deux  poches  sont  séparées  par 
un  petit  gousset,  solidement  tressé  et  plus  serré  de  maille  que 
le  reste  de  la  ceinture.  Après  avoir  équilibré  la  charge  de  chaque 
côté  de  ces  poches,  on  noue  ce  sac  autour  de  la  taille  et  il  sert 
à  la  fois  de  cartouchière  et  de  vêtement... 


(^Voîr  dans  la  Revue  des  Matériaux,  aûnée  1880,  l'article  de  M.Pomeral. 


—  72  — 

Les  Nouveaux-Calédoniens  emploient  pour  leurs  travaux  des 
haches  assez  semblables  à  nos  armes  préhistoriques  ;  une  de  ces 
pierres,  malheureusement  privée  de  son  manche,  est  exposée 
sous  vos  yeux.  Les  outils  de  ce  genre  sont  ordinairement  fixés 
dans  des  manches  formés  d'une  partie  du  tronc  de  l'arbre  et 
d'une  branche  qui  sert  de  pied.  On  fend  la  partie  la  plus  épaisse 
du  bois,  puis,  après  avoir  enduit  cette  coupure  d'une  substance 
résineuse,  on  y  insère  la  base  de  la  pierre,  et  à  l'aide  d'une 
cordelette  habilement  tressée,  on  rapproche  fortement  les  deux 
lèvres  de  la  fente. 

Les  haches  ou  herminettes  ainsi  préparées  servent  aux  Cana- 
ques pour  creuser  leurs  pirogues,  dégrossir  les  pièces  de  bois 
qui  forment  les  montants  de  leurs  cabanes  et  pour  d'autres 
usages  journaliers. 

Les  haches  rondes,  comme  celle  du  chef  Aliki-Kaï,  sont  au 
contraire  exclusivement  des  haches  de  guerre  ;  et,  de  fait,  leur 
forme  les  rendrait  peu  commodes  pour  les  travaux,  tandis 
qu'elles  doivent  être  aussi  redoutables  dans  un  combat  que  nos 
masses  d'armes  du  moyen  âge. 

Les  belles  haches  en  néphrite  des  tumulus  vannetais,  beaucoup 
plus  effilées  que  celle-ci,  s'en  rapprochent  cependant  par  la 
disposition  du  tranchant,  quipourtourne  le  bord  delà  pierre,  par 
leur  peu  d'épaisseur  et  aussi  par  le  trou  foré  à  leur  base.  Main- 
tenant, nous  avons  peine  à  comprendre  à  quel  usage  on  employait 
ces  minces  lames  de  pierre,  et  cette  difficulté  est  si  réelle  que 
les  uns  regardent  ces  armes  comme  des  simulacres,  des  em- 
blèmes destinés  à  orner  les  sépultures  des  guerriers  ;  d'autres  pen- 
sent que  «  les  cells  n'ont  jamais  été  fixés  à  un  manche,  mais 
qu'on  les  tenait  à  la  main,  et  qu'on  s'en  servait  pour  certains 
usages  que  nous  ne  saurions  définir  aujourd'hui,  mais  pour  les- 
quels, en  tous  cas,  on  ne  devait  employer  ni  la  hache  ni  le  mar- 
teau (1).  » 

Peut-être  serions-nous   également  très  embarrassés  pour  ex- 


f1)  lNTote  de  M.  le  D»-  Lukis,  citée  dans  Evans. 


-  73  — 

pliquer  l'usage  de  cette  grande  rondelle  de  pierre  verte  si  nous 
ne  la  voyions  encastrée  dans  son  manche  et  toute  prête  à  frapper. 
Aussi  vaut-il  mieux,  je  crois,  ne  pas  attribuer  à  nos  haches  bre- 
tonnes un  caractère  votif  ou  hiératique,  que  rien  ne  justifie. 

Les  sauvages  nous  donnent,  sur  ce  point,  un  très  bon  ensei- 
gnement pour  nos  aperçus  archéologiques.  En  effet,  ce  n'est  pas 
pour  leurs  morts  ou  pour  les  devins  de  leur  religion,  qu'ils 
réservent  leurs  plus  belles  pierres,  mais  bien  pour  les  chefs  qui 
les  conduisent  au  combat.  De  môme  en  était- il  pour  nos  celts 
bretons;  jamais  on  ne  me  persuadera  que  les  guerriers  ensevelis  à 
Tumiac,  à  Mané-er-H'roegh  et  au  Mont-Saint-Michel,  ne  se  soient 
pas  servis  de  leurs  belles  armes  de  pierre  (4),  et  qu'ils  les  aient 
gardées  pour  orner  les  sombres  caveaux  de  leurs  dolmens. 

La  Trémissinière,  6  juillet  18S1. 

Pitre  de  Lisle, 

Secrétaire  général  de  la  Société  Archéologique. 


(*)  On  objecte  souvent  que  les  haches  vannetaises  sont  intactes,  comme 
si  elles  n'avaient  jamais  servi,  cette  objection  est  de  nulle  valeur,  car  les 
armes  canaques,  qui  ont  incontestablemenr  servi,  sont  tout  aussi  intactes 
que  nos  haches  bretonnes,  et  leur  tranchant  est  pourtant  tout  aussi  mince. 


rr 


3 
O 


m 


-■■• 


FOUILLES  DU  TUMULUS  DE  LA  ROCHE 

DONGES,  LOIRE-INFÉRIEURE 
Par  M.  Pitre  DE  LISLE 


Notes  d'une  excursion  de  G.  et  P.  de  Lisle  dans  l'ancien  archipel 
de  la  Basse-Loire,  Donges,  Besné,  Crossac,  etc. 


I.  —  DE  LA  GALOCHE  DE  GARGANTUA,  ET  DE  SES  PALETS. 

Entre  Saint-Nazaire  et  Donges,  le  chemin  de  fer  traverse  une 
immense  plaine  marécageuse  qui  s'étend,  unie  et  morne  comme 
un  désert,  depuis  le  bassin  de  la  Vilains  jusqu'à  l'embouchure 
de  la  Loire.  Tandis  que  la  vue  s'égare  au  loin  sur  celte  intermi- 
nable ligne  droite,  on  voit  tout  d'un  coup  se  dresser  devant  la 
portière  du  wagon  une  énorme  pierre  grise,  soulevée  comme 
une  trappe  et  appuyée  sur  un  montant  placé  de  biais.  Cette  pierre, 
ou  plutôt  ce  dolmen,  est  tellement  rapprochée  de  la  voie  qu'il  a 
fallu  courber  tout  à  l'entour  la  ligne  de  clôture  ;  le  chemin  de 
fer  vient  presque  l'effleurer;  aussi,  à  peine  a-fcon  le  temps  de  dis- 
tinguer une  large  table  arrondie,  flanquée  de  deux  ou  trois  supports; 
puis  en  face,  un  grand  menhir  pointu,  piqué  sur  la  prairie  au  bord 
de  l'eau.  Le  train  s'éloigne  rapidement,  enveloppant  de  fumée  cette 
brusque  apparition,  au  grand  regret  des  archéologues  en  voyage. 

Bien  des  fois  j'avais  subi  ce  supplice  de  Tantale,  lorsqu'au 
mois  d'août  de  l'an  dernier,  je  résolus  d'y  mettre  un  terme  et 
descendis  à  la  gare  de  Donges.  Laissant  derrière  moi  le  bourg  et 


—  70  - 

sa  vieille  église  qui  se  baigne  dans  la  Loire  comme  un  navirea 
l'ancre,  je  coupai  à  travers  les  prairies  pour  gagner  les  abords 
du  dolmen. 

Je  dis  bien  les  abords,  car  entre  ce  monument  et  moi  se  dressait 
une  double  rangée  de  pieux  aigus,  solidement  enchevêtrés  dans  les 
broussailles  d'une  haie  vive.  Sans  doute,  le  désir  d'étudier  de 
plus  près  ce  dolmen  que  la  Compagnie  d'Orléans  retient  en  cap- 
tivité m'aurait  fait  passer  sur  le  danger  d'être  empalé  sur  ces 
longues  pointes  ;  mais  à  la  première  tentative  d'escalade,  je  vis 
s'avancer  des  deux  bouts  de  la  voie  un  cantonnier  et  un  garde- 
barrière,  et  force  me  fut  d'en  rester  là;  j'apercevais  bien,  par- 
dessus les  barreaux  de  cette  longue  cage,  le  géant  de  pierre  à 
demi  couché  sous  les  ronces  et  les  grandes  herbes,  mais  cela  était 
loin  de  me  suffire. 

Tout  en  songeant  aux  difficultés  dont  mon  entreprise  était 
de  tout  point  hérissée,  je  me  dirigeai  vers  le  menhir  dont  la 
haute  taille  se  détachait  au  loin  sur  la  surface  unie  des  eaux  et 
des  prés  ;  faute  de  mieux,  je  me  mis  à  en  prendre  la  hauteur. 

La  pierre  est  taillée  comme  un  fuseau  et  très  unie,  de  sorte 
qu'il  n'est  point  facile  d'arriver  jusqu'à  son  sommet.  Mais  je  fus 
aidé  en  cette  besogne  par  un  vieux  pêcheur,  qui  m'apporta  com- 
plaisamment  de  grandes  perches  qui  lui  servaient  à  étendre  les  filets. 
Je  pus  ainsi  me  hausser  jusqu'à  la  hauteur  de  quatorze  pieds  et  demi 
que  mesure  cette  belle  aiguille  de  granité;  arrivé  là,  je  vis  que  le 
haut  de  la  pierre  avait  été  creusé  par  le  milieu,  comme  pour  un  trou 
de  mine.  (Jette  rainure  était  destinée  à  recevoir  une  croix  en  fer, 
qui  fut  abattue  par  la  foudre  un  peu  avant  la  Révolution. 

Pendant  que  j'examinais  ce  singulier  travail,  exécuté  sur  une 
pointe  glissante  et  si  étroite  que,  pour  ma  part,  j'avais  fort  à  faire 
de  m'y  maintenir,  mon  bonhomme  me  conta  que,  dans  le  pays  on 
appelait  cette  pierre  la  galoche  de  Gargantua  et  qu'autrefois  la 
grande  table  ronde  du  dolmen,  qui  est  maintenant  à  quelques 
cent  pas  de  là,  était  posée  sur  le  bout  de  la  galoche  et  lui  servait 
de  pièce.  Mais  il  arriva  que  Gargantua,  passant  un  jour  aupays 
de  Retz,  avisa  de  l'autre  rive  cette  gigantesque  amusette  cl  se  mit 


—  ti- 
en devoir  de  l'abattre.  Il  prit  pour  cela  ses  palets,  qui  sont  des 
meules  en  pierre  de  grisou,  trois  fois  grosses  et  lourdes  comme 
nos  meules  de  moulins,  et  les  fit  voler  par- dessus  la  grande  lieue 
d'eau  saumâtre  qui  coule  en  cet  endroit.  S'ils  tombèrent  croix 
ou  pile,  on  n'en  sait  rien  encore,  mais  un  fait  bien  eertain,  c'est 
qu'au  dernier  coup  la  pièce  fut  enlevée  de  dessus  la  galoche, 
puisqu'on  la  voit  maintenant  juste  à  l'endroit  où  elle  est  tombée , 
et  que  le  palet  vint  s'abattre  bien  loin  de  là,  tout  au  beau  milieic 
de  la  Gagnerie  du  Prieur.  Le  bonhomme  ajouta  qu'en  cherchant 
bien,  on  le  trouverait  encore. 

Cette  conclusion  fut  pour  moi  un  trait  de  lumière  :  j'avais  sous 
les  yeux  deux  des  pièces  de  ce  grand  jeu,  l'une  était  un  dolmen, 
l'autre  mon  menhir;  la  troisième,  celle  qui  les  avait  séparées,  de- 
vait bien  valoir  tout  autant. 

J'entrevoyais  dans  ces  palets  égarés  à  droite  et  à  gauche,  toute 
une  riche  moisson  de  pierres  dolméniques  et  de  tables  d'allées 
couvertes,  et  cette  perspective  me  fit  presque  oublier  la  grosse 
roche  emprisonnée  qui  m'avait  si  traîtreusement  retenu  au  passage- 
Mais  pour  ne  point  m'égarer  en  courant  après  les  coups  d'essai  du 
géant,  je  résolus  tout  d'abord  de  retrouver  le  palet  qui  avait  frappé 
le  plus  juste.  De  l'observatoire  où  j'étais  grimpé,  je  me  fis  indi- 
quer par  mon  aide  la  Gagnerie  du  Prieur,  et  bien  vite  je  me  lais- 
sai glisser  à  terre. 

Mon  premier  soin  fut  de  me  rendre  à  la  mairie;  je  voulais  évi- 
ter des  marches  et  contre-marches  dans  les  champs  de  blé,  et 
préparer  d'abord  mes  recherches  sur  l'atlas  du  cadastre.  Je  trou- 
vai bientôt  aux  nos  1301  et  suivants  du  lieu  dit  la  Gagnerie-Prieur, 
un  coin  de  terre  désigné  sous  le  nom  significatif  de  la  Roche. 
(Section  I  de  Trélagot,  3me  feuille.) 

Je  fermai  le  registre  et,  prenant  à  travers  champs  le  long  de  la 
route  qui  mène  au  château  de  Marligné,  j'aperçus,  un  peu  sur  la 
droite  de  la  route,  une  butte  de  terre  de  vingt  pieds  de  large  sur 
cinq  à  six  de  haut,  surmontée  d'une  grosse  pierre  plate,  posée 
de  travers  et  qui  semblait  tombée  du  ciel.  Il  n'y  avait  plus  ta  en 
douter,  c'était  là  mon  palet,  ou  plutôt  celui  de  Gargantua. 


—  78  — 

En  passant  de  l'autre  côté  de  la  butte,  je  vis  que  cette  pierre 
n'était  point  seule;  deux  autres,  fichées  en  terre,  relayaient  en 
côté,  et  sous  les  ronces  qui  couvraient  le  sol,  on  devinait  toute  une 
série  de  blocs  en  forme  d'allées  couvertes.  Mais  pour  vérifier  cette 
conjecture,  il  fallait  déblayer  tout  ce  côté  du  monument  et  suivre 
sous  les  terres  le  prolongement  de  la  galerie. 

Tous  ceux  qui  ont  entrepris  un  travail  de  ce  genre,  savent 
bien  que  la  première  difficulté  à  vaincre  en  pareil  cas  est  d'obte- 
nir le  consentement  du  propriétaire.  Celui-ci,  le  plus  souvent, 
ignore  tout-à-fait  qu'il  y  ait,  dans  un  coin  de  ses  terres,  de 
grosses  roches  recouvrant  une  sépulture,  ou,  s'il  le  sait,  cette 
particularité  le  laisse  complètement  froid.  Aussi,  que  son  fermier 
lui  demande  la  permission  de  culbuter  ces  blocs  qui  encombrent 
inutilement  les  pièces,  il  n'y  voit  pas  d'inconvénient.  Mais  au  seul 
mot  de  fouille,  l'instinct  du  propriétaire  se  réveille  :  «  On  veut 
fouiller  mes  pierres  !  Il  y  a  quelque  chose  là-dessous.  »  Et  le  voilà 
rêvant  au  souterrain  d'Aladin,  au  trésor  des  Mille  et  une  Nuits  ; 
tout  cela  pour  quelques  cailloux  et  de  vieux  pots  qu'il  saluerait 
d'un  coup  de  pied  s'il  les  rencontrait  sur  sa  route. 

Hâtons-nous  do  le  dire,  ici  aucune  difficulté  ne  s'est  présentée. 
Le  maître  du  lieu  étant  notre  éminent  avocat,  M.  Anthime  Menard, 
la  cause  était  gagnée  d'avance. 


—  79 


II.  —  Fouilles  du  tumulus 


Au  dernierjour  d'août  1879,  nous  avons  donc  fait  commencer, 
mon  frère  Georges  de  Liste  et  moi,  les  premiers  travaux  des  fouilles. 

L'endroit  où  est  situé  notre  tumulus  est  un  petit  terrain  vague 
enclavé  dans  les  champs  de  la  Gagnerie  du  Prieur;  c'est  le  point 
le  plus  élevé  d'un  large  promontoire  qui  s'avance  entre  les  bas- 
fonds  de  Martigné  et  la  coulée  de  Jouy.  De  là,  on  découvre  un 
horizon  splendide  :  à  l'est  le  sillon  de  Bretagne  profile  ses  masses 
sombres,  brusquement  repliées  sur  le  cours  du  fleuve;  en  face, 
par-dessus  l'immense  nappe  d'eau  de  la  Basse-Loire,  s'étendent 
les  plaines  bleuies  du  pays  de  Retz  ;  plus  loin,  les  deux  rives 
s'écartent  et  l'Océan  paraît.  Certes,  nos  prédécesseurs  avaient 
bon  goût,  et  j'aimerais  assez  de  mon  vivant  les  sites  qu'ils  choi- 
sissaient pour  leurs  défunts. 

La  tombelle  que  nous  avions  à  explorer  forme  un  tertre  légè- 
rement ovale  de  7  mètres  de  long  sur  deux  de  hauteur  au  som- 
met. La  partie  nord  avait  déjà  été  entamée  ;  le  plus  simple  était 
donc  de  continuer  à  enlever  les  terres  de  ce  côté  afin  de  rencon- 
trer la  place  des  tables  et  des  supports. 

Dirigeant  notre  tranchée  de  l'est  à  l'ouest,  nous  avons  coupé  la 
butte  dans  le  sens  de  son  plus  grand  diamètre,  et  de  façon  à 
laisser  les  supports  du  midi  engagés  dans  la  masse  pierreuse  du 
tumulus.  Quatorze  blocs  de  pierres  ont  été  ainsi  mis  à  jour;  quatre 
tables  de  deux  à  trois  mètres  de  long  se  faisaient  suite  et  recou- 
vraient l'aire  de  la  galerie. 

La  figure  (1,  pi.  I)  donne  le  plan  de  cette  construction. 

Une  première  remarque,  due  à  un  de  nos  ouvriers,  c'est  que  la 
pierre  de  cette  allée  couverte  est  d'un  grain  tout  différent  de  celui 
des  autres  pierres  que  l'on  rencontre  aux  environs  (gneiss  et  micas- 
chiste). Je  n'ai  pu  vérifier  ce  fait,  mais  si  l'on  admet  la  légende 
qui  précède,  l'explication  de  cette  étrangeté  est  toute  trouvée. 


—  80  — 

Ce  travail  une  fois  terminé,  notre  butte  présentait  encore  sur  la 
gauche  l'apect  d'un  tumulus  à  peu  près  intact;  sur  la  droite,  une 
allée  couverte  dégagée  de  son  enveloppe,  absolument  comme 
dans  ces  planches  d'anatomie  où  l'on  voit  un  homme  coupé  en 
deux,  et  montrant  d'un  côté  un  visage  souriant,  une  peau  rose  et 
fraîche  ;  de  l'autre  des  os  décharnés  et  les  viscères  les  plus  in- 
times. 

Ce  squelette  de  pierre  avait  été  détérioré  dans  sa  partie  cen- 
trale, une  des  tables  manquait  et  ses  supports  s'étaient  abattus. 
C'est  par  cette  brèche  que  nous  nous  sommes  introduits  dans  la 
place  ;  explorant  d'abord  la  partie  de  l'ouest,  c'est-à-dire  la 
crypte  et  les  deux  premières  travées.  Cette  coupure  divise  logi- 
quement notre  fouille  en  deux  parties  :  1°  la  chambre  sépulcrale, 
2°  l'allée  couverte. 


81  — 


lvo  partie  des  fouilles  :  la  crypte  et  les  deux  premières  travées. 

Après  avoir  fait  enlever  un  grand  nombre  de  pierres  mêlées  à 
un  lerreau  noir  et  léger  qui  remplissait  le  sommet  de  la  galerie, 
nous  avons  trouve  une  couche  de  30  à  40  cent,  de  terre 
ocreuse,  sèche  et  compacte,  très  différente  du  sol  qui  entourait  le 
tumulus.  Ce  remplissage  forme  la  couche  archéologique  par  excel- 
lence, et  chaque  parcelle  de  cette  terre  fut  examinée  avec  le  plus 
grand  soin.  C'est  en  effet  dans  ce  mortier  compact  que  se  trouvaient 
encastrés  les  objets  que  nous  avons  découverts,  et  il  est  bien  évi- 
dent que  ce  lit  est  comtemporain  de  la  sépulture  et  servait  à  pro- 
téger ce  qu'on  nomme,  je  ne  sais  pourquoi,  le  mobilier  funéraire. 

Nous  étions  alors  à  l'entrée  de  la  grande  crypte,  au  point  où 
la  paroi  D  forme  un  biais  en  coupant  obliquement  sur  l'entrée 
de  la  galerie.  Ce  caveau  recouvert  par  une  gigantesque  pierre 
plate  mesure  à  l'intérieur  environ  4  m.  10  c.  sur  3  m.  à  3  m. 
20  c.  Sur  le  seuil  de  la  chambre,  vers  le  milieu  de  la  largeur  de 
l'allée  se  trouvait  un  très  beau  vase  de  grande  dimension,  orné 
de  bandes  de  dessins  en  dents  de  loup,  avec  des  incrustations 
d'une  pâte  blanche,  assez  semblable  au  gypse  (fig.  1,  pi.  II). 

Ce  premier  résultat  et  l'état  homogène  de  la  couche  où  se  trou- 
vait ce  dépôt,  nous  rassuraient  déjà  sur  le  bon  état  de  notre  allée 
couverte-,  certes,  rien  n'avait  été  touché  dans  cette  partie  du  mo- 
nument, car  la  moindre  fouille  eût  inévitablement  brisé  ce  vase 
fragile,  placé  presque  au  centre  de  la  chambre. 

En  continuant  à  dégager  les  terres  aux  alentours  de  ce  point, 
nous  avons  rencontré,  sous  la  pierre  couchée  à  l'entrée  de  la 
crypte,  une  très  jolie  pendeloque  triangulaire  en  agate,  d'un 
poli  et  d'une  transparence  admirables  (fig.  7  pi.  II).  Une  rainure 
éclatée  servait  à  maintenir  un  cordon  pour  suspendre  celle  amu- 
lette :  arrondie  sur  deux  de  ses  côtés  comme  le  tranchant  des 
pierres  polies,  elle  est  coupée  à  angle  droit  sur  l'autre  face  et  les 

1881  6 


—  82  — 

bords  en  ont  été  adoucis  par  des  facettes  taillées  en  biseau.  C'est 
un  fragment  d'une  de  ces  merveilleuses  haches,  de  ces  sceptres 
de  pierre  comme  en  possède  le  musée  de  Vannes. L'accident  ma- 
lencontreux qui  a  brisé  jadis  ce  précieux  ouvrage,  a  dû  causer  à 
son  possesseur  d'énergiques  regrets,  que  nos  langues  modernes 
seraient  sans  doute  impuissantes  à  traduire. 

On  voit  encore,  par  le  soin  qu'on  a  pris  pour  polir  et  transfor- 
mer ce  bijou,  tout  l'intérêt  qu'y  attachait  son  propriétaire. 

La  chambre  à  moitié  détruite  par  l'affaissement  des  parois  de 
l'ouest  avait  été  débarrassée  par  celle  ouverture  d'une  partie 
de  ses  terres;  tout  à  fait  au  niveau  du  sol  se  trouvait  une  argile 
de  couleur  jaune  paille,  qui  formait  l'aire  de  la  crypte,  et  que 
nous  avons  retrouvée  à  la  même  profondeur  dans  toutes  les  par- 
ties du  monument.  Au-dessus,  dans  l'épaisseur  du  mortier  rap- 
porté, se  trouvait  engagé  un  vase  d'une  pâte  grossière,  inégale- 
ment poli  à  la  main  et  très  brisé.  Au  point  D  un  couteau  en  silex  de 
1°2  c.  sur  3,  bien  coupant  et  présentant  trois  méplats  grossièrement 
détachés  à  la  partie  supérieure  et  un  seul  éclat  sur  l'autre  face. 

En  relevant  un  des  supports  inclinés  de  la  paroi  nord,  mon  frère 
Georges  découvrit  un  autre  vase  en  terre  noire  et  très  bizarre  de 
forme  (fig.  5,  pi.  II)  :  en  coupe,  ses  bords  présentent  deux  angles 
très  accusés,  l'un  rentrant,  l'autre  sortant.  Parmi  toutes  les  pote- 
ries de  dolmen,  du  bronze  ou  de  la  pierre  polie,  que  j'ai  examinées 
jusqu'à  ce  jour,  je  n'ai  point  trouvé  son  équivalent.  Dans  la  belle 
collection  de  M.  du  Chatellier,  la  plus  riche  en  céramique  de  ce 
genre,  un  seul  vase  provenant  de  Parc-ar-Chastel  en  Tréguennec 
présente  quelque  analogie  lointaine  avec  le  nôtre  ;  mais  il  est  bien 
plus  écrasé  de  forme  et  sans  aucun  dessin  ;  tandis  que  les  parois 
de  celui-ci  sont  ornées  d'un  grand  damier  où  les  carreaux  poin- 
tillés alternent  avec  des  fonds  unis. 

Après  avoir  ainsi  déblayé  ce  côté  de  la  crypte,  nous  avons  passé 
au  tamis  les  terres  qui  en  provenaient;  cette  opération  nous  donna 
de  nombreux  silex  éclatés,  entre  autres  un  poinçon  finement  re- 
louché. 


—  83 


2e  partie  des  fouilles  :  l'allée  couverte. 


Passons  maintenant  à  la  seconde  partie  de  nos  fouilles.  Trois 
grosses  tables  de  pierre,  à  demi  ensevelies  dans  les  terres  du 
tumulus,  nous  indiquaient  la  direction  à  suivre  pour  retrouver  le 
prolongement  de  la  galerie  souterraine.  Nous  fîmes  enlever  les 
cailloux  et  les  ronces  qui  encombraient  ces  tables,  et  bientôt 
s'ouvrit  devant  nous  une  toute  petite  entrée  donnant  accès  dans 
un  couloir  étroit,  dont  les  murs,  formés  de  quatre  pierres  plates, 
se  rapprochaient  au  sommet,  un  peu  comme  les  montants  d'un 
château  de  cartes.  Une  lourde  table,  débordant  d'un  mètre  de 
chaque  côté  de  cette  ouverture,  semblait  vaciller  sur  ses  étais 
hors  d'aplomb. 

Il  y  a  toujours,  pour  l'archéologue  qui  pénètre  le  premier  dans 
ces  caveaux  fermés  depuis  de  si  long  siècles,  une  sorte  d'attente 
mystérieuse  dont  les  plus  froids  ne  peuvent  se  défendre.  La  lueur 
incertaine  du  jour  filtrant  çà  et  là  entre  les  grosses  pierres 
sombres  de  ces  tombeaux,  semble  éciairer  quelque  fantôme  du 
passé,  gardien  vigilant  de  trésors  inconnus.  —  En  réalité,  ces 
trésors  se  réduisent  bien  souvent  à  peu  de  chose,  et  pour 
modérer  ces  impatientes  illusions  nous  avons  un  calmant  tout 
prêt.  Les  soixante-quatre  tomes  de  nos  huit  sociétés  savantes 
en  contiennent  la  recette,  dont  voici  la  formule  abrégée  :  le  ré- 
sultat le  plus  heureux  d'une  fouille  de  dolmen  est  neuf  fois  sur 
dix  celui-ci  :  quelques  poteries  brisées,  des  silex  éclatés,  un  ou 
deux  celts  ou  amulettes,  un  ou  deux  grains  de  colliers,...  etc'est 
tout. 

Il  n'y  a  véritablement  rien  là  qui  puisse  légitimer  la  moindre 
émotion.  Mais,  malgré  soi,  on  se  rappelle  toujours  les  merveilleuses 
trouvailles  de  Tumiac,  du  Mané-er-H'roech  et  de  Saint-Michel, 
sans  songer  que  ces  trois  monuments  n'ont  jamais  eu  pour  nous 
d'équivalent. 


—  84  — 

Bien  calmés  par  ce  préambule,  pénétrons  maintenant  dans  l'é- 
troit corridor  que  la  pioche  vient  de  mettre  à  jour;  d'abord,  nous 
relevons  à  l'entrée  une  pierre  en  forme  de  coin,  polie  et  usée  par 
le  frottement,  munie  de  deux  trous  de  22  millimètres  sur  04  de 
profondeur.  C'est  une  sorte  de  polissoir  en  granit,  et  les  trous 
ronds  placés  en  face  l'un  de  l'autre  devaient  servir  à  le  retenir 
en  main  (fig.  2,  pi.  II). 

Malgré  l'enlèvement  des  blocs  qui  comblaient  l'entrée  du  tunnel, 
il  faut  ramper  sous  ses  grosses  pierres;  là,  je  retrouve  la  même 
couche  de  terre  sèche  et  jaune  que  nous  avions  rencontrée  sous 
les  autres  remblais.  Arrivé  au  point  F,  en  dégageant  les  parois 
de  la  seconde  pierre  verticale  de  droite,  je  trouvai  collé  sur  la 
lace  de  ce  pilier  un  couteau  en  silex  translucide,  taillé  à  arête 
vive  sur  le  dessus.  Près  de  cette  lame,  en  palpant  les  terres  qui 
bouchaient  le  passage  (de  B  en  G),  je  rencontrai  le  bord  d'une 
poterie,  solidement  encastrée  dans  le  mortier  compact  de  la  se- 
conde couche  ;  des  pierres,  mêlées  à  l'argile  durcie,  la  mainte- 
naient en  place,  et  il  fallut  de  longues  heures  de  travail  pour  la 
dégager  entièrement.  Cette  partie  de  l'allée  étant  fort  resserrée, 
le  jour  manquait  et  il  était  impossible  de  se  servir  de  la  pioche 
ou  du  plantoir;  ce  n'est  qu'à  la  pointe  du  couteau  que  je  parvins 
à  enlever  le  blocage  qui  entourait  ce  vase.  Mais,  lorsque  sortant  de 
mon  caveau  je  vis  en  pleine  lumière  l'objet  de  ce  long  travail,  je  fus 
bien  vite  récompensé  de  ma  peine;  c'est,  en  effet,  une  très  belle 
coupe  en  forme  de  calice,  d'une  terre  rouge  et  lustrée;  elle  est 
ornée  de  5  bandes  de  dessins  (')  alternés  et  sa  conservation  est 
parfaite  (fig.  3,  pi.  II). 

En  poursuivant  nos  fouilles,  nous  pénétrons  sous  la  troisième 
table;  moins  élevée  que  la  précédente,  elle  est  soutenue  par  des 
blocs  de  pierres  irrégulièrement  disposés  ;  entre  ces  deux  tables, 
jes  fragments  d'un  vase  épais,  assez  grand,  et  portant  des  rayures 
profondes  horizontalement  tracées;  plus  loin  sous  la  dernière 


(M  Ces  dessins  paraissent  formés  par  l'application  d'une  baude  de  tissu 
vég  étal  rise  entre  deux  cordelettes. 


--  85  - 

table  au  point  G,  se  trouvait  une  énorme  jatte  en  terre  poreuse  et 
mal  cuite,  retournée  à  l'envers,  l'ouverture  collée  sur  le  sol  ; 
elle  était  bien  entière  lorsque  nous  l'avons  dégagée,  mais  en  l'en- 
levant, elle  s'est  brisée  en  morceaux  (fig.  6,  pî.  II).  De  nombreux 
débris  de  charbon  accompagnaient  ces  différents  vases,  qui  tous 
étaient  remplis  d'une  terre  fine  et  bien  homogène- 
La  finissait  notre  galerie. 


86 


III.  —  Considérations   sur  la  structure  de  ce  dolmen. 


En  résumé,  sous  le  tumulus  de  la  Roche  se  trouve  une  allée 
couverte  aboutissant  à  une  chambre;  dix  supports  et  quatre  tables 
sont  encore  à  peu  près  en  place  ;  ces  pierres  sont  en  granité,  sauf 
le  troisième  montant  de  droite  et  le  quatrième  de  gauche,  qui  sont 
en  grès  (J).  Chaque  travée  de  celte  galerie  se  rétrécit  successivement 
comme  les  tuyaux  d'une  lorgnette,  de  façon  à  se  terminer  à  l'ouest 
par  une  ouverture  extrêmement  petite.  La  construction  de  ce  mo- 
nument se  rapporte  au  type  le  plus  ancien,  à  cette  classe  d'allées 
couvertes  dont  le  plan  est  simple  et  rectangulaire,  et  dont  le  pla- 
fond est  formé  par  des  blocs  posés  carrément  sur  des  parois  ver- 
ticales ;  point  de  voûtes  ni  de  corbelets  en  moellons,  comme  dans 
les  tumulus  de  Pornic,  mais  la  simplicité  grandiose  et  la  lourdeur 
massive  des  tombes  les  plus  primitives.  A  l'intérieur,  de  fines  po- 
teries, le  fragment  d'une  hache  d'un  beau  travail,  etc.;  en  somme, 
le  dernier  degré  de  perfection  industrielle  de  la  pierre  polie  con- 
trastant avec  la  rudesse  d'une  structure  grossière  et  toute  primi- 
tive. 

Dans  quatre  parties  de  l'allée  et  de  la  crypte  se  trouvaient  des 
vases  entiers  entourés  de  fragments  de  poteries,  de  pierres  tail- 
lées, de  silex  et  de  charbons,  ce  qui  indique  ordinairement  au- 
tant de  foyers  funéraires. 

C'est  un  fait  assez  bizarre  que  la  réunion  de  plusieurs  morts 
dans  la  même  sépulture  ;  on  dit  bien  que  les  dolmens  étaient, 
comme  nos  caveaux  de  familles,  destinés  à  recevoir  successive- 
ment les  parents  du  premier  mort.  Pour  cela,  on  ouvrait  l'extré- 

(')  Malgré  les  précautions  que  nous  avions  prises  pour  assurer  la  con- 
servation de  ce  dolmen,  de  malencontreux  chercheurs  ont  bouleversé 
toute  une  partie  du  monument  (juin  1881). 


—  87  - 

mité  de  la  galerie,  qui  se  trouvait  presque  à  affleurer  le  bord  du 
tumulus,  et  recouvert,  par  conséquent,  d'une  couche  de  terre 
peu  épaisse.  Biais  dans  le  cas  présent,  ce  moyen  est  impraticable; 
l'ouverture  de  l'Est  est  un  tuyau  si  étroit  qu'il  est  presque  impos- 
sible de  s'y  faufiler  en  rampant.  Gomment  aurait-on,  dans  ces 
conditions,  transporté  le  mort  avec  les  poteries  et  les  objets  qui 
l'accompagnaient,  et  allumé  le  feu  dont  nous  voyons  encore  les 
traces  ? 

Enlever  et  remettre  les  énormes  blocs  qui  recouvraient  la  ga- 
lerie, c'était,  détruire  infailliblement  l'équilibre  des  supports.  — 
On  n'attendait  pourtant  point  le  trépas  d'une  famille  entière  pour 
procéder  à  son  ensevelissement.  Les  parents  du  défunt  étaient-ils 
enfermés  tout  vifs  dans  cette  prison  de  pierre  ?  L'imagination 
recule  devant  de  telles  horreurs.  Et  puis,  ces  êtres,  ainsi  enfermés 
pleins  de  vie,  n'auraient  pas  laissé  si  intact  le  mobilier  du  défunt 
qui  causait  leur  tourment.  Egorgeait-on,  comme  au  temps  de 
César  (4),  les  clients  et  les  esclaves  du  mort  pour  donner  à 
ce  dernier  des  compagnons  de  funérailles  ? 

Je  ne  veux  point  trancher  une  si  embarrassante  question,  et  je 
laisse  un  vieil  historien  nous  raconter  comment  se  passaient 
de  son  temps  les  cérémonies  funéraires,  chez  un  peuple  qui, 
dans  le  monde  ancien,  fait  le  pendant  de  nos  Celtes.  —  Ce  sont 
les  Scythes  que  je  veux  dire,  et  c'est  Hérodote  que  je  laisse  parler. 

Hérodote,  bibl.IV-71. 

Les  sépulcres  des  rois  scythes  sont  en  un  lieu  nommé  Gerrhes 
jusque  auquel  Borysthène  est  navigable.  Mourant  leur  roi,  ils 
fouillent  une  grande  fosse  carrée...  Là  ils  donnent  sépulture  au 
corps...  En  ce  qui  reste  vide  ils  logent  une  des  concubines  du  roi, 
laquelle  ils  ont  d'abord  étranglée  ainsi  que  ses  principaux  servi- 
teurs et  de    tout  autre  meuble  quelque  pièce,   avec   vases  d'or, 

CAR  ARGENT  ET  CUIVRE  NE  LEUR  SONT  POINT  EN  USAGE.  Ces  funérailles 

(!)  Pauîo  supra  hancmemoriam  servi  et  clientes  qiœs  ab  Us  dikctos  esse 
constatât,  justis  funeribus  confectis,  una  cnmabantur.  De  Bello  Gallico, 
iv-19. 


—  88  - 

accomplies,  ils  couvrent  le  tout  de  terre  à  qui  plus  et  mieux,  tant 
qu'ils  élèvent  un  grand  tumulus. 

En  fouillant  un  des  tumulus  de  Gerrhes  (*)  on  trouverait  donc, 
comme  dans  celui  de  la  Roche,  plusieurs  sépultures  accompagnées 
de  vases  et  d'objets  également  antérieures  à  Tusage  du  bronze;  et 
alors,  si  le  texte  du  vieil  historien  n'était  là  pour  nous  renseigner, 
nous  aurions  sans  doute  beaucoup  de  peine  à  admettre  que  la  plu- 
part des  personnages  ensevelis  sous  ces  tombelles  aient  été  égorgés 
pour  servir  aux  funérailles  d'un  chef.  Peut-être  aussi  serions- 
nous  tentés  de  reporter  à  une  période  extrêmement  lointaine, 
ces  sépultures  antérieures  à  Vâgè  du  bronze  (2)  et  cependant 
historiquement  datées  du  Ve  siècle  avant  Jésus-Christ. 

Pitre  de  Lisle, 

Secrétaire  général  de  la  Société  archéologique* 


(*)  Les  fouilles  d'un  des  tumulus  des  rois  Scythes  sont  décrites  au  tome 
X  des  Matériaux,  et  concordent  parfaitement  avec  le  récit  d'Hérodote.  Près 
du  principal  personnage,  on  trouva  amoncelée  une  grande  quantité  de  silex 
taillés  et  tranchants. 

(2)  Les  Massagètes,  peuple  voisin  des  Scythes,  étaient  en  plein  âge  du 
bronze  au  temps  d'Hérodote  (440  av.  J.-G.)  «  Ils  se  servent  de  bronze  pour 
les  piques,  les  pointes  de  flèches  et  les  sagaies  et  réservent  l'or  pour  orner 
les  casques  et  les  baudriers...  Le  fer  et  \ argent  ne  sont  point  en  usage 
parmi  eux  et  en  n'en  trouve  point  dans  leur  pays,  mais  l'or  et  le  bronze  y 
sont  très  abondants.  »  Le  pays  des  Massagètes  et  les  rives  du  Boryslhène 
étaient  bien  moins  éloignés  de  la  patrie  d'Héredote  que  notre  sauvage 
Armorique,  et  si  le  vieil  historien  se  fût  aventuré  jusque  dans  nos  régions, 
il  eût  sans  doute  été  témoin  de  scènes  tout  aussi  barbares  et  tout  aussi  pri- 
mitives que  celles  dont  il  nous  a  laissé  le  récit. 


plu. 


Fo aillas  du  tumuius  de  la  Roche    _ 


m 


Pitre   ie  L;sle  del. 


Lith.  Bruno  e:  Salomone  Rome 


G.  Massuero  hth. 


Notes   sur  différentes  armes  de  pierre  et  de  bronze,  trou- 
vées AUX  environs  de  donges  (loire-inférieure) 


Exposées  à  la  séance  du  18  janvier  1881. 

Après  nos  fouilles  à  la  Roche,  nous  avons  exploré  une  grande 
partie  des  localités  environnantes,  et  le  résultat  de  ces  recherches 
a  été  une  cinquantaine  de  haches  en  pierre  polie,  dont  les  plus 
disparates  ont  été  exposées  sous  vos  yeux  à  la  séance  du  18  jan- 
vier 1881: 

Une  hache  marteau  de  grande  dimension,  percée  d'un  trou 
pour  recevoir  un  manche;  une  hache  en  diorite  verte,  avec  un 
léger  bouton  au  sommet  ;  une  autre  plus  petite  en  fibrolithc; 
une  moitié  de  hache  forée,  trouvée  à  peu  de  distance  de  nos 
fouilles. 

Les  bronzes  ont  été  découverts  au  nord  de  Donges,  sur  le 
bord  des  marais  qui  contournent  cette  commune.  La  grande  épée 
que  notre  excellent  conservateur,  M.  Parenteau,  compare  a  juste 
titre  aux  épécs  de  la  Grèce,  a  été  draguée  à  l'aide  d'une 
fouine  à  prendre  les  anguilles  ;  on  voit  encore  sur  le  tranchant 
la  marque  des  dents  de  la  fouine.  —  Celle  qui  est  munie  de  deux 
rivets  était  enfouie  sous  terre  et  a  été  découverte  en  creusant 
un  fossé.  Un  manche  en  bois,  de  près  de  cinq  pieds  de  long, 
était  fixé  à  cette  lame  ;  ce  qui  me  ferait  croire  qu'au  lieu  d'avoir 
servi  d'épée,  les  lames  de  ce  genre,  toujours  courtes  et  larges  à 
la  base,  étaient  plutôt  des  pointes  de  pique.  Nos  hallebardes  du 
moyen  âge  avaient  souvent  des  lames  aussi  longues  que  celle 
que  nous  voyons  ici. 

Les  deux  pièces  les  plus  rares  de  cette  série  sont  deux  objets 
de  toilette,  une  épingle  à  cheveux  et  un  rasoir. 


-  90  - 

L'épingle  que  l'on  prendrait  à  première  vue  pour  une  baguette  de 
pistolet  légèrement  efiilée  du  bout  (elle  mesure  31  c.)est  bien  réelle- 
ment et  indubitablement  une  épingle.  On  voit  encore  la  place  où  était 
enchâssée  une  pierre  en  forme  de  médaillon  pour  orner  la  tôle. — 
Ces  objets,  qui  rappellent  assez  les  longues  broches  dont  les  dames 
chinoises  transpercent  leur  coiffure,  sont  parfaitement  connus 
maintenant,  grâce  aux  nombreuses  trouvailles  de  bronze  des  cités 
lacustres  de  la  Suisse;  mais  jusqu'ici,  cette  pièce  est  la  première 
de  cette  dimension  que  l'on  ait  trouvée  dans  notre  contrée. 

Le  rasoir  de  bronze  fixé  sur  la  planche  2,  N°  5,  est  tellement 
différent  des  produits  de  notre  coutellerie  moderne,  que  pour 
lui  donner  ce  nom,  il  nous  faut  invoquer  une  autorité  bien  com- 
pétente. Biais  la  réponse  de  M.  Adre  Bertrand  est  catégo- 
rique ;  le  savant  directeur  du  Musée  de  Saint-Germain  m'as- 
sure que  l'objet  en  question  est  bien  im  rasoir  ;  il  ajoute  que 
cette  pièce  est  fort  intéressante;  nous  n'avons  donc  plus  qu'à 
nous  incliner. 

Puis,  viennent  deux  objets  bizarres,  inexplicables,  deux  coins 
en  plomb,  fondus  sur  le  modèle  des  coins  en  bronze.  A  quoi 
pouvaient  bien  servir  ces  haches  de  plomb?  Les  conjectures 
sur  ce  sujet  nous  entraîneraient  beaucoup  trop  loin  pour  le  mo- 
ment. Nous  reviendrons  d'ailleurs  sur  l'étude  de  ces  produits  de 
notre  métallurgie  bretonne  dans  un  prochain  mémoire  (*). 

G.    ET   P.   DE   LlSLE. 


i  (»)  Voir  Revue  archéologique.  Paris,  Didier,  édit. 


LES  TROUVERES  GUÉRANDAIS 

EN    LA    FÊTE     DE     SAINT- NICOLAS,     AU    XIVe    SIÈCLE 

DEUXIÈME    ARTICLE 


LA    CHRONIQUE    EN    VEP.S    DE    GUILLAUME    DE    SAINT-ANDRÉ 


I 

Nous  avons  dans  un  premier  article  cité  un  statut  de  la  con- 
frérie guerrandaise  de  Saint-Nicolas,  d'après  lequel  les  frères, 
après  la  procession  de  la  fête  patronale  du  9  mai,  «  de  vent 
faire  hystoire  d'aucunes  choussez  (choses)  pour  esbatement 
avant  aler  digner.  »  Il  serait  tout  à  fait  invraisemblable,  il  serait 
inadmissible  que  ce  devoir,  lorsqu'il  n'y  aurait  pas  de  preuves 
positives,  n'eût  jamais  été  rempli  dans  la  longue  durée  de  la 
noble  et  dévote  confrérie.  Mais  nous  croyons  avoir  ces  preuves. 
Nous  avons  trouvé  entre  les  pages  du  cartulaire  de  la  confrérie 
des  échantillons  de  l'art  des  vers  appliqué  à  l'histoire  à  la  fois 
nationale  et  locale,  et  nous  en  avons  fait  l'objet  de  notre  premier 
article,  intitulé  :  Chronique  inédite  du  XIVe  siècle.  Maintenant 
une  chronique  beaucoup  plus  importante,  connue  et  publiée, 
nous  attend.  C'est  l'histoire  du  long  règne  de  notre  duc  Jean  IV, 
dit  le  Conquérant  ou  le  Vaillant,  histoire  composée  par  le  breton 
Guillaume  de  Saint-André.  Nous  devons  faire  connaître,  autant 
qu'il  convient,  l'œuvre  et  son  auteur,  et  les  rattacher  ensuite  au 
pays  de  Guerrande,  en  même  temps  qu'à  la  confrérie  guerrandaise 
de  Saint-Nicolas. 


—  92  — 

C'est  surtout  cette  seconde  opération  qui  remplira  notre  but,  à 
savoir  de  revendiquer  pour  ce  pays  un  honneur  qu'on  ne  sait  plus 
auquol  rendre,  en  faisant  rentrer  parmi  les  trouvères  guerran- 
dais,  dont  il  sera  la  gloire,  un  écrivain  sorti  d'une  partie  aujour- 
d'hui ignorée  de  la  province  de  Bretagne. 

Guillaume  de  Saint-André  nous  donne  lui-même  son  nom,  en 
signant  sa  chronique  d'une  manière  assez  originale  ,  en  22  vers 
acrostiches. 

Il  faut  prendre  les  2°2  initiales  à  rebours  ,  c'est-à-dire  ,  en 
remontant  la  page  au  lieu  de  la  descendre  :  il  nous  en  prévient  en 
ces  termes  : 

<r  Lisez 
De  rebours  et  non  pas  de  l'E, 
Ne  sceut-on  corn  suis  appelle.  » 

E  ,  c'est  la  dernière  lettre  du  mot  André;  il  faut  donc  ,  pour 
avoir  le  nom  complet  de  l'auteur  ,  commencer  à  lire  G  qui  ouvre 
la  21e  ligne  suivante.  Après  G,  on  s'attend  a  trouver  U,  qui  vient 
mais  en  double,  apparemment  pour  représenter  le  double  V  de 
William  (le  Guillaume  anglais). 

Afin  de  nous  faire  bien  comprendre,  citons  les  trois  derniers 
vers  de  l'acrostiche  ,  qui  se  trouvent  être  aussi  les  derniers  de 
l'épilogue  et  du  poème  : 

Vieil  suis,  ne  vaux  pas  une  maille. 
Vien  avant  (*)  pour  moi  Dieu  prier, 
Ge  t'en  prie  et  t'en  requier. 

Avec  ces  explications,  il  est  permis  à  Guillaume  de  dire  : 

Mon  nom  y  est  certainement, 
Voyant  tout  (2),  je  l'ose  dire; 
Alten-y  (3)  donc,  se  tu  sceis  lire. 


(')  Que  je  meure;  viens  promptement. 

(2)  C'est  une  condition  nécessaire. 

(3)  Atten,  c'est  le  mot  latin  attende  ,•  nous  dirions  :  Attention!  ou  fais-y 
donc  attention. 


-  93  - 

Apprécions  le  surnom,  plus  important  ici  que  le  prénom.  Il  a 
une  apparence  féodale  qui  deviendra  une  réalité  après  les  éclair- 
cissements que  nous  donnerons.  Appuyé  sur  eux,  uous  ne  crai- 
gnons pas  de  dire  déjà  que  notre  poète  était  le  seigneur  de 
Saint-André.  Entre  les  localités  bretonnes  de  ce  nom,  nous  choi- 
sissons une  paroisse  intermédiaire  aux  villes  de  Guerrande  et  de 
Saint-Nazaire,  la  paroisse  de  Saint-Andrô-des-Eaux,  communé- 
ment appelée  autrefois  Saint-André-lès-Guerrande.  Ce  choix  que 
uous  faisons  sera  suffisamment  justifié  plus  tard.  Les  plus  anciens 
seigneurs  de  cette  paroisse  résidaient  en  un  manoir  dont  on  ne 
connaît  plus  que  l'emplacement  sous  le  nom  de  Ghâteauloup  , 
à  un  kilomètre  nord  du  bourg  :  c'est  là  que  nous  sommes  fondé 
à  voir  la  demeure  de  l'historien  du  duc  Jean  IV. 

M.  Jégou  a  voulu  reconnaître  dans  la  liste  citée  des  membres  de 
la  confrérie  de  Saint-Nicolas  notre  illustre  personnage  sous  le  nom 
de  Guillermus  Scriptoris,  qu'il  traduit  par  Guillaume  le  secré- 
taire. Notre  trouvère  fut-il  le  secrétaire  du  duc  Jean  IV  ?  C'est  ce 
que  nous  ne  pouvons  reconnaître.  Remarquons  ensuite  que 
la  liste  des  confrères  ne  porte  aucun  titre  d'office  civil.  D'ailleurs 
on  ne  lirait  pas  Scriptoris  pour  secrétaire,  mais  bien  Scriptor  ou 
Scriba.  Ici  Scriptoris  est  inconstestablement  un  nom  patrony- 
mique, un  nom  de  famille,  à  traduire  par  Lécrivain.  11  serait  fort 
possible  que  ce  nom  de  famille  appartînt  à  Guillaume  de  Saint- 
André,  qui  l'aurait  déposé  pour  le  nom  plus  glorieux  d'un  fief 
acquis  de  son  souverain  en  récompense  de  ses  services.  Si  les 
faits  ont  eu  lieu,  nous  lui  en  voulons  un  peu  pour  avoir  renoncé 
à  cet  honorable  nom  de  Lécrivain,  auquel  il  devait  avoir  plus  de 
droit  que  tous  ses  aïeux. 

On  a  chargé  de  titres  et  d'honneurs  notre  trouvère  breton. 
Nous  devons  examiner  un  peu  ce  qui  en  est.  Il  est  certain  que 
Guillaume  de  Saint-André  joignait  à  l'art  des  vers  la  science  du 
légiste.  Qu'on  lise  les  dissertations  dont  il  a  allongé  sa  chronique 
pour  établir  les  droits  de  la  maison  de  Montfort  à  la  couronne 
de  Bretagne.  Après  les  avoir  lues  on  ne  s'étonnera  pas  de  le  voir 
siéger  parmi  les  conseillers  du  prince  Jean  dans  le  débat  du  pre- 


-  94  - 

mier  traité  de  Guerrande.  C'est  lui-même  qui  nous  fait  connaître 

ce  rôle  politique  de  sa  vie  : 

Bien  ce  puet  cil  qu'il  estoit  ('). 
L'on  estoit  en  conseil  souvent. 
Grand  cour  avoit  de  sage  gent. 

A  ce  litre  il  en  ajoute  bien  d'autres,  si  on  en  croit  Dom  Lo- 
bineau  et  Dom  Morice,  qui  le  qualifient  licencié  en  décret  (*), 
scholastique  de  Dol,  notaire  apostolique  et  impérial,  secrétaire 
et  ambassadeur  du  duc  Jean  IV.  Nous  conseillons  bien  à  ce  que 
notre  trouvère  ait  été  licencié  en  décret  ;  mais  nous  n'accorde- 
rons pas  plus.  Si  D.  Lobineau  et  son  copiste  D.  Morice  l'ont  sur- 
chargé de  titres  et  d'honneurs,  c'est  qu'ils  ont  confondu  le  père 
et  le  fils  et  attribué  à  celui-là  ce  qui  ne  peut  appartenir  qu'à  ce- 
lui-ci. Ils  auraient  évité  leur  erreur,  s'ils  avaient  fait  plus  d'atten- 
tion à  l'épilogue  du  poème  qu'ils  ont  copié.  Revenons  sur  des 
vers  que  nous  avons  déjà  cités. 

Viel  suis,  ne  vaut  pas  une  maille. 
Vien  avant  pour  moi  Dieu  prier, 
Ge  t'en  prie  et  t'en  requiert. 

N'est-ce  pas  là  le  langage  d'un  moribond,  craignant  de  n'être 
pas  assisté,  au  moment  de  la  mort  qui  est  proche,  des  prières 
de  son  fils?  Or  il  tenait  ce  langage  en  arrêtant  sa  chronique,  à 
peu  près  au  milieu  du  règne  de  Jean  IV,  et  il  l'arrêtait  là,  d'un 
côté,  parce  que  les  forces  lui  manquaient  pour  aller  plus  loin, 
pour  faire  autre  chose  que  de  signer  son  œuvre  poétique  et  don- 
ner ses  derniers  avis  à  son  fils,  et  d'un  autre  côté,  parce  qu'il 
avait  épuisé  le  passé  dans  ses  récits  et  que  la  vue  de  l'avenir  lui 
était  fermée.  Il  est  si  vrai  qu'il  ne  lui  restait  plus  rien  de  connu 
à  dire,  qu'il  ne  parle  que  de  ce  que  le  prince  fera  désormais,  en 
recommandant  à  son  fils  d'en  achever  l'histoire  : 

Mon  cher  fils,  pour  Dieu  te  prie 
Que  tu  escrives  ce  qu'il  fera 
Avec  la  fin  qu'il  prendra. 

(')  Il  peutbien  dire  cela  celui  qui  y  était. 
(2)  Droit  canon  ou  ecclésiastique. 


-  95  ~ 

La  chronique  et  son  auteur  doivent  donc  prendre  fin  à  peu  près 
dans  le  même  temps.  Or  la  chronique  prend  fin  en  janvier 
1382,  au  retour  de  Jean  IV  de  Gompiègne  à  Nantes,  qui  lui  fit 
fête.  Le  chroniqueur,  dont  nous  avons  entendu  la  voix  mou- 
rante, n'aura  guère  survécu.  Et  c'est  justement  en  1382  que 
nos  annalistes  bretons  lui  font  commencer  son  grand  rôle  his- 
torique. Ils  l'envoient  en  message  à  Londres  où  ils  lui  font 
signer,  le  26  mai  de  celte  année-là,  comme  notaire  public, 
apostolique  et  impérial,  un  acte  de  soumission  de  Jeanne  de 
Navarre  au  duc  son  époux.  Ils  l'envoient,  deux  ans  après,  à  Paris, 
soutenir  les  droits  de  son  maître  devant  le  roi  Charles  VI.  En 
1387,  Guillaume  de  Saint-André  signe  en  qualité  de  secrétaire 
du  duc  un  acte  de  protestation,  —  nous  dirions  aujourd'hui 
de  satisfaction,  —  en  face  des  ambassadeurs  du  roi  de  France 
qui  réclamait  en  faveur  d'Olivier  de  Clisson.  L'année  suivante, 
il  est  chanoine  scholastique  de  Dol  et  baptise  dans  la  chapelle 
de  Sucinio  une  fille  de  Jeanne  de  Navarre.  Le  scholastique 
ou  écolâtre  de  l'Église  de  Dol  vit  encore  en  1401.  Entre  temps 
il  figure  plusieurs  fois  parmi  les  conseillers  du  duc  Jean  IV, 
qui  décéda  le   1er  jour   de  novembre  1399. 

A  ce  défilé  d'honneurs  et  de  fonctions  civiles,  politiques  et  ec- 
clésiastiques, postérieur  à  l'an  1382,  on  voit  s'il  faut  et  com- 
bien on  doit  en  rabattre  des  titres  attribués  par  nos  historiens 
bénédictins  au  trouvère  Guillaume  de  Saint-André.  Ne  le  char- 
geons point  tant  pour  le  grandir,  et  ne  dépouillons  point  le  fils 
pour  revêtir  le  père,  qui  n'a  pas  besoin  d'une  plus  grande  part 
de  gloire,  si  on  veut  apprécier  son  œuvre  ;  ce  que  nous  vou- 
lons faire  brièvement. 


II 


On  ne  possédait  pas  la  chronique  de  Guillaume  de  Saint-André 
tout  à  fait  entière  avant  la  publication  qu'en  a  faite  M.  Gharrière, 
vers  1840,  dans  ses  Documents  inédits  de  l'histoire  de  France. 
D.   Lobineau  et  D.  Morice   avaient  en   vue  seulement  ce  qui 


—  96  — 

pouvait  servir  à  leurs  preuves,  et  l'exemplaire  qui  était  entre 
leurs  mains  s'est  perdu.  Heureusement  que  la  Bibliothèque  na- 
tionale réservait  à  l'éditeur  parisien  deux  autres  exemplaires, 
dont  l'un  est  plus  que  complet,  contenant  une  description  du 
jeu  d'échecs,  vrai  hors  d'oeuvre  de  1200  vers.  Nous  croyons 
assez  que  Guillaume  de  Saint-André  est  l'auteur  de  celte  des- 
cription ;  mais  il  avait  trop  de  bon  sens  pour  l'intercaler  dans  sa 
chronique  :  il  aura  été  desservi  par  un  capricieux  copiste, 
comme  le  pense  M.  Charrière. 

Le  poème  s'annonce  ainsi  :  «  C'est  le  livre  du  bon  Jehan  duc 
de  Bretaignc,  »  et  s'ouvre  par  un  prologue  de  100  vers  sur  les 
vicissitudes  de  la  fortune,  dont  le  bon  duc  fut  un  grand  exemple. 

Le  récit  des  faits  a  un  point  de  départ  précis: 

«  L'an  trois  centz  quarante  et  un  mil, 
Le  derrain  jour  du  mois  d'apvril, 
Quand  le  duc  Jehan  (trois)  trépassa 
Et  en  guerre  tous  nous  laissa 
Sur  la  propriété  de  sa  terre. 
Dont  longuement  dura  la  guerre, 
Par  une  outrageuse  sentence, 
Qui  lors  fut  donnée  en  France 
Par  un  arrêt  du  parlement, 
Près  de  Paris,  à  Escoufflent  (*) 
Et  fut  ce  fait,  comme  il  me  semble, 
Le  septième  jour  de  septembre.  » 

Le  récit  se  termine  en  1382  par  la  fôte  de  réception  que 
Nantes  fit  à  Jean  IV  de  retour  de  Gompiègnc,  où  il  avait  été 
rendre  hommage  à  Charles  VI.  Le  duc  devait  vivre  encore  18 
ans.  Son  historien  nous  prévient  en  ces  termes  qu'il  n'a  pas 
tout  dit  :  «  Cy  finist  le  libvre  non  complet  du  bon  duc  Jehan.  » 
Avant  de  mettre  son  nom  en  acrostiche,  il  engage  son  fils  à 
poursuivre  l'histoire.  La  recommandation  ue  paraît  pas  avoir 
eu  d'effet. 


'  Confkuis,  au  confluent  de  la  Seine  et  de.  la  Marne. 


—  97  — 

C'est  une  période  de  40  ans  (*)  qu'embrasse  le  chroniqueur, 
eu  déroulant  une  suite  de  plus  de  4,300  vers.  Ces  vers,  on  le  con- 
çoit, n'ont  pointées  mérites  poétiques  qu'on  exigerait  aujourd'hui. 
L'art  était  alors  des  plus  simples.  Le  discours  se  découpait  réguliè- 
rement par  la  rime  en  lignes  de  huit  syllabes,  sans  autre  ornement 
de  langage.  Les  élégances  étudiées  de  la  poésie  moderne  ont-elles 
plus  de  charmes  que  ces  naïfs  récits  du  moyen  âge  ?  Que  Guil- 
laume de  Saint-André  ne  soit  point  compté  parmi  les  poètes  vé- 
ritables, c'est  du  moins  un  chroniqueur  véridique,  auquel  on 
peut  se  fier  entièrement  :  que  lui  demander  de  plus  ?  M.  Char- 
rière  ne  le  trouve  qu'une  fois  en  défaut  :  les  deux  voyages  que 
Jean  IV  fît  en  Flandre  sont  confondus  en  un  seul.  Le  savant  cri- 
tique compare  deux  trouvères,  dont  il  a  édité  les  œuvres  à  la 
suite  l'une  de  l'autre,  le  Normand  Guvelier,  qui  dans  sa  chronique 
a  célébré  Duguesclin  avec  Charles  V,  et  le  Breton  Guillaume, 
panégyriste  du  duc  son  maître.  Il  donne  l'avantage  au  second.,  qui 
nous  initie  aux  sentiments,  aux  mœurs  et  au  langage  de  la 
Bretagne  sa  patrie,  outre  qu'il  a  été  témoin  oculaire  de  ce  qu'il 
raconte. 

Nous  n'en  dirons  pas  davantage  sur  Guillaume  de  Saint-André 
et  son  œuvre,  sur  la  chronique  de  Jean  IV  et  le  chroniqueur,  ou 
du  moins  nous  n'en  parlerons  maintenant  que  pour  les  rattacher 
au  pays  de  Guerrande,  ce  que  nous  avons  promis  de  faire. 

III 

Une  pièce  diplomatique  de  1387  mentionnée  plus  haut  va  nous 
servir.  Lobineau  et  d'après  lui  D.  Morice  l'intitulent  :  «  Ambassa- 
de du  roi  de  France  vers  le  duc  au  sujet  d'Olivier  de  Clisson.  » 
C'est  trop  vague,  si  c'est  même  exact.  La  suscription  de  l'ori- 
ginal conservé  aux  Archives  du  département  porte  :  «  Acte  de 
protestation,  par  lequel  le  duc  de  Bretagne  s'engage  en  face  des 
ambassadeurs  du  roi  à  se  démettre  des  places  qu'il  avait  eonfîs- 

(*)  1341-1381,  vieux  stylet  on  dirait  aujourd'hui  1382. 

1881  7 


-  98  — 

quées  sur  le  sire  de  Glisson,  y  compris  la  somme  de  100,000", 
pour  en  donner  la  garde  au  sire  de  Laval,  jusqu'à  ce  que  justice 
lui  eût  été  rendue,  sans  préjudice  de  ses  droits.  »  Cet  acte,  ré- 
digé partie  en  français,  partie  en  latin,  est  ainsi  signé  par  les  deux 
secrétaires  du  duc  : 

Et  ego  Guillus  de  Sancto  Andréa,  fuir)  Nannetensis  diœcesis, 
publiais,  apostolicus  et  imperialis  nostarius. 

Et  ego  Herveus  le  Grant  clerus  Corisopitensis  diœcesis,  pu- 
bliais, etc. 

Ce  sont  surtout  ces  signatures  que  nous  voulons  faire  remar- 
quer et  dans  ces  signatures  les  pays  des  signataires.  Dom  Morice 
a  bien  lu  et  noté  qu'Hervé  le  Grant  était  un  clerc  du  diocèse  de 
Quimper  ;  mais  comment  expliquer  qu'il  ait  négligé  de  voir  ou 
de  nous  apprendre  que  Guillaume  de  Saint-André  était  du  dio- 
cèse de  Nantes  ?  Par  suite  de  cette  négligence  on  ignorait  jusqu'ici 
le  lieu  de  naissance  ou  de  domicile  en  Bretagne  d'un  personnage 
fort  important.  Pour  nous  il  est  vrai  qui  faisons  la  distinction  du 
père  et  du  fils,  nous  ne  pouvons  reconnaître  en  1387  que  celui-ci, 
non  le  trouvère  ;  mais  nous  sommes  bien  en  droit  de  pré- 
tendre que  le  pays  de  l'un  et  de  l'autre  était  le  même,  le  diocèse 
de  Nantes,  surtout  quand  leur  nom  de  Saint-André  appartient  à 
ce  diocèse,  ce  qui  se  confirmera  par  un  nouvel  examen  de  la 
Chronique. 

Elle  nous  offre  deux  parties  bien  distinctes,  la  première  an- 
térieure et  la  seconde  postérieure  au  traité  de  1365.  L'une 
raconte  la  guerre  de  succession,  l'autre  les  démêlés  de  Jean  IV" 
avec  Charles  V.  Il  n'est  guère  possible  qu'elles  aient  été  com- 
posées au  même  lieu.  Dans  la  première,  Guerrande  n'obtient  que 
deux  légères  mentions;  silence  absolu  sur  la  catastrophe  dont  fut 
victime,  en  1343,  cette  moult  grosse  ville  de  l'historien  Frois- 
sart.  Mais  laissons  venir  Guillaume  au  conseil  où  se  prépare  lt; 
traité  qui  mettra  fin  à  une  guerre  de  25  ans.  Dès  lors  Guerrande 
commencera  à  prendre  pour  lui  un  intérêt  des  plus  marqués  :  on 
sent  qu'à  partir  de  là  il  est  attaché  au  sol  et  aux  affaires  de  Guer- 
rande. Cette  attache  s'explique  très  bien  par  le  don  rémunérateur 


—  99  - 

de  ses  services  qui  lui  aurait  été  fait  de  la  châtellenie  de  Saint- 
André,  de  la  terre  et  du  manoir  de  Châteauloup,  dans  le  do- 
maine patrimonial  de  la  maison  de  Mont-fort,  non  loin  d'une  ré- 
sidence ducale  (').  Il  est  certain  que  l'attention  de  notre  chro- 
niqueur prend  une  nouvelle  direction  :  ce  n'est  plus  de  l'indif- 
férence ou  de  l'oubli  pour  cet  important  quartier.  Il  s'étend  avec 
complaisance  sur  les  deux  traités  de  Guerrande,  l'un  juré  en 
1365  dans  l'église  de  Saint-Aubin,  l'autre  en  1381  dans  la  cha- 
pelle de  Notre-Dame  la  Blanche,  de  même  sur  le  siège  de  la 
place  vainement  tenté  par  Olivier  de  Glisson  et  les  représailles 
des  Guerrandais  dans  les  terres  du  connétable,  sur  la  descente 
des  Espagnols  et  le  double  échec  que  leur  font  éprouver  les  deux 
de  Guerrande  et  de  Saint-Nazaire,  Guillaume  du  Châtel  et  Jean 
d'Ust  (2).  On  sent  que  ce  dernier  était  le  voisin  et  l'ami  du  châ- 
telain poète,  qui  en  parle  si  avantageusement  et  si  complaisam- 
ment.  Nous  devons  signaler  encore  dans  sa  chronique  versifiée 
du  règne  de  Jean  IV,  une  exactitude  topographique  qu'on  ne 
trouve  pas  dans  les  meilleurs  historiens,  lorsqu'ils  n'  ont  pas  eu 
le  pied  dans  les  lieux  qu'ils  mentionnent. 

Tout  cela  ne  nous  permet  pas  de  douter  que  Guillaume  de 
Saint-André  ne  fût  inféodé,  du  moins  dans  la  dernière  partie  de 
sa  vie,  au  pays  de  Guerrande,  mais  tout  notre  but  n'est  pas  at- 
teint. Nous  tenons  à  faire  entrer  son  œuvre  dans  la  noble  con- 
frérie guerrandaise  de  Saint  Nicolas,  si  c'est  possible. 

Il  serait  fort   étonnant   que  Guillaume  de  Saint- André,    que 


(*)  Que  Jean  IV  et  ses  successeurs  ont  eue  à  Guerrande,  au  faubourg 
Bizienne,  tout  près  du  couvent  des  Jacobins  :  c'était  le  manoir  de  la  Tou- 
che. Une  autre  maison  princière,  dite  de  la  duchesse  Anne,  était  dans  la 
ville  même,  avant  qu'elle  ait  été  démolie  pour  l'ouverture  de  la  rue  Pellan 
sur  la  place  Saint-Aubin,  vers  1860. 

(2)  Le  cbàteau  d'Ust,  dont  il  ne  reste  plus  que  les  fondements,  était  assis 
sur  un  promontoire  de  la  Brière  en  Saint-André,  sur  la  limite  de  cette 
paroisse  et  de  celle  de  Saint-Nazaire.  Il  était  vassal  de  Châteauloup.  — 
L'exploit  de  Jean  d'Ust  a  été  représenté  cette  année,  a  Saint-Nazaire,  dans 
uue  brillante  cavalcade,  le  lundi  9  mai,  lendemain  de  l'inauguration  du 
bassin  a  flot  de  Penhouët. 


-  100  — 

dous  voyons  résider  au  pays  de  Guerrande,  n'eût  pas  été  enrôlé 
dans  une  confrérie,  où  avaient  à  cœur  de  l'être  les  notables  de 
ce  pays.  On  a  voulu  trouver  son  nom  dans  la  liste  générale  des 
confrères  dressée  en  1381  et  insérée  en  tête  des  procès-verbaux 
de  leur  cartulaire.  Parmi  les  104  noms  qu'elle  contient  on  WtMa- 
gister  Guillermus  Scriptoris,  qu'on  a  traduit,  comme  nous  l'avons 
vu  au  commencement  de  ce  second  article  :  Maître  Guillaume 
secrétaire.  Nous  avons  fait  observer  que  Scriptoris  ne  pouvait  dé- 
signer un  office,  mais  était  un  nom  de  famille  équivalent  a  L'écri- 
vain; les  nombreux  surnoms  marqués  de  ce  cas  oblique  dans  la 
liste  en  question  sont  tous  des  noms  patronymiques.  Nous  ne  refu- 
sons point,  du  reste,  de  voir.Maître  Guillaume deSaint-André  dans  le 
Magister  Guillermus  Scriptoris  (L'écrivain),  ou  encore  dans  le 
Magister  Guillermus  Gauffridi  (Geoffroy),  qui  suit  de  près;  le  nom 
de  famille  pouvait  bien  ne  pas  s'effacer  entièrement  devant  le 
titre  féodal. 

L'introduction  de  l'illustre  chroniqueur  dans  la  confrérie  guer 
randaise  de  Saint-Nicolas  étant  admise,  il  dut  y  apporter  son 
œuvre  poétique,  qui  était  tout  à  fait  propre  à  satisfaire  au  statut 
prescrivant  une  histoire  rimée  des  anciennes  choses  pour  les  es- 
battements  de  la  fête  du  grand  patron  :  nous  l'entendons  surtout 
de  la  seconde  partie  du  poème,  si  intéressante  et  si  flatteuse  pour 
les  Guerrandais.  Ce  qui  y  paraît  si  déplacé,  la  longue  descrip- 
tion du  jeu  d'échecs,  avait  sa  place  toute  naturelle  dans  un  de 
ces  esbattements.  Ce  devait  être  une  jouissance  pour  les  confrères 
que  ces  ingénieux  développements  sur  un  jeu,  dont  les  habiles 
manœuvres  s'accordaient  si  bien  avec  l'esprit  guerrier  de  la 
plupart.  Supposons  contre  la  vraisemblance  que  les  rimes  de  Guil- 
laume n'aient  pas  eu  l'honneur  de  contribuer,  de  son  vivant,  aux 
charmes  de  la  fête  de  Saint-Nicolas  ;  elles  ont  dû  avoir  cet  hon- 
neur, présentées  après  son  décès  par  un  heureux  dépositaire  de 
l'original.  Notre  assertion  est  fondée  sur  l'examen  des  deux  ma- 
nuscrits de  la  Bibliothèque  nationale  consultés  et  collationnés  par 
M.  Gharrière.  L'un  est  sur  papier  ordinaire  et  date  du  17e  siècle  ; 
l'autre  est  beaucoup  plus  ancien,  comme  nous  allons  le  voir.  Ils 


—  101  — 

offrent  des  particularités  très  significatives  à  nos  yeux.  Dans  l'un, 
c'est  le  hors-d'œuvre  du  jeu  d'échecs,  qui  n'en  est  point  un,  si 
le  manuscrit  est,  comme  il  nous  paraît,  un  recueil  des  pièces  com- 
posées ou  du  moins  lues,  par  le  trouvère  Guillaume,  pour  la  cir- 
constance festivale  du  9  mai.  Dans  l'autre,  ce  sont  des  suppres- 
sions raisonnées  et  une  curieuse  souscription  de  copiste.  Dans  ce 
dernier  on  s'explique  la  suppression  du  jeu  d'échecs,  qui,  évidem- 
ment, ne  peut  faire  corps  avec  la  chronique  ;  on  s'explique  de 
même,  pour  le  cas  si  probable  de  la  présentation  des  récits  de 
cette  chronique  à  la  confrérie  de  saint-Nicolas,  la  suppression 
d'un  épilogue  où  l'auteur  parle  de  lui-même  et  à  son  fils  un  peu 
longuement  ;  on  s'explique  enfin  la  suppression  du  nom  en  acros- 
tiche de  l'auteur,  lorsque  la  confrérie  devait  ou  était  censée  en- 
tendre les  rimes  d'un  frère  vivant  et  présent.  La  façon  d'explicite 
par  laquelle  le  copiste  remplace  ses  suppressions,  nous  fournira 
quelque  argument  encore  plus  probant  en  faveur  de  notre  opinioni 

Cet  livre  fut  complété,  et  escript 
En  l'honneur  de  Jhesus-Christ 
L'onzième  jour  du  moys  de  may, 
Affin  que  ne  soyés  en  esmay, 
Pour  et  au  nom  d'Yvon  Conan, 
Mille  quatre  cent  quarante  et  un  an, 
Par  Jehan  Ollivers,  de  sa  main: 
De  ce  soyés  très-bien  certain. 

V onzième  jour  de  may  n'est  pas  loin  du  neuf,  fête  solennelle 
de  Saint-Nicolas  au  moyen  âge.  Il  y  a  l'intervalle  nécessaire  et 
suffisant  pour  tirer  une  copie  d'environ  4,000  vers,  qui  aura  été 
commandée  à  Jean  Olivier  par  quelque  notable  sous  l'impression 
de  la  lecture  des  intéressants  récits  de  Guillaume  de  Saint-André 
devant  la  confrérie  guerrandaise,  et  cette  lecture  était  très  vrai- 
semblablement réclamée  par  l'année  1441,  anniversaire  cente- 
naire du  mémorable  avènement  de  la  maison  de  Montfort.  Rap- 
pelons-nous, d'un  autre  côté,  que  cet  avènement  de  1341  est  le 
point  de  départ  de  la  chronique  du  règne  de  Jean  IV,  ce  vaillant 


—  402  — 

fils  du  comte  de  Monlfort  dit  le  Conquérant,  et,  en  style  du  temps 
le   Conquéreur, 

Concluons.  Nous  n'avons  point  découvert  un  grand  trou- 
vère inconnu  ;  mais  nous  avons  ajouté  quelque  chose  à  la 
connaissance  qu'on  en  avait,  en  déterminant  le  canton  de  la 
Bretagne  auquel  il  appartenait,  en  le  rattachant  au  Comté  nantais 
et  à  la  sénéchaussée  de  Guerrande,  en  lui  donnant  pour  titre  sei- 
gneurial et  pour  résidence  la  paroisse  de  Saint-André-des-Eaux, 
et  en  le  faisant  entrer,  autant  qu'il  était  possible,  dans  la  con- 
frérie guerrandaise  de  Saint-Nicolas.  Nous  avons  fait  sortir  du 
sein  de  cette  confrérie  quelques  essais  de  chronique  en  vers  (!). 
C'étaient  des  germes  de  la  grande  chronique  de  Jean  IV.  Nous 
ne  trouvons  plus  rien  après  dans  ce  dévot  milieu,  comme  s'il 
s'était  épuisé  a  la  produire,  ou  comme  si  la  perfection  du  genre 
étant  réputée  atteinte,  il  n'y  avait  plus  rien  à  faire  Ou  à  dire. 

Abbé  Gallard. 


0)  Voir  notre  premier  article. 


LES  PARADIS 

SONT-ILS  DES   CIMETIÈRES  MÉROVINGIENS? 


Messieurs  et  chers  collègues, 

En  posant  cette  question  devant  vous,  mon  intention  n'est 
pas  de  îa  résoudre  seul,  je  veux  uniquement  convier  ceux 
d'entre  vous  qui  ont  des  loisirs  à  étudier  et  à  interroger  les 
lieux  dits,  dont  le  sous-sol  recèle  la  solution  de  nos  énismes 
archéologiques.  C'est  le  programme  d'une  série  de  fouilles  que 
je  vous  soumets,  en  vous  laissant  le  soin  de  fixer  le  moment  et 
la  méthode  que  nous  aurons  à  suivre  pour  les  exécuter.  Notre 
domaine  embrasse  l'histoire  entière  du  passé,  c'est  vrai,  cepen- 
dant notre  titre  nous  oblige  à  nous  consacrer  plus  spécialement 
à  l'exploration  des  monuments  et  des  productions  humaines 
enfouies  sous  les  ruines.  Notre  science  à  nous  ne  peut  avancer 
que  si  ses  disciples  s'arment  tout  à  la  fois  de  la  pioche  et  de  la 
plume. 

Jusqu'ici  nous  avons  poursuivi  avec  passion  tout  ce  qui 
pouvait  nous  éclairer  sur  l'état  de  l'industrie  humaine  aux  épo- 
ques préhistoriques,  M.  le  baron  de  Wismes  et  M.  de  Lisle 
du  Dréneuf  ont  arraché  à  nos  dolmens  tous  leurs  secrets  ;  M. 
de  Rochebrune  nous  a  montré  l'homme  des  cavernes,  tel  qu'il 
était  dans  une  contrée  voisine  de  la  nôtre.  Pourquoi  mainte- 
nant ne  chercherions-nous  pas  des  documents  sur  les  généra- 
tions plus  rapprochées  de  nous  ?  Leurs  habitations  et  leurs 
sépultures  ne  sont  pas  apparentes  comme  les  dolmens  et  les  ca- 
vernes des  Troglodytes,  mais  elles  n'en  n'existent  pas  moins.  Les 
peuplades  qui  ont  vécu   sur  les  rives  de  la  Loire-Inférieure 


—  104  — 

au  temps  des  invasions  bretonnes  et  postérieurement  ont  dû 
laisser  autour  de  leurs  principales  agglomérations  autant  d'armes, 
de  bijoux  et  d'instruments  que  les  générations  gallo-romaines. 
Depuis  que  j'ai  eu  sous  les  yeux  les  splendides  albums  publiés 
par  M.  Frédéric  Moreau  sur  les  merveilleuses  richesses  exhumées 
au  cimetière  mérovingien  de  Caranda,']e  rôve  pour  notre  société 
une  bonne  fortune  semblable. 

Ce  n'est  pas  une  aventure  que  je  vous  propose  de  courir, 
non,  des  jalons  certains  nous  marquent  la  route  à  suivre.  Nos 
maîtres  dans  la  science  archéologique  nous  ont  laissé  des  indi- 
cations qui  nous  empêcheront  de  nous  égarer,  les  noms  de  lieu 
seront  notre  boussole  dans  la  recherche  des  emplacements  à 
fouiller.  M.  l'abbé  Cochet,  l'auteur  de  La  Normandie  souterraine 
a  publié  dans  la  revue  archéologique  une  série  d'articles  que  je 
vous  invite  à  lire.  Ses  investigations,  vous  le  verrez.,  l'ont  con- 
duit à  constater  que  les  pièces  de  terre,  nommées  Paradis, 
étaient  des  lieux  d'inhumation  très  anciens.  Je  cite  au  hasard 
quelques  unes  de  ses  preuves  : 

«  Diverses  constructions  entreprises  au  lieu  dit  le  Paradis  par 
des  habitants  du  village  de  Sommery,  canton  de  Saint-Saëns, 
ont  rais  à  jour  des  squelettes  de  guerriers  armés  de  couteaux,  de 
sabres  et  de  lances  (4).  » 

«  En  1868,  dix  rangs  de  corps  ont  été  trouvés  sur  le  territoire, 
de  Nesle-Hodeng,  près  Neufchâtel,  dans  un  champ  nommé  le 
Paradis,  «  dénomination  qui  indique  presque  toujours  une  né- 
cropole mérovingienne  »,  ajoute  l'abbé  Cochet  (2). 

«  A  Sénarpont,  on  voit  des  fosses  de  craie  dans  un  cimetière  qui 
porte  le  nom  de  Paradis  «  vocable  très  commun  aux  premières 
nécropoles  chrétiennes,  »  dit  le  même  auteur  (s). 

Pendant  les  travaux  nécessités  par  le  raccordement  du  chemin 
qui  conduit  du  Calvaire  à  l'église  de  Nesle,  on  rencontra,  dans 


(*)  Revue  archéologique,  XIXe  vol.,  nouv.  série,  p.  191. 

(2)  Ibidem,  XXI*  vol.,  p.  317. 

(3)  Ibidem,  p.  80. 


—  105  — 

un  champ  nommé  le  Paradis,  des  vases  de  terre  et  des  perles  de 
verre  (4). 

M.  Parenteau,  qui  a  bien  voulu  me  relever  ces  citations.,  pos- 
sède, sur  une  de  ses  propriétés  de  Vendée,  une  pièce  de  terre 
qui  paraît  appartenir  à  la  classe  des  précédentes.  Son  Paradis  est 
environné  de  pièces  nommées  l'Enfer,  le  Thabor  et  la  Passion. 
Dans  d'autres  provinces  on  fera  sans  doute  la  même  remarque, 
et  l'avenir  prouvera  que  les  générations  du  Moyen  Age  ont  appli- 
qué partout  le  nom  de  Paradis  à  leurs  cimetières.  Les  habitants 
des  villes  se  sont  servis  du  même  mot  que  les  habitants  des 
campagnes.  Quand  nous  disons  le  parvis  d'une  église,  nous  dé- 
signons l'emplacement  qu'occupait  jadis  son  cimetière,  devant 
la  porte  principale.  Le  Parvis  et  le  Paradis  d'une  église  procè- 
dent d'une  origine  commune,  ces  deux  mots  s'appliquent  à  un 
lieu  funèbre,  l'un  est  la  contraction  de  l'autre.  Littré  admet 
cette  étymologie  dans  son  monumental  dictionnaire,  mais  il 
en  donne  une  singulière  explication,  faute  de  connaître  les 
travaux  de  M.  l'abbé  Cochet.  Il  croit  que  la  place  antérieure 
des  églises  a  été  nommée  Paradis  ou  Parvis  parce  que,  dans 
les  représentations  des  Mystères  au  Moyen  Age,  on  y  établis- 
sait le  Paradis  de  la  scène.  L'interprétation  que  nous  fournit 
l'archéologie  est  plus  satisfaisante,  et  bien  autrement  certaine. 
Le  cimetière  mérite  le  nom  de  Paradis  à  plusieurs  titres  :  pour 
les  justes,  c'est  le  commencement  de  la  félicité  promise  à  ceux 
qui  ont  accompli  les  prescriptions  de  la  loi  divine,  pour  les 
autres,  c'est  le  terme  des  tribulations  de  la  vie  humaine,  le  sé- 
jour du  repos  après  le  combat. 

Il  y  a  encore  une  explication,  moins  mystique  que  la  première, 
qui  conviendra  mieux  aux  esprits  positifs  :  Paradis  signifie  ri- 
goureusement un  jardin  ;  or,  comme  les  chrétiens  attachés  au 
culte  des  morts  se  sont  plu  à  embellir  de  fleurs  la  tombe  de 
leurs  défunts,  il  est  arrivé  que  les  cimetières  ont  été  transformés 


(*)  Ibidem,  p.  442. 


—  406  — 

en  véritables  parterres.  Il  n'est  pas  surprenant,  alors,-  que  les 
mots  de  cimetières  et  de  paradis  soient  devenus  synonymes 
dans  la  langue  de  nos  pères. 

Les  pièces  de  terre  nommées  le  Paradis  dans  la  Loire-Infé- 
rieure ne  sont  pas  rares,  leur  situation  particulière,  leur  con- 
figuration, leurs  alentours  les  recommandent  à  notre  attention. 
A  nous  de  les  sonder  et  d'examiner  si  elles  diffèrent  de  celles 
qui  ont  été  explorées  en  Normandie.  Tantôt  elles  portent  la  trace 
d'une  ancienne  clôture,  tantôt  elles  se  rattachent  à  l'histoire  de 
quelque  bénéfice  ecclésiastique.  Voici  les  renseignements  que 
j'ai  pu  recueillir  en  consultant,  tour  à  tour,  le  cadastre  et  la  tradi- 
tion orale  : 

Abbaretz.  —  Au  nord  de  la  commune,  je  remarque  le  grand 
et  le  petit  Paradel  ;  ce  n'est  pas  le  Paradis,  mais  il  faut  avouer 
que  la  parenté  est  frappante.  A  côté,  je  vois  la  chapelle  de  la 
Marguerite,  ancienne  dépendance  de  l'abbaye  de  Melleraye, 
dotée  par  les  ducs  d'une  foire  célèbre.  Il  n'y  a  plus  à  en  douter, 
cet  endroit  est  bien  un  lieu  sacré  depuis  longtemps  et  digne 
d'arrêter  notre  attention.  La  terminaison  et,  dans  Paradel,  n'est 
autre  que  l'article  breton  renversé. 

Aigre  feuille.—  La  pièce  du  Paradis-Cabot  est  à  4  chemins,  et 
autour  on  remarque  les  pièces  de  la  Croix,  les  pièces  au  Curé,  le 
Grand  et  le  Petit-Tabernacle,  tout  près  du  village  des  Maillar dé- 
vies, commune  actuelle  de  la  Planche  (*). 

Assérac.  —  Dans  la  section  du  bourg  existent  une  terre,  des 
prés  et  un  champ  du  Prady  (2),  et  dans  la  section  de  l'Eclis  le 
clos  du  Prady  (3).  Reste  à  savoir  si  le  nom  de  Prady  est  une 
contraction  de  Paradis. 

Avessac.  —  Sur  la  métairie  de  la  Guichardière,  près  du  Petit- 
Meslay,  il  y  a  une  pièce  de  terre  de  3  hectares  environ  entourée 


(»)  Cadastre,  B  446,  447,  657,  700,  704. 

(2)  Ibidem,  614,  628,  630-636,  641. 

(3)  Ibidem,  487-492,  499-500. 


-  407  — 

de  grands  sapins,  moitié  en  pré,  moitié  en  labour,  qu'on  nomme 
le  Paradis  (*). 

Ancenis.  —  On  dirait  qu'on  a  voulu  jouer  ici  sur  les  mots  ;  la 
rue  qui  conduit  au  cimetière,  est  la  rue  d'Enfer. 

Auverné.  —  Le  Paradis  est  tout  près  du  bourg,  à  côté  du 
pâtis  Saint-Georges. 

Barbcchat.  —  Le  Paradis  est  une  pièce  carrée  en  labour,  sur 
une  éminence,  bordée  par  le  chemin  étroit  des  Alouettes  qui  des- 
cendait au  pont  de  Barbechat.  On  ne  peut  pas  le  confondre  avec 
le  cimetière  de  l'ancienne  Templerie  de  Barbechat  supprimé  il  y 
a  plusieurs  siècles.  Ce  dernier  est  à  une  portée  de  fusil  des  ruines 
de  la  Madeleine,  à  l'angle  d'un  carroi  où  se  trouvent  les  pièces  du 
Presbytère.  Les  tombes  y  sont  cachées  par  une  châteigneraie. 

Boissière  (la).— Le  Paradis  est  à  la  petite  Giraudière.  Dans  le 
voisinage  se  trouve  l'Ew/èr,  les  près  du  Rosaire,  et  la  pièce  de  la 
Madeleine  (2). 

Carquefou.  —  Il  existait  avant  1790,  aux  environs  du  bourg, 
un  bénéfice  ecclésiastique  nommé  la  chapelle  du  Paradis  (3).  Cet 
endroit  n'est  peut-être  pas  le  plus  intéressant  à  fouiller.  M.  de 
Dion  m'en  a  signalé  un  autre  sur  la  terre  de  Maubreuil  :  c'est 
une  pièce  de  terre  dans  laquelle  on  a  relevé  de  grandes  pierres 
d'ardoise  semblables  aux  couvercles  des  tombeaux.  Il  est  possible 
que  ce  soit  là  le  cimetière  de  la  Vieille  Ville  d'Arlèze,  dont  le 
nom  nous  est  révélé  par  une  charte  de  donation  aux  moines  de 
Marmoutiers.  Il  ne  faut  pas  aller  loin  de  là  pour  trouver  VEnfer, 
il  est  au  village  du  Chemin  Nantais,  dans  un  clos  de  vigne.  Les 
paysans  de  Maubreuil  connaissent  très-bien  la  Vieille-Ville  et  le 
champ  des  Poteries  (4). 


(*)  Note  de  M.  de  l'Estourbeillon,  propriétaire  à  Penhouet. 

(4  Cadastre,  division  de  l'Aubinière,  172-176,  210-215, 260,  251-252. 

(3)  Pouillédes  bénéfices  (arcb.  dép.). 

(4)  Titres  du  prieuré  de  Sainte-Croix  (arch  dép.)  Cadastre,  D.  498-506- 


-  108  — 

Camoil.  —  Le  clos  du  Pradis  est  borné  par  les  terres  de  la 
chapellerie  de  Camoil  (*). 

Cellier  (le).  — Près  du  prieuré  de  Saint-Meen,  dit  M.  des  Ja- 
monnières,  trois  pièces  de  terre  sont  nommées  le  Paradis,  le 
Purgatoire  et  ['Enfer. 

Chapelle-Glain  (la).  —  Les  pièces  de  terre  du  Paradis  sont  au 
Bois-Jumel,  m'a  dit  un  vieillard  du  pays.  Il  est  à  noter  qu'il  y 
existe  aussi,  dans  le  voisinage,  un  lieu  dit  la  Vieille-Ville  qui  fut 
donné  vers  1120  aux  moines  de  Saint-Florent  par  le  seigneur 
Glain  et  que  le  Bois-Jumel  est  entre  le  Prieuré  et  Saint-Jouiu. 
Voilà  certainement  un  quartier  qui  mérite  d'être  exploré. 

Chapelle-Bas  semer  (la) .  —  Le  lieu  nommé  le  Paradis  est  voi- 
sin du  bourg,  du  côté  de  la  vallée  d3  la  Loire,  il  n'est  séparé 
que  par  un  petit  chemin  du  lieu  dit  Y  Enfer. 

Château-Thébaud. —  La  petite  Placellière  est  nommée  Y  Enfer 
dans  le  langage  vulgaire.  Ne  faut-il  pas  en  conclure  que  le  Pa- 
radis était  à  côté  dans  la  grande  Placellière  ?  Les  terres  ont  été 
si  bouleversées  dans  ce  canton  qu'il  n'est  plus  possible  de  tirer 
des  indications  précises  des  habitants.  Les  ruines  de  Saint- 
Gabriel  touchent  Y  Enfer. 

Chevrolière  (la). —  Entre  le  village  de  l'Arsangle  et  celui  de 
Passay  se  trouve  un  grand  terrain  vague,  sablonneux,  semblable 
aux  dunes  d'Escoublac,  appelé  le  Charnier,  nom  qui  éveille  im- 
médiatement l'idée  de  cimetière  et  qui  fait  penser  au  célèbre 
cimetière  de  Paris,  dit  le  Charnier  des  Innocents.  En  pressant 
de  questions  les  habitants  du  voisinage,  M.  de  l'Estourbeillon 
a  su  que  le  vrai  charnier  est  la  butte  qui  est  en  face  de  l'Ar- 
sangle, près  d'un  petit  golfe  formé  par  le  lac.  La  veuve  d'un  maçon 
du  pays,  interrogée  par  notre  zélé  confrère,  a  affirmé  que  son 
mari  avait  trouvé  des  substructions  et  des  ossements  à  l'extré- 
mité du  charnier  qui  touche  le  lac.  On  dit  dans  le  pays  que  des 
habitations  ont  été  ensevelies  sous  le  sable  à  la  suite  d'une  tem- 


(»)  Arch.  dép.  E  1475. 


—  109  — 

pète.  Cette  tradition  n'est  pas  sans  vraisemblance.  Le  centre  pri- 
mitif de  la  paroisse  touchait  le  charnier.  Au  XIIIe  siècle,  on  ne 
connaissait  pas  d'autre  église  que  celle  de  Saint-Martin  de 
Passay  (4)  ;  il  est  donc  probable  que  le  charnier  était  le  cimetière 
paroissial,  bien  qu'il  existe  encore  deux  autres  endroits  nous  rap- 
pelant des  lieux  funèbres.  Il  y  a  une  partie  des  bois  de  l'Arsangle 
qu'on  nomme  le  Paradis  et  dont  les  arbres  ont  une  apparence 
très  luxuriante.  D'un  autre  côté,  près  du  village  des  Marosses, 
on  voit  deux  pièces  de  terre  entourées  de  châtaigniers  et  de  buis 
plusieurs  fois  séculaires  qui  portent  le  nom  de  cimetière.  (2) 

Corsept.  —  Le  bourg  actuel  est  de  création  récente  comme 
celui  de  la  Ghevrolière,  il  ne  remonte  pas  au  delà  du  XVIe  siècle. 
Il  est  visible  qu'il  est  établi  sur  un  terrain  d'alluvion.  Pour 
trouver  le  solide,  il  faut  s'avancer  plus  à  l'ouest,  jusqu'au  Prieuré, 
centre  primitif  de  la  paroisse,  qui  a  aussi  son  Paradis  au  sud  du 
chemin  de  la  Chaussée  (3).  C'est  là  que  dorment  les  restes  des 
premiers  habitants  du  pays,  les  contemporains  des  carolingiens. 

Couëron.  —  Le  Paradis  estunerand  clos  de  vigne,  sis  à  la  sor- 
tie  du  bours,  à  l'ouest,  sur  le  chemin  de  Saint-Etienne.  LalVowe 
Saint-Jean  est  dans  le  voisinage.  Plusieurs  bénéfices  ecclésias- 
tiques avaient  des  planches  dans  ce  clos  de  vigne,  qui  passe  pour 
un  des  meilleurs  du  pays  (4).  Il  y  a  d'autres  terres  en  pré  sur 
le  chemin  duPort-Launay,  qui  s'appellent  aussi  le  Paradis. 

Fresnay.  —  Une  maison  du  bourg  porte  le  nom  de  Paradis. 

Frossay.  —  Dans  le  faubourg  de  la  Gripperie,  on  cite  un  jardin 
appelé  le  Paradis  de  Saint-Michel,  qui  appartenait  autrefois  à 
une  chapellenie.  Il  y  a  un  chemin  dit  du  Paradis  qui  commence 
au  Port  de  l'Ile  et  qui  conduit  à  la  Bidonnière. 

Près  delà  Cheminandais,  dans  les  vignes  dites  de  Saint-Front, 


(0  «  Paçay  »  Fouillé  du  XIII*  ^ededans  le  Cartulaire  de  Redon,  édité 
par  M.  de   Courson. 

(2)  Cadastre,  G  688,691. 

(3)  Cadastre,  B  171. 
0)  Ibidem,  L  42-74. 


-  110  — 

on  a  trouvé  des  tombeaux  d'une  apparence  très  ancienne,  dont 
on  n'a  pas  pu  me  préciser  le  caractère.  Le  monastère  de  Notre- 
Dame  de  Frossay  a  été  établi  sur  les  ruines  de  l'oratoire  de 
Saint-Front  de  Périgueux,  vers  1050  (1). 

Goulaine  (Basse).  —  Dans  les  vallées  de  la  Loire,  il  existe  des 
terres  nommées  l'Enfer,  mentionnées  dans  les  estimations  de 
domaines  nationaux.  C'est  évidemment  l'antithèse  d'un  Paradis, 
qu'on  trouverait  aux  alentours,  si  l'on  interrogeait  les  habi- 
tants^). 

Grandchamp.  —  Le  Paradis  est  une  grande  prairie  comprise 
dans  la  terre  de  Fresnay,  aux  confins  de  Sncé  et  de  Héric. 
Un  ancien  instituteur  de  Sucé  m'a  affirmé  qu'on  avait  trouvé 
des  débris  de  murs  et  des  ossements  dans  cette  pièce  de  terre. 
Comme  il  existe  à  côté  un  domaine  de  Malabry  qui  a  les  appa- 
rences d'une  léproserie,  il  est  possible  que  ce  cimetière  soit  sim- 
plement celui  d'un  hôpital. 

Guérande.  —  Nous  avons  ici  deux  endroits  à  'observer  :  le 
premier  est  un  Paradis  situé  entre  Sandun  et  le  village  de  la 
Madeleine,  que  M.  l'abbé  Gallard  a  vu  entouré  d'une  ceinture  de 
pierres  d'un  caractère  étrange.  Le  second  est  le  pré  du  Petit- 
Paradis  à  côté  de  Clis,  village  où  l'on  a  exhumé  des  tuiles  à  re- 
bords comme  à  la  Madeleine.  En  cherchant  bien  dans  ce  quartier 
de  Guérande,  on  découvrirait  sans  doute  aussi  le  Grand-Paradis, 
car  le  Petit  veut  un  terme  correspondant  (3). 

Haie-Fouassière  (la).  —  Il  y  a  ici  une  coïncidence  non  moins 
frappante.  Le  village  du  Paradis  se  trouve  entre  la  station  ro- 
maine des  Cléons  et  la  maladrerie  de  la  Madeleine.  Des  briques 
à  rebords  ont  été  découvertes  récemment  en  ce  dernier  endroit 


(*)  Cart.  de  Redon,  page  342. 

(2)  Estimations,  (arch.  dep.,  Q). 

(3)  Arch.  dep.,  L  1481.  Au  village  de  la  Madeleine,  près  de  la  chapelle, 
on  a  trouvé  un  cercueil  fait  de  tuiles  à  rebords.  {Bull,  de  la  Soc.  archéol. 
de  Nantes,  t.  XVIII,  p.  236.) 


—  111  — 

par  M.  de  Lisle.  L'Enfer  est  à  l'autre  extrémité  de  la  commune 
sur  la  route  de  Vertou. 

Joué.  —  Le  Paradis  est  dans  la  section  des  Fourbelins,  près 
d'un  carrefour  voisin  du  village  important  de  Franchaud  (*). 
En  arrachant  une  haie,  le  propriétaire  a  trouvé  les  restes  d'un 
ancien  mur  de  clôture. 

Limousinière  (la).  —  Le  fief  de  Paradis  (2)  était  tout  près  du 
bourg  et  de  la  terre  de  la  Noë.  Il  est  mentionné  dans  un  aveu 
de  1650. 

Loroux  (le).  —  Il  n'existe  plus  de  lieu  connu  sous  le  nom  de 
Paradis,  et  cependant  les  tombeaux  anciens  ne  manquent  pas 
sur  le  territoire  de  cette  commune.  M.  Renoul,  qui  l'a  explorée 
dans  tous  les  sens,  affirme  qu'il  en  a  rencontré  dans  la  tenue  du 
presbytère  actuel,  autour  du  moulin  de  la  Motte  et  à  3  kilomè- 
tres du  bourg,  près  du  Perron,  sur  la  route  de  Vallet,  sans  parler 
des  cimetières  intérieurs  qui  entouraient  les  églises  de  Notre- 
Dame- de-Recouvrance,  de  Saint- Jean,  de  Saint-Pierre  Martyr, 
de  Saint-Laurent  et  de  Saint-Clément. 

Marne  (la). — Le  Paradis  est  ici  un  pré  de  12  ares,  situé  sur  la 
limite  de  la  commune  de  Saint-Philbert,  entre  le  Grevé  et  les 
Nouettes  (3). 

Moisdon.  —  On  cite  près  du  bourg  une  maison  qui  a  été  cons- 
truite sur  un  lieu  dit  le  Paradis  (4). 

Monnières.  —  Il  existait  autrefois  un  clos  de  vigne  contenant 
4  journaux  et  demi,  borné  par  le  grand  chemin  de  Monnières  à 
à  la  Haie-Bodin,  qu'on  nommait  le  Paradis.  A-t-il  conservé  ce 
nom  ?  Je  l'ignore;  on  disait  le  clos  et  le  fief  de  Paradis.  (5) 

Pellerin  (le).  —  Le  Paradis  est  un  petit  pré  qui  est  à  l'Est  de 


0)  Cadastre,  n°  57-59. 

(2)  Arch.  dép.,  série  E,  suppl.  inédit. 

(3)  Cadastre,  B  1400. 

(*)  Déposition  de  M.  Fontaine,  propriétaire  à  la  Prévôté. 
(5)  Aveu  de  1666  (Inv.  des  archives  du  Plessis-Sauvage). 


—  112  — 

la  commune,  tout  près  de  la  Loire.  Il  dépendait  autrefois  du 
temporel  de  la  cure  (4). 

Vont-Château.  —  Le  siège  primitif  de  la  paroisse  était  au 
village  de  Lescren  ou  des  Queren.  C'est  là  qu'il  faut  chercher 
le  Paradis.  Les  sires  du  Pont,  ayant  choisi  pour  édifier  leur 
donjon  un  endroit  plus  favorable  à  la  défense,  leur  protection 
attira  vers  le  IXe  siècle  un  grand  nombre  d'habitants  qui  jetèrent 
les  fondements  de  la  ville  actuelle. 

Pont-Saint-Martin.  —  Le  Paradis  est  dans  le  terrain  que 
couvrait  autrefois  la  foret  de  Melleray.  Dans  ses  débornements, 
on  indique  le  canton  des  ruines  et  le  chemin  de  Nantes.  Je  l'ai 
cité  ailleurs  comme  le  cimetière  probable  d'une  léproserie,  mais 
il  est  possible  que  je  m'abuse.  J'appelle  de  tous  mes  vœux 
la  lumière  sur  cette  énigme  (2). 

Port-Saint-Père.  —  Le  chemin  des  Fortunes  s'embranche  sur 
le  chemin  n°  31,  à  rendroitnommé  leParadiset  lechemin  duPa. 
radis  part  du  chemin  n°  30,  passe  par  le  Fief-Soudan  et  finit  aux 
Cinq-Chemins  (3). 

Riaillé. —  Dans  le  grand  village  de  la  Melleraie,  il  y  a  un  quar- 
tier nommé  le  '  Paradis,  et  le  chemin  qui  y  conduit  a  le  même 
nom  (4).  Près  du  bourg  le  cadastre  signale  des  prés  du  Paradis, 
qui  sont  voisins  de  l'ancien  grand  cimetière  de  la  paroisse.  Cette 
coïncidence  mérite  de  fixer  l'attention. 

Rougé.  —  Ce  bourg  est  sur  une  éminence  considérable.  Pourquoi 
trouve-t-on,  sur  le  versant  entre  la  Cour-au-Roi  et  le  Pont-Saint- 
Père,  un  chemin,  dit  du  Paradis,  qui  côtoie  des  champs 
nommés  Saint-Simon,  dans  lesquels  se  rencontrent  des  pierres 
de  construction  innombrables.  Est-ce  l'emplacement  primitif  de 
Rougé,  le  siège  de  sa  première  église  paroissiale,  comme  on  le 


(*)  Estimation  de  Domaines  (série  Q.,  arch.  tlép.). 

(2)  Domaines  royaux.  Estimations  (arch.  dëp.,  Q).  Je  l'ai  fouillé   sans 
succès,  au  mois  de  juin  1881. 

(3)  Tableau  des  chemins  ruraux  (arch.  dép.,  0). 

(4)  Témoignage  des  habitants  de  Melleraie. 


—  113  — 

croit  dans  le  pays,  ou  bien  faut-il  y  voir  les  traces  d'une  lépro- 
serie? A  vous  de  répondre  en  sondant  le  terrain  et  en  exami- 
nant les  sépultures  (l). 

Saint-Colombin.  —  Ce  qu'on  nomme  ici  le  Paradis  se  com- 
pose de  terres,  de  prés  et  de  jardins,  situés  près  du  domaine  du 
Plessis,  des  pièces  de  la  Fontaine  et  du  Pont.  Le  presbytère  en 
possédait  une  partie  avant  1789  (2). 

Saint-Herblain.  —  Le  Paradis  est  près  de  l'Aunay  et  de  la 
Fournée,  non  loin  d'un  chemin  (3). 

Saint-Mars-la-J  aille.  —  On  trouve  le  Paradis  en  sortant 
du  bourg  par  la  route  d'Ancenis,  sur  le  côté  opposé  a  la  Har- 
lière,  au  sud  de  la  Grenouillette.  Ce  sont  trois  pièces  de  terre  en 
labour  (4). 

Sai?it-Nazaire.  ~  Le  nom  de  Paradis  ne  s'est  pas  conservé 
et  cependant  il  y  a  un  très  ancien  cimetière  près  de  la  chapelle 
de  Notre-Dame -de-Bonne-  Espérance  et  de  la  batterie  du  Port. 
C'est  là  qu'on  a  déterré,  vers  1700,  ces  corps  et  ces  casques  dont 
parle  Ogée  dans  son  dictionnaire. 

Saint- Nicolas  de  Redon.  —  En  1767,  le  prieur  reçut  l'aveu 
féodal  d'un  tenancier  qui  possédait  au  village  des  Petits- 
Beslac  une  pièce  de  terre  en  labour  appelée  le  domaine  du 
Paradis  (5). 

Sainte-Pazanne.  •—  Nous  avons  ici  trois  lieux  à  explorer. 

1°  Au  Nord-Est,  sur  la  route  du  Pellerin,  le  c!os  de  vigne  du 
Paradis  h  la  rencontre  de  trois  chemins,  près  du  village  de  la 
Bazonnière,  petit  village  qui  fut  le  théâtre  d'un  combat  en  1794. 

2°  Le  bois  de  Paradis  entre  l'Angle  et  la  Tuilerie  et  le 
Moulin-Henriet,  grande  pièce  en  labour,  contenant  deux  jour- 
naux (6). 


(')  L'Assistance  publique  dans  la  Loire-Inférieure,  p.  121. 

(2)  Estimations  (série  Q,  arch.dép).  Cadastre,  G  607,  608,  634,  645,  647. 

(3)  Cadastre,  F  1171, 1172. 
Ô)  Cadastre  B,  371, 372, 373. 

(5)  Prieuré  de  Saint-Nicolas  (arch.  dép.  H.). 

(6)  Cadastre,  H  1090. 

1881  8 


—  114  — 

Enfin  le  Paradis  de  la  Chopinière,  polit  morceau  de  terre  bien 
carré,  qui  n'a  pas  plus  de  25  moires  de  côté,  sur  le  bord  d'un 
chemin  sans  issue  ('). 

Saint-Père-en-Pietz.  —  Au  sud  de  la  ville  sur  le  chemin  des 
Biais,  le  cadastre  signale  un  Paradis  et  en  face  VEnfer,  les  lieux 
les  plus  voisins  sont  la  Blottière  et  le  Chatellier  (2).  A  l'ouest,  sur 
le  domaine  des  Lardières,  il  existe  aussi  un  Paradis,  non  loin  de 
l'emplacement  qu'occupait  le  bénéfice  de  Sainte-Catherine  dans 
la  forêt  de  la  Guerche.  La  pièce  du  Chapitre  est  a  côté. 

Saint-Sébastien.  —  Le  clos  de  vigne  du  Paradis  qui  touche 
la  Gibraie,  dépendait  du  bénéfice  de  Carmeningo  (3). 

Sucé.  —  Le  Paradis  sis  au  village  des  Vaux  se  compose  de 
plusieurs  prés,  qui  ne  sont  pas  loin  des  bords  de  l'Erdre. 
L'Enfer  est  au  sud-est  de  la  commune,  sur  le  chemin  de  Car- 
quefou  (4). 

Teille.  —  Au  lieu  dit  les  lluaux  il  existe  un  jardin  dit  du 
Paradis  sur  le  bord  du  chemin  des  Vignes-Robert,  à  l'ouest  de  la 
Grehondière  (5). 

Touches  (Les).  —  Le  Paradis  est  dans  la  section  des  Masures, 
sur  le  bord  du  chemin  de  Petit-Mars.  Les  lieux  dits  des  environs 
sont  significatifs,  ce  sont  :  YEnfer,  Y  Abbaye,  les  Chapellénies  (6). 

Touvois.  —  Près  du  bourg  il  existe  une  agglomération  d'ha- 
bitants qui  s'est  établie  sur  un  lieu  dit  le  Paradis. 

Vallet.  —  Le  Paradis  est  un  clos  de  vigne  situé  entre  le  Cleray 
et  la  Parentière  sur  une  roule. 

Vertou. —  Le  Paradis  est  un  clos  de  vigne  aussi,  situé  a  un 
carrefour,  presque  au  sommet  du  plateau  occupé  par  le  domaine 
de  la  Frémoire,  à  côté  de  la  Gohelière.  Les  anciens  se  rappellent 
avoir  vu  ce  clos  renfermé  de  haies.  Le  terrain  voisin  se  nomme  les 


(*)  Cadastre,  E  87. 

(2)  Cadastre,  K  258. 

(3)  Arch.  dép.,  G. 

(4)  Cadastre,  H,  35-50.  —  D.,  lieu  dit,  3. 

(5)  Arch.  dép.,  C  191  -,  feuille  desRuaux,  7. 

(6)  Cadastre  E,  141, 148,  121  —  128. 


—  115  - 

Prières  et  le  Petit  Paradis.  L'un  des  4  chemins  qui  se  croisent 
en  cet  endroit  conduit  à  la  forêt  de  Touffou. 

Vue.  —Le  Paradis  est  un  petit  morceau  de  terrain  situé  der- 
rière les  maisons  qu'on  nomme  la  Ville. 

Il  est  un  autre  terme,  synonyme  de  Paradis,  qui  a  été  fré- 
quemment employé  dans  la  Loire-Inférieure  pour  désigner  un 
lieu  de  sépulture,  c'est  le  nom  de  Champfleuri.  Sa  signification 
me  semble  avoir  la  même  valeur  au  point  de  vue  archéologique. 

Aux  portes  de  Nantes,  sur  le  grand  chemin  de  Paris,  nous 
avions  au  delà  de  la  barrière  de  Saint-Clément  un  cimetière,  dit 
de  Champfleury,  qui  peut  avoir  servi  de  lieu  d'inhumation  dès  les 
premiers  siècles  de  notre  ère.  On  sait  que  les  Romains  plaçaient 
toujours  les  urnes  funéraires  le  long  des  grandes  voies  qui  abou- 
tissaient aux  cités.  Ce  Champfleury,  situé  presque  en  face  de 
l'église  de  Saint-Clément,  embrassait  le  terrain  compris,  entre  la 
montée  de  Saint- André,  le  bas  chemin  de  Saint-Donatien  et  l'hôtel 
actuel  du  Grand  Monarque.  Dès  1366,  il  était  désigné  sous  cette 
dénomination  (*). 

Plus  loin,  en  suivant  la  même  route,  on  rencontre,  avant  d'ar- 
river à  Saint-Georges,  une  tenue  de  Champfleury  entre  Tourne- 
bride  et  les  Marsauderies  qui  ne  présente  pas  le  même  intérêt 
que  le  précédent.  Les  fourches  patibulaires  de  la  justice  de  l'E- 
vêché  étaient  dans  les  landes  de  la  Haie-Lévesque,  qui  touchent 
*e  domaine  de  Saint-Georges  ;  il  est  donc  à  présumer  que  ce  lieu 
n'est  autre  que  le  cimetière  des  suppliciés  (2) 

Dans  la  commune  de  Vallet  il  existe,  à  6500  mètres  du  bourg, 
une  métairie  de  Champfleury  sur  laquelle  je  n'ai  pu  faire  aucune 
remarque  ;  j'invoque  le  secours  des  localistes. 

A  Vigneux,  près  du  bourg,  il  y  a  un  calvaire  appelé  la  Croix  de 
Champfleury  et,  dans  le  champ  le  plus  voisin,  on  a  déterré  récem- 
ment beaucoup  d'ossements,  suivant  le  rapport  de  M.  l'abbé  Pa- 


(')  Hist.  de  Nantes,  par  l'abbé  Travers,  t.  1,  p.  439,  et  arch.  dép.,  fonds 
du  chapitre^ 
(2)  Arch.  dép.,  G  Evêché. 


—  116  — 

bouin,  curé  de  la  paroisse.  Le  bois  de  l'Enfer  n'est  pas  loin,  ce 
qui  ferait  penser  que  le  nom  de  Champfleury  à  Vigneux  a  été  pris 
dans  la  même  acception  que  le  mot  de  Paradis.  (*)  Je  dois  ajouter, 
pour  être  complet,  que  le  champ  de  la  Maladrie  est  à  peu  de 
distance  et  que  tout  annonce  un  cimetière  de  léproserie. 

Blême  coïncidence  pour  le  Champfleury  de  Vue  :  il  est  au 
village  de  la  Boirie,  c'est-à-dire  à  proximité  de  la  léproserie  de 
la  Blanchardais  (2). 

Ce  dénombrement  ne  comprend  pas  tous  les  lieux  dits  qu'il 
serait  intéressant  de  fouiller,  il  peut  être  notablement  étendu 
par  ceux  d'entre  vous  qni  habitent  la  campagne  pendant  la 
belle  saison.  Vous  obtiendrez  des  renseignements  précieux  en 
interrogeant  les  fermiers  et  surtout  les  journaliers  qui  travail- 
lent à  la  terre.  Vous  suppléerez  aux  lacunes  du  cadastre,  dont 
les  désignations  ne  sont  trop  souvent  que  des  répétitions  mono- 
tones qui  ne  disent  rien  à  l'esprit. 

Permettez -moi  de  vous  rappeler  aussi  un  fait  que  les  histo- 
riens ont  plus  d'une  fois  constaté  :  c'est  que  la  plupart  des 
créations  du  Moyen  Age  reposent  sur  des  substructions  romai- 
nes ou  gauloises.  L'homme  a  eu  les  mêmes  tendances  à  toutes 
les  époques;  il  s'établit  de  préférence  là  où  ses  ancêtres  ont  vécu 
et  sont  morts.  Le  christianisme,  respectant  cette  loi  naturelle, 
n'a  pas  déserté  les  lieux  consacrés  au  culte  du  paganisme,  il  a 
seulement  substitué  ses  églises  aux  temples  des  idoles.  Ma 
nomenclature  elle-même  vous  en  a  fourni  des  preuves.  Autour 
des  chapelles  dédiées  à  la  Madeleine,  à  Guérande  et  à  la  Haie- 
Fouassière,  je  vous  ai  signalé  des  briques  romaines  et  cependant 
ce  sont  bien  des  édifices  du  Moyen-Age.  Cette  réflexion  s'appli- 
que avec  autant  d'à  propos  aux  cimetières.  Ne  vous  arrêtez  pas 
à  la  surface,  creusez  et,  sous  des  sépultures  du  XIIIe  siècle,  vous 


(»)  Cadastre,  M  511.  M,  980, 981. 

(2)  Cadastre,  M  511,  M,  981. 

(3)  Cadastre,  B  594-599,  67G-678. 


-  417  — 

réussirez  souvent  à  découvrir  les  tombes  des  contemporains  de 
Saint-Clair  et  de  Saint  Félix. 

Vous  le  voyez,  l'étude  des  Paradis  est  pleine  d'attraits  ;  elle 
touche  à  plusieurs  points  curieux.  Si  nos  fouilles  sont  couron- 
nées de  succès,  nous  aurons  non  seulement  de  nouveaux  objets 
à  placer  sous  les  vitrines  de  notre  musée  départemental,  mais 
encore  nous  aurons  recueilli  des  données  précises  sur  rempla- 
cement des  anciens  centres  de  population  et  sur  l'antiquité  de 
nos  établissements  hospitaliers. 

Léon  Maître. 


MONASTICON  NANTAIS 


(') 


STATISTIQUE   DES   COMMUNAUTÉS  RELIGIEUSES,  ETABLIES 
DANS  LE  DIOCÈSE  DE  NANTES 

(  1790  ) 


Avant-coureurs  de  la  civilisation,  les  évoques  sont  ve- 
nus les  premiers  au  pays  d'Armorique,  apportant  la  grande 
nouvelle  de  l'Évangile  :  avec  la  croix  et  leurs  vertus  ils  ont 
plus  fait  que  l'épée  et  le  génie  de  Rome.  Cependant  la  ré- 
génération de  ce  vieux  peuple  s'opéra  lentement  :  caché 
dans  les  ombres  des  forêts,  ou  perdu  au  milieu  des  landes, 
il  demeura  pendant  de  longues  années  presque  inacces- 
sible à  la  lumière  bienfaisante  du  christianisme.  Excepté 
quelques  cités  épiscopales,  la  plus  grande  partie  de  la  pé- 
ninsule armoricaine  était  encore  païenne  au  VIe  siècle,  d'a- 
près un  témoignage  de  S.  Mélaine,  souscrivant  au  Concile 
d'Orléans  (2) 

Toutefois  il  faut  admettre  qu'au  Sud  de  la  Bretagne,  et 
particulièrement  sur  les  rives  de  la  Loire,  les  moines  n'ont 
point  précédé  les   évoques.  Ceux-ci,  qui  depuis   plusieurs 


(*)  Ce  travail,  offert  à  la  Société,  doit  entrer  en  second  lieu  dans  le  corps 
de  l'ouvrage  de  M.  l'abbé  P.  Grégoire:  Etat  du  Diocèse  de  Nantes  en  H90; 
la  première  partie,  intitulée  Pouillé  Nantais,  a  pour  objet  l'évêché,  les  cha- 
pitres et  les  paroisses. 

(2)  Les  Moines  d'Occident,  par  M.  de  Montalembert,  II,  310. 


-  120  — 

siècles  déjà  jetaient  la  semence  de  la  divine  parole  sur 
cette  terre  inculte  et  sauvage,  durent  faire  germer  et  s'é- 
panouir quelques  fleurs  solitaires,  embaumant  de  leur  par- 
fum les  déserts  où  elles  croissaient.  Certains  hommes, 
choisis  entre  mille,  obéissant  à  l'attrait  de  la  grâce  et  re- 
tirés au  fond  des  solitudes,  s'appliquèrent  à  mettre  en  pra- 
tique les  conseils  évangéliques  :  témoin  les  Friard  et 
Hermeland,  sous  la  conduite  des  saints  évoques,  Félix  et 
Pasquier.  Ces  ermitages  peuvent  être  considérés  comme 
les  origines  monastiques,  dans  le  pagus  Nannetensis. 

Nous  ne  saurions  accepter  pour  cette  contrée  ce  qui  s'est 
accompli  pour  d'autres  :  la  venue  de  moines  et  de  mis- 
sionnaires bretons.  Notre  terre,  arrosée  du  sang  et  des 
sueurs  des  premiers  pontifes,  a  produit  d'elle-même,  et  n'a 
point  laissé  place  aux  plantes  exotiques.  Martin  à  Vertou, 
Friard  et  Secondel  dans  l'île  Vindunit,  Victor  à  Camphon, 
Vital  sur  le  coteau  de  Scobrith,  Hermeland  dans  un  antre 
de  la  Loire,  sont  les  fondateurs  de  l'ordre  monastique  dans 
le  Diocèse  de  Nantes.  Aux  autres  diocèses  de  Bretagne,  les 
pères  de  la  vie  religieuse  sont  presque  tous  des  émigrés, 
comme  les  Jacut,les  Hervé,  les  Gildas,  les  Guénolé,  les  Sam- 
son  et  tant  d'autres.  Nous  sommes  heureux  et  fier  de 
revendiquer  pour  notre  pays  nantais  cet  honneur  d'avoir 
donné  lui-même  naissance  à  ces  maisons  saintes,  refuges 
de  la  prière,  de  la  charité  et  de  la  science. 

Quelle  règle  y  observait-on?  Il  est  difficile  de  le  déter- 
miner d'une  manière  précise  :  ce  serait  peut-être  la  vé- 
rité d'affirmer  que  les  institutions  bénédictines  n'ont  été 
connues  et  suivies  que  fort  tard  en  Bretagne.  Laadévénec, 
la  plus  célèbre  abbaye  de  la  contrée,  ne  les  mit  en  vigueur 
qu'au  IXe  siècle,  sur  les  ordres  de  Louis-le-Débonnaire.  La 
prière,  l'étude  des  sciences  divines  et  humaines,  le  travail 
des  champs  absorbaient  ces  vies  vouées  à  la  pratique  des  ver- 
tus chrétiennes  et  des  conseils  évangéliques,  au  soulagement 
des  misères  humaines,  à  l'instruction  du  peuple  et  à  la  pros- 


—  421  — 

périté  matérielle  du  pays.  C'a  toujours  été  et  ce  sera  tou- 
jours le  grand  et  unique  but  des  congrégations  religieuses. 

Mais  hélas  !  les  hommes  pervers  et  les  peuples  impies  se 
sont  plus,  de  tout  temps,  à  contrarier  par  la  persécu- 
tion les  œuvres  de  Dieu.  La  rapacité  de  certains  seigneurs 
guerroyeurs  troubla  bientôt  la  paix  des  solitudes.  Que  dire 
de  ce  terrible  fléau  de  l'invasion  normande,qui  dispersa  les 
moines  et  incendia  les  monastères  aux  IXe  et  Xe  siècles  ?  La 
barbarie  de  ces  hommes  du  Nord  est  sans  exemple.  Aindre, 
Vertou,  S.-Glément,  Castel-Wel,  Clisson,  Doulon,  Corde- 
mais,  Prigny  furent  la  proie  de  ces  nouveaux  Vandales,  qui 
profanaient  les  temples,  jetaient  au  vent  les  saintes  reli- 
ques, égorgeaient  les  pontifes  et  ne  laissaient  après  eux  que 
la  dévastation  et  la  mort. 

Théâtre  de  ces  brigandages,  Nantes  devient  un  affreux 
désert  :  il  faut  le  bras  valeureux  d'Alain-le-Grand  pour 
rendre  à  cette  ville  son  antique  splendeur.  La  générosité 
de  ce  prince  se  plaît  à  enrichir  et  à  édifier  ce  que  l'inva- 
sion vient  de  spolier  et  de  détruire.  Sur  tous  les  points  du 
Comté,  surgissent  des  établissements  religieux.  C'est  à 
cette  époque  qu'on  doit  placer  la  fondation  de  la  plupart 
des  prieurés  bénédictins  qui  ont  été  desservis  jusqu'au 
XVIIe  siècle  et  qui  depuis  ont  été  sécularisés  ou  sont  pas- 
sés en  commande.  Blanche-Couronne,  N.-D.  du  Port,  Doulon 
Clisson,  Buzay,la  Chaume,  Prigny, les  Couëts,  Pirmil,  S.-Ar- 
mel,  S.-Thébault  et  d'autres,  dont  les  vestiges  ont  complè- 
tement disparu,  commencent  leur  vie  cénobitique  ou  se  re- 
constituent à  nouveau.  Ce  serait  trahir  l'histoire  de  ne  point 
indiquer  ici,  comme  mobile  de  ces  largesses,  les  terreurs 
de  l'An  mil,  qui  poussèrent  tant  de  chrétiens  à  faire  de  pieu- 
ses fondations. 

L'effervescence  monastique  se  montre  surtout  au  XIe  et 
XIIe  siècles,  le  plus  beau  temps  de  l'Eglise,  le  temps  des  saints 
Bernard,  Dominique,François,  Jean  de  Matha,  Robert  d'Ar- 
brissel.  Presque  toutes  nos  grandes  abbayes  bénédictines, 


—  422  - 

cisterciennes,  augustines  et  fontevristes  se  sont  formées  à 
cette  époque  glorieuse  :  S.-Gildas,  Melleray,  Villeneuve, 
Pornic,  Geneston,  la  Rcgrippière,  le  Val-de-Morière.  Sont 
également  de  la  première  moitié  du  XIII'5  siècle  les  Trintaires 
de  Châteaubriant,  les  Cordeliers  et  les  Dominicains  de 
Nantes. 

Le  clergé  séculier  devient  insuffisant  :  aussi  les  évêques 
se  font-ils  besoin  de  ces  porteurs  de  la  parole  évangé- 
lique  que  la  vertu  et  le  talent  recommandent  au  peuple. 
Les  Carmes  sont  appelés  à  Nantes  (1318);  les  Capucins  à 
Nantes  et  àMachecoul;  les  Cordeliers  à  Bourgneuf,Savenay, 
Clisson,  Ancenis  et  Ruffigné  ;  les  Dominicains  à  Guérande. 
Dans  un  des  faubourgs  de  la  ville  de  Nantes,  les  Chartreux 
se  font  un  désert;  les  Minimes  viennent  à  leur  suite  (1587). 

Dans  des  temps  moins  éloignés  de  nous,  la  civilisation 
étant  à  son  apogée,  on  sentit  mieux  la  nécessité  de  procurer 
aux  riches  et  aux  pauvres  le  bienfait  de  l'instruction,  aux 
malades  et  aux  infirmes  des  soins  plus  assidus  et  plus  dé- 
voués. Aussi,  lorsque  le  Seigneur  eut  suscité,  pour  la  gloire 
delà  religion  et  le  bien  de  l'humanité,  ces  utiles  congré- 
gations enseignantes  ou  hospitalières,  furent-elles  accueil- 
lies avec  joie  dans  ce  riche  et  vaste  diocèse  de  Nantes,  où 
la  foi  a  toujours  été  si  pure  et  la  charité  si  constamment 
pratiquée.  Les  Oratoriens.,  ces  savants  disciples  de  S. -Phi- 
lippe de  Néri,  prirent  alors  la  direction  du  grand  collège 
de  S. -Clément  (1655).  Les  pieux  prêtres  de  S.-Sulpice  ou- 
vrirent un  séminaire  et  une  maison  de  missions.  Les  catho- 
liques d'Irlande  trouvèrent  dans  notre  ville  un  asile  pour  la 
formation  de  leur  clergé.  Les  Jésuites  obtinrent  une  rési- 
dence. N'oublions  pas  ici  de  mentionner  l'heureuse  réforme 
de  St  Maur,  qui  vint  rallumer  la  ferveur  éteinte  dans  les 
monastères  bénédictins. 

Chez  les  femmes,  toutes  les  aspirations  du  dévouement 
et  de  la  piété  purent  se  satisfaire.  Depuis  longtemps 
déjà  les  Fontevristes  se  sanctifiaient  dans  leur  solitude.  La 


.  —  123  — 

Visitation,  le  Calvaire,  le  Carmel  se  constituent  (1613-1629). 
Les  Pénitentes  ouvrent,  une  retraite  aux  larmes  du  repen- 
tir, L'instruction  des  jeunes  filles  nécessite  de  nombreuses 
fondations  :  les  Ursulines  s'établissent  successivement  à 
Nantes,  Ancenis,  Ghâteaubriant,  Guérande  ;  les  Carolines,  à 
S.-Donatien,  vers  la  fin  du  siècle  (1698),  ouvrent  des  classes 
gratuites  et  une  école  normale. 

Enfin  le XVIIIe  siècle  amena  dans  les  hôpitaux  les  Sœurs 
de  la  Providence  de  Saumur,  de  S. -Thomas  de  Villeneuve, 
duS, -Esprit  de  Plérins.  Pour  rendre  populaire  l'instruction 
des  enfants,  on  reçut  à  Nantes  les  Frères  du  V.  de  la  Salle, 
maîtres  instruits  et  vertueux,  les  Sœurs  de  la  Sagesse, 
nouvellement  instituées. 

Quoique  notre  diocèse  ne  renfermât  pas  de  ces  puis- 
santes et  riches  abbayes,  comme  Noirmoutiers,  S.-Jouin, 
Landévenec,  S.-Florent,  Toussaint,  le  Ronceray,S.-Sulpice, 
et  d'autres  semblables,  il  fournissait  à  tous  les  besoins  et  à 
toutes  les  vocations.  Les  solitaires  et  les  prêcheurs,  les  con- 
templatives et  les  pénitentes  avaient  des  asiles,  les  orphe- 
lins et  les  malades  trouvaient  des  abris  pour  leur  misère, 
les  captifs,  des  rédempteurs  ;  les  ignorants,  gens  de  con- 
dition ou  du  peuple,  avaient  leurs  maîtres  et  maîtresses. 
La  charité  et  l'instruction  ne  sont  donc  point  des  inven- 
tions de  notre  temps  :  les  siècles  passés  les  ont  connues  plus 
parfaitement  qu'on  ne  pense. 

Nous  nous  proposons  de  donner  ici  la  statistique  de  ces  di- 
verses maisons  religieuses,  en  indiquant  leur  origine,  leur 
but,  leurs  revenus,  leurs  charges  et  leur  personnel,  à  l'époque 
où  la  Nation  confisqua  leurs  biens  et  dispersa  leurs 
membres.  Tel  est  l'objet  de  notre  Monasticon  nantais. 

On  compte  au  diocèse  de  Nantes  :  1"  30  communautés 
d'hommes,  dont  9  abbayes,  1  prévôté,  1  prieuré  et  1  char- 
treuse ; 

2°  19  communautés  de  femmes,  dont  une  seule  abbaye. 
Les  premières  sont  occupées   ou  desservies  par  13  ordres 


-  124  — 

religieux;  les  dernières,  par  18.  On  ne  comprend  point  ici  les 
Hospitalières  qui  suivent  quatre  règles  différentes  et  possèdent 
9  maisons,  non  plus  que  les  Oratoriens  qui  tiennent  le  col- 
lège, et  les  Sulpiciens  qui  sont  des  prêtres  séculiers. 


COMMUNAUTÉS  D'HOMMES 

I.  -  BÉNÉDICTINS. 
1.  Prévôté  conventuelle  de  S. -Martin  de  Vertou,  OSB. 

S.-Martinus  Vertavensis. 


—  Cette  ancienne  abbaye,  la  première  de  toutes  celles  de  Bretagne,  fut 
fondée  par  Saint  Martin  dans  un  lieu  appelé  Vtrlaw,  au  temps  de  S.  Félix, 
ëvêque  de  Nantes  (VIe  siècle).  A  la  mort  du  bienheureux  fondateur,  300 
moines  y  pratiquaient  avec  ferveur  les  règles  de  l'Institut.  Le  monastère 
fut  érigé  en  prévôté,  alors  qu'il  passait  sous  le  patronage  de  S.-Jouin-les- 
Marnes.  La  réforme  de  S.-Maur  y  est  introduite  depuis  1664.  Il  y  a  quel- 
ques années  (1767),  on  y  reçut  les  religieux  de  l'abbaye  de  la  Chaume. 

Le  roi  présente,  le  pape  nomme. 

Prévôt  commendataire  :  Jean  Coulon  de  la  Bernardais, 
de  l'ordre  de  S. -Jean  de  Jérusalem,  —  28  avril  1782. 

Revenus  et  privilèges:  6  métairies,  haute-justice,  droits 
seigneuriaux,  lods,  ventes,  rachat,  pêches,  four  banal, 
dîmes  au  tiers,  34,749  tt.  Titre  de  curé  primitif  de  la  pa- 
roisse. —  Mense  conventuelle  :  11,802  *. 

Ch.  L'office  canonial  tous  les  jours  dans  l'église, 
acquitté  par  1  prieur,  1  sacriste  et  5  religieux.  —  Rentes 
annuelles,  750  n  ,  savoir  :  420,  *  au  sieur  Boisiau,  aumô- 
nier du  roi  à  Grenelle  ;  170,  *  au  sieur  Le  Grand  d'Aran- 
terre,chanoine,  et  160  *  au  sieur  Pignot,  curé  de  la  Roche- 
Durèse. 

L'église,  dont  certaines  parties  sont  fort  anciennes,  vient 
d'être  réparée  (style  roman  simple,  XIe  siècle.)  Elle  est 
conventuelle  et  paroissiale  à  la  fois.  Il  y  a  deux  clochers, 
l'un  pour  le  couvent  et  l'autre  pour  la  paroisse  ;  le  pre- 
mier a  été  relevé  dernièrement.  Un  autel  de  marbre  et  des 


—  1°26  — 

stalles  sculptées   ornent  le  chœur.  L'édifice , comme   plan 
d'ensemble,  a  la  forme  d'un  T. 

Mobilier  :  18  chasubles,  G  dalmatiques,  4  chapes,  21  au- 
bes; —  une  croix  et  son  bâton,  1  petite  croix,  1  masse  de 
bedeau,  2  calices,  1  ostensoir,  1  encensoir  ;  —  4  cloches  et 
1  horloge  qui  frappe  sur  d'eux  d'entre  elles. 

Reliques  :  1  buste  de  S.Martin,  1  autre  de  S.Benoit, 1  bras» 
1  main  d'argent. 

On  compte  les  autels  de  la  Vierge,  de  S.-  Sébastien,  de 
S.-Martin,  de  S. -Michel,  de  S.-  Mathurin  et  de  Ste-Marguc- 
rite. 

Bibliothèque  de  1,90G  volumes. 

Les  Bâtiments  claustraux  ont  été  reconstruits  en  1700  : 
ils  sont  agréablement  situés,  près  le  bourg  de  Vertou.  L'en- 
clos du  monastère  couvre  3  journaux  de  terrain.  Outre  les 
cellules,  les  salles  communes  et  les  servitudes,  il  y  a  pour 
les  hôtes  des  chambres  et  un  billard. 

Personnel.  Prévôt  conventuel  :  P.  Henri  Soulastre,  depuis 
1781  ;  Aug.  Bazille,  sous-prieur  et  sacriste,  né  à  Vertou. 
Religieux:  DD.Boutan,  de  Fay,  Dezé,  Doly,  Ghàtoaurenard. 

2.  Abbaye  de  Notre-Dame  de  la  Chaume,  OSB. 

Beata-Maria  de  Calma,  aliàs  de  Calmariâ. 
Paroisse  de  Sainte-Croix  de  Machegoul 

—  Elle  est  située  au  faubourg  du  nom,  sur  la  rivière  du  Tenu.  Une  dota- 
tion en  terres  et  bénéfices  curiaux,  faite  par  Ilarscoët,  Sgr  de  Relz,  en  1055, 
permit  a  Perennés,  abbé  de  Redon,  de  bâtir  un  prieuré  en  ce  lieu,  et  d'y 
envoyer  4  religieux.  Cette  fondation  dut  être  érigée  en  abbaye  antérieure- 
ment au  XIIe  siècle.  Le  premier  abbé,  dont  on  sache  le  nom  d'une  manière 
certaine,  selon  D.  Mabillon,  serait  Philippe  (1184).  Les  deux  cardinaux 
de  ReU  possédèrent  ce  bénéfice.  Ilestpassé  en  command  depuis  1594  et  la 
réforme  de  S.-Maur  esten  vigueur  depuis  1630.  Il  y  a  23  ans,  comme  cette 
maison  était  d'un  minime  revenu,  on  l'abandonna  et  l'on  se  réunit  à 
Vertou  ^  cependant  le  titre  d'abbé  commendataire  a  été  conservé 

Patron  :  Le  roi.  Le  pape  nomme. 


—  127  — 

Abbé  commendataire  :  Jacques-Julien  MeslédeGrandclos, 
vie.  général  de  S.-Malo,  —  4  août  1782. 

Revenus:  4  journeaux  de  terres  affermés  3.700*  Le 
cloître,  les  bâtiments  et  le  colombier  sont  également 
affermés.  Les  meubles  et  les  ornements  de  la  maison  abba- 
tiale ont  été  transportés  à  Vertou.  Le  prieuré  d'Arzon  en 
Rhuis,  qui  en  dépend,  rapporte  300  *. 

Charges  :  760  tt  de  rentes  annuelles  redevables  à  certains 
ecclésiastiques,  gratifiés  du  roi;  entretien  du  local.  —  Les 
religieux  n'avaient  pas  prééminence  sur  le  clergé  parois- 
sial, excepté  le  jour  des  Rameaux,  où  l'abbé  officiait  entre 
les  deux  curés  au  grand  cimetière  des  Chaumes. 

V église  est  très  belle  :  3  nefs,  transept,  un  chœur  carré 
lambrissé  et  décoré  de  peintures  à  l'huile.  (XIVe  au  XVe  siècle). 
Elle  n'a  point  de  dédicace  particulière.  Autels  S.-André,  où 
il  y  a  une  grande  dévotion,  et  Ste-Emérance,  construits  par 
les  Pères  de  la  Réforme.  Le  clocher  n'a  plus  qu'une  cloche. 

Le  cloître  s'étecd  au  côté  de  l'épitre  ;  il  est  dans  le  style 
roman.  Ogé  dit  qu'il  a  été  bâti  en  1063.  Il  a  été  refait  au 
XVIIe  siècle.  Toute  la  maison  a  été  réparée  et  distribuée 
à  neuf,  au  moment  de  l'introduction  de  la  Réforme.  Il  y  a 
fuye  et  étang,  deux  jardins,  une  cour  intérieure  et  une 
cour  d'honneur. 

3.  Prieuré  conventuel  de  S.»  Jacques  de  Pirmil,  OSB. 

—  Prioratus  Sti-Jacobi  de  Palameyo. 
Paroisse  S.-Sebàstien  d'AiGNE. 

—  Les  Bénédictins  de  S.-  Maur  se  sont  établis  au  faubourg  de  Pirmil, 
vers  la  fin  du  XVII8  siècle.  Dans  un  acte  daté  de  1360,  on  trouve  le 
nom  d'un  prieur  de  celte  maison  qui  s'appelait  alors  S.-James.  On  croit 
qu'elle  est  de  fondation  anglaise  et  très  ancienne.  Les  religieux  de 
Blancbe-Couronne  viennent  de  se  réunir  à  ceux  de  Pirmil  (1707). 

Patron:  olim  l'abbé  de  S.-Jouin,mmc  le  rci. 

Revenus  :  3.800  K  Le  prieur  a  droit  de  seigneurie,  haute 


—  128  — 

moyenne  et  basse  justice.  Le  sacriste  est  curé  primitif  de 
S.-Sébastien. 

Charges  :  501  *. 

Vàglise,  qui  anciennement  était  paroissiale  et  qui  est 
encore  aujourd'hui  tréviale  de  S.-Sébastien,  fut  réparée, en 
1484,  par  Thomas  James,  évoque  et  comte  de  Dol  ;  la  cou- 
verture et  la  charpente  ont  été  renouvelées,  il  y  a  12  ans. 
La  sacristie  a  été  reconstruite  en  1786.  Des  boiseries  de  9 
pieds  ornent  le  chœur  et  le  sanctuaire.  Dans  le  clocher  il 
y  a  trois  cloches,  du  poids  total  de  3.000  *.  —  Style  de 
transition. 

Mobilier  de  la  sacristie  :  2  calices  en  argent,  1  ciboire, 
1  soleil,  2  croix,  2  bénitiers,  2  paires  de  burettes,  2  encen- 
soirs de  même;  —  19  chasubles,  7  chapes,  12  aubes. 

La  maison  conventuelle,  qui  est  solide  et  fort  régulière, 
a  été  rebâtie  par  la  Congrégation  de  S.-Maur,  au  commen- 
cement de  ce  siècle.  La  situation  est  élevée,  saine  et  très 
agréable.  On  y  remarque  la  salle  à  manger,  qui  est  boisée 
tout  autour  à  la  hauteur  de  7  pieds  et  demi.  Il  y  a  comme 
dépendance,  ljardin  très  bien  dessiné,  lverger,2  journeaux. 
de  vigne,  13  à  14  journeaux  de  prairies.  On  peut  offrir  aux 
étrangers  3  chambres  meublées. 

Personnel.  Prieur  commendataire  :  J.-B. -Louis  delà  Tour 
de  Gallois,  du  d.  d'Aix,vic.  général  d'Autun, — 15  mai  1775. 

Prieur  conventuel  :  Séb.  Bonnard,  né  en  1739,  prof,  en 
1756. 

Sous-prieur  :  Joachim  Marmier,  né  en  1742  ,  prof,  en 
1760. 

Procureur:  Etienne  Audio,  né  en  1762,  prof,  en  1776. 

Augustin  Fortier,  né  en  1720,  prof,  en  1740. 


—  129  — 
4.  Abbaye  de  Notre-Dame  de  Blanche -Couronne,  OSB. 

Beata-  Maria  de  Albâ  Coronâ  Veteri. 
Paroisse  de  la  chapelle-Launay. 

—  Cette  abbaye  porta  primitivement  le  nom  de  Coét-Quen  —  bois 
blanc  — ;plus  tard  elle  reçut  celui  de  Douce-fontaine,  à  cause  d'une  excel- 
lente source  qui  coulait  près  du  monastère.  La  magnifique  futaie,  dont  elle 
était  environnée,  affirment  certains  historiens,  lui  fit  enfin  décerner  le  vo- 
cable de  Blanche- Couronne  ;  quelques  uns  disent  que  ce  vocable  a  été  tiré 
de  la  dédicace  de  l'établissement  à  la  Ste  Vierge.  Des  bulles  papales,  da- 
tées du  XIIIe  siècle,  en  font  mention  comme  étant  de  l'ordre  de  Cîteaux,  et 
d'autres  de  1410,  comme  étant  de  l'ordre  ancien  de  S.-Benoît.  Ce  qui  ferait 
supposer  qu'elle  est  antérieure  à  S. -Bernard.  D'ailleurs  on  ignore  l'époque 
précise  de  sa  fondation  et  le  nom  de  son  fondateur.  Le  Calendrier  ecclésias- 
tique de  Nantes  la  fait  remonter  à  9C9  :  Geoffroy,comte  de  Nantes,  et  Daniel 
du  Pontenseraientles  principaux  bienfaiteurs.  Quelques  auteurs  prétendent 
que  cette  maison  fut  dotée  pour  19  religieux  en  1160.  La  réforme  fut  établie 
en  1652,  par  Claude  de  Cornulier. 

Elle  est  située  a  10  lieues  de  Nantes,  au  dessous,  vers  la  mer,  dans  la 
paroisse  de  la  Chapelle-Launay.  La  position  est  si  malsaine  que  les  religieux 
ont  eu  beaucoup  de  peine  a  se  conserver  en  santé.  Puis  les  revenus,  qui  ont 
été  diminués  dans  la  suite  des  siècles,  sont  devenus  très  modiques  5  ils  ne 
suffisaient  plus  qu'à  6  habitants.  Ceux-ci,  n'étant  point  en  nombre  pour  y 
vivre  selon  la  règle  bénédictine  réformée,  se  réunirent  aux  moines  de  Pirmil, 
le  jour  de  l'Ascension,  1767  5  cependant  le  titre  abbatial  resta  attaché  à  la 
maison  abandonnée. 

Patron:  le  roi  ;  le  pape  nomme. 

Abbé  commendataire  .•  J.-B.-Louis  de  la  Tour  de  Gallois, 
vie.  général  d'Autun,  originaire  du  d.  d'Aix,  —  15  mai 
1775. 

Il  nomme  aux  prieurés  simples  du  Tertre,  de  la  Madeleine, 
de  rAngle-Chaillou,  au  prieuré  claustral  de  S. -Jacques  de 
Pirmil  avec  ses  annexes  en  Bouin. 

V Eglise  est  ogivale  et  à  plein  cintre:  vaste  carré  avec 

un  clocher.  Elle  renferme  les  tombeaux  d'Hervé  de  Blain, 

père  d'Eudo^qui  fonda  en  1290  une  lampe  perpétuelle  sur 

sa  sépulture;  d'Éon  deRochefort,  vicomte  deDonges,  1372; 

de  Gillette  de  Rochefort,  1510. 

1881  0 


—  130  — 
5.  Abbaye  de  S.-Gildas-des-Bois,  OSB. 

S.-GUILDAS  OU  S.-GUEDAS. 

Slus-Gilâasius  de  Nemore. 

— Fondée  Tau  1206,  par  Simon,  Seigneur  de  la  Roche-Bernard,  «  en  l'hon- 
neur de  Dieu  et  de  S.  Gildas,  dans  un  lieu  nommé  Lampridic,  a  10  lieues 
de  Nantes,  vers  le  couchant  d'été,  à  2  lieues  de  la  Vilaine  et  d'autant  de 
la  petite  ville  de  Pontchâteau.  »  On  l'appela  primitivement  de  Landâ,  puis 
de  Nemore.  Ce  fut  une  colonie  de  S.-Sauveur  de  Redon,  qui  peupla  ce 
nouveau  monastère  bénédictin,  érigé  en  abbaye  et  doté  pour  8  reli- 
gieux. 

Patron-  Le  roi.  Le  pape  nomme. 

Abbé  commendataire:  François  Marie  de  Valory-la-Pom- 
merays,  du  d.  de  Rennes,  prévôt  de  la  collégiale  de  Tour- 
nay,  aumônier  de  la  comtesse  d'Artois,  licencié  en  droit,  — 
décembre  1763. 

Revenus  :  16.833  rt  ;  mense  conventuelle,  3.500  * 

L'abbé  commendataire  possède  l'abbatiale,  la  seigneurie 
de  S.-Gildas,  le  prieuré  de  Pénestin,  (droits  féodaux,  lods, 
ventes,  rachats  et  tous  les  émoluments  du  fief,  droits  d'offi- 
cier et  de  haute  justice);  il  perçoit  la  moitié  des  grosses  dîmes 
à  l'onzième,  dans  les  paroisses  deMissillac  et  des  Marais,- les 
novales  exceptées,  et  4.780  tt  de  dîmes  à  Férel,  Herbignac, 
Camoël;  la  dîme  matinale  dans  le  canton  des  Mortiers.  Il  a 
leprivilège  de  célébrer  pontificalement  avec  mitre  et  crosse, 
le  seul  du  diocèse  ;  ce  privilège  fut  accordé  au  concile  de  Bâle, 
avecles  restrictions  mentionnées  dans  la  bulle  de  Clément  IV. 
Il  nomme  aux  cures  de  Nivillac,  de  Missillac,  de  Fégréac,  etc.  ; 
aux  vicairies  perpétuelles  de  S. -Gildas,  de  Drefféac,  d'Herbi- 
gnac,  etc  ;  aux  prieurés  simples  de  S.- And  ré  de  Bouvron, 
de  S.-Jean  de  Sévérac,  de  S.-Jean  de  la  Roche,  de  Pennebé, 
de  Beaulieu,  etc. 

Charges  :  9,005  tt.  Portion  congrue  aux  recteurs  de  S.-Gil- 
das et  de  Drefféac  ;  l'aumône  le  vendredi  depuis  la  Tous- 


—  131  — 

saint  jusqu'à  la  S.-Jean,  le  Jeudi  saint  à  13  pauvres,  et 
autres  aumônes  en  argent,  770  tt.  La  taxe  de  la  congréga- 
tion de  S.-Maur  n'est  pas  comprise  dans  cette  somme. 

Dettes  passives  :  11,044  rt  ;  dettes  actives  :  11,852  tt. 

Les  chapellenies  paroissiales  de  Beau  pois,  de  S. -Michel 
de  S.-Jean,  de  S.- Jacques,  de  S. -Pierre  sont  régulières  et 
produisent  234  n. 

L'église  est  communeà  l'abbaye  etàla  paroisse  :  5  autels, 
le  maître  dans  le  choeur  des  religieux,  séparé  par  une  belle 
grille  de  fer  forgé  ;  d'un  côté,  ceux  de  N.-D.  de  Pitié,  de 
S.-Michel;  de  l'autre,  ceux  de  S.  Jean-Baptiste  et  de  S.-S... 
—  XIIIe  au  XIVe  siècle  —  ;  achevée  en  1533;  le  chœur  est 
de  1711  ;  le  clocher  a  129  pieds. 

Sacristie  :  1  calice,  1  encensoir  d'argent,  1  ciboire  mi 
cuivre  et  argent,  une  crosse  abbatiale  en  bois  et  cuivre,  5 
petits  reliquaires  d'argent  et  1  grand,  argenté,  recouvrant 
une  parcelle  du  chef  de  S.  Gildas  ;  — 14  chasubles,  8  dalma- 
tiques,  72  chapes,  35  aubes. 

Bibliothèque  :  415  volumes. 

Personnel  :  D.  Gannat,  prieur  claustral,  vie.  général 
de  l'abbé,  — 9  déc.  1783. 

Charles  de  laPasseigue,  sous-prieur. 

Jacques-Piené  Grethier,  procureur. 

Claude  le  Poitevin,  Louis  Joly,  N.   Le  Cerf,    religieux. 

6.  Prieuré  conventuel  et  non  électif  de  Ste-Élisaheth 
de  Grand-Lieu,  OSB. 

Prioratus  Stœ-Elisabeth  de  Grandi-Lacu. 

Paroisse  de  S.-Philbert  de  Grand-Lieu 

—  La  fondation  de  ce  prieuré  est  inconnue.  On  lit  dans  un  rapport  de  1572 
qu'elle  a  été  faite  anciennement  pour  6  religieux.  Il  dépend  de  l'abbaye  de 
Tournus,  il  est  passé  en  commande  depuis  longtemps  (1572).  Quoique  ré- 
gulier, il  est  desservi  par  des  séculiers. 


—  d32  — 

Patron  :  l'abbé  de  S. -Michel.  Le  pape  nomme  et  l'abbé 
confère. 

Les  desservants  sont  nommés  par  l'Ordinaire;  le  sous- 
prieur  est  au  choix  du  prieur  commendataire. 

Revenus  :  7.425  tt. 

Charges  :  3.411  «,aux  desservants,  et  au  Régent  ;  messe 
chantée  à  8  h.,  vêpres  et  complies  à  2  h.,  tous  les  jours; 
matines  et  laudes  la  veille  des  fêtes  et  chaque  samedi.  Le 
dimanche  elles  se  chantent  immédiatement  après  la  messe 
matutinale.  Le  prieur  doit  l'aumône  3  fois  la  semaine  aux 
indigents  du  lieu  et  tous  les  jours  aux  passants. 

Eglise  :  elle  est  priorale  et  paroissiale  en  même  temps. 
Très  remarquable  avec  une  crypte,—  XIL>  au  XIIIe.  Grande, 
belle  et  élancée.  On  distingue  le  sanctuaire,  le  choeur,  muni 
de  stalles  et  de  pupitres,  et  la  nef.  Séparant  le  chœur  de  la 
nef,  deux  autels,  S.-Nicolas,  la  T.-Ste-Trinitéetune  Passion. 
Danslanef,  deuxautresautels,S.-André,S. -Lambert.  Un  beau 
et  grand  clocher  renfermant  4  cloches  et  une  horloge.  Cha- 
pelles en  appentis:  1°  Ste-Anne,  2°  S. -Jean -Baptiste,  3° 
S.-François,  4°  le  Rosaire,  5°  olim  S.-Philbert,mmcN.-D.  de 
Miséricorde,  6°  Ste-Marguerite,  7°  S.-Sébastien. 

Sacristie  :  3  calices,  1  ciboire,  1  custode,  1  soleil,  2  bu- 
rettes, 2  encensoirs,  2  croix  processionnelles,  1  petite  croix 
d'argent  ;  —  13  chasubles,  4  chapes  et  2  bannières. 

La  Maison  priorale  comprend  3  corps  de  logis. 

Le  prieur  est  haut-justicier  et  seigneur  de  la  ville,  de 
S.-Lumine,  de  S. -Jean  de  Corcoué,  de  la  Benàte,  de  la  Li- 
mouzinière  et  de  Ste-R.adegonde. 

Personnel.  Desservant  :  D.  Alexis  Louason,  rel.  de  S.-Ger- 
main-des-Prés,  né  en  1750,  depuis  1786,  prieur  commenda- 
taire; Jean  Maillard,  sous-prieur,  —  8  mai  1770;  r.  438  n; 
Auguste  Paumier,  —  9  nov.  1776;  r.  338  ll;  Charles  Gi- 
raud,—  12  juillet  1763;  r.  336  tt;  N.  Julien,  pr.  de  chœur,  — 
12  mars  1776;  Jos.  Robert,  chantre,  —  1787. 


-  133  — 
II.  -  CISTERCIENS 

1.  Abbaye  de  Ste-Marie  de  Buzay  ou  Bussais,  OC. 

Beata-Maria  de  Buzayo,  alias  Busaio. 
Paroisse  de  Rouans 

—  Ce  sont  les  Bernardins  mitigés  qui  l'habitent.  Sise  sur  la  gauche  de 
de  la  Loire,  à  7  lieues  au-dessous  de  Nantes,  cette  fille  de  Clairvaux  fut 
dotée  par  Ermengarde  d'Anjou,  duchesse  de  Bretague,  pour  entretenir  6 
religieux,  le  17  juin  1135  ou  1136.  Conan  111,  n'ayant  pas  obtempéré  aux 
volontés  maternelles,  S.  Bernard  lui-même,  selon  la  chronique  de  Mil- 
îeray,  vint  à  Nantes,  pour  arranger  les  affaires  de  l'établissement  de  Bu- 
zay. Antérieurement,  (avant  le  XIIe  siècle)  il  y  avait  en  cet  endroit,  comme 
aux  Couëts,  deux  maisons  religieuses,  l'une  d'hommes  et  l'autre  de 
femmes.  —  L'abbaye  est  passée  en  commende  depuis  1474  ;  c'est  la  plus 
riche  du  diocèse. 

Patron:  Le  roi;  le  pape  nomme. 

Abbé  commendataire  :  Jean-Georges  Le  Franc  de  Pom- 
pignan,  ex-archevêque  de  Vienne,  ministre  d'État,  nommé 
par  bulles  pontificales  du  6  des  kalendes  d'octobre,  1785. 

Les  Revenus  sont  partagés  en  3  menses,  dont  2  sont  au 
commendataire  et  l'autre  au  pieur  claustral  et  aux  reli- 
gieux.Les  terres  affermées  en  4  lots  ou  métairies  produisent 
150,000  *  .  Les  objets  réservées  sont  évalués  à  un  rende- 
ment de  4,500  rt .  Il  faut  aussi  ajouter  à  cela  des  rentes  sei- 
gneuriales et  foncières.  M.  Le  Franc  de  Pompignan  exerce  à 
Nantes  basse  et  moyenne  justice,  dans  les  fiefs  de  Buzay, 
Buson,  Couëlin  et  Vièvre. 

L1 église,  qui  a  une  très  haute  tour,  a  été  reconstruite  en 
1755. 11  y  a  4  cloches  et  une  horloge  avec  carillons.  Le  maî- 
tre autel  est  en  beau  marbre  et  les  stalles  du  chœur  en 
chêne  sculpté. 

Sacristie  :  1  calice  de  vermeil,  3  ciboires,  2  calices,  1  so  - 
leil,  1  bénitier  et  son  goupillon,  2  encensoirs,  1  plateau  et 
des  burettes,  1  boîte  aux  Stes  Huiles,  1  reliquaire,  1  croix 
d'argent. 


—  \u  — 

La  maison  conventuelle  et  ses  dépendances  immédiate 
ont  entourées  d'une  douve  de  clôture  et  couvrent  4  jour- 
naux de  terre.  Il  y  a  12  ebambres  de  religieux,  coforta- 
blement  meublées,  avec  salle,  salon,  billard.  Les  domes- 
tiques occupent  6  chambres,  réservées  à  leur  usage. 

On  entretient  1  organiste,  2  choristes,  1  garçon  sacris- 
tain, 1  infirmier,  1  hôtelier,  1  valet  pour  le  Prieur,  1  chef 
de  cuisine,  et  plusieurs  autres  pour  la  basse-cour  et  le  ser- 
vice de  la  maison. 

Bibliothèque:  1,612  volumes. 

Personnel  :  Prieur,  procureur  général  de  l'abbé,  D.  André 
Quintin  Caignard  ;  sous-prieur,  Martin  ;  receveur,  Hannel  ; 
procureur  du  couvent,  Jarno  ;  maître  des  hôtes,  Labbe  ;  sa- 
criste,  Ant.  L'Enseigne  ;  DD.  de  Prades,  Verdun,  Dupin  et 
Bourgouing. 

2.  Abbaye  de  Notre-Dame  de  Melleray,  OC. 

Beata  Maria  de  Mellereyo,  aliàs  Mêler io, 
vel  de  Mellis  alveario 

PAROISSE   DE  MEILLERAY 

—  Suivant  la  chronique  de  ce  monastère,  deux  religieux  cisterciens  de 
Pontron  s'établirent,  en  1132,  sur  la  seigneurie  d'Alain  de  Moisdon,  dans  un 
endroit  retiré,  appelé  le  Vieux- Melleray,  avec  le  dessein  d'y  fonder  une 
nouvelle  maison  de  leur  ordre.  D'autres  auteurs  assignent  à  la  fondation 
une  date  moins  ancienne  (1330—1332). 

L'abbaye  de  Melleray  est  située  «  a  huit  lieues  de  Nantes,  entre  les  rivières 
de  Loire  et  de  Vilaine  près  la  source  de  la  rivière  d'Airdre  ». 

Elle  est  occupée  par  des  Bernardins  de  l'élroite  observance. 

Patron  :  Le  roi  ;  le  pape  nomme. 

Abbé  commendataire  :  Louis  Auguste  le  Mintier,  du  d.  de 
S.-Brieuc,  précédemment  archidiacre  d'Auch,  vie.  général 
de  Rennes,  maintenant  évoque  de  Tréguier. 

Revenus  :  mense  conventuelle,  7,355  ;  tt  mense  abbatiale, 
6,184*.  Charges  :  2,227*. 

V  église  porte  la  date  de  1183:  nef  du  XIIe  siècle;  chœur 


-  135  — 

du  XVe.  Le  maître  autel  est  construit  à  la  romaine,  avec 
gloire  et  deux  anges  adorateurs;  il  est  de  marbre  blanc.  Il 
y  a  aussi  deux  petits  autels  en  marbre  de  couleurs  et  deux 
autres  en  bois  doré  et  sculpté  ;  ces  derniers  sont  placés  en 
dehors  de  la  grille.  Le  clocher  contient  3  cloches  (l'une 
4  pieds  8  pouces  de  tour)  et  une  horloge  établie  en  1697. 

Sacristie  :  2  ostensoirs,  3  calices,  2  ciboires,  2  bénitiers, 
2  flambeaux,  1  lampe,  2  croix,  2  encensoirs,  1  boîte  aux 
Saintes-Huiles,  2  paires  de  burettes,  d'argent,  1  calice  de  ver- 
meil. (On  a  déjà  envoyé  à  la  monnaie  une  valeur  de  33 
marcs  d'argent).  —  14  chasubles,  12  dalmatiques,  24  jaubes, 
1  dais. 

Bibliothèque  :  757  volumes  et  deux  armoires  de  manus- 
crits classés. 

Les  Bâtiments,  reconstruits  au  XVIIe  siècle  ont  été  mis 
à  neuf  en  1767.  Ils  forment  4  ailes,  et  comprennent  15  cham- 
bres de  religieux,  4  chambres  d'hôtes,  1  salon,  1  salle  à 
manger  et  les  autres  pièces  nécessaires  au  service  de  la 
communauté.  Il  y  a  8  lits  pour  les  domestiques.  Les  êtables 
renferment  10  bêtes,  dont  2  chevaux  et  8  vaches  laitières. 

Personnel.  Prieur  :  D.  Ant.  Carlier,  né  à  Cambrais,  depuis 
1750.  Procureur  :  Richard.  Chantre  :  Jean  Le  Maître,  né  à  la 
Chapelle-Glain.  Sacriste:  Pierre  Chinon.  D.  Vannier,  ancien 
prieur  de  Buzay,  retiré.  Fr.  Clément  Martin,  convers. 


—  13G  — 

3   Abbaye  de  Notre-Dame  de  Villeneuve,  OC. 

Beata-Maria   de  Villa-Nova. 
Paroisse  du  Bignon. 

—  La  fondation  est  faite  pour  13  religieux.  Le  premier  établissement  se  fit 
à  la  Grange  de  Gort-Maria,  dans  la  forêt  de  Touffou,  et  eut  pour  bienfaitrice 
Constance,  duchesse  de  Bretagne,  dans  la  première  année  du  XIII0  siècle. 
Quelques  temps  après  on  commença  la  construction  de  l'église  et  du  mo- 
nastère tout  près  de  là,  en  la  paroisse  du  Bignon.  La  dédicace  de  l'église 
abbatiale  fut  faite  en  présence  de  tous  les  évoques  de  la  Province,  14  nov. 
1245.  Le  premier  abbé  qui  posséda  ce  bénéfice  en  commande,  c'est  Jean 
d'Estrées  (1677). 

Fille  de  Buzoy,  cette  abbaye  est  occupée  par  des  Bernardins  réformés  de 
X  étroite  observance. 

Patron:  le  roi  ;  le  Pape  nomme. 

Revenus  :  16.769  *  La  mense  conventuelle  est  formée  du 
tiers  des  revenus  généraux. 

Charges  :  3.951.  tt  On  donne  l'aumône  le  lundi  et  le  ven- 
dredi, et  de  plus  946  tt  chaque  année. 

Eglise:  On  y  compte  le  maître  autel,  ceux  deSle-Anne,  de 
S. -Laurent,  de  S.-Bernard,  de  S.-Joseph,etl'ony  remarque 
le  tombeau  de  Constance  de  Bretagne. 

Sacristie  :  1  ciboire  et  1  soleil  de  vermeil,  3  calices,  1  os- 
tensoir, 1  encensoir,  1  bénitier,  1  paire  de  burettes,  1  croix 
processionnelle,  1  crosse,  1  croix  épiscopale,  1  reliquaire, 
1  petit  S.-Laurent,  1  Vierge,  1  petite  croix  avec  christ,  2 
chandeliers,  1  suspensoir,  d'argent  ;  —  30  chasubles,  9 
dalmatiques,  11  chapes;  —  3  cloches,  1  horloge  et  1  vieil 
orgue. 

Bibliothèque  :  2.053  volumes. 

La  Maison  comprend  les  pièces  communes,  5  chambres 
d'hôtes,  9  cellules  de  religieux  et  des  appartements  pour  les 
dames,  chambres  et  salon. 

Personnel:  L'abbaye  est  vacante  par  la  mort  (20  avril  1789) 
de  Claude  François  Lizarde  de  Badonvilliers,  sous-précepteur 


—  137  — 

des  enfants  de  France,  membre  de  l'Académie  et  conseiller 
d'Etat,  nommé  en  1770. 

DD.  :  Simon  Vanin,  prieur,  né  en  1744. 

Domin.  Guillemin,  sous-prieur,  né  en  1749. 

Alexis  Ducros,  dépensier,  né  en  1761. 

J.-B.  Gauthier,  né  en  1726. 

Jac.-Jos.  Meuran,  né  en  1743. 

Pierre  Bonnet,  né  en  1749.  < 

Max.-Jos.  Léonne,  né  en  1763. 

François-Jos.  Lacourt,  né  en  1765. 

Louis  de  Maure,  ancien  abbé  de  Prières,  retiré  depuis  1787. 
R.  4.000  *. 

D.  Paillet,  aux  aliénés  d'Angers. 

III.  -  AUGUSTINS 
1.  Abbaye  de  Ste-Madeleine  de  Geneston,  OSA. 

Sta-Magdalena,  de  Genestonio,  Genestrino,  Genesto. 

—  Les  chanoines  réguliers  de  St-Augustin,  dits  Génofévains,  congréga- 
tion de  France,  possèdent  cette  abbaye.  «Près  le  lac  de  Grand  Lieu,  à  la 
droite  de  la  rivière  de  Boulogne,  à  h  à  5  lieues  de  Nantes,  vers  le  Poitou,  du 
côté  de  l'Occident  d'hiver  .  »  Eu  1148,  Bernard,  religieux  de  Citaux,  appelé  à 
l'évêché  de  Nantes,  fonda  le  monastère  de  Geneston  pour  des  chanoines 
réguliers,  auxquels  il  prescrivit  les  constitutions^  l'ordre  des  Augustins  : 
le  premier  prieur  fut  Clément,  homme  d'un  rare  mérite.  Il  fut  érigé  en 
abbaye,  1163.  Alexandre  III,  qui  était  à  Tours,  ratifie  la  fondation  épisco- 
paleet  prend  les  religieux  sous  sa  protection. 

Patron  :  Le  roi  ;  le  pape  nomme. 

Abbé  commendataire  :  Pierre  Guillaume  Le  Franc  de  Fon- 
taine, vie  général  de  Tréguier,  prévôt  et  premier  digni- 
taire du  chapitre  royal  de  Morlaix,  licencié  en  lois,  origi- 
naire dé  Quimper,  —  27  juin  1754. 

Revenus:  3  métairies,  3  maisons  dans  le  bourg,  moulin  et 
four  banal,  droit  de  terciage  et  8  foires,  11.835  rt.  L'abbé 
nomme  à  la  cure  de  Geneston,  aux  prieurés-cures  de  Mont- 


-  -138  - 

bert  et  de  S.-Jean  de  Bouguenais,  aux  prieurés  simples  de 
S.-Symphorien,  de  Fréligné,  de  S.-Lupien,  etc. 

Charges  :  portion  congrue  au  desservant  de  la  paroisse  ; 
au  prieur,  2,400  *  ;  aux  prêtres  de  S.-Symphorien  en  la 
Bruffière,  400  *  ;  au  prieur  de  S.-Jean,  78  *  ;  aumônes,400 *. 

L'église  est  beaucoup  plus  vieille  que  la  maison  qui  a  été 
construite  vers  1660  ;  elle  a  75  pieds  de  long  et  25  de  large  ; 
elle  est  coupée  par  une  boiserie;  la  partie  supérieure  ser- 
vait au  Chapitre  et  l'inférieure  à  la  paroisse.  Le  clocher, 
ayant  été  dernièrement  foudroyé  (1783),  vient  d'être  relevé  ; 
bâti  sur  une  chapelle  latérale;  42  pieds  de  hauteur.  Le 
chœur  contient  9  stalles  de  chaque  côté. —  Le  roman  et  le 
gothique  sont  mélangés. 

Sacristie:  1  calice  de  vermeil,  1  autre  d'argent,  1  soleil, 
1  ciboire,  2  encensoirs,  2  croix,  2  ampoules,  1  paire  de  bu- 
rettes et  son  plateau,  d'argent;  plusieurs  ornements  dont 
une  chasuble  et  une  chape  galonnées  d'or;  —1  cloche. 

Bibliothèque:  300  volumes. 

En  1750  le  chapitre  se  composait  seulement  de  3  prêtres. 
Aujourd'hui  il  n'y  en  a  plus  qu'un  qui  fait  l'office  curial. 

Le  service  divin  a  cessé  et  les  bâtiments  sont  inoccupés. 

2.  Abbaye  de  Ste-Marie  de  Pornic,  OSA. 

Sta-Maria  de  Pornido,  seu   Porindio,  aliàs    de  Burgo 

propè  Porimdum 

PAROISSE  DE  STE-MARIE. 

—  «  Située  dans  les  marais  salés,  à  la  gauche  de  la  Loire,  au  duché  de 
Retz,  vers  l'océan,  à  14  lieues  de  Nantes,  à  5  de  Machecoul.  »  Il  faut  renoncer 
à  donner  des  certitudes  sur  les  origines  de  cette  abbaye.  Voici  la  légende  que 
fournissent  certains  auteurs.  Les  chanoines  de  St-Augustin,  établis  à  Dou- 
lon,  l'an  1105,  par  l'évêque  Benoît,  quatre  ans  après  chassés  de  ce  lieu,  à 
cause  de  leur  relâchement,  se  retirèrent  à  Pornic,  près  d'une  chapelle  appar- 
tenant aux  moines  deSt-Serge  d'Angers.  Le  premier  abbé,  dont  le  nom  appa- 
raît dans  les  actes  publics,  gouvernait  cette  communauté,  vers  le  commen- 


—  139  - 

cernent  du  XIIIe  siècle  (J)-  La  conventualité  cessa  en  1620,  à  la  mort  de  l'ab- 
bé Guillaume  Pineau.  L'abbaye,  qui  conserva  ses  titres,  revenus  et  privilèges, 
est  devenue  séculier  depuis  quelques  années,  et  par  conséquent  desservie  par 
de  simples  prêtres  au  choix  de  l'abbé  commendataire.  Aujourd'hui  aucun 
clerc  ni  régulier,  ni  séculier,  n'habite  cette  maison,  qui  d'ailleurs  est  détruite. 
Elle  est  passée  en  commende  vers  le  commencement  du  XVIIe  siècle. 

Patron  :  le  roi  ;  le  pape  nomme. 

Revenus  :  Dîmes,  2.800  *,  droits  de  pèches  et  moulins, 
rentes,  fiefs,  métairies,  marais,  etc.,  7.050*. 

L'abbé  de  Pornic  nomme  à  la  vicairie  perpétuelle  de  Ste- 
Marie,  à  la  cure  de  St-Gilles,  aux  prieurés  de  Haute-Perche 
de  Rohard,  d'Aisne,  de  Guermiton,  du  Clion,  de  St-Michel, 
de  la  Plaine,  du  Port-St-Père  et  de  Chauve. 

Charges  :  Portion  congrue  au  vicaire  perpétuel  et  entre- 
tien de  la  lampe  du  St-Sacrement. 

Eglise,  elle  est  paroissiale. 

Les  bâtiments  claustraux  n'existent  plus,  la  maison  abba- 
tiale a  été  construite  dans  l'enclos  de  l'ancien  monastère. 

Abbé  commendataire  :  Julien-Olivier  Gibon  de  Pargo, 
vicaire  général  et  officiai  de  Rennes,  — 12  déc.  1777. 

IV.  —  CARMES 

De  l'ancienne  Observance. 

Paroisse  de  S.-Vincent  de  Nantes. 

—  Thibaud,  seigneur  de  Rocbefort,  vicomte  à  Donges,  appela  les  Carmes 
à  Nantes,  (1318),  et  les  logea  lui-même  dans  son  hôtel  de  Rochefort,  qui 
devait  être  occupé  plus  tard  par  les  dames  de  Ste-Claire.  C'est  le  premier 
établissement  que  ces  religieux  aient  eu  en  Bretagne.  Le  couvent  fut  cons- 
truit en  1327,  sur  la  paroisse  S.-Vincent;  mais  le  curé  et  le  chapitre  de  la 
cathédrale  s'y  étant  opposés,  l'interdit  demeura  sur  la  maison  et  la  cha- 
pelle pendant  quelques  années. 


(4)  Travers  assure  qu'elle  a  été  fondée  par  Garsire  de  Retz,  ou  par  Gestin 
seigneur  de  Machecoul  et  de  Pornic-,  les  Etrennes  nantaises  fixent  la  date  à 
1117. 


—  140  — 

R.  Maisons  dans  la  G-rand'Rue,  dans  la  petite  rue  des 
Carmes,  dans  les  rues  du  Moulin,  de  la  Poissonnerie,  de  la 
Salorge,  et  des  terres  :  9,161 tt;  rentes  foncières  en  argent, 
1,433  «;  rentes  constituées,  652  *  ;  rentes  viagères,  1,080*. 

Ch.  1°  intérieures:  honoraires  d'un  organiste,  d'un  prédi- 
cateur et  de  professeurs,  1,277  ft;  —  2°  extérieures  :740H  ; 
frais  de  culte,  1,016  tt. 

Dettes  actives,  5,940  tt;  dettes  passives,  1,466  *. 

Eglise:  grande  nef  carrée,  large  chœur,  à  l'angle  de  la 
Grand'rue  et  de  la  petite  rue  des  Carmes.  Il  y  a  3  autels, 
ornés  de  colonnes  de  marbre.  La  chapelle  de  N.-D.  de  Lo- 
rette,  qui  a  son  autel,  est  close  par  une  balustrade.  Le 
maître  autel  a  été  consacré  le  18janv.l768.  De  chaque  côté 
du  sanctuaire,  on  voit  deux  colonnes  supportant  des  statues, 
et  5  tableaux  dont  un  dans  le  sanctuaire.  Les  autels  de 
S.-Jacques  et  de  S.-Christophe  sont  tout  neufs.  Il  n'y  a  que 
2  confessionnaux  pour  le  public. 

Il  faut  remarquer  le  magnifique  tombeau  de  François  II 
et  de  Marguerite  de  Foix,  chef-d'œuvre  de  scuplture,  1505. 
Le  cœur  de  la  duchesse  Anne  de  Bretagne,  deux  fois  reine 
de  France,  est  conservé  dans  l'église. 

Sacristie  :  1  soleil,  4  calices,  2  ciboires,  de  vermeil;  3 
calices,  2  encensoirs,  1  croix  processionnelle,  1  petite  croix 
d'autel,  1  bénitier,  1  ciboire,  2  paires  de  burettes  et  leur 
plateau,  2  ampoules,  8  chandeliers  d'autel,  2  chandeliers 
d'acolyte,  2  grandes  lampes,  1  instrument  de  paix,  un  reli- 
quaire de  S.  Albert,  2  chapelets  précieux,  3  statuettes,  en  ar- 
gent; —  1  dais  de  velours  cramoisi,  4  chasubles  riches,  2 
autres  très  belles,  33  communes,  10  chapes,  12  aubes  de  fin 
lin,  60  communes,  3  tapis  précieux. 

Les  4  cloches  qui  font  un  harmonieux  carillon  ont  été 
consacrées  par  Mgr  de  Dol,  le  19  août  1769. 

La  Bibliothèque  est  vieille  et  rongée. 

Le  couvent  longe  la  rue  du  Moulin:  au  rez-de-chaussée, 
magasin  et  sacristie;  au  1er  étage,  grande  salle  de  l'Uni- 


—  141  — 

versité,  3  chambres  d'hôtes  ;  2me  étage,  dortoir  des  jeunes 
religieux.  Deux  ailes  sont  accostées  à  ce  corps  de  logis  et 
forment  un  carré  long  autour  du  cloître. 

Confrérie  de  N.-D.  du  Garmel,  érigée  en  1460  :  la  fête 
patronale  est  la  Nativité  de  la  Ste  Vierge. 

Le  personnel  se  compose  de  religieux  prêcheurs,  profes- 
seurs et  étudiants  : 

Eioi  de  la  Bellangerie,  docteur  en  théologie,  prieur, — 
22 mai  1789; Groleau, vicaire  ;  JéromeDavid,  lerprofesseur; 
Xavier  de  la  Mothe-Fouquet,  2e  professeur  ;  Aug.  du  Pont 
de  Badelio,  procureur  et  définiteur  ;  Richard  Mulot,  sa- 
criste  ;  Nicolas  Lefrancois,  secrétaire  et  vocal  ;  Claude 
de  Strasbourg,  vocal  ;  Guill  Letourneux,  vocal  ;  Ange 
Brossard  ;  Etienne-Charles  Fourziier  ;  Cyr  Lemailloux  ; 
Jean-Pierre  Piel,  ancien  prieur  ;  Athanase  Deliepvre,  assis- 
tant du  R.  P.  Provincial  ;  Julien  Lorre,  discret;  François 
Mathurin  Renouard,  étudiant  etc. 

V.  -  CHARTREUX. 

Paroisse  St.-Donatien,  aux  faubourgs  de  Nantes, 

—  Charles  de  Blois  fit  dans  l'antique  chapelle  des  SS.  Donatien  et  Roga- 
tien,  dite  Chapelle-au-Duc,  une  fondation  de  six  chanoines  séculiers.  Ce 
sanctuaire,  élevé  sur  le  lieu  du  martyre  de  nos  saints  Patrons,  était  un  des 
plus  vénérables  de  la  ville  de  Nantes  par  son  ancienneté  (Ve  siècle)  et  par 
le  souvenir  glorieux  qu'il  rappelle.  Le  13  oct.  1425,  François  II  consentit 
qu'il  devînt  une  Chartreuse  pour  13  religieux:  une  bulle  d'Eugène  confirma 
la  fondation  pour  Hervé  du  Pont,  élu  le  premier  prieur.  Arthur  III  et 
Catherine  de  Luxembourg,  dont  les  cendres  reposent  dans  la  nouvelle 
église,  en  sont  les  principaux  bienfaiteurs. 

R.  En  S.-Donatien,  2.863  *  ;  en  S.  -Clément  et  S.-Vincent, 
1.905*;  en  Ste.-Croix,  1.912*;  en  S.-Viaud,  1.494*;  en 
Valletetla  Chevrollière, 2.717  *;  en  la  Rémaudière,  1.490 *; 
rentes  à  Paris,  788  *  ;  constituts,  3.203  *  etc.  Total  : 
17.054.*  Ch.  2.315  *. 


-  142  - 

L'église  a  été  consacrée  le  16  avril  1459,  par  l'évoque  de 
Laodicée;  située  sur  le  bord  du  grand  chemin,  elle  se  dé- 
veloppe en  le  longeant  dans  une  forme  assez  bizarre;  la  nef 
et  le  sanctuaire  sont  vastes,  mais  le  vestibule  réservé  au 
public  est  fort  petit.  On  y  voit  le  tombeau  d'Arthur  III  ; 
elle  est  ornée  de  22  tableaux.  Autour  de  la  grande  nef, 
rayonnent  la  chapelle  du  prieur  et  12  autres  pour  les  reli- 
gieux, car  chacun  célèbre  en  môme  temps. 

Sacristie  :  4  calices  pour  le  maître  autel,  12  autres  pour 
les  religieux  ;  1  ostensoir,  1  ciboire,  1  encensoir,  1  croix 
processionnelle,  1  croix  d'autel,  1  bénitier,  4  instruments  de 
paix,  1  crucifix,  13  paires  d'orceaux,  en  argent,  2  reliquaires 
de  vermeil,  1  autre  d'or;  —  22  ornements  complets,  ;20 
chasubles,  35  aubes.  —  Il  y  a  deux  cloches,  dont  l'une  de 
700  livres. 

Le  vaste  enclos  de  la  Chartreuse  s'étend  entre  le  bas  che- 
min du  bourg  de  S.-Donatien  et  le  grand  chemin  de  Paris- 
Les  bâtiments  forment  une  trrès  gande  cour  intérieure  ; 
l'angle  du  N.  0.  se  prolonge  vers  l'établissement  de 
S.-Charles;  à  l'E.  se  trouvent  les  servitudes.  Le  tout,  en 
comprenant  2  jardins  et  3  cours,  couvre  une  étendue  de  4 
journaux  de  terre.  La  maison  est  double  :  2  cloîtres,  sur 
lesquels  donnent  13  cellules  habitables,  2  réparables  et  5 
ruinées.  Le  P.  Procureur,  le  frère  lai  et  l'oblat  logent  ailleurs. 
On  tient  2  chambres  à  la  disposition  des  hôtes.  Dans  la 
salle  du  chapitre,  il  y  a  13  tableaux;  le  réfectoire  est  orné 
de  boiseries,  et  de  peintures  d'un  Christ. 

La  Bibliothèque  se  compose  de  2  galeries  :  une  bible  ma- 
nuscrite de  1379;  vol.  in-folio,  1.127;  in-4°,  580;  in-8° 
et  in-12, 1.054.  En  tout  :  1.667  ouvrages. 

Personnel  :  Le  Prieur,  12  religieux,  1  frère  lai  et  1  oblat. 

François  L'Honoré,  né  à  Hennebont  en  1778,  prof.  1748, 
prieur. 

Augustin  Guéraud,  né  en  1747,  prof.  1768  sous-prieur. 


-  143  - 

Nicolas  Albergaty-Chapon,  né 
cureur. 
François  Boutherou,    né  en 

Etienne  Labottière,  — 

Jean-Baptiste  Cléret,  — 

Jean  Hallereau,  — 

E.-Maurice  Thiébaud,  — 

Rog.  GautiendelaFoy,  — 

Pierre  Legouz,  — 

Antoine  Brunet,  — 

Gabriel  du  Thoya,  — 

Thomas  Arnaud,  — 
Nicolas  Posnier, 
Jean  Charrié, 


en  1735,  prof.  1760,  pro- 
1725,  prof.  1750. 


1730, 

—  1753. 

1736, 

—  1773. 

1737, 

—  1764. 

1737, 

—  1767. 

1755, 

—  1776,  diacre. 

1757, 

—  1778,  sacriste. 

1756, 

—  1783. 

1762, 

—  1788. 

1760, 

—  1789. 

1740, 

—  1772,  convers 

—        1730,  attaché  depuis  1778. 


VI.  —  TRINIT AIRES,  dits  MATHURINS. 

Paroisse   de   S.-Jean-le-Béré,    près   la   ville   de 

Chateaubriant. 


—  En  1252,  Geoffroy  fonda  cette  Ministrerie,  qui  ne  reçut  la  forme  légale 
qu'en  1612.  L'ordre  des  Trinitaires,  ëlabli  dans  le  diocèse  de  Maux,  vers  la 
fin  du  XIIe  siècle  par  Jean  de  Matha  et  Félix  de  Valois,  a  pour  but  de  rache- 
ter les  chrétiens  captifs  chez  les  infidèles  ^  or  la  première  maison  qui  exis- 
tât en  Bretagne  fut  celle  de  Chateaubriant.  Geoffroy,  ayant  suivi  noire  bon 
roi  Louis  à  la  Croisade,  tomba  entre  les  mains  des  Sarrazins  et  fut  rachetée 
par  les  Trinitaires  ;  son  épouse  eut  tant  de  joie  de  le  revoir  qu'elle  mourut 
en  l'embrassant.  En  reconnaissance  de  sa  délivrance,  le  baron  dota  ces  reli- 
gieux sur  son  domaine. 

Ils  vivent  de  cette  fondation  et  de  quêtes. 

Eglise  :  Le  chœur  est  séparé  de  la  nef  par  une  grille  de 
fer.  Au  chevet  est  un  tableau  représentant  la  T.-Ste.  Trinité. 
Outre  le  maître  autel,  on  voit  ceux  de  la  Vierge  et  de 
S.-Augustin.  Il  n'y  a  qu'un  confessionnal. 

Sacristie  :  2  soleils,  2  encensoirs,  2  ciboires,  2  calices, 
2  paires  de  burettes,  2  ampoules,  1  croix  processionnelle, 


—  144  — 

chandeliers,  d'argent  ;  —  15  chasubles,  9  chapes,  2  dalma- 
tiques,  10  aubes. 

Les  cloches  sont  petites  :  203  1.  et  148  1. 

Bibliothèque  :  474  ouvrages  divers. 

Ministre  :  François-Maurice  Pichault,  conseiller  et  prédi- 
cateur ordinaire  du  Roi,  général  de  l'ordre  de  la  Trinité, 
nomme  à  la  Ministrerie  de  Châteaubriant  D.  Pierre  Henri 
Auger  de  S. -Germain,  —  20  mars  1768. 

Religieux  :  J.  Maréchal,  Bâlé,  Trézel,  A.  Prérevé  et 
Rauqué. 

VIL  -  DOMINICAINS,  dits  JACOBINS. 

1.  Paroisse  de  Sainte-Radégonde  de  Nantes. 

—  Étant  venus  a  Nantes  par  ordre  du  Pape,  pour  voir  le  duc  Pierre  et 
arranger  les  difficultés  qui  avaient  surgi  entre  l'évêque  et  le  chapitre  d'un 
côté  et  le  duc  excommunié  de  l'autre  (1217),  les  Dominicains  résolurent  de 
s'établir  dans  cette  bonne  ville.  En  effet  neuf  ans  après  ils  revenaient  pour  jouir 
d'une  fondation,  qu'avait  faite  en  leur  faveur  André  Sr  de  Vitré,  fonda- 
tion qui  fut  acceptée  par  Guillaume  de  Séguino,  provincial  de  France,  au 
nom  du  B.  Jourdain  de  Saxe,  alors  général  de  l'Ordre. 

R.  Maisons,  11.250  *;  terres,  5.146  tt;  rentes.  120  *;  etc. 
Total,  17.606  ». 

Ch.  Desservance  de  304  messes  chantées,  de  1283  messes 
basses;  exposition  du  T.-S.  Sacrement  3  fois  la  semaine; 
salut  etstabatle  mercredi;  rentes  constituées,  590  tt;  rentes 
viagères,  1.158  tt. 

Eglise  :  Elle  brûla  avec  le  couvent  en  1410;  mais  la  gé- 
nérosité de  l'évêque,  du  duc  et  des  fidèles  permit  de  recons- 
truire ce  que  les  flammes  avaient  détruit.  On  consacra  le 
nouveau  sanctuaire  le  19  octobre  1413.  Le  portail  n'a  été 
achevé  qu'en  1688.  Très  grande  :  le  sanctuaire,  le  chœur, 
la  nef  pour  le  public  et  un  vaste  et  beau  portique.  L'autel 
est  de  marbre,  sous  un  retable  à  6  colonnes  avec  un  diadème 
doré,  la  galerie  supporte  deux  figures  et  un  tableau  qui 


-  145  — 

représente  V  Adoration  des  Mages;  de  chaque  côté,  enclavés 
dans  le  retable,  sont  deux  petits  autels  ;  il  y  a  2  grands  ri- 
deaux qui  peuvent  recouvrir  toute  la  façade  de  ce  monu- 
ment. 

On  voit  encore  les  autels  :  1°  de  N.-D.  des  Vignes,  à 
sauche,  avec  une  table  de  communion  à  la  romaine  et  un 
retable  en  menuiserie  ;  2°  du  S.-Nom  de  Jésus,  à  droite.  Le 
chœur  qui  s'ouvre  entre  deux  grandes  colonnes  formant 
retable,  contient  16  stalles  ;  au  pied  de  chaque  colonne  sont 
deux  petits  autels,  N.-D.  de  Pitié  et  N.-D.  du  Rosaire.  Dans 
la  nef  il  y  a  encore  les  autels  de  N.-D.  de  Miséricorde  et  de 
St. -Thomas,  du  Tombeau  et  du  Tiers-Ordre  ;  enfin  deux 
autres,  dont  l'un  dédié  à  la  Véronique. 

Tout  près  de  la  sacristie  est  une  salle  qui  sert  de  cha- 
pitre et  de  cimetière  pour  les  religieux  ;  on  y  voit  deux 
pierres  tombales  ;  il  y  a  4  et  5  châsses  de  plomb  dons 
les  enfeus  ;  les  chapelles  de  N.-D.  des  Vignes,  du  S.-Nom  de 
Jésus,  de  N.-D.  de  Pitié  et  du  Tiers-Ordre  sont  des  enfeus 
de  familles. 

Argenterie  :  2  ciboires,  2  calices,  1  soleil,  2  chandeliers, 
1  croix,  1  bénitier,  i  paire  de  burettes. 

Il  y  a  un  petit  orgue  près  du  sanctuaire  ;  le  clocher,  qui 
est  peu  élevé,  renferme  3  cloches. 

Le  courent  a  été  rebâti  en  1632.  Le  cloître  est  formé  de 
4  galeries  de  13  toises  sur  7,  longeant  le  Port-Maillard.  Au 
côté  de  l'O.  existe  un  autel  extérieur  servant  de  prédica- 
toire  ;  sur  une  autre  aile  du  cloître  est  une  véritable  chaire 
à  prêcher;  il  y  a  un  petit  jardin  entouré  par  les  galeries. 
La  plus  belle  pièce  de  la  maison  est  le  réfectoire  :  il  est 
boisé  jusqu'à  la  hauteur  des  fenêtres,  les  tables  sont  ran- 
gées tout  autour  ;  l'ornementation  consiste  en  8  tableaux, 
un  christ  et  une  chaire  de  lecteur.  Il  faut  aussi  faire  men- 
tion du  grand  parloir,  où  se  reçoivent  les  personnes  hon- 
nêtes, qui  font  visite  aux  religieux.  Outre  les  cellules  de 
chacun,  on   compte  2  chambres   d'hôtes,    dont  l'une  sert 

1881  10 


—  146  — 

au  Provincial.  Les  appartements  du  Prieur  sont  meublés, 
en  considération  des  services  éminents  qu'a  rendus  le 
P.  Maury. 

La  bibliothèque  contient  2,714  vol.  et  un  manuscrit  de  la 
Bible  de  1500. 

La  communauté  comprend  les  religieux  résidants,  les 
novices  et  les  étudiants.  L'Ecole  de  Théologie  est  une  des 
meilleures  de  France. 

Personnel:  PP. 

Charles  Maury,  professeur  en  théologie,  ex-vicaire,  ex- 
provincial et  commissaire  général,  élu  prieur  le  19  mai 
1787; 

Jean-Baptiste  Trotel,  vicaire  et  commissaire  général,  pré- 
cédemment général,  plusieurs  fois  prieur  du  couvent, 
conseiller  ; 

Mathurin  Panaget,  professeur  en  théologie,  secrétaire  du 
conseil,  sous-prieur  depuis  1787  ; 

Marcellin-François  Daniel,  conseiller  et  pro-secrétaire  ; 

François  Mallet,  conseiller  ; 

Guillaume  Le  Cam,  conseiller  ; 

Urbain -Pierre  Joyeau,  du  d.  d'Angers,  ord.  1789, 
conseiller  ; 

Jacques  L'Again,  lecteur  de  philosophie ,  conseiller, 
maître  des  novices  ; 

Jean-Jacques  Launoi,  professeur  en  théologie,  conseiller, 
procureur  depuis  1788  ; 

Louis-Guillaume  Lezé,  de  Château-Gonthier,  conseiller, 
procureur  supplémentaire  ; 

Julien  Tissot,  ancien  sous-prieur  et  maître  des  novices  ; 

René  Ouyce,  contrôleur  ; 

Michel  Doizé,  professeur  en  théologie,  prédicateur  gé- 
néral; 

Jean-Baptiste  Voirel,  professeur  en  théologie  ; 

Jean  Baz,  professeur  en  théologie,  ord.  en  1789  ; 

Joseph  Le  Maître,  de  Dinan,  ord.  en  1789  ; 


—  147  - 

Jean- Joseph  Sébillot,  sous-diacre,  étudiant  en  philosophie  ; 
Aug.-René  Roger  de  la  Marre,  vêtu  le  1er  janv.  1789. 

FF. 
Jean  Hervouet,  gérant  de  l'office  de  la  sacristie; 
Jean  Cottie,  infirmier  ; 

François  Sottin,  dit  fr.  Thomas,  oblat  du  Tiers-Ordre, 
attaché  depuis  1787. 

2.  Paroisse  de  Guérande,  faubourg  de  Bizienne. 

—  Le  duc  JeanV  avait  obtenu  du  pape  l'autorisation  de  bâtir  une  maison 
de  Jacobins,  au  faubourg  de  Guérande,  dès  l'an  1406  -,  mai-s  le  Chapitre  du  lieu 
y  mit  obstacle.  Cependant,  le  16  mai  1409,  on  posa  la  première  pierre  du 
couvent,  après  avoir  accordé  audit  Chapitre  4,000"  d'indemnité.  Les  bulles 
pontificales  furent  obtenues  et  adressées  à  Gatien,  év.  de  Quimper.  Deux 
rois  de  France  prirent  les  religieux  sous  leur  protection. 

On  ne  connaît  point  ni  les  revenus  ni  les  charges  de  ce 
prieuré. 

L1  Église ,  consacrée  en  l'honneur  de  S.  Yves,  le  9  sept.  1440 
est  séparée  en  deux  corps  bien  distincts  :  dans  le  corps 
majeur,  le  chœur  avec  les  stalles,  une  chaire,  un  orgue  à 
jeux  et  le  maître  autel  ;  dans  le  corps  mineur,  l'autel  de  la 
Vierge  et  4  confessionnaux.  Ce  sanctuaire  a  été  bâti  sur 
l'emplacement  d'une  ancienne  chapelle. 

Le  couvent  est  situé  au  faubourg  de  Bizienne.  On  re- 
marque dans  le  réfectoire  2  tableaux  :  la  Cène  et  le  Christ. 
Il  y  a  2  dortoirs  :  l'un  de  4  cellules  et  l'autre  de  9.  L'enclos 
du  monastère  renferme  un  pressoir,  une  basse-cour,  un 
étang,  4  jardins  et  des  prairies. 

Personnel  : 

Fidèle-Marie  Paris,  né  à  Rennes,  1753,  ord.  à  Moutiers 
1777,  prieur. 

Louis -René  Thoby,  né  à  Guérande,  1751,  ord.  à  Angers, 
1766,  ex- professeur  de  théologie. 

François-Louis  Guinguenet,  né  à  S.-Brieuc,  1756,  ord.  à 
S.-Malo,  1784. 

Salien,  né   à  Metz,  1746,  ord.  à  Vannes,  1786. 


—  148  — 

VIII.  -  CORDELIERS 

1.  —  Paroisse  de  St-Léonard  de  Nantes. 

—  Los  Cordelicrs  résidaient  a  Nantes  dès  le  milieu  du  XIIIe  siècle,  ha- 
bitant une  maison  provisoire.  La  bienfaisance  des  seigneurs  de  Rieux  fonda 
leur  couvent  en  1296,  et  leur  donna  un  local,  situé  entre  St-Léonard  et 
JNotre-Dame,  ainsi  que  la  chapelle  dédiée  h  St  Michel,  archange. 

R.  39  fondations,  (32.18  »;  rentes,  3.500  ». 

V Église  de  St-Michel,  reconstruite,  fut  consacrée,  le  22 
sept.  1332,  par  l'év.  Henri  -,  dans  la  suite,  cet  édifice  re- 
çut de  grandes  modifications,  surtout  dans  ses  proportions. 
On  y  remarque  entre  autres  2  tombeaux  :  ceux  de  Jeanne, 
épouse  d'Olivier  de  Clisson  (1329),  et  de  Jean  de  Bretagne, 
comte  de  Richemont  (1333).  Sous  les  dalles,  se  trouvent 
12  châsses  de  plomb,  renfermant  les  cendres  des  bienfai- 
teurs. 

Sacristie  :  5  calices,  3  ciboires,  2  soleils  d'argent,  etc. 

La  sonnerie  se  compose  de  3  cloches. 

La  maison  peut  contenir  20  religieux.  Il  y  a  deux  cham- 
bres d'hôtes  et  une  infirmerie.  Les  cellules  des  religieux 
sont  meublées  à  leurs  dépens,  «  chacun  s'étant  plu  à  orner 
sa  retraite,  du  fruit  de  ses  épargnes,  qu'il  regarde  comme 
le  sanctuaire  de  son  bonheur.  »  L'enclos  est  borné  par  la 
rue  des  Pénitentes,  la  rue  des  Caves,  la  promenade  des 
Comptes  et  les  murs  de  la  ville. 

Personnel  : 

Pierre  Etienne,  doct.  en  Sorbonne,  né  en  1735,  prof. 
1734,  ancien  provincial  de  Rennes,  gardien. 

Julien  Loiseleur,  né  en  1751,  au  d.  de  Rennes,  prof.  17G7, 
doct.  en  théologie,  père  do  Province,  proministre  provincial 
de  Touraine. 

François  Majeunc,  né  en  1753,  au  d.  du  Mans,  prof.  1776, 
doct.  en  théologie,  père  de  Province,  procureur. 


-  149  - 

Jean  Baly,  né  en  1753,  au  d.  d'Orléans,  prof.  1751,  défini  - 
teur  ;  Christophe  Aubry,  né  en  17G5  à  Craon,  prof.  1765,  ex- 
définiteur  et  gardien  ;  Gilles-Epiphane  Goret  de  la  Cornillais, 
né  en  1745  à  Fougères,  prof.  1764  ;  Jean  Sartre,  né  en  1747, 
à  Angoulème,  prof.  1771,  maître  des  novices;  Honoré  Robin, 
né  en  1765,  à  Paulx,  prof.  1785. 

Jean  Brochard,  né  en  1765,  à  Montaigu,  prof.  1784. 

Jean  Martin,  né  en  1765,  à  Laval,  prof.  1787,  sacriste. 

11  y  a  de  plus  un  jeune  homme,  qui  a  fait  un  an  de  novi- 
ciat, mais  qui  n'est  point  encore  profès. 

2.  —  Paroisse  de  St-Cyr,  trêve  de  Bourgneuf. 

—  Gérard  Chabot,  seigneur  de  Macbecoul  et  de  Bourgneuf,  de  concert 
avec  Aliénor  de  Thouars,  son  épouse,  fonda  le  couvent  des  Cordeliers 
à  Bourgneuf,  dans  la  paroisse  de  St-Cyr  $  ils  y  furent  inhumés. 

R.  1.084  «. 

Uèglise  est  vaste  et  très  propre  :  il  y  a  dans  le  choeur  le 
tombeau  des  fondateurs. 

Sacristie:  1  soleil,  1  ciboire  de  vermeil,  3  calices,  2 
paires  de  burettes,  2  statuettes  de  la  Vierge,  1  petite  croix 
d'argent,   1  chef  en  bois    argenté,  4  ornements  complets. 

Personnel  :  R.  P.  Denis  Brun,  définiteur  perpétuel,  gar- 
dien démissionnaire,  retiré  à  St-Florent,  où  il  sert  d'aumô- 
nier aux  religieuses,  depuis  quelques  mois. 

F.  Louis  Benoit,  de  Chaumont,  né  en  1748,  prof.  1770. 

3.  —  Paroisse  de  la  Trinité  de  Clisscn. 

—  Olivier  de  Clisson  mourant  à  Josselin,  le  13  avril  1407,  fondait  le  cou- 
vent des  Cordeliers  dans  sa  ville  natale.  Marguerite  sa  fille  y  établit  des 
Franciscains  de  l'étroite  observance  trois  ans  après.  Dès  1415,  le  gardien 
assistait  an  concile  de  Constance. 

R.  Il  n'y  a  point  de  rentes  proprement  dites  :  les  reli- 
gieux vivent  de  quêtes  et  d'aumônes.  Les  fondations  rap- 
portent 100  ft  ;  la  location  des  deux  maisons,  825  #. 


—  150  - 

Uéglise  a  une  grande  nef  et  une  nef  latérale  ;  l'entrée 
donne  sur  un  large  vestibule,  dans  la  rue  des  Cordeliers. 
Au-dessus  de  la  porte  principale  est  la  statue  du  titulaire, 
saint  Bonaventure  ;  on  y  vient  en  pèlerinage  avec  des 
enfants. 

Mobilier  :  On  peut  mentionner  7  chasubles,  4  dalma- 
tiques,  10  chapes,  19  aubes  ;  —  1  soleil,  1  ciboire,  1  custode, 
4  calices,  1  encensoir,  1  paire  de  burettes  en  argent  ;  —  2 
cloches,  1  horloge. 

Le  couvent  est  bâti  avec  simplicité  et  régularité,  sur  la 
rive  droite  de  la  Sèvre,  dans  un  site  ravissant,  au  fau- 
bourg et  paroisse  de  la  Trinité  :  il  se  compose  d'un  grand 
corps  de  bâtiment  parallèle  à  l'église  et  relié  à  celle-ci  par 
deux  ailes  pour  former  la  cour  intérieure  du  cloître. 

Bibliothèque  :  150  vol. 

Personnel  : 

André  Barat,  né  en  1725,  prof.  1742,  gardien  ; 

Gilles-François  Le  Mauviel,  né  en  1763,  prof.  1786,  pré- 
dicateur; 

Gabriel  Piveteau,  né  en  1764,  prof.  1789,  confesseur  ; 

François  Gillet,  né  en  1735,  prof.  1752,  frère  lai. 

4.  —  Paroisse  de  Savenay. 

—  Les  Cordeliers  s'établirent  à  Savenay  en  1419,  grâce  à  la  libéralité 
de  H.  et  P.  seigneur  de  Rieux.  Des  lettres  ducales  de  Jean  V,  datées  du 
17  mai,  le  consentement  du  curé  de  Savenay,  et  la  permission  du  chapitre 
de  Nantes,  Sede  vacante,  régularisèrent  cette  pieuse  fondation. 

R.  944  *.  Le  bénéfice  de  l'Ecurais,  chargé  d'une  messe 
par  semaine  et  qui  rapporte  227  tt,  se  dessert  dans  l'église 
conventuelle. 

Église  :  (XIIIe  siècle)  elle  a  14  toises  de  long.  La  chapelle 
St-Antoine  y  est  attenante.  Le  clocher  a  deux  cloches  et 
une  horloge  à  carillon,  qui  sert  à  toute  la  ville.  On  re- 


—  151  - 

marque  dans  l'église  le  tombeau  de  Guy  de  Rieux,  vicomte 
de  Donges  (1637). 

Sacristie  :  2  calices,  1  soleil,  1  ciboire,  1  paire  de  bu- 
rettes et  son  plateau  d'argent  ;  —  9  chasubles,  17  chapes, 
19  aubes. 

Au  devant  du  couvent,  il  y  a  une  cour  d'honneur,  qui 
conduit  à  l'église,  au  chapitre  et  à  la  porte  d'obédience.  Il 
y  a  un  grand  dortoir  de  7  cellules,  et  un  autre  composé  de 
3  chambres  pour  domestiques,  un  pavillon  et  deux  cham- 
bres d'hôtes. 

Près  le  cloître  sont  les  écuries,  les  granges  et  la  basse- 
cour  et  les  appartements  des  détenus. 

On  voit  une  belle  terrasse  de  17  pieds  de  largeur  longeant 
le  grand  dortoir  :  la  vue  s'étend  sur  le  grand  jardin,  qui 
est  en  bas  et  sur  les  campagnes  d'alentour. 

La  bibliothèque,  qui  est  près  de  la  chambre  du  P.  Gar- 
dien, ne  se  compose  que  d'une  centaine  de  volumes. 

Personnel  :  il  comprend  8  religieux,  4  détenus  et  3  do- 
mestiques. 

René-François  Courtois,  né  le  19  juin  1742,  gardien. 

François-Jacques  Salmon,  né  en  1748,  prof.  1773. 

François  Moëssard,  —        1715,   —    1737. 

Louis  Marsac,  —        1758,   —    1872. 

François  Moénard,  né  à  Pontchâteau. 

Pierre  Méchinaud,  né  en  1740,  prof,  frère  lai. 

Un  autre  frère  lai,  qui  n'est  que  novice. 

Quelques-uns  de  ces  religieux  se  trouvent  momentané- 
ment absents. 


5.  —  Paroisse  d'Ancenis. 

—  L'an  1448,  fut  commencé  à  bâtir  le  couvent  des  Cordeliers  d'Ancenis 
aux  abords  de  la  ville,  par  la  générosité  de  la  veuve  de  Jean  de  Rieux,  ba- 
ron d'Ancenis  ;  les  bulles  de  Rome,  qui  confirment  cette  nouvelle  fonda- 
tion franciscaine,  sont  signées  de  Nicolas,  et  datées  du  13  novembre. 


—  152  - 

Les  revenus  sont  inconnus,  s'il  y  en  a  toutefois. 

Véglise  est  dédiée  à  St  François,  patron  et  instituteur  de 
l'Ordre. 

Il  y  a  2  sacristies  :  Tune  pour  les  religieux  et  l'autre  pour 
les  dames  du  Tiers-Ordre.  Dans  le  chœur  se  voit  le  tombeau 
de  Jean  de  Rieux.  Une  grille  de  fer  le  sépare  de  la  nef,  où  il 
y  a  4  confessionnaux  et  un  orgue  ;  deux  chapelles  latérales 
forment  les  bras  de  l'édifice. 

Sacristie :2  ciboires,  2  calices,  1  ostensoir,  1  croix,  4  or- 
ceanx,  1  encensoir,  1  plateau,  1  bénitier,  1  lampe  et  2 
chandeliers  d'argent. 

La  maison,  qui  est  faite  pour  18  à  20  religieux,  a  comme 
dépendances  un  pressoir  et  des  écuries. 

Personnel  : 

Ant.- Alexis  Guitton,  maître  en  sacrée  théologie;  né  en 
1739,  gardien  ; 

Nicolas  Bernard,  né  en  1727,  ex-gardien,  définiteur  perpé- 
tuel ; 

Charles  Lafond,  né  en  1742,  ex-gardien,  directeur  du 
Tiers-Ordre  ; 

Alexandre  Despéroux,  né  en  1742  ; 

Charles-Louis  Hayer,  né  en  1746,  affilié  à  Laval  ; 

Louis  Loriau,  né  en  1756,  frère  lai. 


6.  —  Paroisse  de  Ruffigné. 


—  Geoffroy,  sgr.  de  Gliâteaubriant,  (onda  (XIe. siècle)  la  chapelle  de  Si- 
Martin,  dans  la  forêt  de  Teille.  Albert  de  Morlaix  rapporte  la  fondation  a 
l'année  1207,  mais  Geoffroy  mourut  19  ans  plus  tût.  Celte  chapelle  ainsi 
dolée  fut  donnée  aux  Frères  mineurs,  dans  le  commencement  du  XVe  siècle. 
Ils  y  bâtirent  un  couvent,  l'an  1428.  Les  Cordeliers  réformés  remplacent  ces 
premiers  religieux  depuis  1750.  Ce  couvent,  situé  dans  la  forêt  de  Teille, 
relève  du  territoire  de  Ruffigné. 

R.  On  vit  d'aumônes  et  de  quêtes.  On  a  droit  à  400  fagots 


—  153  — 

et  4  pieds  d'arbres  par  an,  pris  dans  la  forêt  qui  appartient 
au  prince  de  Condé. 

Église  :  elle  remonte  au  XIIIe  siècle.  Grande  et  spacieuse, 
très  bien  ornée;  mais  le  chœur  est  petit.  Le  clocher  a 
une  belle  sonnerie  de  4  cloches  et  une  horloge  à  répéti- 
tion. 

Il  y  a  un  cimetière  auprès  du  cloître. 

Sacristie  :  3  calices,  1  ciboire,  1  custode,  1  croix  proces- 
sionnelle, i  encensoir,  2  ampoules  d'argent  ;  23  chasubles 
et  dalmatiques,  6  chapes. 

Le  couvent  fut  bâti  en  1428  :  16  chambres  de  religieux  et 
d'hôtes,  et  une  chambre  double  pour  domestiques.  Il  y  a 
pressoir,  boulangerie,  jardin,  cour,  grange  et  écurie.  On 
reçoit  les  étrangers  et  l'on  donne   des  soins  aux  malades. 

Bibliothèque  :  800  à  1.000  vol. 

Personnel  : 

Louis  Pinaud,  né  en  1745,  prof.  1768,  ord.  1769,  affilié  à 
Savenay,  gardien  ; 

René- Jean  Salmon,  né  en  1740,  prof.  1753,  ord.  1759; 

N.  Tanchan,né  en  1740,  ord.  1792,  prof.  1761  ; 

Julien  Le  Boucher,  né  en  1740,  prof.  1762,  frère  lai; 

Jean-Pierre  Paillard,  né  en  1749,  prof.  1768,  frère  lai. 


IX.  -  RÉGOLLETS 


—  Le  premier  projet  d'établissement  date  de  1615;  deux  ans  après,  les 
Récollets  renouvelèrent  leurs  instances,  et,  en  1618,  ils  se  fixèrent,  sous  le 
nom  de  Pères  Douillets,  au  faubourg  de  Vertais  près  le  pont  Brize-bois.  La 
ville  leur  accorda  600  *  (]0  rentes,  à  cause  de  leur  indigence  ;  l'évêque, 
Charles  deBourgneuf,  favorisa  le  commencement  de  cette  maison. 

Véglise  a  un  maître  autel  et  4  petits;  dans  la  cour  d'en- 
trée à  l'intérieur,  il  y  en  a  un  sixième;  elle  est  meublée  de 
6  tableaux,  d'une  chaire  et  de  5  confessionnaux  ;  sa  forme 


—  154  — 

est  un   rectangle   allongé  avec  des  chapelles  latérales  à 
gauche. 

Sacristie  :  2  ostensoirs,  4  ciboires,  G  calices,  2  custodes, 
1  bénitier,  2  paires  de  burettes,  2  encensoirs,  2  reliquaires, 
3  croix,  un  bâton  de  chantre,  2  chandeliers,  2  ampoules 
aux  saintes  huiles,  le  tout  d'argent;  1  soleil,  1  ostensoir  de 
vermeil,  4  calices  dorés  ;  —  22  chasubles  et  dalmatiques,  7 
chapes,  50  aubes,  24  surplis,  17  chasubles  simples ,  19  chapes 
noires. 

Les  h  aliments  forment  deux  carrés  dont  l'un  figurant  avec 
l'église  fait  le  cloître.  Salles  communes,  cellules,  10  cham- 
bres d'hôtes,  infirmerie  de  4  lits.  On  regarde  comme 
magnifique  la  plantation  d'arbres,  qui  longe  le  cours 
d'eau,  et  comme  excellents  les  jardins  qui  entourent  la 
maison. 

Bibliothèque  :  1.500  volumes. 

Personnel  :  PP. 

René-Laurent  Baudoin,  Sauveur  de  Rennes,  né  en  1743, 
prof.  1761,  gardien  ;  René  Gilbert,  René  de  Ste -Croix 
d'Angers,  né  en  1725,  prof.  1742,  définiteur  ;  Armel  Poues- 
sel,  Hermel  de  Rennes,  né  en  1722,  prof.  1740,  ex-provin- 
cial ;  Valérien  Gicquel,  de  Fougères,  né  en  1724,  prof.,  vi- 
caire ;  Michel  Melay,  Juvénal  d'Avranches,  né  en  1731, 
prof.  1753,  maître  des  novices  ;  Joseph  Bouchel,  Placide  de 
Ste-Croix  d'Angers,  né  en  1738,  prof.  1755,  ex-gardien; 
Jean-Pierre  Bolteau,  Rogatien  de  St-Sébastien-d'Aigne, 
né  en  1743,  prof.  17G3  ;  Julien  Allory.,  Jean-Baptiste  de 
Rennes,  né  en  1754,  prof.  ;  Jean-Gabriel  Sauvé,  André 
d'Avranches,  né  en  1758,  prof.  1767. 

FF. 

René  Philippon,  Bonaventure  de  Doué,  né  en  1737,  prof. 
1757;  Jean  Bigeard,  Pascal  du  Fuilet,  1729,  prof.  1757; 
Claude  Bonnet,  Dominique  de  Fontevrault,  né  en  1756, 
prof.  1780  ;  Pierre  Boisson,  René  de  St-Michel  du  Tertre, 
né  en  1761,  prof.  1784  ;  Pierre  Aubin,  Aubin  du  Mans,  né 


-  155  — 

en  1755,  prof.  1787;  Pierre  Gâté,  Charles  d'Angers,  né  en 
1750,  prof,  1779,  tertiaire. 

X.  —  CAPUCINS 

1.  —  Paroisse  de  St-Nicolas  de  Nantes. 

—  Les  religieux  franciscains,  dits  Capucins,  vinrent  à  Nantes  en  1593  ; 
ils  se  logèrent  d'abord  au  faubourg  du  Marchix,  dans  le  local  qui  fut 
acheté  plus  tard  par  les  Cordelières  de  Ste-Elisabeth  ;  c'est  le  duc  de 
Mercœur,  qui  leur  avait  donné  ce  premier  établissement.  Le  Souverain 
Pontife  leur  ayant  accordé  un  bref  spécial,  on  se  passa  du  consentement 
du  Chapitre  de  la  ville.  Le  7  novembre  1629,  ils  prirent  possession  de 
leur  couvent  de  la  Fosse,  qui  ne  fut  achevé  que  l'aunée  suivante.  Les 
religieux  qui  l'habitent  sont  dits  Grands  Capucins,  par  opposition  a  ceux 
qui  occupent  le  petit  couvent  de  l'Ermitage  en  Chantenay. 

Église  :  vaste  et  très  belle,  consacrée  par  Mgr  de  Cos- 
péan,20déc.  1631.  Il  y  a  trois  parties  distinctes  :  le  choeur, 
la  nef  et  le  portique  réservé  aux  fidèles.  Le  cloître  y  est 
adossé.  L'entrée  fait  face  à  la  rue  des  Capucins. 

Mobilier  :  8  calices  et  9  patènes,  1  soleil,  2  ciboires,  1 
custode  d'argent  ;  20  aubes  etc.;  —  1  cloche. 

Il  y  a  une  maison  d'études. 

Personnel  :  PP. 

Jean-Sylvestre  Le  Quénec,  Joseph  de  Vannes,  né  en  1744, 
prof.  1764,  gardien  ;  Toussaint-Georges  Richard,  Paul- 
Marie  de  Rennes,  né  en  1731,  prof.  1750,  vicaire  ;  Pierre- 
René  Baudry,  Ambroise  de  St-Brieuc,  né  en  1717,  prof. 
1734,  prédicateur  ;  Vincent  Richard,  Pacifique  de  Rennes, 
né  en  1730,  prof.  1740  ;  Michel-François  Herpe,  Dosithée  de 
Guémené,  né  en  1733,  prof.  1764  ;  Jacques-François  Genu, 
Jean-François  de  Guingamp,  né  en  1749,  prof.  1773  ;  Noël- 
Yves  Fraboulet,  Séverin  de  Corlay,  né  en  1749,  prof.  1779  ; 
Jean-Pierre  Blandin,  Marc  de  Janzé,  né  en  1756,  prof.  1776, 
professeur  de  théol.;   Jean-Marie    Quennec,   Cyprien    de 


—  15G  — 

Vannes,  né  on  1763,  prof.  1785,  étudiant;  Mathurin  Preux, 
Mathurin  de  St-Brieuc,  né  en  17Gl,prof.  17S0;  Jean  Le 
Lagadec,  Corentin  d'Audierne,  né  en  1705,  prof.  1780; 
François-Jérôme  Tournois,  Romain  de  Dinan,  né  en  17G5, 
prof.  1780  ;  Guillaume-Marie  Gajan,  Casimir  de  Qnimper, 
né  en  17G3,  prof.  1784,  étudiant. 

FF. 

René-Joseph  Legrand,  Hyacinthe  de  Redon,  né  en  1725, 
prof.  1748;  Pierre  Stéven,  Didace  de  Vannes,  né  en 
1725,  prof.  1750  ;  Sébastien  Artaud,  Edouard  de  Nantes,  né 
en  1734,  prof.  1755  ;  Louis  Roux,  Luc  de  Redon,  né  en 
1740,  prof.  1760  ;  Louis  Pommieré,  Louis  de  Quintin,  né  en 
1737,  prof.  1763  ;  Guillaume  Hydrio,  Modeste  de  St-Brieuc, 
né  en  1740,  prof.  1765;  Charles  Béranger,  François  de 
Nantes,  né  en  1736,  prof.  1788,  tertiaire. 

2.  —  A  l'Ermitage,  paroisse  de  Chantenay. 

—  Les  Capucins  du  grand  couvent  commencèrent  dès  1622  leur  hospice 
de  V Ermitage  dans  la  banlieue  de  la  ville,  sur  le  coteau  de  Misery,  terrain 
que  leur  avait  concédé  le  seigneur  de  ia  Hautièrc  :  il  devait  contenir  12 
religieux.  Bâti  sans  autorisation  royale,  il  était  condamné  a  être  démoli, 
depuis  le  décret  de  1668  ;  mais  comme  on  avait  servi  à  Louis  XIV  de 
bonnes  raisons,  et  que  lui-même  avait  été  reçu  par  les  religieux  de  l'Er- 
mitage, l'hospice  fat  heureusement  épargné. 

Ce  couvent,  appelé  des  Petits  Capucins,  est  assis  sur  un  rocher  domi- 
nant la  Loire,  au  bout  de  la  Fosse.  Des  fenêtres,  des  terrasses  et  des  jar- 
dins superposés,  la  vue  s'étend  magnifique  au  loin. 

L'église,  quoique  petite,  est  fort  belle  et  bien  ornée  ; 
elle  est  régulièrement  orientée  ;  elle  est  dédiée  à 
St  François.  11  y  a  une  chapelle  latérale  en  l'honneur  de 
St  Antoine.  Un  calvaire  orne  l'entrée  de  la  place  qui  sert 
d'abord  à  la  maison. 

Mobilier  sacré  :  1  calice,  1  soleil,  1  ciboire,  1  croix  d'ar- 
gent ;  —  4  ornements  complets  avec  chapes,  1  chape  noire  ; 
—  1  horloge  et  des  cloches. 


—  157  — 

Bibliothèque  :  1.5G4  vol. 

Personnel  :  PP. 

Mathurin  Foulon,  Eusèbede  Pairapont,  né  en  1743,  prof. 
1746,  gardien;  Guillaume  Le  Méhauté,  Pacifique  de  Cor- 
lay,  né  en  1747,  définiteur;  René  Mouillard,  Dosithée  de 
Lamballe,  né  en  1746,  prof.  1766,  vicaire;  Jos.-Céleste-Hya- 
cinthe  de  la  Vicomte -Cauchard,  François-Marie  de  St- 
Malo,  né  en  1718,  prof.  ;  Simon-Joseph  Rioche,  François  de 
Bécherel,  né  en  1774,  prof.  1778. 

FF. 

Michel  Chanquier,  Raphaël  de  Morlaix,  né  en  1758,  prof.  ; 
François-Xavier  Guignard,  Albert  des  Sables,  né  en  1738, 
prof.  1788. 

3.  —  Paroisse  du  Croisic. 

—  Lacroix  des  Capucins  fut  plantée  au  Croisic  le  19  août  1618,  et,  le  29 
juillet  de  l'année  suivante,  le  marquis  d'Assérac  posa  la  première  pierre  du 
couvent.  Le  chapitre  de  Guérande  avait  consenti  à  l'établissement  des 
religieux. 

On  n'a  pu  relever  les  revenus  et  les  charges,  l'inventaire 
de  la  maison  faisant  défaut. 

L'église,  fondée  en  1618,  est  dédiée  à  St  Antoine  de 
Padoue. 

Personnel  : 

François-Maurice  Patin,  Ferdinand  de  Rennes,  né  en 
1749,  prof.  1770,  gardien  ;  Jean  Auffray,  Joseph  de  St- 
Brieuc,  né  en  1753,  prof.  1776  ;  Grégoire  Vénard,  Fortu- 
né d'Ancenis,  né  en  1762,  prof.  1783  ;  François  Lion,  Ma- 
thurin de  Lude,  né  en  1759,  prof.  1786,  frère  lai. 

4.  —  Paroisse  de  Ste-Croix  de  Machegoul. 

—  L'établissement  remonte  a  l'année  1579. 

V église  a  une  chapelle  qui  donne  dans  le  chœur  ;  elle  a 
un  clocher  et  une  horloge. 


-   158  - 

Sacristie  :  3  calices  d'argent,  etc..  ;  —  12  ornements,  3 
chapes,  etc.. 

La  maison  comprend  24  cellules  pour  les  religieux  et  2 
pour  leurs  domestiques,  2  réfectoires  très  vastes  ornés  de 
7  tableaux,  1  chauffoir,  1  bibliothèque,  1  jardin  et  verger. 
Le  cloître  est  très  beau  ;  le  parloir  donne  sur  la  cour,  de- 
vant l'église.  L'enclos  couvre  3  arpents  de  terrain. 

Bibliothèque  :  182  vol.  in-f°;  134  in-4°  ;  130  in-12. 

Personnel  : 

J.-B.  Leozeau,  Bernard  de  Châteauneuf,  né  en  1725, 
prof,  gardien  ;  Pierre  Provost,  Julien  de  Quintin,  né  en 
1748,  prof.  1770,  vicaire  ;  Jacques-Louis  Bezard,  Alexis  de 
Marnes,  né  en  1742,  prof.  1782;  Fidèle  Burguen,  Marc 
d'Auray,  né  en  1754,  prof.  1782;  Louis-Pierre  Saudreux, 
Laurent  de  Pordic,  né  en  1764,  prof.  1785,  frère  lai. 

XI.  -  MINIMES 

Paroisse  de  St-Clément  de  Nantes. 

—  Les  frères  mendiants,  appelés  Bonshommes  et  ensuite  Minimes,  que 
la  Reine  Anne  de  Bretagne  venait  de  gratifier  d'une  maison,  arrivèrent  a 
Nantes  et  habitèrent  d'abord  sur  la  Fosse  le  local  que  devaient  occuper 
plus  tard  les  Capucins.  Le  27  juillet  1589,  ils  entrèrent  en  possession  de  la 
Chapelle  de  St- Antoine  de  Padoue  et  des  bâtiments  et  jardins  que  leur  avaient 
octroyés,  à  Richebourg,  François  II,  duc  de  Bretagne,  et  Charles  VII  de 
France,  avec  la  permission  toutefois  de  Philippe  de  Bec,  év.  de  Nantes. 
Henri  IV,  en  1598,  confirma  la  fondation  avec  la  défense  expresse  de  men- 
dier. 

R.  Rentes  foncières  et  constituées,  salines,  maisons  de 
ville  et  de  campagne  ;  total  .  6.951  tt. 

Cli.  1.358  «. 

Dettes  actives,  2.586  tt;  dettes  passives,  4.475  «. 

L'église,  qui  remplaça  la  vieille  chapelle  ducale,  fut 
achevée  en  1635.  Très  belle,  style  gothique  ;  3  nefs  ;  riches 
verrières  au  chevet. 


—  159  — 

Sacristie.  Reliques  :  bustes  de  bois  doré  de  St  Vincent 
et  de  St  François  de  Paule  ;  une  grande  figure  de  vierge  en 
bois  doré  ;  une  belle  niche  de  même  matière,  au  fond  de 
laquelle  il  y  a  une  gloire  pour  l'exposition;  un  reliquaire 
de  St-François  de  Paule,  en  argent.  —  Ornements  :  28  cha- 
subles, 14  chapes,  2  tapis,  1  dais  brodé  argent  et  soie,  25 
aubes,  23  surplis.  —  Vases  sacrés  :  1  calice,  1  soleil  de 
vermeil,  2  calices,  1  ciboire,  1  encensoir,  1  bénitier  et  son 
goupillon,  1  croix  processionnelle,  2  chandeliers,  ampoules 
et  burettes  d'argent. 

Le  couvent,  dû.  aux  largesses  de  M.  de  Mercœur,  fut  ter- 
miné en  1593.  Les  dépendances,  jardins  et  cour,  sont  de  2 
journaux.  Les  religieux  ont  une  maison  de  campagne  à 
la  Roche. 

Bibliothèque  :  526  vol.  in-f°  ;  136  in-4°  ;  1306  in-8°  ;  184 
in-12. 

Personnel  : 

Philippe  Chérière,  né  en  1723,  prof.  1739,  correcteur  de- 
puis 1789;  Jean-Charles  Saint-Blancard,  né  en  1738,vprof. 
1755,  ex-provincial;  Joseph  Salogne,  né  en  1740,  prof. 
1757,  assistant  du  provincial  ;  René-Marie  Alix,  né  en 
1755,  prof.  1774,  sacriste  et  vocal;  René-Alexandre  Bou- 
rot,  né  en  1754,  prof.  1776,  vocal;  Jean-Baptiste  Coè'ffe- 
teau,  né  en  1754,  prof.  1779. 

XII  -  FRÈRES  DES  ÉCOLES  CHRÉTIENNES. 

Paroisse  St-Similien  de  Nantes. 

-  Un  arrêté  du  conseil  fixe  leur  établissement,  dans  les  fossés  Mer- 
cœur  (1743),  pour  faire  les  écoles  gratuites  aux  enfants  da  peuple  et  tenir 
un  pensionnat.  Ils  sont  de  la  congrégation  du  V.  de  la  Salle,  dits  Frères 
ignorantins. 

La  maison  est  située  entre  les  enclos  du  Calvaire  et  de 
Ste- Elisabeth;  c'est  un  long  bâtiment  avec   une  cour  au 


.._  160  - 

devant,  donnant  sur  la  rue  Mercœur.  Elle  comprend  17 
pièces  :  2  parloirs,  1  salle  de  musique,  2  classes  pour  les 
pensionnaires,  2  autres  pour  les  externes,  8  chambres  de 
religieux,  5  dortoirs  de  21,  19,  17,  4  lits  et  de  plusieurs 
couchettes,  l'infirmerie.  Il  y  a  en  outre  un  préau,  1  basse  - 
cour  et  un  jardin. 

La  chapelle,  dédiée  au  Verbe  incarné,  est  située  auN.  ;  le 
mobilier  est  estimé  600  tt,  sans  compter  un  calice  d'argent. 
Un  vicaire  de  St-Similieny  vient  célébrer  chaque  matin. 

L'école  de  charité  compte  230  enfants;  le  pensionnat,  70; 
les  frères  sont  au  nombre  de  9,  dont  6  professeurs. 

Personnel  : 

Jean-Antoine  Barbin,  dit  en  religion  Josaphat,  directeur; 
Martin  Lelarge,  sous-directeur;  Philippe-Joseph  Colin, 
professeur  et  surveillant  des  dortoirs;  Jean-Baptiste-Joseph 
Wallard,  id.  ;  Pierre  Fresnoy,  id.;  Philippe  Brisard,  profes- 
seur des  écoles  de  charité;  Louis-Auguste  Dolegez,  id; 
Claude-François  Lartier,  id.  ;  Louis-Joseph  Bocquillon, 
attaché  au  service  de  la  maison. 

XIII.  -  JÉSUITES 

Paroisse  St-Vincent  de  Nantes. 

—  Le  25  sept.  1C61,  avec  la  faveur  du  roi  en  passage  à  Nantes, les  PP. 
de  la  Compagnie  de  Jésus  obtinrent  de  s'établir  dans  un  des  faubourgs  de  la 
Ville  :  ils  ne  profitèrent  de  cette  permission  que  deux  ans  après,  les  négo- 
ciations avec  l'évêché  et  la  commune  ayant  été  très  longues.  Enfin  ils 
louèrent  une  résidence  près  le  Don-Pasteur,  pour  desservir  un  hospice. 
Quelques  années  plus  tard  (1671),  ils  achetèrent  l'hôtel  de  Briord,  malgré 
le  recteur  et  le  général  de  St-Vincent,  mais  dûment  autorisés  par  l'évêque, 
afin  d'y  fonder  une  Retraite  pour  les]  hommes  :  le  P.  Nicolas  d'Harrouis 
en  fut  le  premier  supérieur. 

Depuis  1772,  époque  à  laquelle  le  trop  fameux  de  La 
Chalotais  expulsa  du  royaume  les  membres  de  la  sainte  et 
pieuse  Compagnie,  ceux  de  Nantes  ont  quitté  leur  local. 


—  161  — 

En  1777,  M.  de  Mélient  ayant  reçu  des  lettres  patentes 
pour  faire  desservir  cette  maison  si  utile,  par  des  prêtres 
séculiers  du  choix  de  l'Ordinaire,  le  Présidial  de  Nantes 

•  * 

s'opposa  à  ce  rétablissement. 

Les  bâtiments  sont  vastes  et  bien  distribués  ;  l'enclos 
s'étend  entre  les  rues  de  Briord  et  du  Moulin. 

Il  y  a  deux  chapelles,  dont  l'une  à  l'intérieur  et  l'autre 
sur  la  rue. 


1881  11 


COMMUNAUTÉS  DE  FEMMES 


I.  -  CLARISSES 


Paroisse  de  St-Vincent  de  Nantes. 


La  première  maison  de  Bretagne,  où  s'introduisit  la  réforme  de  Ste  Co- 
lette, fut  l'abbaye  des  Stes-Claires,  a  Nantes.  Le  pape  Calixte  III  permit  au 
duc  François  et  a  son  épouse,  la  bienheureuse  Françoise  d'Amboise  (1455), 
d'établir  un  couvent  de  18  religieuses  qui  auraient  pour  confesseurs  et  mi- 
nistres 6  pères  franciscains,  dits  Récollets.  Les  pauvres  dames  arrivèrent 
dans  notre  bonne  Ville  avant  l'achèvement  du  monastère ■-,  aussi  demeu- 
rèrent-elles provisoirement  au  Château,  chez  leur  généreuse  fondatrice, 
jusqu'à  ce  qu'elles  fussent  mises  en  possession  de  l'hôtel  de  Rorhefort,  5 
août  1457. 

Elles  vivent  d'aumônes  et  n'ont  point  de  revenus. 

Chapelle  :  3  confessionnaux,  1  chaire  et  trois  tableaux 
ornent  l'intérieur;  1  soleil  de  vermeil,  3  calices,  2  ciboires, 
1  encensoir,  1  croix  d'argent  ;  —  27  chasubles,  6  chapes, 
60  aubes. 

L&maison  contient  32  cellules;  elle  est  située  à  l'angle 
de  la  rue  des  Saintes-Glaires  et  de  celle  de  St^ Vincent,  sur  la 
paroisse  de  ce  dernier  nom.  Un  petit  jardin  y  est  attenant. 

Bibliothèque  :  100  vol.  de  piété. 

Personnel.  Mères  de  chœur  : 


—  Î64  — 

Françoise  Cosson,  Adélaïde  de  St-François,  née  à  St-Sa- 
turnin  1735,  prof.  1754,  élue  abbesse  en  1788;  Olive-Fran- 
çoise  Couenier,  Claude   de  St-Tiburce,  née  à  Laval   1730, 
prof.  1751,  vicaire;  Thérèse  Charrier,  St-Jean  de  la  Croix, 
née  17G0,  discrète;  Catherine  Constans,  Elisabeth  de  Ste- 
Célestine,  née  1713  ;  Claude  Goutelle,  Agathe  de  St-Edme, 
née  au  Fougeray,  1703,  prof.  1744,  discrète;  Jeanne-Rose 
Cotelle,  Françoise  de  St-Germain,  née  à  Rennes,  prof.  1752; 
Catherine  Durand,  Agnès  de  St  -Sixte,  née  à  la  Mothe-Achard, 
prof.  1754;  Jeanne-Marie  Mellaerts,  Gertrude  de  Ste-Claire, 
née  à  Malines,  prof.  1755  ;  Anastasie-Sara  Ellis,  Elisabeth 
de  St -Louis,  née  à  St-Nicolas,  prof.  1757;  Françoise  Monsail- 
lier,  Rosalie  de  St-Barnabé,  née  à  Laval,  prof.  1761  ;  Marie- 
Elisabeth  Mercier,  Marie  de  Jésus,  née  à  l'Ile-Dieu,  prof. 
1767  ;  Marie-Françoise  Sacré,  Thérèse  de  St-Antoine,  née  à 
Liège,  prof.  1770;  Rose-Renée  Drouet,  Joseph  de  St-Ray- 
mond,née  à  Rennes,  prof.  1773;  Françoise  Duvau,  Séraphine 
de  Jésus,  née  à  Ligné,  prof.  1776  ;  Louise  Rigaudoau,  Claire 
de   St-François,  née  à  Tiffauges,  prof.   1776;  Renée-Olive 
Guichard,  Colette  de  Ste-Rosalie,  née  au  Pouliguen,  prof. 
1777;  Monique-Désirée  Arondel,  Louise  de  St-Victor,  née  à 
St-Saturnin,  prof.  1779  ;  Anne-Laurence  de  Vay,  Marie  des 
Anges,  née  à  St-Laurent,  prof.  1782;  Marguerite  Busson- 
nière,  Thérèse  de  St-Mathurin,  née  à  Angers,  prof.  1786  ; 
Marie-Françoise  Bertho,  Marie  de  Jésus,  née  à  St-Nazaire, 
prof.  1786  ;  Françoise  Pinard  de  Giraubeaux,  Scholastique 
de  St-Antoine;   Thérèse-Pétronille  Vermarien,  Rose  des 
Chérubins;  Anna  Beelinks,  Catherine  de  Jésus,  née  à  An- 
vers, entrée  à  Nantes  1785;  Marie-Thérèse  de  Wité,  Thérèse 
de  Jésus,  née  et  prof,  à  Anvers,  entrée  à  Nantes  1785  ;  Isabelle 
Vanderlinden,  Isabelle  de  Jésus,  née  et  prof,   à  Malines, 
entrée   à  Nantes  1786;   Marie  Vandamme,  Angélique   de 
St-Antoine,   née    à  Gand,  entrée  à  Nantes  1787  ;  Anne- 
Catherine  Van-Dick,  Christine  de  Jésus,  née  à  Rotterdam, 
entrée  à   Nantes   1789;   Marie-Anne   Mainguy,   Dorothée 


—  165  — 

de  St-Jean-Baptiste,  postulante  ;  Louise  Gicquel-Rous- 
sière,  Béatrix,  id. 

Sœurs  externes  :  Sophie- Adélaïde  Gaucher,  Augustine, 
née  à  Séez,  prof.  1786;  Renée-Marie  Recour,  née  à  Château- 
neuf,  prof.  1775;  Anne-Perrine  Langevin  ;  Marie-Made- 
leine Galipaud  ;  Anne -Marie  Buel  ;  Catherine  Druneau. 

PP.  Confesseurs  et  ministres  :  Louis  Dodet,  Archange, 
aumônier,  1779;  Jean-Baptiste  Ménière,  Albert,  prédica- 
teur, 1787;  Ànt. -Nicolas  Lionnet,  Basile,  confesseur, 
1764  ;  Jean-Philippe  Debrest,  Nicolas,  frère  lai. 

II.  —  CARMÉLITES  DÉCHAUSSÉES 

Paroisse  de  St-Denis  de  Nantes. 

—  Les  religieuses  de  la  Réforme  thérésienne,  ayant  obtenu  des  lettres 
d'autorisation  pour  s'établira  Nantes,  dans  la  rue  St-Gildas,  8  février  1618, 
demandèrent  la  concession  de  la  Chapelle  aux  paroissiens  de  St-Denis,  par 
l'intervention  de  la  reine-mère  :  on  la  leur  accorda,  pourvu  qu'elles  s'en- 
gageassent à  construire  une  nouvelle  chapelle  de  St-Gildas,  ouverte  au 
public.  La  fondatrice  de  cette  maison  est  Mme  du  Breil  de  Champcartier. 
C'est- le  22  avril  1619  que  les  Carmélites  prirent  possession  de  l'hôtel  de  la 
Bretont)ière  •,  les  premières  arrivées  étaient  descendues  provisoirement  au 
Sanitat,  sur  la  Fosse. 

R.  8.171  *.  Ch.  1.597  *.  Dettes  à  recouvrer,  2.973  *. 

Église  vaste  et  bien  éclairée  par  le  chevet  ;  belle  façade 
sur  la  rue.  On  y  dessert  720  messes  de  fondations.  La  son 
nerie  est  de  3  cloches. 

Sacristie  :  6  calices,  4  ciboires,  2  ostensoirs,  3  paires 
de  burettes,  1  croix  processionnelle,  1  petite  croix,  Hampe, 
2  encensoirs,  8  chandeliers,  2  reliquaires  d'argent;  —  24 
ornements  complets,  24  chasubles  communes,  4  douzaines 
d'aubes. 

Les  bâtiments  claustraux  donnent  dans  la  rue  du  nom,  à 
droite  de  l'église,  les  jardins  s'étendent  derrière.  La  mai- 
son contient  30  cellules,  qui  sont  meublées  de  cette  manière  : 


—  166  — 

paillasse  sur  3  planches  et  2  tréteaux,  1  escabeau,  1  petit 
banc,  3  images  de  papier,  et  1  lampe  de  fer-blanc.  Le  réfec- 
toire est  commun  :  il  n'y  a  point  d'argenterie,  chaque  re- 
ligieuse se  servant  d'un  couvert  en  buis. 

La  bibliothèque  est  peu  volumineuse. 

Personnel.  Mères  de  chœur  : 

Marguerite-Julienne  Potier  de  la  Houssaye,  Marie  de  Jé- 
sus, née  à  St-Malo,  1737,  supérieure;  Françoise-Vincente 
Boisquet,  Aimée  de  Jésus,  née  à  Nantes,  1737,  sous-prieure  ; 
Marguerite-Paule  de  Kervégan,  Victoire  du  Cœur  de  Jésus 
née  à  Nantes,  1738  ;  Catherine  Coicaud,  Catherine  de  la 
Résurrection,  née  à  Nantes,  1776  ;  Eulalie  du  Colombier, 
Eulalie  de  l'Assomption,  née  à  Nantes,  1714;  Louise- 
Claude  Le  R.ay  du  Fumet,  Agathe  du  St- Sacrement,  née  à 
Nantes,  1720  ;  Marguerite-Elisabeth  Froust,  Suzanne  de 
l'Incarnation,  née  à  Nantes,  1728  ;  Marie-Madeleine  Do- 
neau,  Madeleine  de  Jésus-Médiateur,  née  à  Bourgneuf, 
1730  ;  Marie-Françoise  Proust,  Thérèse  de  Jésus,  née 
à  Nantes,  1739  ;  Anne-Marie  Frémont  du  Bouffay,  Anne 
de  Jésus,  née  à  Nantes,  1747;  Pierre-Marie  de  Govello, 
Rosalie  de  Jésus,  née  à  Nantes,  1739  ;  Jeanne-Perrine 
Sagory,  Pélagie  du  Cœur  de  Jésus,  née  à  Nantes,  1741  ; 
Marie-Catherine  de  Rappet,  Constance  du  Carmel, 
née  à  Nantes,  1742  ;  Marie-Jeanne  de  la  Cassaigne , 
Thérèse -Joséphine,  née  en  Amérique,  1744  ;  Jeanne- 
Thérèse  de  la  Barre,  Thérèse  des  Séraphins,  née  à 
Nantes,  1742  ;  Anne-Françoise  Thériot,  Victime  de 
Jésus,  née  à  Montaigu,  1750  ;  Marie-Gabrielle  Mellet, 
Thérèse  de  St-Augustin,  née  au  Loroux,  1745  ;  Margue- 
rite-Thérèse Sagory,  Marie  de  St-Cyr,  née  à  Nantes, 
1750;  Jeanne- Anne  de  Trévélec,  du  Cœur  de  Jésus,  née  à 
Nantes,  1758  ;  Sophie-Louise  Gorgette,  de  l'Enfant  Jésus, 
née  à  Bouguenais,  1762  ;  Louise-Aimée  Goéau,  Marie  de 
Jésus,  née  à  la  Benaste,  1753;  Marie-Thérèse  Balais,  Julie 
de  St-Honoré,  née  à  Nantes,  1767. 


—  167  — 

Sœurs  converses  : 

Catherine  Béziaud,  de  Jésus,  née  à  Légé,  1740  ;  Jeanne 
Marie  Pavageaud,  des  Anges,  née  à   Nantes,  1741  ;  Marie- 
Françoise   Pédron,   de  St-Louis,  née   à  St-Brieuc,  1760  ; 
Jeanne-Modeste  Gennevois,  de  St-Malo,  née  à  St-Kazaire, 
1764. 

Sœurs  tourières  : 

Elisabeth  Blanchard,  de  Nantes,  attachée  à  la  maison  de- 
puis 20  ans  ;  Perrine  Blanchard,  de  Nantes,  attachée  à  la 
maison  depuis  20  ans. 

Novices  de  chœur  :  Marie  et  Rose  de  Charpentier. 

Postulante  de  chœur  :  Claire  Balais. 

Postulante  converse  :  Cécile  Benoist. 

Aumônier  :  M.  Bleuneven. 

Il  y  a  dans  la  maison  un  jardinier  et  un  clerc. 

III.  -  CARMÉLITES  RÉFORMÉES 

Paroisse  de  Bouguenais,  aux  Couets. 

—  Vers  le  commencement  du  XIIe  siècle  fut  fondé  aux  Couëts  le  couvent 
annexe  de  l'abbaye  de  St-Sulpice  de  Rennes  ^  le  pape  Galixte  III,  dans  une 
de  ses  bulles,  en  fait  mention  (1119).  Ce  prieuré  était  alors  occupé  par  des 
religieux  de  l'un  et  l'autre  sexe,  comme  à  Buzay,  et  selon  l'institution  de 
Robert  d'Arbrissel.  Des  abus  étant  venus  altérer  la  discipline,  le  duc  Fran- 
çois II,  exécuteur  des  volontés  de  Sixte  IV,  plaça  aux  Couëts  la  bonne  et 
sainte  duchesse  Françoise  d'Amboise,  faite  Carmélite  du  Bon-Don.  La 
colonie  vint  de  Liège.  D'abord  sous  la  juridiction  des  PP.  Carmes  de  l'an- 
cienne Observance,  ces  pieuses  filles  passèrent  sous  celle  de  l'Ordinaire, 
qui  leur  donna  de  nouvelles  constitutions,  1556. 

R.  40.496  «,  en  métairies,  maisons,  terres,  prairies,  rede- 
vances et  rentes  constituées,  4  échelles  d1eau,  2  moulins, 
droit  de  bac. 

Ch.  25.971  *. 

Eglise:  3  calices,  1  ostensoir,  1  soleil,  2  ciboires,  6  chan- 
deliers, 1  croix,  1  paire  de  burettes,  1  bénitier,  1  lampe,  1 


—  168   - 

encensoir,  d'argent  ;  —  24  ornements,  6  chapes,  36  aubes, 
24 surplis,  24  amicts,  200  purificatoires; —  1  orgue,  1  cloche, 
baptisée  sous  le  nom  de  Françoise,  13  déc.  1754. 

Tombeau  de  la  bienheureuse  Duchesse,  en  grande  véné- 
ration. 

La  maison  a  été  reconstruite  en  1658.  Elle  comprend  33 
cellules,  1  infirmerie  de  9  lits,  un  pensionnat  de  6  chambres 
et  toutes  les  autres  pièces  nécessaires  à  la  communauté, 
aux  gens  de  service  et  à  la  basse-cour. 

Personnel  :  33  religieuses,  13  filles  domestiques,  6  gar- 
çons, 1  homme  d'affaires,  1  organiste  et  2  aumôniers. 

Les  dernières  élections  aux  charges  ont  été  faites  le  3 
juin  1788,  en  présence  de  M.  l'abbé  de  Boissieu. 

Jeanne  Langlois  delà  Rouxière,  née  en  1723,  prof.  1743, 
prieure  ;  Perrine  Grangier  de  la  Ferrière ,  prof.  1759, 
sous-prieure  ;  Marie-Anne  Bourdin  du  Branday,  prof.  1750, 
discrète;  Anne  Galot  deLierne,  prof.  1738,  id.;  Françoise 
Paris  de  Soulanges,  prof.  1740,  id.;  Marie-Françoise  Fildié, 
prof.,  1771,  id.;  Marie  deBiré,  prof.  1755,  procureuse ;  Péla- 
gie Vanderchen,  prof.  1744,  dépositaire  ;  Julie-Anne  Lemai- 
gnan,  prof.  1778,  sacriste  ;  Marguerite  Joullin,  Vve  de 
M.  Durbé,  née  en  1771,  maîtresse  des  novices;  Julienne 
Moisson  du  Pied,  prof.  1786,  dépensière;  Victoire  de  la  Ville, 
prof.  1777,  portière  ;  Rose  Goéau  du  Vigneau,  prof.  1778,  id.; 
Claire  du  Tréjet-Daniel,  prof.  1780,  aide  de  porte  ;  Thérèse 
de  Carheil,  prof.  1750,  infirmière;  Renée  de  la  Ramée,  prof. 
1781,  pharmacienne  ;  Anne-Jacquette  de  Berthou,  prof.  1783, 
lingère;  Jeanne  Guoguet  de  la  Salmonière,  prof.  1781,  ro- 
bière;  Thérèse  Hamon  de  la  Thébaudière,  prof.  1781,  réfec- 
torière  ;  Glotilde  Reliquet,  prof.  1783,  cavière  ;  Catherine 
Merger,  prof.  1750,  grainetière  ;  Renée  d'Anguy,  prof.  1746  ; 
Simone  Bizeul,  prof.  1750  ;  Cécile  Busson,  prof.  1751  ;  Marie 
Simon  de  Lessard,  prof.  1762  ;  Marie-Louise  de  la  Touche- 
Limousinière,  prof.   1766. 

Sœurs  converses  : 


—  169  — 

Marie  Bruneau,  prof.  1755;  Angélique  Lautier,  prof. 
1758;  Perrine  Lautier,  prof  1763;  Marie  Peneau,  prof. 
1786. 

Novice  :  Thérèse  Cusinier,  âgée  de  23  ans. 

Postulante  :  Marie  Ripoche,  âgée  de  27  ans  ;  Michelle 
Chargé,  âgée  de  27  ans. 

Aumôniers  :  Pierre-Laurent  Rivalan,  de  S.-Molf,  ord. 
1784;  Pierre-François  Métayer,  du  Fougeray. 

IV.  —  FONTEVRÏSTES 

1.  —  Paroisse  de  Vallet,  a  la  Regrippière 

—  L'Ordre  de  Fontevrault,  institué  au  XIIe  siècle,  par  un  Breton  célèbre, 
le  vénérable  Robert  d'Arbrissel,  n'a  que  deux  maisons  dans  la  province, 
l'une  et  l'autre  situées  dans  notre  diocèse  et  occupées  par  des  religieuses. 
Le  Prieuré  de  la  Regrippière,  en  Vallet,  fut  fondé  peu  après  la  mort  de 
Robert  et  réformé  en  1630  par  le  pieux  M.  Olier,  instituteur  de  la  Compa- 
gnie de  St-Sulpice. 

R.  Maisons  et  dépendances,  20  journaux;  terres  labou- 
rables, prés  et  prairies;  dîmes  au  treizième;  rentes  sur 
plusieurs  paroisses,  et  quelques  métairies  affermées. 

La  prieure  est  dame  du  lieu,  avec  droit  de  justice,  mou- 
lins à  eau  et  à  vent;  l'auditoire  et  les  prisons  sont  au  bourg 
de  la  Regrippière. 

Eglise  :  3  calices,  2  ciboires,  1  soleil,  2  encensoirs,  1  bé- 
nitier, 1  lampe,  1  croix  processionnelle,  6  chandeliers,  1 
bassin  et  ses  2  orceaux;  —  9  chasubles,  4  dalmatiques,  3 
chapes,  28  aubes;  —  4  cloches,  1  jeu  d'orgues. 

La  maison  contient  une  grande  infirmerie,  une  petite 
infirmerie,  une  chambre  de  gardes-malades,  4  chambres  de 
pensionnaires,  3  lits  pour  le  noviciat  et  une  cellule  pour 
chaque  professe,  les  appartements  des  aumôniers,  une  basse- 
cour  et  des  étables. 

Bibliothèque  :  420  vol. 


-  170  — 

Personnel.  Dames  de  choeur  : 

Madeleine  Bellestre,  prof.  1768,  prieure;  Marguerite  du 
Rondier,  prof.  1755,  sous-prieure;  N.  Moisset,  prof.  1753, 
cellérière  ;  Marie  Brochard  de  Souche,  prof.  1769,  déposi- 
taire; Julienne  Levrault,  prof.  1753,  portière;  Louise-Re- 
née  Thébaud,  prof.  1782,  boursière;  Judith-Bonne  Fourché, 
prof.  1744,  discrète;  Monique  Hallouin,  prof.  1734,  discrète; 
Dosithée  Rodrigue,  prof.  1759,  discrète;  Marie  Langlais, 
prof.  1772,  discrète;  Madeleine  Brochard  de  Souche,  prof. 
1775;  Marie  Moraud-Grand'Maison,  prof.  17S0;  Louise  Papin, 
prof.  1780;  Julie  Ricard,  prof.  1788;  Victoire  Gotteneuve, 
prof.  1788  ;  Marie-Joseph  Ozé,  prof.  1788  ;  Marguerite  de 
Rorthais,  prof.  1788. 

Sœurs  converses  : 

Marie-Céleste  Drue,  prof.  1754;  Perrine  Hallereau,  prof. 
1762;  Marguerite  Beugnet,  prof.  1763;  Mathurine  Hallereau, 
prof.  1764;  Marie-Anne  Buet,  prof.  1772;  Françoise  Bran- 
geon,  prof.  1775;  Perrine  Reledoie,  prof.  1784. 

Aumôniers  :  PP. 

Grille,  du  Pont-de-Gé,  né  en  1740,  prof.  1770  -,  Jacques 
Rigault,  de  Liersac,  né  en  1752,  prof.  1782. 

2.  —  Paroisse  de  Touvois,  au  Val-de-Morière. 

—  Fondé  par  le  duc  Conan  (22  août  1175),  à  l'Ermitage  de  Haute-Courbe, 
dans  la  forêt  de  Nantes,  ce  prieuré  de  filles  s'appela  d'abord  Bademoreria, 
en  mémeire  d'un  certain  Bademorc,  ancien  propriétaire  du  terrain,  sur  le- 
quel le  petit  couvent  et  la  chapelle  furent  construits.  Aux  XVIe  et  XVIIe 
siècles,  ce  nom  a  subi  une  transformation  assez  difficile  à  expliquer  :  la 
Bademorière  est  devenue  le  Fal-de-Morière.  Les  Sires  de  Betz  ont  enri- 
chi le  monastère  par  des  donations. 

R.  Bâtiments  estimés  environ  600  rt,  une  futaie  de  3  jour- 
naux servant  de  promenade  aux  religieuses,  4  métairies,  1 
moulinet  des  prés  et  terres  labourables  ;  droit  de  dîmes, 
terciage  et  rentes,  1.400  *. 


—  171   - 

Ch.  8  services  de  fondations,  l'aumône  2  fois  par  semaine 
500  *;  redevances  aux  Capucins  de  Machecoul,  20  *;  hono- 
raires du  P.  confesseur,  150  tt;  entretien  et  gages  de  2  do- 
mestiques. 

Eglise  :  31  chasubles,  7  dalmatiques,  et  les  vases  sacrés 
nécessaires  au  culte,  en  argent;  5  cloches  dont  3  à  l'église. 

La  maison  comprend  un  dortoir  de  18  cellules,  et  un 
autre  de  16,  abandonné,  et  toutes  les  pièces  servant  à  la 
communauté,  qui  se  compose  de  religieuses  professes,  de 
novices  et  de  pensionnaires;  pour  ces  dernières  il  y  a  13 
chambres  meublées. 

Il  n'y  a  pas  de  bibliothèque. 

Personnel.  Mères  professes  : 

Antoinette  Bouyer,  prieure;  N.  de  Mello  de  la  Millière, 
sous-prieure;  Anne-Marie  du  Tressay,  discrète;  Éléonore  de 
Rorthais, discrète;  Marie-Prudence  de  l'Arduseau,  discrète; 
Céleste  de  Biré,  dépositaire;  Gabrielle-Marie  de  la  Barbe- 
lays,  dépositaire;  Thérèse  Letenneur.,  cellérière;  Marie 
Guilloteau,  boursière;  Anne  Métairie, infirmière;  Perrine 
Fleury  ;  Marie  Ellis;  Louise  Bain;  Elisabeth  Leroux;  Cé- 
leste Girard;  Anne  Robert  de  Boisfossé. 

Sœurs  converses  : 

Avenie  Tanneur  et  Marie  Macé. 

Aum.  :  P. -Sébastien  Jaulin,  de  l'Ordre  de  Fontevrault. 

Confes.  :  P.-M.  Boutin,  de  l'Ordre  de  Fontevrault. 


V.  —  BÉNÉDICTINES 

Paroisse  de  la  Trinité-de-Clisson. 

—  La  fondation  est  très  ancienne  et  doit  remonter  au  Xe  siècle.  Des 
chanoines  réguliers  de  St-Augustin  habitèrent  cette  maison  dans  le  prin- 
cipe ;  vinrent  après  eux  des  religieux  obédienciers  de  la  réforme  mitigée 
de  St-Maur,  1  profès  et  2  novices.  La  Maison  changea  encore  de  maîtres  : 
elle  fut  occupée  par  quelques  prêtres  gagés  qui  faisaient  la  desservance. 


—  172  — 

Eq  1619,  dit  Mellier,  il  y  avait  une  ministrerie  de  Mathurins.  Enfin, 
le  1  juin  1045,  une  petite  colonie  de  Fontevristes  quitte  la  communau- 
té de  la  Regrippière  en  Vallet,  avec  la  permission  de  l'Ordinaire,  et  vient 
s'établir  définitivement  au  prieuré  de  la  Trinité  pour  suivre  la  règle  adoucie 
de  St-Benoît.  Cependant  le  prieur  ecclésiastique  garda  toujours  le  titre 
de  curé  primitif  de  la  paroisse  et  ne  le  céda  point  à  la  nouvelle  supérieure. 
Les  religieuses  tiennent  un  pensionnat  pour  les  jeunes  filles  de  condition 
et  un  noviciat  de  leur  Ordre. 

Le  couvent  est  adjoint  à  l'église  paroissiale;  il  est  très 
bien  bâti,  dominant  la  vallée  et  la  ville  de  Clisson;  le  cloître 
est  un  carré  parfait,  formé  par  des  arcades  à  plein  cintre  ; 
le  parc  qui  est  arrosé  par  la  petite  rivière  de  Moine  fait  de 
ce  lieu  une  délicieuse  solitude. 

La  partie  de  Y 'église  qui  sert  aux  religieuses  est  le  chœur; 
au  fond  on  voit  un  autel  et  un  beau  retable. 

Dans  la  sacristie  on  compte  :  3  calices,  1  ostensoir,  6 
chandeliers,  1  encensoir,  1  navette,  1  croix  de  procession, 
3  paires  d'orceaux  en  argent,  1  soleil  de  vermeil;  —  12 
chasubles,  5  chapes. 

La  maison  est  double  :  le  noviciat  et  le  pensionnat.  Les 
religieuses  ont  chacune  leur  cellule,  il  y  en  a  33;  on  mange 
dans  un  réfectoire  garni  de  6  tables  ;  dans  celui  des  pen- 
sionnaires, il  n'y  a  que  2  tables  ;  au  dortoir,  25  couchettes  ; 
à  l'infirmerie,  6  lits. 

La  bibliothèque  contient  250  vol. 

R.  Terres,  454  *  ;  rentes,  1.296  *;  dots  des  religieuses, 
340  #  ;  pensions  viagères,  800  tt  ;  pensions  des  élèves, 
2.173  #. 

Ch.  Redevances  au  prieur,  entretien  d'un  aumônier  et 
d'un  clerc,  soin  de  la  maison;  total  :  1.359  tt. 

Personnel.  Prof.  : 

Anne  Descaseaux  de  Ste-Agnès,  prieure;  Anne  Grésil 
de  St-Alexandre,  sous-prieure  ;  Rose  de  la  Barre  de  Ste- 
Gertrude,  discrète  ;  Hélène  de  la  Gastinays  de  St-Louis,  id.; 
Claude  de  Romaceul  de  Ste-Félicité,  id.;  Marie  Baulon  des 
SS.- Anges,  id.  ;  Marie-Modeste  Texier  de  St- Augustin,  id.  ; 


-   173  — 

AnneBaullon  du  St-Esprit,  cellérière  ;  Catherine  Taillendeau 
de  St-Paul,  cellérière  ;  Mari e  Froissy  de  St-Benoît,  procureuse  ; 
Niécelle  Dubois  de  St-Charles;  Marie  Sauvaget  de  Ste-Anne  ; 
Marguerite  Bureau  de  St-Bruno;  Louise  Avril  de  St-Ro- 
main;  Catherine  Bureau  de  Ste-Victoire;  Marie  Lafitte  de 
St-Séraphin;  Anne  Minguet  de  l'Annonciation;  Anne  Oli- 
vier de  St-Maur  ;  Gabrielle  Luzeau  de  St-Ambroise  ;  Anne 
Joubert  de  St-Jean  l'Evangéliste;  Françoise  Douaud  de 
l'Assomption;  Marie  Joubert  de  la  Visitation. 

Nov.  :  Jeanne  Formon  du  St-Sacrement  ;  Françoise  Prévôt 
de  St-Emmanuel. 

Gonv.  :  Perrine  Plessis  de  Ste-Marie  ;  Jeanne-Florence  de 
Ste-Thérèse  ;  Perrine  Durand  de  St-Raphaël  ;  Madeleine 
Dugast  de  St-Jean. 

Aum.  :  Guillaume  Bretin. 

Il  y  a  pour  le  service  de  la  maison  4  servantes  et  3  va- 
lets. 

VI.  -  CORDELIÈRES  DE  Ste_ELISABETH 

1.  —  Paroisse  de  S.-Similien,  au  Marchix. 

—  Les  filles  de  Ste-Elisabeth,  dites  Cordelières  sans  clôture  ou  Tertiaires 
Conventuelles,  avaient  été  reçues  à  Nantes  avant  1515,  sous  la  condition 
d'instruire  les  jeunes  personnes  pauvres  ^  plus  tard  elles  prirent  chez  elles 
de  grandes  pensionnaires.  En  1632  elles  quittèrent  leur  première  maison 
située  près  la  Chambre  des  Comptes,  en  S. -Léonard,  et  passèrent  au  fau- 
bourg du  Marchix,  dans  le  couvent  occupé  par  les  PP.  Capucins. 

R.  Les  livres  ne  sont  pas  assez  bien  tenus    pour  qu'on 

puisse  s'en   rendre  compte.   Dettes  actives   :   927   *.    Ch. 
1.086  «. 

Chapelle:  1  ostensoir,  1  ciboire,  2  calices,,  1  paire  de 
burettes,  2  ampoules,  1  encensoir,  2  croix,  1  bénitier,  1 
lampe,  6  chandeliers,  1  pot  à  fleurs,  d'argent  ;  —  15  cha- 
subles, 4  dalmatiques,  6  chapes,  36  aubes,  1  dais. 


-   174  — 

L'enclos  est  entouré  par  la  rue  du  Marchix,  la  rue  Mer- 
cœur  et  la  rue  Barrière-de-Couè'ron.  Le  couvent  qui  pré- 
sente la  figure  d'un  quadrilatère  parfait  avec  la  chapelle, 
donne  sur  la  place  Ste-Elisabeth.  On  a  25  lits  pour  les  reli- 
gieuses, 35  pour  les  pensionnaires  et  les  domestiques.il  y  a 
des  appartements  pour  les  aumôniers  et  confesseurs. 

Personnel: 22  religieuses, 36  pensionnaires, 20  femmes  de 
chambre.  MMes  Elisabeth  Archer,  née  à  S.-Nicolas,  1751, 
prof.  deSavenay,  1771,  supérieure;  Céleste  Cadou,née  1733, 
vicaire  ;  Marie  Le  Butte  de  S.-Paul,  prof.  d'Auray,  ancienne 
supérieure;  Marie-Joseph  Le  Comte  de  Bièvre,  ancienne  su- 
périeure d'Auray  ;  Madeleine  Dubois,  née  en  1720  ;  Marie- 
Anne  Bizeul,  discrète  ;  Marguerite  Olive,  discrète  ;  Marie  - 
Olive  Bertheluc,  discrète  ;  Anne  Gérard,  discrète  ;  Françoise 
Binet-  Laville,  procureuse  ;  Louise-Félicité  Jeannot  de  Pin- 
guer,  lre  sacriste  ;  Rose  Binet,  2e  sacriste  ;  Marie  Le  Pays, 
maîtresse  de  chœur  ;  Marguerite  Védye,  portière  ;  Louise- 
Perrine  de  Bruc,  portière  ;  Marie  Rocher,  infirmière  ;  Ca- 
therine Le  Gays,  occupée  à  la  roberie  ;  Adélaïde  Le  Ray, 
occupée  à  la  lingerie;  Perrine  Langevin,  dépensière. 

SSrs  Jeanne  Bernard  de  Ste-Françoise  ;  Marie  Fourrage 
de  Ste-Elisabeth  ;  Julienne  Baudin  de  Ste-Marie. 

Confesseur  -  le  P.  Louis  Remeur. 

2.  —  Paroisse  de  Savenay. 

—  La  fondation  de  ce  couvent  doit  remonter  à  1487.  On  ignore  quel  en 
est  l'auteur.  La  maison  sert  de  retraite  pour  les  personnes  du  sexe  que  les 
familles  font  enfermer^  c'est  aussi  un  pensionnat  de  jeunes  filles. 

V église  est  dédiée  à  St-Antoine  de  Padoue;  on  y  dessert 
50  fondations. 

Le  clocher  contient  2  cloches  et  1  horloge. 

Sacristie  :  2  calices  en  vermeil,  1  ciboire,  1  soleil,  1 
paire  de  burettes,  1  encensoir  et  des  ampoules  en  argent  ; 
—  10  chasubles,  12  chapes,  8  aubes. 


—    175  — 

La  maison  a  deux  dortoirs  pour  les  pensionnaires. 

La  bibliothèque  ne  se  compose  que  de  29  ouvrages. 

Personnel  : 

Mme  du  Breil,  supérieure,  depuis  1789;  Jeanne  Avril,  de 
Paimbœuf,  prof.  1770  ;  Louise-Madeleine  Ellis,  de  St-Nico- 
las,prof.  1785  ;  Marie-Renée  Ragnaud,de  St-Similien,  prof. 
1785;  Elisabeth  Bertrand,  née  1738;  Jeanne  Launier,  née 
1727;  Marie  Labatte,  née  1743  ;  Louise  Lehoux,  née  1748; 
Françoise  Ellis,  née  1745. 

Confesseur  et  aumônier  :  Un  P.  Cordelier  de  la  ville. 


VII.  —  URSULINES 

1.  —  Paroisse  de  St-Clément,  au  faubourg  de  Nantes. 

—  Le  26  août  1626,  les  Ursulines  présentèrent  a  la  ville  leur  requête 
d'établissement  et  furent  accueillies,  a  condition  qu'elles  habiteraient  un 
faubourg,  qu'elles  ne  mendieraient  point  et  qu'elles  tiendraient  des  écoles. 
L'année  suivante,  sous  l'épiscopat  de  Mgr  de  Coispéan,  Madame  de  Berty 
et  8  religieuses  arrivèrent  à  Nantes,  détachées  du  couvent  de  Saurnur  :  tout 
d'abord  elles  ouvrirent  une  école  gratuite.  Au  mois  d'avril  1628,  elles  com- 
mencèrent la  construction  de  leur  monastère  a  la  Golletrie,  près  la  tenue 
de  Malvoisine.  Vers  la  fin  de  l'année  1629,  elles  obtinrent  des  lettres  pa- 
tentes de  Louis  XIII. 

R.  Maison  et  rentes,  1.746  *;  pensions  des  religieuses  et 
des  élèves. 

Chapelle:  elle  est  ornée  de  12  tableaux  dans  le  chœur; 
elle  est  située  sur  la  rue,  dans  le  même  sens  que  celle  du  Sé- 
minaire. 

Sacristie  :  2  ciboires,  3  calices,  1  soleil,  1  crucifix,  2 
chandeliers,  2  anges,  1  encensoir  et  sa  navette,  1  custode, 
1  paire  de  burettes,  1  couronne,  1  lampe  d'argent;  —15 
chasubles,  4  chapes. 

Il  y  a  2  cloches  et  1  orgue  estimé  5.000  *. 


—  476  — 

La  maison  qui  est  vaste  comprend  le  cloître,  le  noviciat, 
le  pensionnat,  les  écoles  gratuites  et  les  appartements  des 
aumôniers.  Le  réfectoire  commun  est  meublé  de  11  tables. 
Deux  divisions  partagent  le  pensionnat  :  les  petites  et  les 
grandes,  réparties  en  2  dortoirs,  l'un  de  24  lits,  l'autre  de 
69.  Il  y  a  2  classes  de  charité,  fréquentées  par  170  enfants. 
On  tient  une  pharmacie  pour  les  malades  du  dehors  et  une 
infirmerie  pour  les  gens  de  la  communauté. 

Devant  le  cloître  est  un  vaste  préau  pour  les  élèves  ;  les 
jardins  sont  à  l'Est. 

Bibliothèque  :  200  vol. 

Personnel  :  39  religieuses  de  chœur,  1  novice,  1  postu- 
lante^ sœurs  tourières,  80  pensionnaires,  9  domestiques,  1 
aumônier  et  son  clerc. 

Anne  Davoynes,  née  en  1722,  supérieure  depuis  le  13  déc. 
1788;  Pélagie  de  l'Espinoze,  sous-prieure;  Marie  Raymond, 
conseillère  ;  Françoise  Renoul,  conseillère  ;  Marie  de 
Bruc,  conseillère  ;  Marie  de  Biré,  conseillère  ;  Geneviève 
de  Penhouet,  mère  du  Commun  ;  Marguerite  Raveuil,  dé- 
pensière ;  Marie  Dupont,  mère  du  Commun  ;  Gabrielle  de 
La  Vergne,  dépositaire;  Marie  Roberdière,  infirmière  ; 
Marie  Ordrenneau,  infirmière  ;  Jeanne  de  Beauchamp, 
pharmacienne  ;  Françoise  Judalet,  infirmière  ;  Marie  Ange- 
bault,  maîtresse  des  novices  ;  Louise  Bourdin,  boulangère  ; 
Marie  Edelin,  réfectorière  ;  Bastienne  Clouet ,  réfectorière  ; 
Marie  Salomon,  portière  ;  Thérèse  Penot,  portière  ;  Louise 
Odiette,  sacriste  ;  Marie  Gloyé,  sacriste  ;  Pélagie  Macé  de 
la  Barbelais,  maîtresse  de  chœur;  Anne  Launay,  maîtresse 
de  musique  instrumentale  ;  Marie  Archer,  procureuse  ; 
Marie  Laurent,  employée  aux  écoles  ;  Angélique  Marchand, 
employée  aux  écoles  ;  Sophie  Raveuil,  maîtresse  du  Grand- 
Pensionnat  ;  Marguerite  Boutaut,  maîtresse  du  Grand-Pen- 
sionnat; Louise  Lassale,  suppléante  ;  Elisabeth  Palliau,  lre 
maîtresse  du  Petit-Pensionnat  ;  Madeleine  Salomon,  2e  maî- 
tresse ;  Marie  Philippe,  mère  des  écoles  de  charité  ;  Marie 


-  177  - 

Liard,  préfète  des  écoles  de  charité  ;  Angélique  Eerthelot, 
maîtresse  des  écoles  de  charité;  Rose  Dubuisson,  maîtresse 
des  écoles  de  charité  ;  Rose  Simon,  maîtresse  des  écoles  de 
charité;  Rose  Odiette,  maîtresse  des  écoles  de  charité; 
Hélène  Archard,  maîtresse  des  travaux  d'aiguille  ;  Made- 
leine Trébuchet,  novice  ;  Claudine  Candeau,  postulante  ; 
Marie  Retière,  converse  ;  Marguerite  Rivière,  converse; 
Perrine  Perrochaud,  converse. 
Aumônier  :  01.  Lepré. 


2.  —  Paroisse  de  St-Géréon,  près  d'Ancenis. 

—  Madame  la  baronne  d'Ancenis  institua,  le  23  avril  1643,1e  pension- 
nat des  Ursulines,  pour  sa  ville.  La  supérieure  Antoinette  de  Bruc  et  8  re- 
ligieuses composèrent  la  communauté  qui  se  développa  et  s'agrandit  dans 
la  suite. 

R.  Dans  la  paroisse  St-Géréon,  6.218  **. 

La  chapelle  est  dédiée  à  S.  Joseph.  —  Mobilier  :  1  soleil, 
3  calices,  2  ciboires,  1  bénitier,  2  encensoirs,  1  christ,  1 
lampe,  1  custode,  2  chandeliers,  3  paires  de  burettes,  6 
chopinaux  ;  —  12  chasubles,  8  dalmatiques,  4  chapes  ;  —  2 
cloches  et  1  horloge. 

Le  couvent  est  situé  au  lieu  dit  la  Davrays,  tout  près 
d'Ancenis,  sur  le  territoire  paroissial  de  St-Géréon.  Il  se 
compose  du  cloître  et  des  classes  :  45  chambres  sont  occu- 
pées par  les  religieuses  et  les  grandes  pensionnaires.  Le 
réfectoire  du  pensionnat,  distinct  de  celui  des  sœurs,  est 
meublé  de  deux  grandes  tables. 

Ces  dames  qui  sont  au  nombre  de  33,  sans  compter  les 
novices  et  les  converses,  tiennent  avec  beaucoup  de  succès 
un  pensionnat ,  un  externat  et  des  écoles  gratuites  ;  elles 
'  s'occupent  aussi  de  donner  des  médicaments  et  des  soins 
aux  pauvres.  Le  pensionnat  se  compose  de  12  grandes 
élèves  et  de  11  petites  ;  il  y  a  4  classes  pour  les  externes. 

1881  12 


—  178  — 

Personnel  : 

Marie  de  Carheil,  née  à  Sucé,  1723,  supérieure,  nommée 
récemment  ;  Marie  Ballan,  sous-prieure  ;  Marie  Archam- 
baut,  dignitaire  ;  Henriette- Julie  Tostin,  dignitaire;  Jeanne 
Petit,  dignitaire;  Anne  Varray,  dignitaire;  Marie  Boilève, 
dignitaire;  Michelle  Saulccque,  dignitaire;  Madeleine  Gi- 
rardeau,  Mathurine  Bodinier,  Anne  Luzeau  de  la  Mulonière , 
Victoire  Mazeau-Lebeau ,  Anne  de  Pleumaugat,  Marie- 
Anne  Saulecque,  Françoise  de  Carheil,  Geneviève  Faligan, 
Jeanne  Huron,  Marie-Anne  Lotain  ,  Eulalie  Palierne  ;  Eli- 
sabeth Turpin ,  Anne  Bedeau  de  TEcochère  ,  Marguerite 
Revnier,  Louise  Auffrav,  Madeleine  Withe  ,  Marie  de  la 
Noë ,  Perrine  Renoul ,  Elisabeth  Bahuaud  ,  Marguerite 
Breheu,  Hyacinthe  de  Vizé  ,  Marie  Bodinier,  Marie  Rivet , 
Elisabeth  Renoul ,  Perrine  Belain,  converse  ;  Adélaïde  Bon- 
nain ,  novice. 

Aumônier  :  Jos.  Chardot,  rect.  de  St-Géréon. 

3. —  Paroisse  de  St-Jean  de  Béré,  près  Ghateaubriant. 

—  Mgr  de  Beauveau,  év.  de  Nantes,  envoya  les  Ursulines  occuper  et  des- 
servir l'ancien  prieuré  conventuel  Bénédictin,  en  l'année  1643.  Ce  prieuré 
avait  été  fondé  au  Xlle  siècle,  par  Briand  II. 

Les  dames  tiennent  un  pensionnat  pour  les  jeunes  filles 
de  condition,  et  des  classes  pour  les  externes. 

L'église  priorale  et  conventuelle  est  dédiée  au  St-Sau- 
veur;  elle  date  de  la  fondation,  mais  elle  fut  achevée  par 
le  fils  du  fondateur. 

Personnel .-  Mme  Salomon,  supérieure  ;  Elisabeth  Bahuaud, 
Geneviève  Boisson  ,  Marguerite-Rose  Fleury,  Rose  Giraud, 
Marie  Rabu,  Marguerite  Portail,  Perrine  Portail,  Fran- 
çoise Loye. 


179  — 


4.  —  Paroisse  de  St  -Aubin  de  Guérande,  faubourg 

St- Michel. 

—  L'an  1646,  la  Mère  Marie  Charette,  du  couvent  de  Nantes,  vint  à  Gué- 
rande,  accompagnée  de  quelques  religieuses  :  le  chapitre  et  les  habitants  les 
réclamaient  pour  y  instruire  la  jeunesse.  La  dot  de  ces  religieuses  fut  em- 
ployée à  acheter,  sous  la  caution  du  Prévôt,  une  petite  maison  avec  son 
enclos,  appelée  la  Porte-Talon.  En  1753,  elles  obtinrent  des  lettres  patentes, 
et  des  dames  portugaises  prirent  l'habit  de  Tordre  et  firent  construire 
un  couvent  neuf. 

R.  160  œillets  de  marais,  y  compris  ceux  qui  sont  attachés 
à  la  chapellenie  de  St-Michel  ;  pensions  viagères,  900  rt  ; 
rentes,  1.376  *.  —  Ch.  1.300  *. 

Sacristie  :  un  cachet  de  Ste  Ursule,  un  reliquaire  en 
bois  doré,  une  couronne  impériale  d'argent,  enrichie  de 
pierreries,  venant  de  la  maison  de  Portugal  ;  —  1  ciboire,  2 
calices,  1  soleil,  1  custode,  2  crucifix,  2  chandeliers,  1  en- 
censoir, 2  anges,  1  lampe,  1  paire  de  burettes  en  argent  ;  — 
20  chasubles,  2  dalmatiques,  4  chapes,  30  aubes. 

Le  mobilier  de  la  maison  qui  contient  un  noviciat,  un 
pensionnat  et  une  école  d'externes,  se  compose  de  10  ar- 
moires, 71  lits,  60  prie-Dieu,  60  tables,  20  couverts  d'argent 
et  d'une  bibliothèque  de  200  vol. 

Personnel: 

MMes  Duvivier,  supérieure  ;  Julienne  Chrétien,  Jacquette 
Chambilly,  Marie  Mayet,  Louise  de  Monty,  Marie  Tison, 
Jeanne  Thiéry,  GabrielleTrotreau,  Louise  Poisbeau,  Jeanne 
du  Mesnil,  Madeleine  Fourré,  Jeanne  Amelot,  Marie 
Boullo,  Marie  Forget,  Jeanne  Chottard,  Suzanne  de  Ker- 
cabus,  Françoise  Moisson. 

SSrs  Marie  Aoustin,  Michelle  Mahé,  Jacquette  Lecoq, 
Brigitte  Legouy,  Marie  Hégarit,  Catherine  Foys,  Perrine 
Mahé  et  2  autres  dont  on  ignore  les  noms. 

Aumônier  :  M.  Chaussun. 


180  - 


VIII.   -  VISITANDINES 


Paroisse  de  St-Clément  de  Nantes,  au  faubourg. 

—  Autorisées  a  condition  de  n'être  point  mendiantes  (12  mai  1629;,  les 
dames  de  la  Visitation  Ste-Marie  s'établirent  d'abord  à  la  Malvoisine,  dans 
le  premier  lieu  qu'avaient  occupé  les  Mères  de  Ste-Ursule.  L'année  sui- 
vante, elles  bâtirent  leur  monastère  sur  les  ruines  du  vieux  logis  de  la  Mi- 
ronerie,près  le  Collège.  La  fondation  est  due  au  zèle  d'une  personne  pieuse 
de  la  ville,  nommée  Louise  Hardouin.  On  s'adressa  à  Mme  de  Chantai  elle- 
même,  qui  vivait  alors,  et  qui  donna  7  religieuses  du  couvent  de  Moulins. 
La  même  maison  envoya,  quelques  mois  après,  7  autres  religieuses  pour 
onder  a  a  Croisic  un  nouveau  monastère  ;  mais  le  séjour  de  cel!e3-ci  ne  fut 
pas  long  dans  cette  petite  ville  ;  elles  se  transportèrent  bientôt  k  Vannes. 

R.  3  maisons,  rentes,  contrats,  10.039  tt  ;  3  métairies  à  la 
Boissière,  1  maison  dans  la  Grand'Rue,  rentes  sur  le  clergé, 
les  Etats  de  Bretagne,  l'hôtel  de  ville,  St-Jacques,  l'hôpital 
de  Machccoul,  etc.  Ch.,  5.004  *. 

V église  a  été  construite  de  1643  à  1645  :  une  nef,  le  chœur 
des  religieuses  et  une  sacristie,  3  autels,  1  chaire.  Elle  est 
située  entre  les  bâtiments  du  cloître  et  du  collège  ;  on  y 
parvient  par  l'impasse  qui  donne  sur  la  rue  du  collège. 
Les  peintures  à  fresque  qui  ornent  cette  chapelle  sont  re- 
marquables. 

Il  y  en  a  une  autre  à  l'intérieur,  meublée  d'un  autel  et 
d'un  confessionnal. 

Sacristie  :  4  calices,  2  ciboires,  1  soleil,  1  custode,  1  en- 
censoir, 1  bénitier,  1  lampe,  2  flambeaux  ;  —  27  chasubles, 
4  dalmatiques,  11  chapes. 

On  distingue  dans  la  maison  le  pensionnat  et  la  partie 
réservée  aux  religieuses  :  celle-ci  se  trouve  presque  paral- 
lèle à  la  rue  du  faubourg.  Les  jardins,  d'une  petite  conte- 
nance, sont  derrière  le  corps  principal  des  bâtiments. 


—  181  - 

On  dessert  dans  la  chapelle  le  bénéfice  des  Hardouin. 

Personnel  :  39  religieuses  de  chœur,  2  sœurs  tourières 
et  5  domestiques. 

MM<*  Claude-Marie  deBruc  de  Montplaisir,  née  en  1729, 
supérieure  ;  Julienne- Angélique  Alexandre  ,  assistante  ; 
Rose-Victoire  Charbonneau,  ancienne  supérieure  ;  Margue- 
rite-Aimée  de  Soulange,  conseillère;  Marie -Rosalie  Guil- 
lermo,  conseillère  ;  Marie- Ursule  de  Bruc,  conseillère  et 
économe;  Sainte-Bonne  Mauclerc,  sacriste;  Jeanne-Fran- 
çoise de  Mélient,  Jeanne-Marguerite  Delmestre,  Françoise- 
Thérèse  Cartier,  Euphrasie  Laurent,  Marie-Augustino 
Chauveau,  Marguerite  Turquetil,  Marie-Victoire  Bedeau 
de  l'Ecochère,  Marie-Félicité  de  la  Barre,  Reine- Agathe 
Braud,  Anne-Marie  Dennebays,  Anne-Rosalie  Goulard  du 
Rétail,  Françoise  Le  Govello,  Claire-Elisabeth  Galipaud, 
Marie-Anne  Galipaud,  Marie-Tranquille  Pineau,  Marie-Ma- 
deleine Lebeau,  Marie-Céleste  Chauvet,  Marie-Olive  Moisan  ; 
Marie-Aimée  Madec,  Marie-Perrine  Chevas,  Marie-Thérèse 
Joly,  Marie-Joseph  Mouraud,  Jeanne-Marie  Damot. 

SSrs  Marie-Renée  Mauclerc,  Marie-Marthe  Perraudeau, 
Jeanne-Thérèse  Nicolle,  Marie-Louise  Gault,  Jeanne-Ca- 
therine Le  Bourye,  Jeanne-Marie  Lecomte,  Marie-Joseph 
Picard ,  Jeanne-Emmanuelle  Léauté ,  Marie-Catherine 
Hourmel,  Jeanne-Hélène  Eriau,  tourière  ;  Françoise-Julie 
Corneteau,  tourière. 


IX.  —  GALVAIRIENNES 

1.  —  Paroisse  de  St-Similien  de  Nantes. 

—  Les  Bénédictines,  dites  dames  du  Calvaire,  réformées  par  le  P.  du 
Tremblay,  arrivèrent  h  Nantes  en  1623  ^  elles  bâtirent  leur  maison  près  la 
Motte  St-Nicolas  et  s'y  établirent  le  16  juin  1629  :  la  reine  Marie  de  Mé- 
dias posa  la  première  pierre.  La  maison  de  Bretagne,  ou  la  réforme 
commença,  est  celle  de  Nantes. 


-  18-2  — 

R.  7.635  *.  Ch.  5.298  tt.  Les  eifets  mobiliers  de  la  maison 
sont  évalués  à  12.000  tt.  8  religieusesjouissent  d'une  pen- 
sion volontaire,  8  autres  d'une  pension  alimentaire.  Rede- 
vances à  Msr  l'évoque,  supérieur  général,  un  plat  de  fruits 
crus  du  jardin. 

Chapelle  ornée  de  4  autels  ;  l'entrée  ouvre  sur  le  pas- 
sage du  couvent. 

La  sacristie  est  richement  meublée  d'ornements,  de  linge 
et  d'argenterie  :  on  n'en  connaît  pas  le  détail. 

Les  bâtiments  sont  distribués  en  carré;  à  l'O.  une  longue 
aile  se  détache  du  corps  principal.  A  droite  de  l'allée  qui 
monte  au  Calvaire  sont  de  magnifiques  jardins  et  un  parc. 

La  maison  renferme  une  infirmerie,  5  chambres  de  reli- 
gieuses, contenant  chacune  2  ou  3  lits  à  quenouille,  1  dor- 
toir de  20  couchettes  pour  les  jeunes  filles  pensionnaires, 
une  basse-cour  et  des  étables. 

La  bibliothèque  ne  contient  que  des  ouvrages  pieux  et 
2  manuscrits  :  Vie  du  fondateur,  Vie  de  la  fondatrice,  par 
une  religieuse. 

Personnel  : 

MMCS  Geneviève  Fresnaud  de  la  Templerie,  Ste-Rosalie, 
née  en  1741,  prieure;  Marie-Anne  Foynaud,  Ste-Claire, 
sous-prieure;  Félicité-Victoire  Flamming,  St-Charles; 
Renée-Thérèse  Cam,  St-Joseph  ;  Marie  Mariol,  St-Cœur  de 
Jésus;  Marie-Anne  Delaunay,  St-H yacinthe;  Marie- Anne 
Radigois,  St-Joachim  ;  Marie-Anne  Pimparay,  Ste-Adelaïde  ; 
Hélène-Renée  Genton,  St-Augustin  ;  Marguerite  Gruaud, 
Ste-Glotilde  ;  Renée-Elisabeth  Joubaye,  Ste-Anne. 

Madeleine  Perrin,  Jeanne  Dubreil,  Michelle  Cottin, 
Françoise  Bidon,  Marie-Rosalie  Billot,  Marie-Elisabeth 
Boussineau,  Marie  Gouerbeil,  Jeanne-Julie  Trichet,  Féli- 
cité-Julie Poisson,  Jeanne-Françoise  Simon,  Marie-Ca- 
therine Gauchet,  Marie- Aimée  Robiou,  Félicité  Pimot. 

SSrs  Mathurine  Nicolle,  St-Maur  ;  Perrine  Richard,  Ste- 
Elisabeth  ;  Anne  Sourisseau,  Ste-Marthe;  Françoise  Rivet, 


—  183  — 

Ste-Placide  ;  Agathe  Guillou,  St-Vincent  ;  Jeanne  Thomas, 
Ste-Eulalie;  Anne  Amelineau,  Ste-Scholastique  ;  Madeleine 
Perrin,  Ste-Félicité  ;  Jeanne  Dubreil  ;  Anne  Radigois. 
Aumônier  :  Peigné. 


2.  —  Paroisse  de  la  Trinité  de  Machecoul. 

—  En  considération  de  sa  fille  Marie-Catherine,  qui  avait  pris  le  voile 
au  Calvaire  de  Paris,  Pierre  de  Gondy,  duc  de  Retz,  fonda  le  couvent  de 
Machecoul  pour  trente  et  quelques  religieuses.  La  réforme  d'Antoinette  de 
Longueville  et  du  P.  du  Tremblay  s'y  introduisit  en  1673. 

La  maison  contient  le  cloître,  le  noviciat,  le  pensionnat 
et  une  pharmacie. 

Personnel  :  12  dames  de  chœur  et  7  sœurs  converses. 

Gillette-Marie  Chenu  de  Ste- Adélaïde,  professe  de  St-Malo, 
prieure  ;  Suzanne-Julie  Relique  de  Ste-Mélanie,  sous- 
prieure  ;  Adélaïde  de  Charette,  Marguerite  Brilet,  Marie 
Beson  de  St-Benoît,  Olive-Jacquette  Bernard,  Marie  Blan- 
chard, Pierrette  Dufour,  Marie-Anne  Gigault,  Suzanne 
Guitenil  de  Ste-Marthe,  Marguerite  Liret,  Jeanne-Marie 
Tarbouillet,  Anne-Françoise  Villéon,  Sauvaget  et  Marion. 

Aumônier  :  François  Esseau,  né  à  St -Nicolas,  ord.  1750. 


X.  —  PÉNITENTES  DE  STE-MADELEINE 

Paroisse  de  St-Léonard  de  Nantes. 

—  René  Levêque,  originaire  de  Gorges,  fondateur  des  missions  de  St- 
Clément,  établit  à  Nantes,  près  des  Cordeliers  (1672),  un  refuge  pour  les 
filles  perdues.  On  les  appela  d'abord  Pénitentes  repenties,  puis  sœurs  de 
Ste-Madeleine  ou  Madelonnettes.  Dans  le  principe  il  n'y  eut  point  de  clôture  : 
une  sainte  veuve  fut  la  première  supérieure  de  cette  maison.  Soixante  ans 
après  ces  humbles  commencements,  les  directrices,  liées  par  des  vœux 


—  184  — 

simples,  prononcèrent  des  vœux  solennels  et  firent  ériger  leur  Refuge  en 
monastère  régulier,  faveur  qu'elles  sollicitèrent  de  Benoit  XIII,  et  qu'elles 
obtinrent  par  bulle  datée  du  27  juillet  1729.  Ainsi  de  saintes  femmes, 
dont  la  vie  était  sans  tache,  composèrent  la  communauté  pour  se  sanctifier 
elles-mêmes  et  préserver  dereebute  les  personnes  de  leur  sexe,  moins  heu- 
reuses qu'elles.  On  admit  aussi  des  pensionnaires  accompagnées  de  do- 
mestiques. 


R.  Constituts,  1.912  *  ;  rentes  foncières,  13  *;  dots  des  re- 
ligieuses, 1.000  tt;des  sœurs  pénitentes,  1.229  *.  Plus  les 
recettes  de  la  maison  et  les  pensions.  Chaque  pension 
nette,  300  *;  en  tout  :  14.542  *. 

Ch.  Entretien  du  personnel  et  du  local,  honoraires  de 
l'aumônier,  frais  de  culte.  Les  dépenses  se  sont  élevées  cette 
année  à  21.464  *. 

La  chapelle  qui  est  domestique  donne  sur  la  rue  des 
Pénitentes  -,  elle  est  très  petite  :  2  calices,  1  ciboire,  1  soleil, 
1  paire  de  burettes,  1  lampe,  1  encensoir,  1  petite  croix,  6 
flambeaux  d'argent ,  28  chasubles,  7  chapes,  30  aubes. 

La  maison  se  compose  de  3  ailes  de  bâtiments  ;  il  y  a  27 
cellules  pour  les  religieuses,  12  pour  les  pénitentes,  40  pour 
les  pensionnaires,  une  infirmerie  de  10  lits,  les  apparte- 
ments des  domestiques  et  toutes  les  pièces  communes.  L'en- 
clos est  borné  par  la  rue  des  Pénitentes,  le  Port-Commu- 
neau,  la  ruelle  du  Port-Gommuneau,  et  la  rue  d'Enfer. 

Il  y  a  une  bibliothèque  de  dévotion. 

Le  personnels  distribue  ainsi  :  25  religieuses,  12  dames 
pénitentes  enfermées  par  leurs  familles,  12  filles  converties, 
48  pensionnaires  et  6  domestiques. 

MMcs  Françoise  Caillaud  de  Beaumont  de  St- Augustin, 
née  àCasson,  1851,  supérieure  ;  Marie-Hélène  Chanceaulme, 
née  1724,  sous-prieure  ;  Julienne  Letourmeulx,  née  1706, 
conseillère  ;  Marie-Renée  Cazet,  née  1740,  id.;  Françoise  Le- 
ray,  née  1706,  id.  ;  Marie-Sainte  de  Carheil,  née  1726,  id.  ; 
Marie -Emilie  Loy,  née  1765,  dépositaire;  Marie-Scholastique 
Eymard,  née  1731,  lre  maîtresse  des  pensionnaires  ;  Anne- 


—  185  — 

Joseph  Guyot,  née  1755,  2e  maîtresse  des  pensionnaires; 
Anne-Cécile  Caillaud  de  Beaumont,  née  1764,  maîtresse  d'é- 
criture et  robière  ;  Michelle  Grégoire,  née  1719,  assistante 
aux  leçons  ;  Thérèse- Angélique  Ballais,  née  1740,  ména- 
gère ;  Louise-Cécile  Caillaud  de  Beaumont,  née  1743,  direc- 
trice des  Pénitentes  ;  Marie  Lelou,  née  1723,  pharma- 
cienne ;  Anastasie  Gauchet  de  Beaulieu,  née  1756  id.  ;  Rosalie 
Gauchet  de  Beaulieu,  née  1756,  lingère  ;  Perrine-Dosithée 
Le  Camus  de  St-Lo,  née  1727,  id.;  Augustine  du  Besset,  née 
1750,  infirmière  ;  Victoire  Mainguy,  1776,  robière;  Marie- 
Madeleine  Forget,  née  1723,  portière  du  couvent  ;  Marie- 
Rose  Pelle,  née  1752,  portière  du  Refuge  ;  Prudence  du 
Chatellier-Lyrot,  née  1733,  portière  du  pensionnat  ;  Marie- 
Céleste  Thérestre,  née  1726,  économe  ;  Marie-Thérèse  Guil- 
let,  née  1768,  dépensière  ;  Anne  Edeline,  née  1732,  sa- 
criste. 
Sœurs  pénitentes  : 

Catherine  Caillon,  depuis  30  ans  ;  Agathe-Françoise  Gic- 
quel,  25  ans;  Apolline  du  Cerceau, 22  ans  ;  Anne-Luce Pel- 
lué,  15  ans;  Elisabeth-Marie  Rousseau,  15  ans;  Pélagie  X..., 
10  ans  ;  Victoire  Goriou,  5  ans  ;  Claire-Marie  Lafaille, 
4  ans  ;  Catherine-Françoise  Gaudron,  3  mois  ;  EulalieX..., 
3  mois  ;  Monique-Marie  Perrochaud,  séparée  ;  Félicité  X..., 
6  semaines. 

Supérieur  général  :  M.  l'abbé  de  Hercé,  vie.  gén. 

Aumônier  .•  M.  Briant. 


XI.  —  GAROLINES 

1.  —  Paroisse  de  St-Donatien,  au  faubourg  de  Nantes. 

—  Un  très  vertueux  directeur  du  séminaire,  M.  Ant.  Guoguet  de  Boishé- 
raut,  prêtre  du  diocèse,  fut,  avec  Mlle  de  laBourdonnays  de  Bras,  l'ins- 
trument dont  Dieu  se  servit  pour  fonder  à  Nantes  des  écoles  gratuites 


—  186  — 

de  filles.  Plusieurs  pieuses  femmes  instruites  vinrent  se  joindre  a  la  fonda- 
trice et  reçurent  en  1698  une  règle  de  Mgr  de  Beauveau.  Vêtues  unifor- 
mément, elles  vivent  ensemble  sans  être  liées  par  des  vœux. 

Ces  dames  instruisent  gratuitement  les  enfants  du  peuple, 
qui  remplissent  2  classes,  d'une  centaine  d'élèves  chacune  ; 
elles  tiennent  une  pharmacie  à  la  disposition  des  malades 
sans  secours,  un  pensionnat  pour  les  jeunes  filles  aisées  et 
Une  école  supérieure  pour  former  des  institutrices  de  cam- 
pagne. 

R.  Rentes,  260  *  ;  fondations,  1.540  *. 

Ch.  Honoraires  de  la  maîtresse  d'école  pour  les  indigentes, 
270  tt;  aumônes  aux  enfants,  400  rt  ;  honoraires  d'une  maî- 
tresse à  la  Boissière,  120  tt;  etc.  Total  :  3.149*. 

Chapelle  :  elle  longe  la  rue  du  bourg  St-Donatien  et  fait 
face  aux  croix  des  saints  Martyrs  nantais,  sur  le  lieu  de  leur 
supplice  :  —  1  soleil  de  vermeil,  3  calices,  1  ciboire,  1  petite 
croix,  1  paire  de  burettes,  1  encensoir,  2  chandeliers,  10 
petits  vases  d'autel,  en  argent  ;  18  chasubles,  3  chapes. 

La  maison  comprend  les  cellules  des  Religieuses,  2  dor- 
toirs, l'un  de  23  lits,  pour  les  grandes  pensionnaires,  et 
l'autre  de  171itspour  les  petites,  1  réfectoire  de  14  couverts, 
pour  les  religieuses,  et  un  autre  plus  grand,  pour  les  élèves 
internes,  4  salles  de  classes. 

Personnel  :  Marie-Françoise  de  la  Bourdonnays,  supé- 
rieure; Marie-Suzanne  Mourin,lre  assistante  ;  Jeanne Lerat, 
2e  assistante  ;  Anne  Arnaud  ;  Marie  Bioteau  ;  Jeanne  Du- 
noir;  Gabrielle  Bioteau;  Anne  Baron  ;  Catherine  Letort  ; 
Marie  Rigodeau  ;  Adélaïde  Fournier  ;  Anne  des  Brosses  ; 
Madeleine  Taillé  ;  Anne  Olivier  ;  Thérèse  Pineau  ;  Made- 
leine-Cécile Boudrot,  novice. 


2,  —  Paroisse  de  St-Similien  de  Nantes. 
Ecole  tenue  par  les  mêmes  dames  Carolines,  dites  de  Ste- 


-  187  - 

Marie.  Elle  est  située  entre  le  Bon-Pasteur    et  la  place 
Bretagne. 
Il  y  a  une  chapelle  domestique. 

XII.  —  DAMES  DE  LA  RETRAITE 

Paroisse    St- Léonard    de   Nantes. 

—  La  première  pierre  de  la  Retraite  des  femmes,  construite  sur  le  marais 
et  devant  le  jardin  delà  Mairie,  reçut  sa  bénédiction,  le  4  mars  1738,  par 
le  ministère  de  Mgr  de  Sanzay.  Les  jésuites  qui  s'étaient  établis  à  Briord  et 
qui  y  avaient  fondé  une  Retraite  d'hommes  prirent  l'initiative  de  la  nou- 
velle maison  :  aussi  furent-ils  désignés  par  l'Ordinaire  pour  la  diriger, 
et  ils  y  demeurèrent  jusqu'à  leur  expulsion. 

Les  dames  de  la  Retraite  de  Vannes,  instituées  en  1664, 
tiennent  cette  maison  :  ces  pieuses  filles  ne  font  point  de 
vœux,  mais  vivent  en  communauté  et  travaillent  de  con- 
cert à  la  conversion  des  âmes. 

Les  bâtiments  forment  un  vaste  carré  ;  la  chapelle  est  à 
l'angle  N.,  du  côté  des  jardins. 


APPENDICE 


Dans  ce  Supplément  nous  donnons  place  aux  diverses 
congrégations  qui  desservent  les  hôpitaux  et  qui  ensei- 
gnent dans  certaines  écoles,  et  nous  terminons  notre  statis- 
tique par  quelques  lignes,  consacrées  aux  Dames  du  Bon- 
Pasteur,  quoiqu'elles  ne  soient  point  des  religieuses. 

HOSPITALIÈRES 


—  Les  sœurs  de  St-Thomas  de  Villeneuve^  instituées  à  Lamballe  en  1CG1, 
suivent  la  règle  du  Tiers-Ordre  de  St-Augustin  et  choisissent  pour  les 
desservir  les  hôpitaux  pauvres  et  délaissés. 

Elles  occupent  l'hôtel-Dieu  de  Châteaubriant,  depuis  le 
commencement  de  1689  ;  l'une  d'elles  fait  l'école. 

Denise  Lecomte,  supérieure  ;  Claude  Pinferray,  institu- 
trice; Madeleine  Boillefays,  infirmière. 

Autrefois  les  mêmes  sœurs  desservaient  les  hôtels-Dieu 
de  Guérande  et  de  Blain. 


II 


Les  sœurs  du  Saint-Esprit  de  Plèrin,  dites  Sœurs  Blanches,  sont 
établies  à  Blain,  ou  elles  remplacèrent  celles  de  St-Thomas,  20  mai  1778. 
Fondées  à  Plérin  près  St-Drieuc,  en  1706,  elles  ont  surtout  pour  but  de 
visiter  les  malades  et  de  leur  porter  des  remèdes  à  domicile;  elles  tiennent 
aussi  des  écoles.  A  Blain,  elles  ont  une  petite  filature  oii  elles  occupent 
15  jeunes  filles. 


—  189  - 

Marie-Jeanne  Lerneaux,  sup.  ;  Augustine  Briand;  Elisa- 
beth Burel  ;  Marthe  Legain  ;  Marie  Jauny,  maîtresse  d'é- 
cole. 


III 


—  Les  sœurs  delà  Providence  appartiennent  à  la  Société  de  ce  non),  ins- 
tituée à  Saumur,  par  la  vénérable  Jeanne  de  LaNoë. 

Elles  desservent  plusieurs  maisons  de  charité.  1°  V Hôtel- 
Dieu  de  Nantes  :  Mme  Guérineau,  sup.  ;  —  2°  VHôpital-Gé- 
néral  du  Sanitat  :  Victoire  Masseau,  sup.  ;  —  3°  l'asile  des 
Enfants  trouvés  :  MMmes  Jeanne  Raulet,  sup.  ;  Marie-Cathe- 
rine Abral;  Angélique  Ogrignaud;  Madeleine-Clémence 
Naudiée;  Julienne  Morée  5  —  4°  la  maison  des  Incurables  : 
Louise  Recto,  St-Joseph,  sup.;  Marie  Rigolage,  seconde; 
Madeleine  Sevrin ,  Perrine  Rortreau ,  Marie-Madeleine 
deHergnes,  Jeanne  Dugast;  —  5°  à  Derval,  le  Bureau  de 
charité,  sous  le  nom  de  Sœurs  grises. 

A  l'hôpital  de  Savenay,  il  y  a  des  sœurs  hospitalières  du 
Tiers-Ordre  de  St-François  :  SS"  Alain  et  Petit  ;  elles 
tiennent  en  même  temps  une  école  de  charité. 

SŒURS  DE  LA   SAGESSE 

1.  —  Paroisse  de  St-Sébastien,  faubourg  de  Piraiil. 

—  Les  filles  delà  Sagesse,  instituées  à  St-Laurent-sur-Sèvre, dans  ce  der- 
nier siècle  (1713)  par  le  P.  Grignion  de  Montfort  et  Mlle  Trichet  de  Poitiers, 
s'établirent  au  faubourg  de  Pirmil,  dans  la  paroisse  St-Sébastien,  près  le 
prieuré  de  St-Jacques  en  Dos-d'âne.  Une  fondation  dont  on  ne  connaît  pas 
l'époque  précise,  faite  par  les  Bénédictins  de  St-Gildas,  leur  permit  d'ouvrir 
des  écoles,  pension  et  externat  de  charité.  Depuis  1773,  année  présumée  de 
leur  établissement,  elles  paient  une  indemnité  de  74  «  aux  moines  de  Tirmil 
pour  une  maison  qu'elles  tiennent  du  prieuré. 

Il  y  a  trois  classes.  Le  pensionnat  a  un  dortoir  de  14 
couchettes  d'élèves  et  3  lits  de  maîtresses. 


-    190  - 

La  chapelle  publique,  qu'il  faut  distinguer  d'un  petit 
oratoire  domestique,  a  un  campanile,  1  autel,  3  ornements, 
2  aubes,  et  des  vases  sacrés.  On  y  célèbre  quelquefois. 

Personnel  : 

Esther  Perraud,  née  en  1752  ;  supérieure  ;  Marie  Guihé- 
neuf,  Louise  Brion,  Marie  Dupé,  Marie  Vincent,  Françoise 
Bazin,  Mathurine  Marchand. 

2.  —  Paroisse  de  Paimbœuf. 
Elles  sont  établies  à  l'Hôpital  depuis  1780. 

3.  —  Paroisse  de  Guérande. 

Le  Bureau  de  charité  les  a  reçues  en  i772  :  S"  St-Pa- 
trice  et  Ste-Apolline. 

4.  —  Paroisse  du  Croisic. 

L'Hôpital  est  desservi  par  ces  pieuses  tilles  depuis  1766. 

BON-PASTEUR. 

Paroisse  St-Nicolas  de  Nantes. 

—  Une  simple  lingère  de  Nantes,  aidée  d'un  diacre,  M.  Barbot  de  la  Per- 
rièrine,  établit,  en  1694,1a  maison  dite  du  S  on- Pas  leur.  Cette  sainte  femme 
s'était  proposé  de  recueillir  les  personnes  de  son  sexe,  désireuses  de  rache- 
ter leurs  désordres  par  une  vie  de  pénitence.  La  nouvelle  Institution,  dont 
la  société  se  fait  un  besoin,  fut  agréée  du  roi  au  mois  de  janvier  1771. 

La  maison,  reconstruite  en  1761,  a  27  chambres  de  pen- 
sionnaires pénitentes  ;  il  n'y  en  a  que  8  qui  soient  occu- 
pées. 

La  chapelle  est  meublée  et  desservie  :  on  y  remarque 
l'autel  encadré  d'un  arc  de  triomphe. 


—  191  — 

R.  1.707  ».  —  Ch.  907  »,  sur  lesquelles  sont  prélevées 
500  *  pour  l'aumônier,  et  300  *  pour  le  culte. 

<Szcp.  Mm*  Legros. 

Aumônier  :  Jos.  Laillaud,  de  St-Saturnin. 

Administrateurs  :  2  prêtres  et  un  laïc.  Ces  deux  premiers 
sont  M.  Douaud,  chan.,  et  M.  Galouin,  rect.  de  St-Lanrent. 

Abbé  P.  Grégoire. 


VENETES,  NANNÊTES  ET  SAMN1TES 


Il  y  a  quelques  années,  des  écrivains  que  la  Société  Archéolo- 
gique de  Nantes  s'honore  de  compter  parmi  ses  membres  pu- 
bliaient sur  la  presqu'île  guérandaise  des  Etudes  qui  ont  vive- 
ment attiré  l'attention.  Rompant  avec  une  tradition  respectée 
jusque-là  à  l'égal  d'un  principe,  s'appuyant  sur  le  récit  de 
César,  sur  la  topographie  des  lieux,  sur  les  écrits  des  contem- 
porains, ils  osèrent  affirmer  que  les  Venètes  s'étendaient  jusqu'à 
la  Loire,  et  que  la  campagne  de  César  en  Vénétie  avait  eu 
pour  théâtre  le  pays  de  Guérande..  L'idée  était  neuve,  assu- 
rément ;  qu'importe,  si  elle  était  juste.  Combien  de  faits  his- 
toriques ont  été  redressés  de  même  par  les  patientes  investiga- 
tions des  contemporains  !  Accueillie  d'abord  avec  quelque  sur- 
prise, cette  opinion  ne  tarda  pas  à  faire  son  chemin  et  à  rallier 
de  nombreux  partisans.  Nous-même,  qu'on  nous  pardonne  ce 
détail,  parce  qu'il  explique  notre  intervention  au  débat,  dans  une 
modeste  étude  qui  n'a  peut-être  pas  été  oubliée,  nous  adoptions 
pleinement  les  conclusions  de  MM.  de  Kersabiec  et  Kerviler. 

Ces  conclusions  ont  été  contestées  depuis,  dans  cette  enceinte 
même.  Nos  hardis  Venètes  ont  été  refoulés,  encore  une  fois,  au 
delà  de  la  Vilaine,  et  telle  est  la  valeur  de  l'honorable  collègue  qui 
a  conduit  cette  nouvelle  campagne,  si  vigoureuse  a  été  son  atta- 
que, qu'il  a  obtenu  un  véritable  succès.  A  Vannes,  au  Congrès 
archéologique  de  France ,  à  Redon,  au  Congres  de  l'Association 
Bretonne,  sa  thèse  a  eu  les  honneurs  d'une  discussion  publi- 
que ;  un  membre  de  la  Société  Académique  de  la  Loire-infé- 
1881  43 


—  194  — 

rieure  lui  a  décerné  des  éloges  sans  restriction  ('),  et  l'ancien 
Président  de  notre  Société,  un  de  nos  critiques  les  plus  compé- 
tents, s'est,  pour  sa  part,  déclaré  convaincu. 

Toutefois,  avec  cette  prudence  qui  distingue  les  véritables  sa- 
vants, M.  le  baron  de  Wismes  a  eu  soin  d'ajouter  :  «  La  liberté 
de  la  réponse  est  d'ailleurs  toujours  sauve  (-).  » 

C'est  cette  liberté  de  la  réponse  que  nous  venons  revendiquer 
aujourd'hui.  La  réplique,  il  est  vrai,  ne  s'est  pas  fait  attendre, 
et  au  Congrès  de  Redon,  notre  habile  contradicteur  trouvait  dans 
réminent  ingénieur  du  bassin  de  Penhouet,  M.  Kerviler,un  anta- 
goniste digne  de  lui.  Mais  peut-être  tout  n'a-t-il  pas  été  dit  sur 
une  question  de  cette  importance,  et  on  peut  espérer  encore  la 
discuter  avec  quelque  fruit  sous  d'autres  aspects.  Puis  nous  avons 
pensé  qu'une  protestation  devait  s'élever  là  môme  où  l'affirma- 
tion s'est  produite.  Cette  Assemblée  a  vu  la  cause  portée  à  son 
tribunal,  il  semble  qu'il  lui  apparticmccle  présider  les  débats, 
d'entendre  les  opinions  en  sens  divers  et  de  recueillir  les  pièces 
contradictoires  de  cet  intéressant  procès. 

Voici,  exposé  en  quelques  mots,  le  système  qui  a  ravivé  la 
lutte  : 

«  Les  Venètes  ne  dépassaient  pas  la  Vilaine.  Entre  la  Vilaine  et  la 
Loire,  et  sur  la  rive  droite  de  ce  dernier  fleuve  jusqu'aux  limites 
de  l'Anjou  habitaient  les  Sarnnites,  occupant  la  plus  grande  partie 
de  notre  département.  Quant  aux  Nannôtes,  n'allez  parles  cher- 
cher aux  bords  de  la  Loire,  ils  étaient  cantonnés  par  delà  le  pays 
angevin,  à  l'orient  du  Maine. Les  textes  de  Pline,  de  Strabonet 
de  Ptolémée  ne  laissent  aucun  doute  à  cet  égard. 

«  C'est  une  erreur  de  croire  que  la  bataille  navale  livrée  contre 
les  Venètes  eut  lieu  dans  les  eaux  guérandaises,  théâtre  trop 
infime  pour   cela.   La  flotte  venète  était  au  mouillage  dans  le 


(*)  Séance  du  7  septembre  1881.  César  chez  les  f'enèies,  de  M.  0  lieux, 
Rapport  fait  par  M.  Manchon. 

(a)  Allocution  de  M.  le  baron  de  Wismes,  en  quittant  le  fauteuil  pré- 
sidentiel, le  18  janvier  1881. 


—  195  — 

golfe  du  Morbihan  et  eu  sortit  pour  aller  au  devant  de  la  flotte 
romaine.  La  rencontre  dut  s'effectuer  à  la  hauteur  de  la  pres- 
qu'île de  Rhuys.  Quant  à  César,  du  pays  des  Andes  et  des  Car- 
nutes,  il  avait  marché,  à  la  tète  de  ses  troupes  de  terre,  jusqu'au 
golfe  du  Morbihan  et,  ayant  attaqué  inutilement  les  îles  et  les  forts 
de  cette  côte,  il  s'était  retranché  entre  Vannes  et  la  Vilaine  pour 
attendre  les  mouvements  de  sa  flotte.  » 

Tel  est  le  résumé  de  cette  étude  intitulée  -.César  chez  les  Ve- 
nètes.  Est-il  besoin  de  dire  qu'elle  est  signée  du  nom  d'un  col- 
lègue honoré  et  apprécié  parmi  nous,  M.  Eugène  Orieux,  agent- 
voyer  en  chef  de  la  Loire-Inférieure  ?  Elle  contient  deux  parties 
principales:  l'examen  des  textes  tendant  à  justifier  la  hardiesse 
de  certaines  innovations  géographiques,  et  la  topographie  des 
côtes  guérandaises,  dans  le  but  de  prouver  que  la  bataille  navale  y 
était  impossible,  quand  tout  s'y  prêtait  dans  le  Morbihan. 

Il  est  juste  d'ajouter  que  l'intérêt  qui  s'attacbe  à  cette  œuvre 
n'a  pas  un  instant  le  temps  de  languir,  grâce  à  l'élégante  so- 
briété du  style  et  à  la  rapidité  concise  avec  laquelle  la  thèse  est 
conduite. 

Cette  étude  contient  trente-quatre  pages  d'impression,  réduites 
à  vingt-neuf,  si  on  en  défalque  le  récit  de  César  reproduit  in  ex- 
tenso. Pour  tant  de  questions  soulevées,  c'est  bien  peu,  trop  peu 
peut-être.  L'auteur  a  rassemblé  les  textes  les  plus  connus,  et, 
presque  sans  débat,  il  conclut,  le  plus  souvent,  en  procédant  par 
affirmations  sommaires.  Je  crains,  je  l'avoue,  d'encourir  un  re- 
proche tout  opposé  et  de  fatiguer  l'attention  par  de  trop  longs 
détails,  voulant,  à  des  théories  qui  semblent  très  discutables,  ré- 
pondre avec  les  développements  que  comporte  un  sujet  aussi  com- 
plexe. 

La  campagne  de  César  en  Vénétie  a  donné  lieu  à  bien  des  in- 
terprétations contradictoires.  Cela  vient  surtout  des  divergences 
qui  se  sont  produites  dans  la  situation  assignée  aux  peuples  roi- 
sins  des  Venètes,  et  dans  le  territoire  attribué  à  ceux-ci. 

La  question,  selon  nous,  se  formule  donc  en  ces  termes  : 


—  196  — 

Quelle  était  la  position  géographique  des  Venètes,  des  Nan- 
nètes  (')  et  des  Samnites,  en  l'an  57  avant  notre  ère? 

Si,  comme  l'affirme  M.  Orieux,  la  Vénétie  s'arrêtait  à  la  Vilaine, 
si  les  Samnites  occupaient  la  presqu'île  guérandaise  et  tout  le 
territoire  où  nous  plaçons  d'ordinaire  les  Nannètes,  la  marche 
suivie  par  César  n'est  pas  douteuse,  en  effet.  Traversant  «  une 
région  qui  était  en  paix  avec  les  Romains  (2),  »  il  vint,  sans  trou- 
ver d'obstacles,  camper  avec  son  armée  en  plein  pays  de  Vannes 
et  la  bataille  navale  se  livra  sur  les  côtes  du  Morbihan. 

Mais  si,  comme  nous  espérons  le  prouver,  les  Venètes  s'éten- 
daient jusqu'à  la  Loire,  avec  les  Nannètes  pour  voisins  et  pour 
alliés,  les  conditions  dans  lesquelles  s'engage  la  guerre  sont  tout 
autres; la  marche  des  légions  en  est  profondément  modifiée,  car 
elles  ne  peuvent  laisser  derrière  elles  le  pays  des  Nannètes,  ainsi 
qu'une  importante  partie  de  la  Vénétie  et,  selon  toutes  les  pro- 
babilités, nos  côtes  guérandaises  deviennent  le  théâtre  de  la  lutte. 
Ce  serait  alors  une  seconde  question  à  examiner. 

Le  point  capital  donc,  celui  qui  s'impose  tout  d'abord,  est  do 
préciser,  à  l'aide  des  documents  qui  nous  restent,  la  situation  des 
Venètes  et  des  peuples  limitrophes.  Tel  est  le  but  que  nous  nous 
proposons  dans  cette  élude. 


1 


Du  côté  de  l'occident,  la  frontière  des  Venètes  paraît  bien  net- 
tement déterminée. 

«  En  sortant,  dit  Strabon,  du  pays  des  Venètes,  on  entre  dans 
«  celui  des  Osismiens  qui  habitent  le  long  de  l'Océan  sur  un  pro- 


(')  Les  géographes  grecs  disent  Namnèles  et  non  Nannètes,  mais  com- 
me César  et  Pline  écrivent  Nannètes,  je  me  décide  pour  ce  dernier   nom. 

(-)  Orieux,  César  chez  les  Fenètcs.  Bulletin  de  la  Société  Arch.  de  Nantes 
1880.  p.  49. 


-  197  — 

«  montoire  assez  étendu,  pas  autant  toutefois  que  l'ont  débité 
«  Pythéas  et  ceux  qui  l'ont  suivi.  » 

Au  temps  dePtolémée,  les  limites  respectives  desOsismiens  et 
des  Venètes  restent  encore  les  mêmes,  car,  d'après  ce  géographe, 
«  les  derniers  peuples  de  la  Gaule  sont  les  Osismiens  qui  vont 
«  jusqu'au  promontoire  Gobœum,  ayant  Vorganium  pour  capitale, 
«  et  au- dessous  d'eux  sont  les  Venètes.  » 

Ce  promontoire  si  étendu  que  Pythéas  n'en  voyait  pas  la  fin, 
nommé  par  les  anciens  promontorium  Gobœum,  et  dont  Marcien 
dans  son  Périple,  faisait  le  point  de  départ,  au  couchant,  de  la  lon- 
gitude de  la  Gaule,  c'est  la  pointe  S.-Mathieu,  ce  célèbre  cap  Pen- 
ar-Bed,  où  nos  aïeux  plaçaient  le  bout  du  monde  et  auquel  le  dé- 
partement du  Finistère  a  emprunté  son  nom. 

Rien  de  plus  précis  que  l'affirmation  de  Marcien,  quand  il  dit  : 
«  La  Gaule  Lyonnaise  se  termine,  au  septentrion,  par  l'océan  Bri- 
tannique et  sa  longitude  commence  au  promontoire  Gobœum.  » 
L'identification  de  ce  promontoire  avec  le  cap  S.-Mathieu  n'est 
pas  douteuse,  puisque  la  pointe  Saint-Mathieu  est  le  cap  le  plus 
avancé  en  mer,  vers  l'ouest,  de  toute  la  péninsule  armoricaine. 

Toutefois  une  objection  peut  m'être  faite  qu'il  est  nécessaire  de 
discuter.  «  Prenez  garde,  me  dira-t-on,  Pornponius'  Mêla  qui 
vivait  au  premier  siècle  de  notre  ère,  place  l'île  de  Sein  en  face 
du  littoral  osismien.  Or,  cette  île  étant  située  au-dessous  delà  baie 
deDouarnenez,  en  avant  du  bec  du  Raz,  il  en  résulte  que  le  ter- 
ritoire des  Osismiens  descendait  au  midi  bien  au  delà  du  goulet  de 
Brest  et  embrassait  presque  toute  la  Gornouaille  armoricaine,  de 
qui  rétablirait  à  peu  près  les  Venètes  dans  les  limites  qu'on  leur 
assigne  généralement.  » 

A  cela  je  répondrai  que  le  point  de  départ  de  l'objection  est 
loin  d'être  prouvé.  Une  vague  similitude  de  nom  entre  Vinsula  Sena 
et  l'ile  de  Sein  ne  suffit  pas  pour  les  identifier.  Similitude  bien 
vague,  en  effet,  puisque,  au  siècle  dernier,  l'île  de  Sein  s'ap- 
pelait vulgairement  l'île  des  Saints,  et  que,  d'après  des  autorités 
incontestables,  comme  le  P.  de  Rostrenen  et  D.  Le  Pelletier,  les 
Bretons  la  nommaient  Énès  Sizun,  Seizun,  ou  Suzun.  Un  ancien 


-  198  - 

titre  duGartalaire  de  Landevenec,  cité  parD.  Lobineau,  lui  donne 
le  nom  ftlnsuïa  Seidzun  que  D.  Lepelletier  écrit  Seidhun  (*). 

Du  reste,  pour  prouver  combien  l'opinion  qui  veut  placer  là 
le  sanctuaire  des  vierges  armoricaines  semble  peu  admissible,  il 
suffit  de  citer  le  texte  môme  de  Pomponius  Mêla  :  «  L'île  Sena, 
«  dit-il,  remarquable  par  l'oracle  d'une  divinité  gauloise,  est  si- 
«  tuée  dans  la  mer  Britannique,  en  face  des  rivages  des  Osis- 
«  miens.  Les  prêtresses,  vouées  à  une  perpétuelle  virginité,  sont  au 
«  nombre  de  neuf.  Les  Gaulois  les  appellent  Cènes,  et  ils  croient 
«  qu'inspirées  par  des  génies  extraordinaires,  elles  peuvent  par 
«  leurs  incantations,  déchaîner  les  vents  et  soulever  les  flots  de 
«  la  mer,  se  transformer  en  toutes  sortes  d'animaux,  guérir  les 
«  maladies  jugées  incurables,  connaître  et  prédire  l'avenir  ;  mais 
«  elles  n'exercent  leur  art  qu'en  faveur  des  navigateurs  qui 
«  viennent  tout  exprès  les  consulter  (-).  » 

Si  tout  ce  récit  n'est  pas  une  fable  comme  les  auteurs  latins  et 
grecs  en  ont  tant  débité  sur  la  Gaule, —  et  en  tout  cas,  fût-ce 
une  fable,  la  position  géographique  resterait  toujours,  —  si  une 
île  a  existé  où  se  tenait  un  collège  de  prêtresses  gauloises,  ce 
n'était  pas  certainement  l'île  de  Sein.  «  Elle  est  environnée  des 
«  écueils  les  plus  dangereux  qui  soient  en  Europe  ;  le  trajet  pour 
«  s'y  rendre  est  des  plus  périlleux  et  fait  trembler  les  plus  har- 
«  dis  (3).  »  Or,  dans  le  but  de  conjurer  les  tempêtes  ou  de  se 
faire  guérir  d'une  maladie,  quel  navigateur  eût  voulu  courir  le 
danger  beaucoup  plus  imminent  d'aller  se  briser  contre  les  récifs? 

D'ailleurs  Pomponius  Mêla  place  l'île  Sewadans  la  mer  Britan- 
nique, ce  qui  ne  convient  nullement  à  l'île  de  Sein  qui  est  en  plein 
Océan.  La  merBritannique,  pour  les  anciens,  était  cette  partie  de 
rOc**ti  comprise  entre  la  Gaule  et  l'île  de  Bretagne.  C'était  à  peu 


(j)  «  Insulam  quœ  vocata  est  insula  Seidzun.  »  D.  Lobineau.    Hist.  de 
Bret.  U.  p.  17.  —  D.  Le  Pelletier.  Dict.  breton,  p.  804. 

(2)  Pomponius  Mêla.  De  situ  orbis.  Lib.  III  cap.  G. 

(3)  Ogce.  Dict.  hist.  de  Bretagne,  art.  île  des  Saints. 


—  199  — 

près  ce  que  nous  appelons  maintenant  la  Manche.  Les  vieux  géo- 
graphes sont  précis  à  cet  égard.  Nous  venons  de  voir  Marcien. 
Ptolémée,  décrivant  les  côtes  de  la  péninsule  armoricaine,  n'est 
pas  moins  explicite.  Arrivé  au  promontoire  Gobée,  il  ajoute  : 
«  Le  côté  qui  aspecte  le  septentrion,  sur  la  mer  Britannique, 
«  suit  ainsi:  après  le  promontoire  Gobée  le  port  Staliocan...  » 
Cette  description  ne  peut  aucunement  s'appliquer  au  bec  du  Raz. 

Il  faut  donc  remonter  plus  au  nord,  et  chercher  YInsula  Sena 
dans  une  de  ces  îles  du  Léonais  que  l'antiquité  a  entourées  de  mys- 
térieuses légendes,  peut-être  à  l'île  d'Ouessant  par  exemple, 
YUxantis  ou  YAxanlis  des  auteurs,  que  Pline  plaçait  dans  la  mer 
Britannique  comme  c'est,  en  effet,  sa  position  et  que  l'Itinéraire 
d'Antonin  appelle  Uxantissina,  nom  dont  la  ressemblance  est 
bien  autrement  frappante  que  celle  qu'on  irait  chercher  dans 
une  dénomination  toute  moderne. 

Les  limites  des  Venètes  semblent  donc  bien  précises,  du  côté 
de  l'ouest.  S'arrêtant  à  la  mer  britannique,  ils  avaient  en  leur 
pouvoir  les  côtes  de  l'Océan,  et  leur  territoire  qui  s'étendait 
jusqu'à  la  pointe  Saint-Mathieu,  renfermait  par  conséquent  la 
plus  grande  partie  de  la  Cornouaille  et  tout  le  pays  de 
Vannes. 

Maintenant,  vers  l'orient,  jusqu'où  ce  territoire  s'étendait-il  ? 


II 


Avant  d'examiner  les  textes,  je  tiens  à  présenter  une  obser- 
vation préjudicielle,  ce  que  l'Ecole  nommerait  un  argument 
a  priori. 

Les  origines  de  la  ville  de  Vannes  ne  se  prêtent  pas  à  de  longs 
détails.  Avant  la  conquête  romaine,  et  longtemps  encore  après, 
elle  reste  entourée  d'une  profonde  obscurité.  C'est  que,  perdue 


—  200  — 

au  fond  de  son  golfe  parsemé  d'îlots  et  aux  courants  irrésistibles, 
elle  n'est  pas  placée  sur  le  chemin  des  grands  navigateurs.  Les 
écrivains  qui  en  veulent  raconter  les  fastes  n'ont  d'autre  res- 
source que  de  s'approprier  pour  leur  ville  le  récit  de  César 
et  de  placer  la  bataille  navale  sur  les  côtes  morbihannaises, 
prenant  pour  un  fait  acquis  ce  qui  n'est  rien  moins  que  prouvé. 

Quelle  différence  avec  nos  ports  de  l'embouchure  de  la  Loire  ! 
C'est  là  que  pendant  de  longs  siècles  se  déroulent  les  plus  graves 
événements  de  notre  Bretagne.  Dès  la  plus  haute  antiquité,  des 
religions  étranges  y  fleurissent,  importées  évidemment  des  pays 
d'outre-mer,  tant  elles  sont  en  désaccord  avec  les  croyances  drui- 
diques. Là  s'élevait  autrefois  une  ville  célèbre,  Corbilon,  dont  le 
commerce,  au  dire  des  anciens,  rivalisait  avec  celui  de  Marseille. 
Après  la  ruine  de  Corbilon,  c'est  encore  d'un  port  à  l'embou- 
chure de  la  Loire,  que  partent  les  navires  pour  L'île  de  Bretagne, 
et  l'on  peut  affirmer,  sur  la  foi  d'un  contemporain,  que  le  prin- 
cipal objectif  de  la  guerre  provoquée  par  les  Veuètes  fut  d'em- 
pêcher l'amoindrissement  de  cet  entrepôt  de  leur  commerce  ma- 
ritime ('). 

Est-ce  fini,  avec  la  conquête  ?  tant  s'en  faut.  Les  Saxons  ra- 
vagent incessamment  notre  littoral,  au  point  qu'il  en  reçoit  le 
nom  de  Saxonique.  Pour  les  contenir,  une  cohorte  romaine 
commandée  par  un  tribun  militaire,  occupe  la  forteresse  de 
Grannone,  au  territoire  de  Guérande,  et   plus  tard  les  exploits 


1  Quatuor  sunt  usitati  è  continente  in  Insulam  trajectus  :  nimirum  au 
ostiis  fluminum  Rheni  Sequanœ,  Ligeris  et  Garumnœ. . . . 

....  Feneti  navali  pugnâ  cum  Cœsare  congressi  sunt,  parali  ejus  brilan- 
nieam  navigationem  impedire,  quod  eoipsi  uterentur  emporio. 

Strabon.  Livre  iv.  Paris,  1620.  P.  194  et  199. 

La  cause  réelle  de  la  guerre  n'aurait-elle  pas  son  explication  daas  le  fait 
suivant,  raconté  par  le  même  auteur?  Un  P.  Grassus,  probablement  le 
lieutenant  de  César  chez  les  Andes,  ayant  enfin  reconnu  les  Iles  Cassité- 
rides,  enseigna  aux  Romains  la  voie  de  Cadix  pour  le  commerce  del'étain. 
C'était  l'anéantissement  du  monopole  des  Venètes. 

Slrab.  Ibid.,  p.  176. 


—  201  — 

légendaires  de  Gradlon-Mùr,  comte  de  Cornou aille,  «  vainqueur 
en  cent  combats,  »  rougiront  les  eaux  de  la  Loire  du  sang  de 
ces  barbares  (*). 

Les  émigrants  de  la  Bretagne  insulaire  viennent  chercher  un 
refuge  dans  notre  presqu'île  et  s'établissent  sur  nos  côtes,  bien 
avant  leur  établissement  à  Vannes.  Ils  s'y  établissent  si  forte- 
ment qu'une  armée  de  douze  mille  hommes,  commandée  par 
Kiothime,  peut  bientôt  remonter  la  Loire  pour  aller  combattre 
dans  le  Berry. 

C'est  encore  de  l'embouchure  de  la  Loire  que  va  s'élancer  le 
terrible  Guerech  pour  dévaster  le  pays  nantais. 

A  leur  tour  arrivent  les  Normands  qui  remontent  tant  de 
fois  le  fleuve,  semant  la  ruine  et  l'incendie  dans  la  ville  de  Nan- 
tes, et  qui  font  des  îles  de  Batz  et  deNoirmouliers  les  repaires  de 
leurs  brieamlases. 

Tout  cela  ne  prouve-t-il  pas  jusqu'à  l'évidence  que  nos  côtes 
guérandaises  étaient  sur  la  route  des  navigateurs  et  furent  visi- 
tées par  les  peuples  les  plus  divers  ? 

Et  fatalement,  il  en  devait  être  ainsi.  Au  temps  d'Annibal, 
nous  apprend  Poiybe,  l'embouchure  du  Rhône  était  le  centre 
d'un  immense  mouvement  commercial  (9).  Les  marchandises  y 
affluaient  en  descendant  le  fleuve,  et  le  remontaient  sur  un  grand 
nombre  de  bateaux.  Or  c'était  l'époque  où,  d'après  Pythéas,  Cor- 
bilon,  rivale  de  Marseille,  florissaità  l'embouchure  de  la  Loire. 


(!) Claret  centenis  victorin  armis; 

Testis  et  ipse  Liyer  fluvius  est,  cujusinallis 
Acta  acriter  fuerant  tune  preelia  tanta  ! 
C'est  par  ces  accents  enthousiastes  que  le  moine  Gurdestin  célébrait  les 
hauts  faits  de  Gradlon.  Un  comte  de  Cornouaille  se  signalant  au  Ve  siècle 
par  ses  exploits  à  l'embouchure  de  la  Loire,  cela  ne  donne-t-il  pas  à  pen- 
serquela  Cornouaille  armoricaine  faisait  encore  partie  du  territoire  véné- 
tique  ? 

On  a  remarqué  souvent  le  rapport  frappant  qui    existe  entre   les  deux 
dialectes  bretons  de  Cornouaille  et  de  Vannes. 
(2)  Poiybe,  m.  42. 


—  20-2  — 

Et  si  le  Rhône,  d'une  navigation  moins  facile  et  moins  étendue, 
se  prêtait  à  une  telle  activité,  quelle  ne  devait  pas  être,  sur 
l'Océan,  celle  à  laquelle  donnait  lieu  le  plus  grand  et  le  plus  na- 
vigable de  nos  fleuves,  celui  qui  arrosait  les  villes  les  plus  riches 
de  la  Gaule  et  entre  autres  Genabum  (Orléans),  qui  paraît  avoir 
été,  au  temps  de  César,  l'entrepôt  des  denrées  de  Tinté- 
rieur  ('). 

La  Loire  était  un  des  grands  chemins  de  l'antiquité.  C'était 
la  route  que  devaient  suivre  les  Venètes  quand,  en  trente 
jours,  ils  transportaient  l'étain  à  Narbonne.  Au  dire  de  Stra- 
bon,  les  marchandises  venaient  de  la  Mer  Intérieure  par  la 
voie  de  terre  au  pays  des  Arvernes  et  de  là  descendaient 
le  cours  de  la  Loire  pour  arrivera  l'Océan.  L'embouchure  du 
fleuve  était  par  conséquent  tête  de  ligne  de  cette  route  à  tra- 
vers la  Gaule  (). 

Est-il  permis  de  supposer  que  les  Venètes,  ces  continuateurs 
des  Corbiloniens,  aient  pu  négliger  une  station  de  celte  impor- 
tance, celle-là  même  qui  pouvait  seule  leur  assurer,  d'une  ma- 
nière effective,  leur  suprématie  maritime  et  commerciale  ?  11  me 
semble  que  poser  la  question,  c'est  la  résoudre. 


III 


Voyons  maintenant  si  les  textes  ne  sont  pas  en  parfait  accord 
avec  ces  données,  et  commençons  par  César  dont  le  témoignage  est 
bien  de  tous  le  plus  important.  Principal  acteur  dans  le  drame 


(*)  César.  De  Bello  gall.  vit.  3.  —  Strabon  appelle  cette  ville  Yemporium 
des  Camutes.  —  'Pustc  S'outoc  (Àstyip)  7:apoc  rvjvapov,  xb  tmv  Kapvouxiov 
![X7topeiov,  xaxà  [jtiaov  rà>u  tov  t;Xoïïv  (juvoixooj/.svov  ,  £x(3aXÀst  repèc  tov 
Qxeavov.  Strab.,  liv.  iv,  p.  191. 

(2)  Strabon,  liv.  iv,  p.  18fi. 


-  203  — 

qui  s'agitait,  ce  général  a  vu,  a  étudié  le  pays  dont  les  autres 
auteurs  ne  parlent  que  par  ouï-dire,  et  il  l'a  décrit  en  stratégiste 
expérimenté. 

Qu'il  ait  exagéré  plus  d'une  fois  les  hauts  faits  de  ses  troupes 
et  l'importance  de  ses  succès,  c'est  très  probable,  puisqu'un 
contemporain,  Asinius  Pollion,  contestait,  en  plusieurs  circons- 
tances, la  véracité  de  ses  récits  (*)  ;  mais  quand  il  s'agit  de  dé- 
tails géographiques,  il  est  impossible  de  récuser  son  incontes- 
table supériorité. 

Tout  le  monde  connaît  le  récit  de  la  guerre  des  Venètes  par 
l'auteur  des  Commentaires  ;  aussi  n'en  reproduirai-je  que  les 
deux  premiers  paragraphes,  à  cause  des  conséquences  qui  en 
découlent. 

César  entre  tout  d'abord  ainsi  dans  son  sujet:  «  Le  jeune 
P.  Crassus,  avec  la  7e  légion,  hivernait  près  de  l'Océan,  chez 
les  Andes.  Comme  le  blé  y  manquait,  il  envoya  un  certain 
nombre  de  préfets  et  de  tribuns  militaires  chez  les  peuples  voisins, 
pour  leur  demander  du  froment  et  des  vivres,  entre  autres 
T.  Terrasidius  chez  les  Unelles,  M.  Trebius  Gaïlus  chez  les  Cu- 
riosolites,  Q.  Velanius  et  T.Silius  chez   les  Venètes. 

De  toute  la  côte  maritime  de  ces  contrées,  ce  dernier  peuple  est 
celui  dont  V autorité  est  la  plus  considérable  (2),  et  en  voici  les 
causes  :  les  Venètes  ont  un  grand  nombre  de  vaisseaux  sur  les- 


(4)  Suétone,  Fie  de  César. 

(2)  La  traduction  donnée  par  M.  Orieux  dénature  complètement  le  sens  de 
ce  membre  de  phrase,  en  faisant  dire  à  César  :  «  La  cité  des  Fenètesest  une 
des  plus  considérables  et  des  plus  puissantes  de  toute  la  côte.  » 

On  peut  comparer  avec  le  texte  latin  : 

Hujus  civitatis  est  longe  amplissima  auctoritas  omnis  orœ  marilimœ 
regionum  earum,  quod  et  naves  liaient  plurimas  quibus  in  Britanniam 
navigare  consuerunt,  et  scimtia  atque  usu  naulicarum  rerum  reliquos  an- 
tecedunt  et  in  magno  impetu  maris  atque  aperto,  paucis  portubus  interjec- 
lis  quos  tenent  ipsi,  omnes  fere  qui  eodem  mari  uti  consuerunt  habent 
vectigalcs.  (De  Bello.  g  ail.  m.  8.^ 


—  204  - 

quels  Us  ont  coutume  d'aller  trafiquer  en  Bretagne;  ils  sur- 
passent les  autres  peuples  dans  la  connaissance  et  la  pratique 
de  la  navigation,  et  possédant,  sur  une  mer  vaste  et  orageuse,  le 
petit  nombre  de  ports  qui  y  sont  disséminés,  ils  ont  pour  tribu- 
taires presque  tous  ceux  qui  naviguent  dans  celte  mer.  » 

On  remarquera  que,  pour  la  traduction  de  ce  dernier  mem- 
bre de  phrase,  je  me  sépare  complètement  de  plusieurs  de  mes 
devanciers.  Je  crois  que  la  construction  latine  exige  impérieu- 
sement que  les  mots  omnes  fere,  presque  tous,  se  rapportent, 
non  pas  aux  ports  de  cette  mer  vaste  et  orageuse,  lesquels  sont, 
sans  restriction,  possédés  par  les  Venètes,  mais  bien  aux  navi- 
gateurs. Ainsi  l'interprète  la  traduction  Artaud,  revue  par  M. 
Félix  Lemaître  (l)  ;  ainsi  l'expliquent  des  professeurs  que  j'ai  con- 
sultés, et  toutes  les  personnes  qui  se  sont  livrées  à  une  sérieuse 
étude  delà  langue  latine  seront  de  cet  avis.  Je  suis  môme  per- 
suadé que  les  auteurs  qui  ont  traduit  différemment  n'y  ont  été 
amenés  que  parce  que  l'affirmation  de  César,  prise  dans  son 
véritable  sens,  leur  semblait  par  trop  absolue. 

Mais,  en  l'examinant  de  plus  près,  on  verra,  au  contraire, 
qu'elle  est  d'une  précision  remarquable  et  qu'elle  concorde, 
d'une  manière  frappante,  avec  les  textes  des  géographes  que  nous 
citions  en   commençant. 

Quand  César  attribue  aux  Venètes  une  autorité  prépondérante 
sur  les  peuples  de  toute  la  côte  maritime  de  ces  contrées,  quelle 
côte  entend-il  désigner?  Celle  naturellement  qu'il  vient  dénom- 
mer dans  la  phrase  précédente,  qui  part  du  pays  des  Unelles  et 
des  Curiosolites  pour  aboutir  à  l'autre  extrémité  de  la  péninsule 
armoricaine,  c'est-à-dire  toutes  les  côtes  du  Cotentin  et  de 
notre  Bretagne  actuelle  jusqu'à  la  Loire. 


(*)  Quant  à  la  traduction  de  Wailly,  vieille  de  cent  ans,  et  choisie  par 
M.  Orieux,  les  mots  omnes  fore  n'y  sont  pas  traduits  du  tout.  Il  serait 
trop  long  d'ailleurs  de  relever  toutes  les  inexactitudes  dont  elle  fourmille. 
Elie  aurait  bien  dû  être  revue  et  corrigée,  avant  de  nous  être  produite. 


—  205  — 

Après  avoir  mentionné  la  supériorité  des  Venètes  sur  leurs  voi- 
sins, César  énumère  les  causes  qui  l'ont  produite  :  le  grand 
nombre  de  leurs  vaisseaux,  leur  science  de  la  navigation,  leur  ha- 
bitude de  la  mer,  leur  actif  commerce  avec  l'île  de  Bretagne  ;  puis, 
dans  une  phrase  incidente  où  se  trahissent  des  préoccupations 
causées  par  une  guerre  toute  nouvelle  pour  lui,  il  ajoute  que 
«  possédant  sur  une  mer  vaste  et  orageuse  le  peu  déports  qui  s'y 
trouvent,  les  Venètes  ont  pour  tributaires  presque  tous  les  navi- 
gateurs qui  la  fréquentent.  » 

Cette  mer  vaste  et  orageuse,  c'est  l'Océan  Atlantique.  La  Mé- 
diterranée, la  mer  Britannique  sont  limitées  par  des  côtes,  mais 
l'Océan  Atlantique  est  sans  limites  et  sans  abri.  Ce  qui  fait  dire  à 
César  quelques  lignes  plus  loin  :  «  autre  chose  est  de  naviguer 
sur  une  mer  enfermée  dans  les  terres  que  sur  l'Océan  immense  et 
ouvert  de  tous  côtés.  »  Et  pour  qu'il  n'existe  aucun  doute 
sur  sa  pensée,  l'historien  emploie  encore  le  même  mot  apertus, 
ouvert,  dont  il  s'est  déjà  servi  pour  peindre  la  partie  occupée 
par  les  Venètes. 

Nous  connaissons  la  position  des  autres  peuples  côtiers  de  la 
péninsule.  Osismiens,  Curiosolites,  Unelles  sont  situés  sur  les  ri- 
vages de  la  mer  Britannique;  les  géographes  nous  l'ont  appris, 
et  César  lui-même  n'a  pas  négligé  de  nous  le  dire.  Car  nom- 
mant les  Osismiens  parmi  les  peuplades  maritimes  alliées  des  Ve- 
nètes, il  prend  soin  d'ajouter  que  ceux-ci  demandent  des  secours 
a  l'île  de  Bretagne  située  vis-à-vis  de  ces  contrées  (4). 

Il  est  donc  bien  incontestable,  et  cela  de  l'avis  de  tous  les  au- 
teurs, que  la  mer  Britannique  des  anciens  commençait  avec   les 


(4)  Socios  sibiad  id  bellum  Oshmios,  Lcxovios,  Nannetcs,  Âmbianos, 
Morinos,  Diablintes,  Menapios  adsciscunt;  auxilia  ex  Britaimia,  quœ  contra 
cas  regiones  posita  est,  accersunt.  (De  Bello  gall.  III.  9.) 

La  traduction  choisie  par  M.  Orieux  rend  ce  passage  à  contre-sens, 
quand  elle  fait  dire  à  César  :  Ils  (les  Venètes)  font  venir  des  secours  de 
la  Bretagne  qui  est  située  vis-à-vis  d'eux,  de  l'autre  coté  de  lamcr. 


coles  osismienaes,  et  que  seuls  de  tous  les  peuples  de  la  pénin- 
sule armoricaine  lesVenètes  étaient  situés  sur  l'Océan.  Or  comme 
ils  possédaient,  non  pas  presque  tous  les  ports,  mais  tous  les  ports 
decette  côte,  on  est  bien  forcé  d'admettre  que  leur  domination 
embrassait  la  presqu'île  guérandaise  et  ne  s'arrêtait  qu'aux  côtes 
pictones. 

Avec  cette  interprétation  du  texte  de  César,  la  seule  vraie,  se- 
lon nous,  point  d'équivoque  possible,  rien  de  laissé  dans  l'incer- 
titude. Les  limites  du  territoire  des  Venètes  sont  irrévocablement 
fixées,  à  l'ouest  comme  à  l'est:  à  l'ouest,  au  promontoire  Gobée  qui 
n'est  autre  que  le  cap  Saint-Mathieu,  et  à  l'est,  à  l'embouchure  de 
la  Loire.  Impossible  de  trouver  sur  cette  partie  de  l'Océan  un 
point  libre  quelconque  pour  y  établir  des  Samnites;  et  dans  la 
presqu'île  guérandaise  moins  que  partout  ailleurs,  puisqu'  à  l'em- 
bouchure de  la  Loire  se  trouvait,  suivant  Srabon,  un  des  quatre 
ports  de  Gaule  où  l'on  s'embarquait  pour  l'île  de  Bretagne  cl 
que  ce  port  ne  pouvait  appartenir  qu'aux  Venètes  lesquels  avaient 
le  monopole  du  commerce  avec  l'île. 

Toutefois,  j'admets  qu'il  puisse  y  avoir  erreur  de  ma  part  et 
que  la  traduction  acceptée  par  mes  devanciers  doive  être  préférée. 
On  va  voir  qu'avec  cette  dernière  version  nous  arriverons  eucore 
aux  mêmes  conclusions. 


IV 


Ici  je  viens  me  heurter  contre  le  travail  récent  dont  j'ai  parlé 
et  qu'il  faut  bien  aborder  de  front.  Pour  fixer  la  géographie  des 
peuples  de  nos  contrées,  notre  éminent  contradicteur  s'appuie 
sur  Pline,  Strabon  et  Ptoîémée  que  nous  discuterons  bientôt  avec 
lui.  Mais  quoiqu'il  nous  rappelle  souvent  au  texte  des  Commen- 
taires, je  cherche  en  vain  dans  son  Étude  un  argument  quel- 
conque qu'il  y  ait  puisé. 

M.  Kerviler  avait  fait  observer  que  «si  lesVenètes  n'avaient  pos- 


—  2U7  — 

sédé  que  le  Morbihan  et  les  cent  kilomètres  de  cotes  qui  vont 
de  l'Ellé  à  la  Vilaine,  César  n'eût  pu  parler  de  leur  littoral 
comme  ouvert  aux  grands  mouvements  de  la  mer,  puisqu'il 
n'aurait  formé  qu'une  immense  baie  fermée;  que  la  phrase  de 
César  s'applique  parfaitement  au  contraire  à  toute  l'étendue  de 
la  presqu'île  armoricaiue;  que  ces  mots  paucis  porlubus  inter- 
jectis  qicos  tenent  ipsi  omnes  fere  indiquent  clairement  qu'ils 
avaient  en  leur  possession  presque  tous  les  ports  de  la  pres- 
qu'île, et  que  les  anciens  géographes  n'en  signalant  qu'un 
fort  petit  nombre  au  nord,  à  peine  un  ou  deux,  on  doit  en  con- 
clure qu'ils  possédaient  tous  ceux  du  sud  (*).  » 

A  ce  raisonnement  M.  Orieux,  répond  d'une  façon  quelque 
peu  magistrale  : 

«  Cela  ne  suffit  pas  pour  nous  autoriser  à  conclure  que  les  Ve- 
«  nètes  possédaient  toute  la  côte  entre  la  Vilaine  et  la  Loire. 
«  C'est  une  conséquence  trop  absolue,  à  laquelle,  certes,  César 
«  n'a  pas  songé  ;  que  n'admettent  pas  les  écrivains  antérieurs 
«  au  Ve  siècle,  ni  même  la  nature  des  lieux,  et  qu'il  serait 
«  malaisé  de  justifier  (2).  » 

«  C'est  une  conséquence  trop  absolue  »  dites-vous.  Pourquoi, 
si  elle  se  déduit  rigoureusement  du  texte  des  Commentaires  ? 

«  11  serait  difficile  de  la  justifier.  »  Mais  c'est  précisément  cette 
justification  qu'on  vous  donne,  à  vous  de  démontrer  qu'elle  porte 
à  faux,  apportez  des  preuves.  «  Les  écrivains  antérieurs  au  Ve 
siècle  ne  l'admettent  pas.  »  Quels  écrivains  ?  Nous  verrons  tout 
à  l'heure  que  ce  ne  sont  pas  ceux  que  vous  avez  cités.  «  La  na- 
ture même  des  lieux  s'y  oppose,»  dites-vous.  Eh  !  en  quoi  ?  Qui 
peut  s'opposer  dans  la  nature  du  territoire  guérandais,  à  ce  qu'il 
appartînt  aux  Venètes  ?  Pour  ces  marins  habitués  à  franchir  l'O- 


(J)  Études  critiques  sur  la  géographie   de  la  presqu'île  Armoricaine, 
par  M.  Kerviler.  P.  14  et  15.  Note  de  César  chez  les  Venètes. 
{-)  César  chez  les  Venètes.  Ibid.  p.  53. 


—  208  — 

céan,  la  Vilaine  était-elle  donc,  comme  on  dit  de  nos  jours,  une 
frontière  scientifique  ? 

«  César,  certes,  ajoutez-vous,  n'y  a  pas  songé.  »  Qu'en  savez- 
vous?  La  pensée  d'un  auteur  ne  peut  se  dégager  que  de  ses 
écrits,  et  ici  elle  est  manifeste.  Cette  côte  maritime  dont  parle 
le  conquérant  et  où  presque  tous  les  ports  sont  possédés  par  les 
Venètes,  c'est-à-dire  au  moins  tous  les  ports  du  Sud,  suivant 
l'observation  très  juste  de  M.  Kerviler,  est-il  possible  de  la  scin- 
der avant  l'embouchure  de  la  Loire.  ?  C'est  la  limite  naturelle, 
celle  que  Pline  lui  a  également  assignée.  En  deçà  de  cette  li- 
mite, les  mots  totius  orœ  maritimœ  des  Commentaires  n'auraient 
plus  de  sens  ;  au  delà,  sont  les  Pictons  et  les  Santons,  alliés  de 
César,  lesquels  ont  une  flotte  et  des  ports  sur  l'Océan. 

Les  Venètes  s'étendent  donc  jusqu'à  la  Loire,  et  dès  lors  qu'un 
port  existe  non  loin  de  son  embouchure,  ce  port  leur  appar- 
tient. 

Telle  n'est  pas  l'opinion  de  M.  Orieux,  car  il  ajoute  :  «  Mais, 
«  poursuit-on,  en  insistant,  il  y  avait  en  Gaule  quatre  points  du 
«  littoral  où  l'on  s'embarquait  pour  l'île  de  Bretagne,  les  em- 
«  bouchures  du  Rhin,  de  la  Seine,  de  la  Loire,  de  la  Garonne.  De 
«  ce  que  les  Venètes  possédaient  les  ports  de  la  côte,  et  qu'ils 
«  avaient  le  monopole  du  commerce  de  l'île  de  Bretagne,  ils 
«  étendaient  leur  domination  jusqu'à  la  Loire.  Et  d'un  autre 
«  côté,  Pline,  qui  leur  attribue  toutes  les  îles  du  littoral,  descend 
«  jusqu'à  Oléroupour  en  nommer  une  qui  ne  soit  pas  à  eux  ('). 

«  Voilà  qui  est  bien  !  Parce  que  les  Vénitiens  ont  été  les 
«  maîtres  du  commerce  de  la  Méditerranée,  ne  faut-il  pas  qu'ils 
«  aient  possédé  les  deux  rives  de  l'Adriatique?  et  aussi  les 
«  côtes  de  la  Grèce,  et  celles  de  la  Turquie  également,  et...  Où 


(')  Blanchard.  Le  Dialecte  breton.  Bulletin  «la  la  Société  Archéologique 
p.  MO.  ISote  de  César  chez  les  Venètes. 

Ai-je  besoin  de  faire  observer  que  ces  deux  questions  des  ports  et  des 
îles  groupées  ici  par  M.  Oricus,  sont  parfaitement  distinctes  dans  l'étude 
précitée? 


-  209  — 

«  n'irait-on  pas  avec  un  pareil  raisonnement  ?  Et  les  Génois, 
«  que  n'auraient-ils  pas  possédé  en  Europe?  Et  l'Angleterre 
«  dont  les  navires  font  actuellement  notre  commerce,  serait-elle 
«  donc  aujourd'hui  maîtresse  de  nos  ports  ? 

«  Pour  attribuer  aux  Venètes  l'embouchure  de  la  Loire,  ainsi 
«  que  l'île  de  Noirmoutiers,  il  faut  d'autres  raisons  que  celles 
«  qu'on  vient  de  nous  exposer  (*).  » 

Rendons  grâce  à  l'auteur  de  n'avoir  pas  poussé  plus  loin 
une  énumération  qui  pouvait  devenir  interminable.  Il  s'agit 
bien,  en  vérité,  de  quelque  station  lointaine!  Comment!  voilà 
un  peuple  qui,  selon  Strabon  et  Ptolémée,  occupe  la  côte  méri- 
dionale de  la  péninsule  armoricaine  jusqu'au  goulet  de  Brest,  et 
sur  cette  même  côte,  il  y  a  un  port  qui  lui  est  indispensable, 
entre  tous,  parce  qu'il  y  concentre  son  commerce  avec  la 
Grande-Bretagne,  et  ce  port-là,  seul,  ne  serait  pas  à  lui  !  et  c'est 
une  peuplade  inconnue  dans  l'histoire  qui  abritera  ses  vaisseaux 
et  s'enrichira  de  ses  trésors  !  Qu'il  plaise  à  cette  peuplade  de 
fermer  son  port  aux  Venètes,  leur  puissance  maritime  s'ébran- 
lera du  même  coup  !  Etait-ce  une  situation  possible  pour  ces 
hardis  navigateurs,  quand  il  leur  eût  été  si  aisé  de  s'affranchir 
de  cette  dépendance  en  transportant,  un  peu  plus  loin,  dans  un 
de  leurs  ports  à  eux,  l'entrepôt  de  leur  commerce  avec  l'île? 
C'est  absolument  comme  si  la  France  avait  son  comptoir  de 
Marseille  en  Italie,  par  exemple,  ou  l'Angleterre  son  Liverpool 
sur  notre  littoral.  Mais  on  veut,  pour  les  besoins  de  sa  cause, 
établir  des  Samnites  dans  la  presqu'île  guérandaise,  il  faut  bien, 
coûte  que  coûte,  en  expulser  les  Venètes. 

Et  l'on  ne  prend  pas  garde  que  les  Commentaires  qui  ont 
décrit  la  puissance  maritime  de  ce  dernier  peuple  en  termes  si 
magnifiques  ne  nomment  pas  une  seule  fois  les  Samnites. 


(4)  César  chez  les  Fenètes.  Ibid.,  p.  55. 

1881  14 


210 


Mais  peut-être  les  contemporains  vont-ils  modifier  les  impres- 
sions que  nous  laisse  le  récit  de  César.  J'ouvre  l'étude  de  M. 
Orieux,  et  j'y  lis  ce  qui  suit  :  «  Dans  la  Lyonnaise,  dit  Pline, 
sont  les  Lexovii,  les  Vellocasses,  les  Galleti,  les  Veneti,  les 
Abrincatui,  les  Osismii.  Là  coule  le  célèbre  Liger;  là  une  pénin- 
sule remarquable  s'avance  dans  l'Océan  depuis  les  limites  osis- 
miennes.  On  lui  donne  625  milles  de  circuit,  et  125  de  largeur. 
Au  delà  sont  les  Nannètes. 

«  Ainsi,  ajoute  l'auteur  de  César  chez  les  Venèies,  d'après  Pline 
«  qui  vécut  de  l'an  23  à  l'an  79  de  notre  ère,  les  Nannètes  étaient 
«  en  dehors  de  la  péninsule  armoricaine,  et  non  dans  la  pénin- 
«  suie  où  nous  les  trouvons  au  Ve  siècle  (').  » 

A  cette  objection  on  pourrait  se  contenter  de  répondre  avec 
l'auteur  lui-même  :  «  nous  devons  confesser  que  la  situation  des 
«  peuples  de  la  Gaule  au  Ve  siècle  ne  nous  préoccupe  aucune- 
«  ment  (2).  »  En  effet,  qu'est-ce  que  cela  prouve?  Tout  simple- 
ment qu'au  temps  de  Pline,  les  Nannètes  n'occupaient  pas 
encore  la  presqu'île  guérandaise  que  leur  attribua  plus  tard  le 
remaniement  des  évêchés.  C'est  tout  à  fait  notre  opinion.  Biais 
où  peut-on  voir  là  un  motif  d'aller  placer  les  Nannètes  aux  en- 
virons de  Lisieux  ? 

Il  ressort  du  texte  de  Pline  qu'à  ses  yeux,  celte  péninsule, 
qui  s'avançait  dans  l'Océan  jusqu'au  fond  des  côtes  osismiennes, 
était  formée  par  la  mer  et  non  par  les  fleuves.  Notre  contradic- 


(')  César  chez  les  Fenètes,  p.  40. 

(a)  Ibicl.  p.  45. 

Il  faudrait  reculer  de  plusieurs  siècles  pour  être  dans  la  vérité.  Aucune 
pièce  n'établit  qu'au  Ve  siècle  la  presqu'île  guérandaise  appartînt  déjà  aux 
Nannètes,  quand  plusieurs  documents,  au  contraire,  démontrent  ses  attaches 
à  la  Vénétie. 


—  211  — 

leur  le  reconnaît  lui-même,  quand  il  dit  :  «  Les  divisions  géo- 
«  graphiques  des  anciens  nous  apprennent  qu'ils  limitent  cette 
«  péninsule  à  la  Basse-Loire  (*).  »  Les  Nannètes,  situés  sur  la 
rive  droite  du  Liger,  étaient  donc  placés  en  dehors  de  la  pénin- 
sule armoricaine  ;  leur  position  se  trouve  ainsi  nettement  dé- 
finie, et  ce  qu'en  dit  Pline  est  rigoureusement  exact.  En  éta- 
blissant cette  peuplade  au  delà  des  Andes,  et  bien  loin  de  la 
Loire,  on  fait  dire  un  non-sens  à  l'auteur  latin.  Car,  dans  ce  cas, 
qu'avait-il  besoin  de  citer  les  Nannètes,  plutôt  que  les  Céno- 
mans,  par  exemple,  ou  les  Garnutes  ou  tout  autre  peuple 
méditerrané  ? 

Quant  aux  Samnites,  je  ne  vois  pas  ce  qu'ils  ont  à  faire  en 
tout  ceci.  Dans  la  nomenclature  des  peuplades  maritimes,  Pline 
ne  les  nomme  même  pas,  ce  qui  eût  été  un  étrange  oubli  s'ils 
eussent  occupé  tes  soixante-dix  kilomètres  de  côtes  de  la 
Vilaine  à  la  Loire.  Ils  méritaient  bien  une  mention,  au  même 
titre  au  moins  que  les  Abrincates  ou  les  Vellocasses. 

Non,  si  Pline  n'en  parle  pas,  si  César  n'en  a  pas  parle  non 
plus,  c'est  que  leur  peu  d'importance  ne  leur  méritait  pas  cet 
honneur,  et  que  «  le  pays  d'entre  Vilaine  et  Loire  était  absolu- 
«  ment  vénétisé.  Sans  cela,  comme  le  fait  observer  très  juste- 
«  ment  M.  Burgault,  César  eût  nommé  les  Samnites  parmi  les 
«  peuples  armoricains;  Pline,  énumérant  les  populations  éche- 
«  lonnées  sur  la  côte,  du  Rhin  à  la  Loire,  n'eût  pas  indiqué  les 
«  Venètes  comme  le  dernier  peuple  avant  l'embouchure  du  se- 
«  cond  de  ces  fleuves,  et  on  ne  retrouverait  pas  Guérande  fi- 
«  gurant,  plusieurs  siècles  après,  au  territoire  des  Venètes  (5).  » 


(i)  Ibid,  p.  46. 

(2)  Notice  sut  les  Peuples  Armoricains,  par  M.  Burgault.  Bulletin  de  la 
Société  Polymathique  du  Morbihan.  1875,  p.  50. 

L'énuinération  de  Pline  n'est  pas,  sans  doute,  dans  l'ordre  géographi- 
que ;  mais,  la  position  des  autres  peuples  étant  connue,  M.  Burgault  a  pu 
dire,  avec  raison,  que  les  Venètes  sont  le  dernier  peuple  nommé  avait  l'em- 
bouchure de  la  Loire. 


—  212  — 


VI 


is,  nous  répond  M.  Orieux,  que  parlez- vous  deNannètes  sur 
Ja  rive  droite  de  la  Loire  ?  Strabon  lui-même  y  place  les  Samni- 
tes. 

«  Ouvrons  Strabon,  et  lisons  attentivement....  Il  parle  deux 
«  fois  des  peuples  qui  bordent  la  rive  droite  de  la  Basse-Loire 
«  qu'il  appelle  Samnites,  dans  un  endroit,  et  Namniles  dans 
«  l'autre.  Voici  comment  il  s'exprime: 

La  Loire  se  décharge  entre  les  Piétons  et  les  Namnites.... 

—  Dans  l'Océan,  il  existe  une  petite  île...  située  vers  le  haut 
de  l'embouchure  du  fleuve  Liger,  laquelle  est  habitée  par  les 
femmes  des  Samnites. 

«  Strabon  n'en  dit  pas  davantage  sur  le  sujet  qui  nous  occu- 

«  pe Nous  en  concluons  qu'il  y  a  dans  le  manuscrit  de  Stra- 

«  bon  :  «  La  Loire  se  décharge  entre  lesPictons  et  les  Samnites.  » 
«  Pour  contester  cette  conclusion  qui  n'a  contre  elle  qu'une 
«  lettre  du  texte  grec,  il  faut  mettre  Strabon  en  contradiction 
«  avec  lui-même,  et  en  opposition  avec  les  géographes  de  son 
temps  (*).» 

Disons  tout  d'abord  que  la  traduction  de  la  première  phrase 
n'est  pas  rigoureusement  exacte  :  Il  faudrait  la  Loire  coule  entre 
es  Pictons  et  les  Namnites,  ce  qui  est  bien  différent  (2). 

ExëaXXst signifie  :  coule  de  sa  source,  découle,  descend;  si  le  cé- 


(*)  César  chez  les  Fenètes,\>.  49. 

(2)  'O  oà  Aeifip  |j.£xa^ù  ILxtovcov  ri  yuxl Najjwrajiv  IxfiaXXsi.  —  Strabon, 
livre  IV,  p.  190. 

La  signification  du  verbe  grec  ne  peut  être  mieux  précisée  que  par  le 
passage  cité  plus  haut  (p.  202),  oh  Strabon  dit  que  la  Loire  passant  par 
Genabum  (Orléans),  descend  vers  l'Océan  •  ExêaXXsi  -rrpoç  xbv  Qxeocvov  . 

Le  verbe  éxéaXXs'.v  ne  prendrait  le  sens  de  se  décharger  que  s'il  était 
suivi  de  la  préposition  e«r,  comme  nos  verbes  couler  ou  descendre  suivis 
de  la  préposition  dans. 


—  213  ~ 

lèbre  géographe  eût  voulu  dire  se  décharge,  il  eût  écrit  e-^JaXXsi, 
mot  qu'il  emploie  en  pareil  cas. 

Nous  ferons  observer  ensuite  que  la  substitution  de  l' i  à  l'e 
est  fréquente  chez  les  auteurs  grecs.  Ptolémée  lui-même  ne  s'en 
ait  pas  faute  en  maint  endroit.  Avec  ce  géographe,  les  Andes  ou 
Andecaves  se  changent  en  Ondicaves  'QvSucaouai,  les  Aulerques  de- 
viennent les  Aulirques  :  ASXfpxux  :  Aulirques  Génomans,  Aulirques 
Diablites,  Aulirques  Eburaïces.  Faut-il  en  conclure  qu' Aulirques  et 
Aulerques  étaient  des  peuples  différents  ?  Pas  le  moins  du  monde 
assurément,  et  M.  Orieux  a  eu  bien  raison  de  conserver  les 
formes  Andecaves  et  Aulerques.  Mais  pourquoi  agir  autrement 
pour  les  Namnites  et  les  Namnètes? 

Le  docte  Bizeul  croyait  aussi  lui  à  une  erreur  de  copiste, 
mais  il  arrivait  à  des  conclusions  diamétralement  opposées.  Selon 
lui,  Nannètes,  Namnètes,  Namnites,  Samnites,  Amnites  étaient  le 
môme  peuple,  et  ce  peuple  était  les  Nannètes.  La  profonde  éru- 
dition dont  il  fit  preuve  dans  cette  étude  qu'ont  publiée  nos  An- 
nales, rallia  même  à  son  opinion  des  savantsdu  premier  ordre  (*). 

Je  ne  crois  pas  toutefois  qu'on  doive  admettre  une  solution 
aussi  radicale,  en  l'un  ou  l'autre  sens.  Samnites  et  Namnètes  exis- 
taient bien  simultanément,  avec  la  différence  qu'il  y  a  entre  une 
petite  tribu  et  une  importante  peuplade  ;  jen'en  veux  pour  preuve 
que  les  textes  précités  de  Strabon.  Quand  ce  géographe,  non 
point  dans  l'énumération  des  peuples  de  la  Gaule,  remarquons-le 
bien,  mais  à  la  suite  d'une  longue  étude  sur  le  culte  national, 
parle  incidemment  des  femmes  des  Samnites,  vouées  au  culte  de 
Bacchus,  et  qu'il  les  représente  habitant  unepetite  île  vers  l'em- 
bouchure de  la  Loire,  d'où,  à  certaines  époques,  elles  allaient  re- 
joindre leurs  maris,  il  est  évident  qu'il  ne  pouvait  avoir  en  vue  la 
grande  peuplade  des  Nannètes,  séparée  des  Pictons  par  la  Loire. 
II  signalait  un  fait  local,  exceptionnel,  en  désaccord  avec  le  drui- 


(*)  Des  Nannètes  aux  époques  celtique  et  romaine.  Bulletin  de  la  Société 
Arch.  de  Nantes.  1859.  p.  114. 


—  214  — 

disme  gaulois,  assez  bizarre  pour  être  relaté,  mais  qui  n'était  ap- 
plicable qu'à  un  nombre  restreint  d'individus.  Un  peuple  tout  en- 
tier n'existe  pas  dans  des  conditions  aussi  anormales. 

L'auteur  de  César  chez  les  Venètes  n'admet  pas  ces  subtilités. 
Pour  lui,  Namnites  et  Samnites  sont  tout  un.  Et  voyez  à  quelles 
conséquences  il  est  forcé  d'aboutir.  Tandis  qu'à  ses  yeux  ces  Sam- 
nites forment  un  peuple  assez  important  pour  s'étendre  du  fond 
de  la  presqu'île  guérandaise  jusqu'aux  limites  de  l'Anjou,  et  pour 
occuper  un  territoire  de  quatre  à  cinq  mille  kilomètres  carrés, 
leurs  femmes, — et  leurs  enfants  aussi,  caries  maris  ne  pou- 
vaient garder  avec  eux  des  enfants  à  la  mamelle,  —  tiennent  toutes 
à  l'aise  dans  une  petite  île,  «  infime  îlot  d'un  quart  de  lieue  car- 
rée »  suivant  l'évaluation  de  M.  Orieux  lui  même  (')!  Je  le  demande, 
est-ce  admissible?  Mettez  même  plusieurs  petites  îles,  si  vous  le 
voulez,  avec  Denys  le  Périégète,  l'impossibilité  n'en  subsiste  pas 
moins. 

Car  la  phrase  de  Strabon  ne  se  prête  point  à  des  accommo- 
dements. Il  ne  dit  point  «  des  femmes  samnites  »,ce  qui  pour- 
rait faire  croire  que  toutes  n'étaient  pas  dans  l'îlot,  mais  bien  «  les 
femmes  des  Samnites,  *ka  tSv  2*[avit£v -fuyaôcaiy,  »  c'est-à-dire 
la  généralité.  Il  n'y  a  donc  aucune  identité  possible  entre 
les  Samnites,  petite  tribu  dont  le  peu  d'importance  se  mesure  au 
nombre  de  leurs  femmes,  et  les  Namnites  que  la  Loire  sépare  des 
Pictons.  D'où  je  conclus  que  s'il  est  un  système  qui  «  mette  Stra- 
bon en  contradiction  avec  lui-même  »  c'est  bien,  à  coup  sûr, 
celui  que  nous  combattons. 

Voulez-vous  voir,  au  contraire,  avec  quelle  précision  Strabon 
place  des  Venètes  là  où  vous  placez  des  Samnites  ? 
«  Les  Belges, dit-il,  se  divisent  en  quinze  peuples  qui  habitent 
entre  le  Rhin  et  la  Loire,  près  de  l'Océan.  »  Et,  partant  du  pays 
des  Ménapiens,  au  nord  de  la  Gaule,  pour  descendre  vers  le  midi, 


(»)  Cet  infime  îlot  d'un  quart  de  lieue  carrée, choisi  pour  demeure  parles 
femmes  <Jes  Samnites.»  César  chez-  les  Fenctes,  p.  G3. 


—  215  — 

le  géographe  énumère  les  différentes  peuplades  maritimes  situées 
entre  le  Rhin  et  la  Seine,  nomme  en  dernier  lieu,  les  Lexoviens 
placés  sur  la  rive  gauche  de  ce  second  fleuve,  puis  franchissant 
tout  un  territoire  intermédiaire  occupé  par  la  Gaule  celtique,  il 
ajoute  :  «  Après  ceux  que  je  viens  de  mentionner  se  trouvent  les 
«  autres  peuples  belges  qui  habitent  près  de  l'Océan,  au  nombre 
«  desquels  sont  les  Venètes  qui  engagèrent  une  bataille  navale 
«  contre  César  (4).  »  Ici,  évidemment,  Strabon  est  arrivé  à  la 
Loire,  limite  extrême  qu'il  s'était  assignée.  Car  il  se  replie  ensuite 
vers  le  fond  de  la  péninsule  armoricaine,  pour  nommer  les  Osis- 
miens,  et  clôt  ainsi  l'énumération  des  peuples  belges  compris  entre 
le  Rhin  et  la  Loire  (2). 

En  tout  cela,  encore,  qui  peut  faire  trouver  des  Samnites  sur 
les  côtes  guérandaises  ? 


VII 


Mais  ces  Samnites  qui  nous  ont  échappé  jusqu'ici,  vont  enfin 
apparaître  avec  Ptolémée.  Nous  arrivons  au  texte  sur  lequel  l'au- 
teur de  César  chez  les  Venètes  a  échafaudé  tout  son  système  géo- 
graphique. 


(i)  Primant  laudem  Bclgis  tribuunt,  divisis  in  quindecim  gantes,  quai 
habitant  inter  Iihenum  et  Ligerim,  ad  Oceanum.... 

Post  dictas  génies,  Behjœ  sunt  ad  Oceanum  pertinentes.  De  his  Feneli 
navati  pugna  cum  Cœsare  congressi  sunt. 

Strabon,  liv.IV.Paris,  1620.  p.  194  et  196. 

(2)  Quoique,  d'après  les  divisions  de  la  Gaule,  les  Venètes  appartinssent 
a  la  Celtique, ilest  horsdedoutequede  nombreuses  affinités  les  rattachaient 
à  la  Belgique  ou  ils  recrutèrent  leurs  alliés,  et  que  des  liens  originels, 
un  élément  commun,  slave  ou  kymmrique,  unissaient  tous  ces  peuples . 
Les  chefs  de  la  confédération  armoricaine  n'avaient-ils  pas  dans  tout  le  nord 
de  l'Europe  des  membres  dispersés  de  leur  grande  famille  ?  Fenèdes  chez 
les  Sarmates,  Vindiles  chez  les  Germains,  Gwened  en  Ecosse  et  au  pays 
Galles,  et  peut-être  Feneles  et  Feneliocasses  sur  nos  côtes. 


—  216  — 

«  Nous  n'avons  rien  de  plus  précis  chez  les  anciens  géogra- 
«  phcs,  dit  M.  Orieux,  que  les  indications  données  par  Ptolémée, 
«  au  second  siècle  de  notre  ère.  Parlant  des  peuples  de  la  Gaule 
«  Lyonnaise,  il  dit,  au  chapitre  VII  du  livre  Iï  : 

§  5.  La  côte  septentrionale,  à  partir  du  fleuve  Sequana,  est  oc- 
cupée par  ...et  enfin  les  Osismii  dont  le  territoire  s'étend  jus- 
qu'au promontoire  Gobœum,  et  qui  ont  pour  ville  Vorganium, 
17(140'  —  SOdlO'. 

§  6.  La  côte  occidentale,  sous  les  Osismii  est  occupée  par  les 
Veneli,  dont  la  ville  est  Dariorigum,  11 d  20'  —  49d  15'. 

Et  au-dessous,  sont  les  Samnitœ  qui  s'étendent  jusqu'au  fleuve 
Liger. 

§  7.  Bans  l'intérieur,  à  V orient  des  Veneti^  sont  les  Aulercii- 
Diablitœ  dont  la  ville  est  Nœdunum  (*),  1M-500. 

§8.  Et  à  l'orient  des  Samnitœ,  les  Andecavœ  dont  la  ville  est 
Juliomagus,  18d  50'-49d. 

§  9.  A  la  suite  de  ceux-ci,  sont  les  Aulercii- Cenomani,  dont  la 
ville  est  Vindunum,  20d  45'  — 49d  20\ 

puis  les  Namnetœ,  dont  la  ville  est  Condevincumj  21d  15'- 
50d  (2). 

«  Le  texte  que  nous  venons  de  reproduire,  ajoute  M.  Orieux, 
«  ne  saurait  laisser  le  moindre  doute  sur  la  situation  donnée  par 
«  Ptolémée  aux  Venètes,auxSamnites  et  aux  Namnètes;  ces  der- 
«  niers  sont  placés  à  l'orient  des  Andecaves  et  des  Cenomans; 
«  et  la  ville  deGondevincuni  est  d'un  degré  plus  au  nord  que 
«  celle  de  Juliomagus  (Angers).  Nous  savons  combien  cette  con- 
clusion paraîtra  hardie:  mais  n'y  sommes-nous  pas  conduits  pas 
«  la  lecture  des  textes  primordiaux  ?  Quant  aux  Samnites,  ils  sont 


(•)  Il  faudrait  écrire  Aidircii,  Nœodunum  et  Ondicavœ,  pour  rendre 
exactement  le  texte  grec. 

(2)  Traduction  de  M.  Léon  Renier.  —  Annuaire  de  la  Société  des  Anti- 
quaires de  France.  Année  1848.  Noie  de  César  chez  les  Fenètes. 


—  217  - 

«  placés  bien  exactement  entre  l'Océan  et  les  Andecaves,  d'une 
«  part,  entre  les  Venôtes  et  la  Loire  d'une  autre  part,  et  de  manière 
«  à  ne  laisser  dans  cet  intervalle  aucune  place  pour  les  Nam- 
«  nètes  (*).  » 

Il  est  certain  qu'au  premier  abord,  en  voyant  ces  Samnites, 
au  midi  des  Venètes,  s'étendre  jusqu'à  la  Loire,  on  serait 
tenté  de  leur  attribuer  toute  la  presqu'île  guérandaise,  voire 
même  une  partie  du  Morbihan.  Mais  il  faut  en  rabattre.  Ici  en- 
core, et  dans  son  membre  de  phrase  le  plus  essentiel  pour  nous., 
la  traduction  manque  d'exactitude,  quoique  signée  du  nom  d'un 
savant  comme  M.  Renier.  Ces  mots  qui  s'étendent  jusqu'à  la 
Loire  font  supposer  un  développement  territorial  que  ne  com- 
porte nullement  le  texte  grec.  Ptolémée  a  écrit  irXy|mo£ovTeç  ™ 
AiyeipiTOrajup,  c'est-à-dire  avoisinant  le  fleuve  de  Loire  (2),  expres- 
sions parfaitement  rendues  parla  traduction  latine appropinquantes 
Ligeri  fluvio.  Le  géographe  se  borne  à  placer  des  Samnites  sur 
la  rive  droite  de  la  Basse-Loire.  Voilà  tout.  Ne  lui  en  faisons 
pas  dire  davantage. 

Marcien,  à  son  tour,  reproduit  simplement  son  devancier, 
quand,  remontant  du  midi  au  nord,  après  avoir  décrit  la  ma- 
jesté de  l'embouchure  du  Liger,  il  ajoute  :  la  peuplade  des  Sam- 
nites habite  les  bords  du  fleuve  (3). 

_  Cette  réserve  posée,  et  elle  est  essentielle,  qu'on  me  per- 
mette de  me  placer  à  un  autre  point  de  vue. 

Pour  le  sujet  qui  nous  occupe,  l'autorité  de  Ptolémée  me 
semble  avoir  été  un  peu  surfaite.  Ce  géographe  vivait  au  second 
siècle  de  notre  ère,  près  de  deux  cents  ans  après  la  conquête  des 


(*)  César  chez  les  Fenètes,  p.  47. 

(2)  nXviaïaÇav  a  pour  sens  unique  ëlre  placé  près  de,  être  voisin  de.  Sa 
racine  est  l'adjectif  Tzk^Gioc  proche,  voisin  de. 

(3)  A  porlu  aulem  Sicor  ad  ostia  Ligeris  fluvii  maximi  quidem  et  in  la- 
titudinem  patentis,  stadia  185.  stadia  155. 

Fluvium  verà  cacolit  gens  Samnitarum. 


—    218  — 

Gaules  par  César.  Que  de  bouleversements  ont  dû  s'opérer  pen- 
dant une  aussi  longue  période  !  Avec  l'occupation  romaine,  la 
Gaule  a  changé  de  face.  Des  garnisons  sont  cantonnées  partout, 
de  larges  routes  se  croisent  en  tous  sens ,  de  nouvelles  villes  se 
fondent  et  se  substituent  aux  anciennes  capitales  détruites  par  la 
guerre,  ou  trouvées  trop  mesquines  pour  la  civilisation  corrom- 
pue qu'apportent  les  vainqueurs.  Ces  constructions  ou  recons- 
tructions récentes  se  révèlent  jusqu'à  l'évidence  dans  certains 
noms  composés  du  qualificatif  Noio,  Nœo,  impliquant  le  sens 
'de  nouveau  ('),  comme  Noiodunum,  capitale  des  Diablinles, 
Noiomagus,  port  des  Lexoviens,  Noio?nagus,  encore,  capitale 
des  Vadicasses.  Les  villes  se  sont  ruées  vers  la  servitude,  et 
s'enorgueillissent  d'être  placées  sous  le  patronage  des  divins 
empereurs.  Il  suffit  de  jeter  les  yeux  sur  les  tables  de  Ptolémée 
pour  juger  du  chemin  parcouru  depuis  les  guerres  de  l'indé- 
pendance. Si  des  noms  franchement  gaulois  subsistent  encore, 
que  de  noms  de  villes,  et  chez  les  peuples  les  plus  braves, 
portent  l'estampille  des  nouveaux  maîtres  !  C'est  Juliomagus, 
capitale  des  Andecaves,  Juliobona,  capitale  des  Calètes,  Cœsaro- 
dunum,  capitale  de  Turons,  Augustobona  capitale  des  Tricasscs, 
et  combien  d'autres  ! 

Quand  nous  voulons  étudier  l'état  des  Gaules,  à  l'époque  de 
la  conquête,  cherchons  donc  nos  renseignements  dans  les  Com- 
mentaires eux-mêmes,  ou  chez  les  auteurs  les  plus  rapprochés, 
mais  ne  descendons  qu'avec  une  extrême  prudence  jusqu'à  Pto- 
lémée, car  nous  courrions  risque  de  confondre  des  époques  ou 
des  villes  bien  distinctes. 

Ce  géographe  a  d'ailleurs  parfois  des  incohérences  qui  boule- 
versent toutes  les  notions  admises.  «  La  cause  en  est,  comme  le 
«  !e  fait  observer  M.  Walkenaer,  que  Ptolémée,  ou  Marius  de 
«  Tyr,   dont  la  carte  a   servi  à   Ptolémée  pour  dresser   ses 


(>)  «  Noï  ou  JNo'io  ou  Koiodunum,  Noiomagus  ou  Kœomagus,  assi- 
milé par  les  Romaics  à  leur  novus.  »  Roget  de  Belloguet,  Glossaire  gau- 
lois, p.  350. 


—  219  - 

«  tables,  formaient  la  description  des  côtes  d'après  des  ma- 
«  tériaux  différents  de  ceux  qu'ils  employaient  pour  décrire 
«  l'intérieur.  C'est  ce  que  Ptolémée  nous  apprend  lui-même  dans 
«  ses  prolégomènes  (J).  » 

Selon  lui,  les  Abrincatui  (pays  d'Avranches)  s'étendaient  jus- 
qu'à la  Seine.  Il  transporte  deux  de  nos  peuples  armoricains,  les 
Rhedons  et  les  Nannètes,  au  centre  de  la  Gaule.  Les  Nannètes, 
on  vient  de  nous  le  dire,  sont  rejetés  à  l'est  du  Maine.  Quant  aux 
Rhedons,  je  vois  bien  que  M.  Orieux  les  fait  figurer,  sur  sa  carte, 
au  territoire  de  Rennes,  où  nous  sommes  accoutumés  de  les 
placer;  il  en  avait  besoin,  pour  les  faire  appuyer,  comme  alliés, 
la  marche  des  légions  romaines,  mais  il  a  eu  tort,  à  mon  avis  : 
quand  on  adopte  un  auteur,  il  faut  l'adopter  tout  entier,  et  non 
uniquement  dans  ce  qui  nous  plaît.  Or  les  Rhedons,  d'après  Pto- 
lémée, étaient  riverains  de  la  Loire,  et  habitaient  au  midi  du 
pays  d'Evreux  (5).  Ils  avaient  à  leur  orient  les  Sénonais,  ces 
Sénonais  que  nous  plaçons  en  Champagne  ! 

Ainsi,  les  Nannètes  relégués  jusqu'au  delà  du  Maine,  les  Abrin- 
cates  confinant  à  la  Seine  et  les  Rhedons  à  la  Loire,  si  telle  était 
la  géographie  des  Gaules  au  temps  de  Ptolémée,  les  choses  avaient 
bien  changé  depuis  César  et  Strabon  ! 

Veut-on  de  ces  changements  un  exemple  palpable?  César  avait 
attribué  aux  Venètes  presque  tous  les  ports  de  la  péninsule  ar- 
moricaine. Avec  Ptolémée,  et  surtout  tel  qu'il  est  interprété,  comp- 
tons ce  qui  leur  en  revient.  De  l'embouchure  de  la  Loire  au  pnys 
des  Unelies,  il  y  a  le  port  Brivatcs,  le  port  Vindana,  le  promon- 
toire Gobée,,  le  port  Staliocan,  Crociatum  port  des  Unelies,  et  si 
l'on  considère  comme  des  stations  navales  les  embouchures  de  la 


(*)  Citation  empruntée  à  M.  de  Courson,  La  Bretagne  du  V*  au  JTIIe  siè- 
cle, p.  97. 

(2)  Sub  prœfatis   omnibus  protenduntur  Licjcri  fluvio     ad     Seqitanam 

Âulircii  Eburaïci,.  quorum  civitas  Medioîanum. 
Sub  quibus,  juxta  Ligerim,  Rhedonas  quorum  civitas  Condate. 


—   220   — 

Loire  ,de  la  Vilaine,  du  Trieux  et  de  l'Arguenon,  citées  par  le  géo- 
graphe, cela  ferait  en  tout  neuf  ports.  Brivates,  placé  par  Ptolé- 
mée,  dans  l'ordre  de  sa  moincnclature  comme  parla  situation  géo- 
graphique qu'il  lui  donne,  entre  la  Loire  et  la  Vilaine,  ap- 
partient au  littoral  guérandais.  Les  Venôtes  n'ont  donc  pas 
besoin  d'y  prétendre,  pas  plus  qu'à  l'embouchure  de  la  Loire. 
Ecartons  aussi  le  promontoire  Gobée  qui  est  auxOsismiens, 
et  tous  les  ports  de  la  côte  septentrionale.  Que  reste-t-il  à  ces 
pauvres  Venètes  ?  Le  port  Vindana  et  l'embouchure  delà  Vilaine, 
deux  ports  sur  neuf!  Et  encore,  à  la  condition  que  les  Samnites 
ne  leur  contestent  pas  cette  dernière  station  ! 

Pour  me  rendre  compte  de  la  position  des  Nannètes,  telle  que 
la  comprend  M.  Orieux,  j'ouvre  la  première  carte  jointe  à  son 
étude,  et  ma  surprise  est  grande  en  y  voyant  les  Génomans  placés 
au  nord  des  Andécaves,  et  plus  au  nord  encore  les  Nannètes, 
entre  les  Génomans  et  les  Lexoviens.  Mais  c'est  une  rectification 
complète  du  texte  de  Ptolémée  !  Le  géographe  place,  au  contraire, 
les  Génomans  à  l'orient  des  Andécaves,  rcpoa  AvaxoXatr,  dit  le  texte 
grec,  et  après  eux,  plus  à  l'orient  encore,  les  Nannètes. 

On  comprend,  du  reste,  aisément  l'embarras  du  commenta- 
teur, quand  après  les  Nannètes,  il  a  vu  surgir  tout  à  coup  les 
gens  d'Avranches,  les  Abrincatui  !  Tout  cela  était  bien  difficile  à 
concilier.  Puis  il  se  sera  dit,  sans  doute,  que  les  Venètes  n'eus- 
sent jamais  songé  à  demander  des  secours  aux  Nannètes,  si  ceux- 
ci  eussent  été  placés  entre  les  Andes,  les  Turons  et  lesCarnules, 
c'est-à-dire  cernés  par  l'armée  romaine  qui  prenait  chez  ces  peu- 
ples ses  quartiers  d'hiver. 

Je  sais  bien  qu'on  me  répondra  que  la  longitude  et  la  latitude 
données  par  Ptoléméeprécisentla  position.  Très  bien  !  Mais  lequel 
dit  vrai,  le  texte  ou  la  situation  géographique,  puisque  les  deux 
ne  concordent  pas?  Si  vous  me  dites  que  ce  sont  les  textes  qui 
sont  erronés,  je  vous  ferai  observer  que  le  texte  aussi  qui  place 
des  Samnites  à  côté  des  Andes  pourrait  bien  n'être  pas  plus  exact, 
et  qu'ici  nous  n'avons  pas  la  ressource  de  la  longitude  et  de  la 


—  221  — 

latitude  pour  redresser  la  position,  puisque   Ptolémée  ne  donne 
pas  de  capitale  aux  Samnites. 


VIII 


Toutefois,  sans  insister  davantage,  je  dirai  avec  M.  Bizeul:  «  II 
me  semble  qu'il  faut  prendre  les  auteurs  tels  qu'ils  sont,  et  non 
les  arranger  à  notre  guise  pour  soutenir  tel  ou  tel  système  (').  » 
J'accepte  donc,  malgré  tous  mes  doutes,  les  indications  du  géo- 
graphe et  je  vous  concède  qu'au  milieu  du  second  siècle  de  notre 
ère,  les  Samnites  avaient  une  station  sur  la  rive  droite  de  la 
Basse-Loire,  et  une  autre  encore,  xai  mxXiv,  dit  le  texte  grec,  à 
l'ouest  des  Andes.  C'est  la  seule  conclusion  qu'on  puisse  tirer 
des  affirmations  de  Ptolémée.  Mais  il  est  impossible  d'admettre 
que  parce  qu'ils  étaient  établis  sur  ces  deux  points,  ils  dussent 
posséder  par  là  même,  à  l'exclusion  des  Nannètes  de  Pline  et 
des  Namnites  de  Strabon,  tout  le  pays  compris  entre  l'Anjou  et 
la  Basse-Loire.  «  Il  faudrait  pour  en  arriver  là,  ajouterai-je  avec 
«  M.  de  Kersabiec,  mettre  à  néant  toutes  les  inscriptions  lapidaires 
«  et  tous  les  documents  les  plus  authentiques  prouvant,  jusqu'à 
«  l'évidence,  que  le  Nantes  gallo-romain,  ou  le  Portus-Namnetum 
«  était,  comme  son  nom  l'indique,  situé  en  pays  namnète  lequel 
«  étant  séparé  des  Pictons  par  la  Loire,  touchait  à  ce  fleu- 
«  ve(5).  » 

J'admire  avec  quelle  hardiesse  l'auteur  de  César  chez  les  Ve- 
nètes  résout  les  questions  les  plus  controversées.  Strabon  avait 
dit  que  la  petite  île  des  femmes  samnites  était  située  pas  tout  à 


(*)  Bizeul.  Des  Nannètes  aux  époques  celtique  et  romaine.  Bulletin  de  la 
Société  Arch.  de  Nantes.  1859,  p.  126. 

(2)  De  Kersabiec.  Corbilon.  Bulletin  de  la  Société  arch.  de  Nantes.  1868, 
p.  198. 


—  222   — 

fait  en  pleine  mer,  en  face  de  l'embouchure  de  la  Loire  (*).  Cette 
indication  un  peu  vague  a  embarrassé  les  commentateurs.  Adrien 
de  Valois  et  l'abbé  Déric  la  placenta  l'île  Dumet,  Travers  et  Ogée 
à  l'île  de Bouin,  Edouard  Richer  àNoirmoutiers,  Gaillo  au  Croisic,  le 
géographe  Samson  à  Belle-Isle,  M.  de  Kersabiee  à  Saille.  Sans  être 
troublé  par  ces  divergences,  M.Orieux  n'hésite  pas  un  instant,  et 
ne  pouvant  admettre  que  le  Croisic  ait  été  un  port  de  Venètes,  il 
en  fait  résolument  la  demeure  des  femmes  samnites.  Puis  il 
s'écrie  d'un  air  de  triomphe:  «  Vous  voyez  bien  que  du  moment 
«  où  les  femmes  habitent  la  petite  île  du  Croisic,  qui  est  située 
«  dans  l'Océan,  vers  le  haut  de  l'embouchure  de  la  Loire,  il  faut 
a  bien  que  leurs  maris  soient  dans  le  voisinage,  c'est-à-dire  dans 
«  la  presqu'île  guérandaise,  toute  autre  situation  n'étant  ni  na- 
«  turelle  ni  vraisemblable;  vous  voyez  bien  que  vous  placez  une 
«  nation  entre  les  femmes  et  les  maris  d'une  autre  nation,  lors- 
«  que  vous  voulez  que  les  Venètes  soient  à  Guérande  (2).  » 

A  une  telle  argumentation,  il  n'y  a  que  deux  mots  à  répondre. 
Ce  genre  de  raisonnement  a  un  nom  eu  logique:  on  l'appelle  une 
pétition  de  principe. 

Relevons  seulement  cette  affirmation  qu'aucune  autre  situation 
que  la  presqu'île  guérandaise  n'était  pour  lesSamnites  «  naturelle 
ni  vraisemblable.  »  Est-ce  que  la  station  des  Samnites  sur  un 
point  de  la  Basse-Loire  n'offre  pas  au  moins  d'aussi  grandes  pro- 
babilités, puisque  les  femmes  habitaient  une  petite  île,  en  face  de 
l'embouchure  du  fleuve?  Et  comme  cette  station  est  précisément 
celle  qui  est  indiquée  parles  géographes,  la  presqu'île  guérandaise 
reste  bien  détinitivemcnt  acquise  aux  Venètes. 

Une  conséquence  de  cette  occupation  était   la   possession  du 


TTOT0C[JlOU  : 

Insulam  parvam,  non  plane  in  alto  sitam,  objectant  ostio  Ligeris. 

Strab.  Livre  IV,  p.  198. 

(2)  Orieux.  César  chez  les  renètes,  p.  49. 


—  223  — 

golfe  de  la  Grande  Brière,  fort  différent  alors  de  ce  qu'il  est  au- 
jourd'hui. Le  vaste  bassin  s'étendait  vers  le  nord  au  delà  de  Bes- 
nè,  bourg  près  duquel  ont  été  trouvées  tant  de  richesses  archéo- 
logiques. Grégoire  de  Tours  appelait  Besné  l'île  Vindunite,  insida 
Vindunita.  Ce  nom  à  lui  seul  est  une  démonstration.  Il  est  im- 
possible de  ne  pas  voir  dans  ce  radical  Vind  une  origine  véné- 
tique.  Un  des  principaux  ports  des  Venètes  s'appelait  Vindana, 
une  de  leurs  plus  grandes  îles,  Belle-Isle,  avait  nom  Vindilis  ('). 
Besné  marquerait  à  peu  près,  vers  le  nord,  la  limite  de  leurs  pos- 
sessions et  de  celles  des  Nannètes,  dans  cette  partie  de  notre 
département. 

Quant  aux  Samnites,  placés  au  midi  des  Venètes,  il  ressort 
très  nettement  des  textes  de  Ptolémée  et  de  Marcien,  combinés 
avec  ceux  de  Strabon  et  de  Denys  le  Périégète,  que  cette  petite 
tribu  occupait  un  territoire  de  peu  d'importance  entre  le  fleuve 
et  la  Grande  Brière,  aux  environs  de  Donges  et  de  Montoir  (5). 
Comment  expliquer  leur  genre  de  vie  si  bizarre  ?  Peut-être 
d'une  façon  toute  naturelle.  Je  serais  tenté  de  penser  que  ces 
Samnites,  sans  gouvernement,  sans  capitale,  séparés  de  leurs  fem- 
mes pendant  de  longs  mois,  devaient  avoir  une  existence  nomade 
qui  ne  rendait  pas  nécessaire  la  présence  de  celles-ci  au  foyer  de 
la  famille,  et  que  l'époque  du  retour  des  uns  et  des  autres  était 
la  saison  du  chômage,  la  saison  d'hiver. 

Alors  que  les  femmes  samnites  se  livraient  aux  cérémonies  de 
leur  culte,  que  faisaient  pendant  ce  temps  leurs  maris  ?  Versés, 


(1)  Ou  Fendinis,  île  des  Wendes  ou  Venètes. 

(2)  On  sait  combien,  naguère  encore,  les  sorciers  de  Montoir  étaient  un 
objet  d'horreur  et  d'effroi.  On  y  connaissait  des  familles  oii  le  don  de  la 
sorcellerie  était  héréditaire,  et  que  poursuivait  la  réprobation  publique. 

Etaient-ce  ces  sorciers  et  ces  sorcières  delà  Basse-Loire  que  visait  surtout 
la  sentence  d'excommunication  fulminée  en  1354  par  un  évéque  de  Nantes  ? 
Sortiarias  quia  quotidie  muWplicantur  in  civitate  etdiœcesi  JSannetensi... 
excommunicamus. 

Dom  Morice,  Hist.  de  Bretagne.  Preuves. 


224  

comme  leurs  congénères  d'Italie  dans  les  travaux  métallurgiques, 
se  mettaient-ils  a  la  solde  des  peuples  voisins  pour  les  exploita- 
tions minières  dont  les  traces  sont  si  nombreuses  et  si  visibles 
encore  au  pays  des  Mauges,  comme  dans  tout  le  nord-est  de 
notre  département  ? 

Les  deux  monnaies  au  double  sigma,  trouvées  à  Ancenis,  qui 
représentent  un  personnage  tenant  un  marteau  à  la  main,  et  que 
M.  Parenteau  attribue  aux  Samnites,  donneraient  un  corps  à  cette 
opinion,  et  expliqueraient  la  station  de  ceux-ci  à  l'ouest  des  Andes. 
Nous  remarquons  même  que  dans  la  Loire-Inférieure,  surtout  le 
territoire  attribué  parM.Orieux  aux  Samnites,  la  trouvaille  d'An- 
cenis  est  unique  en  son  genre,  tandis  que  deux  autres  monnaies 
similaires  ont  été  trouvées  en  plein  pays  picton,à  Chollet,  et  une 
autre  à  Candé,  en  Maine-et-Loire.  Pas  une  ne  s'est  encore  ren- 
contrée dans  la  presqu'île  guérandaise,  si  riche  pourtant  en  statères 
gaulois  au  type  armoricain.  L'argument  de  l'auteur  se  retourne 
donc  contre  sa  thèse  ('). 


IX 


Du  reste,  avec  Ptolémée  et  Marcien,  c'en  est  fini  pour  tou- 
jours du  nom  des  Samnites.  Ni  chartes,  ni  légendes,  ni  chroni- 
ques n'en  font  une  seule  fois  mention,  et  cependant  s'ils  eussent 
eu  la  plus  légère  importance,s'ils  eussent  acquis  surtout,  dans 
le  deuxième  siècle  de  notre  ère,    tout  le  développement  qu'on 


(*)  «  Disons  aussi,  et  cela  n'a  pas  une  mince  importance,  que  des  mon- 
«  naies  marquées  du  sigma  (2)  ont  été  recueillies  sur  notre  sol  ^  deuxàAn- 
«  cenis,  deux  à  Chollet  et  une  autre  à  Candé,  et  que  le  sigma  est  évidem- 
«  ment  la  marque  des  Samnites.  »  César  chez  les  Ftnètes,  p.  48. 

Cet  évidemment  est  bien  absolu. 


—  2-25  -- 

leur  attribue,  il  est  impossible  que  leur  mémoire  n'eût  pas  été 
sauvée  de  l'oubli.  Nous  les  verrions  quelquefois  cités  dans  nos 
vieux  titres  où  apparaissent  si  souvent  les  noms  des  Nannètes  et 
desVenètes. 

Car,  même  après  la  chute  du  pouvoir  romain,  notre  presqu'île 
guérandaise  reste  toujours  attachée  à  la  Vénôtie.  Diverses  citations 
ont  été  produites,  qui  en  fournissent  la  preuve.  Mais  ces  textes,  dif- 
ficiles à  contester,  ne  touchent  guère  M.  Orieux,  et  voici  comme 
il  en  fait  litière  : 

«  Nous  devons  confesser  que  la  situation  des  peuples  de  la 
«  Gaule  au  Ve  siècle  ne  nous  préoccupe  aucunement.... 

«  C'est  alors  que  les  Bretons  insulaires  envahissent  l'Armorique 
«  et  qu'un  petit  peuple  des  bords  du  Rhin  vient  imposer  son  nom 
«  et  ses  loisà  toute  la  Gaule.  Que  dans  cet  immense  mouvement 
«  des  peuples,  lesVenètes,  envahis,  refoulés  par  les  Bretons,  aient 
«  pris  aux  Samnites  la  rive  gauche  de  la  Vilaine,  qu'ils  soient 
«  allés  dans  la  baie  du  Croisic  fonder  une  Vénéda  quelconque, 
«  en  souvenir  de  l'antique  cité  de  leurs  pères,  ce  n'est  pas  ici  le 
«  lieu  de  le  contester  (4).  » 

L'explication  est  sans  doute  ingénieuse,  mais  elle  ne  résiste 
pas  devant  l'évidence  des  faits.  Il  est  acquis  à  l'histoire  que,  sur 
les  côtes  méridionales  d'Armorique,  l'invasion  desBretons  insulai- 
res commença  de  bonne  heure  au  pays  de  Guérande,  et  s'étendit 
jusqu'à  la  Loire.  La  ville  de  Vannes  ne  la  subit  que  longtemps 
après.  «  Les  contrées  de  l'Armorique  occupées  par  les  Bre- 
«  tons  insulaires,  dit  D.   Lobineau,  furent  toute  la  côte  septen- 

«  trionaîe et   une  grande  partie   du  territoire  de  Vannes. 

«  La  ville  de  Vannes,  et  celles  de  Nantes  et  de  Rennes  avec  leur 
«  territoire  demeurèrent  aux  anciens  peuples  de  i'Armorique(2).  » 

Ces  faits  qu'il  est  impossible  de  révoquer  en  doute,  tant  ils  re. 


(')  César  chez  les  Fenèles,  p.  45. 

(2)  D.  Lobineau.  ffist.  de  Bretagne,  I,  p.   7. 

'1881  15 


—  -220  — 

posent  sur  des  documents  irréfragables,  sont  résumés  dans  une 
phrase  que  j'ai  citée  ailleurs  (*).  Elle  est  d'Eghinard,  presqu'un 
contemporain  :  «  L'île  de  Bretagne,  dit-il,  ayant  été  envahie  par 
les  Angles  et  par  les  Saxons,  une  grande  partie  de  ses  habitants 
traversant  la  mer,  était  venue  occuper,  aux  extrêmes  frontières 
de  la  Gaule,  les  pays  des  Venètes  et  des  Curiosolites  (-).  »  La 
presqu'ile  guérandaise  faisait  donc  partie  du  territoire  des  Ve- 
nètes, quand  y  abordèrent  les  insulaires  fugitifs,  et  la  ville  à  la- 
quelle les  anciens  Gaulois  avaient  donné  le  nom  de  Yénéda,  ne 
fut  pas  l'œuvre  des  Bretons  (3). 

Et  à  ce  sujet,  je  ne  puis  omettre  un  fait  qui  me  semble  conti- 
nuer la  tradition  vénétique  dans  notre  presqu'ile.  Grégoire  de 
Tours  raconte  que  Guerech  pilla  les  vignes  du  pays  nantais,  et 
en  transporta  le  vin  au  pays  des  Venètes,  «  in  veneticum  (4).  » 
Est-ce  à  dire  que  les  Bretons  se  donnassent  la  peine  de  trans- 
porter leur  butin  jusque  dans  la  baie  du  Morbihan  ?  Non  sans 
doute,  et  ce  territoire  vénétique  n'était  autre  que  le  pays 
entre  Vilaine  et  Loire  où  le  comte  du  Broérec  s'était  si  fortement 
cantonné. 

Ne  soyez  pas  surpris,  après  cela,  qu'on  ait  signalé  à  l'atten- 
tion des  archéologues  l'existence,  près  du  bourg  de  Batz,  d'an- 


(!)  Le  Dialecte  breton  de  Pannes  au  pays  de  Guérande. 

Bulletin  de  la  Société  Arch.  de  Nantes.  1878. p.  117. 

{-)  Cum  ai  Anglis  et  Saxonibus  Brilannia  insida  fuisset  invasa,  magna 
pars  incolarum  ejus,  mare  trajiciens,  in  ultimis  Galliœ  jinibus  Fcneto- 
rum  et  Curiosolitarum  regiones  occupauerat. 

EgliiDard.  Vita  Caroli  Magni 

(")  Est  urbs  fixa  maris,  Ligeris  quo  fluminis   unda 

sEquor  arat  late,  ingrediturque   rapax, 

Veneda,  cdi  nomen  Galli  dixere  priokes. 
Ermold  le  Noir. 

(*)  7f/rarochus...vineas  JSamneticorwn  abslulit  et,   vendemiam  colligens, 
vinum  in  f'eneticum  transtulit. 

Greg.Tur.,IX,18. 


227 


ciennes  citernes  à  vin,  fort  curieuses  (').  Elles  n'avaient  pas  été 
construites,  je  suppose,  pour  y  loger  les  vins  de  Gongor  ou  de  Pi- 
riac. 


X 


Nous  avons  vu  combien,  pour  les  ports  de  la  côte,  M.  Orieux 
fait  la  part  modeste  aux  Venètes.  Pour  les  îles,  le  compte  est 
aussi  facile  à  faire.  Pline,  qui  devait  s'y  connaître,  avait  dit: 
Les  îles  des  Venètes  sont  nombreuses,  on  les  appelle  Lénétiques  ; 
il  y  a  aussi  Olëron,  dans  le  golfe  d'Aquitaine  (').  »  Gomme,  de 
tout  temps,  il  a  été  dans  le  génie  des  peuples  qui  aspirent  à  la 
suprématie  maritime  de  posséder,  en  aussi  grand  nombre  possible, 
des  îles  et  des  établissements  en  mer,  nous  pensions,  avec  beau- 
coup de  commentateurs,  qu'il  fallait  induire  de  ce  texte  que  toutes 
les  îles,  jusqu'à  Oléron,  appartenaient  aux  Venètes.  Nous  ne  pou- 
vions supposer  qu'on  dût  diviser  l'Océan  par  zones  proportion- 
nelles, pour  attribuer  à  chaque  peuplade  les  îles  aspectant  ses  ri- 
vages. L'île  de  Noirmoutiers  était  connue  des  anciens  ;  l'Itiné- 
raire d'Antonin  la  désigne  sous  le  nom  tfAirica  (2)  et,  vu  son  im- 


(*)  Cette  découverte,  comme  tant  d'autres,  est  due  à  notre  regretté  col- 
lègue, le  docteur  Foulon. 

Bulletin  de  la  Société  Arch.  de  Nantes,  1868,  p.  97. 

(-)  Insulœ  complures   Fenetorum,  quca  et  Feneticœ  appellantur,  et  in 
Aquilanico  sinu  UUarius. 

Pline,  ex  libro  IV,  de  Gallia. 

(3)  «  L'Ile  de  Noirmoutiers,  dit  Richer,  portait  primitivement   le  nom 
«  d'île  d'Her.  Le  monastère  qu'y  établit  S.  Philbert  la  fit  appeler  ffermou- 
«  lier ,-    dans   la   suite,  par  corruption,  ce  nom    se  changea  en  celui  de 
^  Nermoutier. 

«  ...  L'île  d'Her,  comme  il  est  facile  de  le  prouver  par    des  témoignages 
<•  géologiques,  s'étendait  alors  (IXe  siècle  de  notre  ère)  à  quatre  lieues 


—  228  — 

portance,  le  silence  de  Pline  à  son  égard,  comme  à  l'égard  des 
îles  du  littoral  guérandais  et  de  l'île  d'Yeu  ('),  nous  paraissait  bien 
intentionnel. 

Nous  nous  trompions.  Les  nombreuses  îles  des  Venètes  se  bor- 
neront à  Belle-Isle  et  a  Groix,  auxquelles  ils  ajouteront,  comme 
appoint,  l'île  de  Sein  perdue  au  milieu  de  récifs,  Hédic  avec  ses 
deux  cent  cinquante  arpents  superiiciels,et  Houat  avecses  soixante 
cabanes  (2)  ! 

Mais  que  parlé-je  de  Belle-Isle  et  de  Groix  !  Que  parlé-je  môme 
de  Sein,  de  Hédic  et  de  Houat  !  Savez- vous  quelles  sont  pour  l'au- 
teur de  César  chez  les  Venètes  ces  fameuses  îles  vénétiques 
que  Pline  semble  suivre  jusqu'à  Oléron  ?  Tout  simplement  le 
groupe  des  Roches  Méaban,  ces  basses  désignées  sur  les  cartes 
sous  le  nom  de  Buissons  de  Méaban  !  Ici,  il  faut  citer  tex- 
tuellement :  «  Les  Venètes  n'avaient-ils  pas  encore  derrière  eux 
«  l'île  de  Quiberon  que  les  sables  de  l'Océan  ont  dû  rattacher  à 


«  plus  à  l'ouest  qu'aujourd'hui.  La  chaîne  des  Rochers  des  Bœufs,   sur 

«  lesquels  on  a  trouvé  des  murailles  de  briques, formait  la  limite  occi- 

«  dentale  de  l'île.  L'îlot  du  Pilier  en  faisait  partie L'île  d'IIer  se  trouvait 

«  donc  alors  précisément  en  face  de  la  Loire.  » 

E.  Richer.  Voyage  à  Guérande,  p.  23  et  24. 

Richer,  natif  de  Noirmoutiers,  connaissait  son  île  apparemment.  Notons 
qu'elle  faisait  partie  de  l'ancienne  Bretagne. 

Or  Vinsula  Airica  s'étendant  jusqu'en  face  de  Loire,  et  enclavant  l'îlot 
du  Pilier,  les  Venètes  —  puissance  même  à  part,  et  Pline  mis  de  côté  — 
avaient  bien,  ce  me  semble,  autant  de  droits  que  les  Pictonsa  la  possession 
de  cette  île. 

(*)  Le  port  de  l'île  d'Yeu  s'appelle  Porl-Breton  et  le  chef-lieu  de  l'île 
porte  le  nom  de  S.  Aubin,  évêque  d'origine  venèteet  patron  delà  paroisse 
de  Guérande. 

A  Noirmoutiers,  une  des  principales  agglomérations  se  nomme  Gué- 
rande. 

Est-il  possible  de  ne  voir  là  que  de  simples  coïncidences  ? 

(2)  Avant  la  Révolution,  l'île  de  Sein  comptait  64  ménages,  Ilédic   160 
habitants,  et  Houat  60  cabanes. 
Ogée.  Dict.  hisl.  de  Bretagne. 


-   229  — 

la  côte?  N'avaient-ils  pas  les  îles  vénétiques,  ces  sentinelles 
«  avancées  que  le  mouvement  des  îlots  ronge  sans  cesse,  et  qui 
forment  une  ceinture  de  rochers  devant  rentrée  du  Morbihan  (4)  ?  » 

On  dirait  que  M.  Orieux,  tout  en  cherchant  pour  la  lutte  des 
Venètes  un  théâtre  qui  ait  «  de  la  grandeur  (2)  »,  s'ingénie  à  les 
amoindrir  dans  leurs  îles,  dans  leurs  ports,  dans  leur  territoire, 
et  à  contredire,  sur  tous  les  points,  les  affirmations  des  contem- 
porains ! 

Gomme  César,  Pline  et  Strabon  nous  donnent  une  autre  idée 
de  la  puissance  de  ces  souverains  de  l'Océan  ! 

Etablis  sur  le  vaste  littoral  compris  entre  le  promontoire  Go- 
bée et  l'embouchure  du  Liger,  possédant  des  îles  nombreuses  en 
dedans  comme  en  dehors  de  leurs  eaux,  maîtres  depresquetous  les 
ports  de  la  péninsule  armoricaine,  et  dans  un  de  ces  ports,  prèsdu 
sol  que  nous  foulons,  entreposant  leur  immense  commerce  avec  la 
Grande-Bretagne,  tels  nous  apparaissent  les  Venètes  au  moment 
où,  prenant  l'initiative  d'une  guerre  à  outrance  contre  leurs  op- 
presseurs, ils  vont  entraîner  à  leur  suite  tous  les  peuples  mariti- 
mes du  nord-ouest  de  la  Gaule  ! 

Gustave  Blanchard. 


A  la  séance  dn  20  décembre  1881,  M.  René  Kerviler  a  donné 
lecture  d'un  très  beau  travail  intitulé:  Les  Venètes,  César  et 
le  Brivates  Portus.  Ce  mémoire,  qui  a  été  lu  immédiatement 
après  celui  de  M.  Blanchard,  paraîtra  en  tête  de  notre  Bulletin 
de  1882. 


(')  César  chez  les  Fenètes,  p.  70. 

(2)  «  C'est  ici  (dans  le  Morbihan)   que  le    théâtre  de  la  lutte  a   de  la 
grandeur.  »  Ibid.  p.  70.  * 


NÉCROLOGIE 


M.  BENJAMIN  FILLON 

Noire  collègue,  M.  Benjamin  Fillon,  est  mort  au  château  de  la 
Court-Saint-Cyr,  le  25  mai  dernier.  Travailleur  infatigable,  savant 
ingénieux  et  plein  d'érudition,  M.  Fillon  était  un  des  archéologues 
les  plus  éminents  et  les  plus  justement  appréciés  de  notre  épo- 
que. Il  avait  le  don  de  présenter  sous  une  forme  vive  et  saisis- 
sante le  résultat  de  ses  patientes  recherches,  et  de  faire  jaillir  la 
lumière  sur  les  sujets  les  plus  obscurs  de  notre  histoire  primitive. 
Possédant  à  fond  tout  ce  que  les  vieu  x  textes,  les  souvenirs  et 
les  légendes  de  son  pays  pouvaient  lui  fournir  de  documents,  il 
a  su  reconstruire,  à  l'aide  de  ces  matériaux,  le  passé  de  cette  terre 
de  Vendée  qu'il  aimait  tout  particulièrement.  Maître  habile,  il 
disposait  et  appareillait  ces  ruines  avec  un  véritable  talent  ;  ar- 
chitecte autant  qu'archéologue,  il  avait  parfois  son  plan  tout  tracé, 
et  si  les  matériaux  sont  toujours  du  temps,  certaines  grandes 
lignes  sont  bien  souvent  de  lui.  Pour  suivre  notre  comparaison, 
il  procédait  quelquefois  à  la  façon  des  fondateurs  de  nos  pre- 
mières cités  qui  dressaient  des  tours  et  des  courtines  avec  les 
pierres  arrachées  aux  temples  et  aux  édifices  religieux. 

C'est  là  le  côté  sombre  de  cette  grande  et  sympathique  figure. 
De  ses  études  sur  le  moyen  âge,  M.  Fillon  était  sorti  armé  de 
toutes  pièces,  comme  un  chevalier  sous  son  armure  ;  mais  il  n'a 
point  toujours  tourné  sa  lance  pour  le  bon  combat,  et  avec 
un  cœur  noble  et  généreux,  il  est  mort  sans  croyance  et  sans 
prières. 


—  232   - 

Voici,  parmi  ses  travaux,  ceux  qui  intéressent  le  plus  directe- 
ment l'Archéologie  : 

—  Rapport  présenté  à  la  Société  archéologique  de  Nantes,  sur 
une  découverte  de  monnaies,  ustensiles  et  bijoux  de  l'époque 
gallo-romaine,  faite  près  du  Veillon  (Vendée).  1856,  Nantes,  Gué- 
raud. 

—  Recherches  historiques  et  archéologiques  sur  Fontenay, 

—  1847,  Robuchon,  Fontenay. 

Description  de  la  villa  et  du  tombeau  d'une  femme  artiste 
gallo-romaine,  découverts  à  Saint-Médard-des-Prés  (Vendée). 

—  1849,  Fontenay. 

—  Considérations  historiques  et  artistiques  sur  les  monnaies 
de  France.  — 1850,  Fontenay. 

—  Observations  critiques  sur  la  livre  de  l'abbé  Cochet  :  sépul- 
tures gauloises,  romaines,  françaises  et  normandes.  1857  — 
Nantes,  Guéraud. 

—  Mémoire  sur  une  découverte  de  monnaies,  de  bijoux  et 
d'ustensiles  des IIe  et IIIe  siècles,  faite  en  Vendée,  (près du  Veillon). 

—  1857,  Napoléon-Vendée. 

—  Collection  Léon  Rousseau,    monnaies  féodales  françaises. 

—  1860,  Paris. 

—  Poitou  et  Vendée.  Etudes  historiques  et  artistiques  par  B. 
Fillon  et  0.  de  Rochebrune.  2  vol.  in-4°,  1861-1865,  Fontenay, 
Robuchon. 

—  Lettre  à  M.  A.  Gouget  sur  un  tiers  de  sou  mérovingien, 
frappé  à  Niort.  —  1864,  Niort. 

—  L'Art  de  terre  chez  les  Poitevins,  suivi  d'une  étude  sur 
l'ancienneté  de  la  fabrication  duverre  en  Poitou.  —  1864,  Niort. 

—  Etude  sur  les  Lues  poitevins. —  1875,  Bagnères-de-Luchon. 

—  Mémoire  sur  l'ancienne  configuration  du  littoral  bas-poite- 
vin et  sur  ses  habitants,  adressé  en  1755  au  P.  Arcèrepar  Ch.- 
L.  Joussemet,  curé  de  l'IIe-Dieu.  —  1876.  Niort. 

—  Révision  du  cadastre.  Notice  des  points  habités,  tènements, 
lieux  dits,  etc.,  delà  commune  de  Saint-Cyr  en  Talmondais  (Ven- 
dée). —  1877. 


-  233  — 

—  L'art  romain  et  ses  dégénérescences  au  Trocadéro.  —1878, 
Paris. 

—  Les  médailleurs  italiens  des  XVe  et  XVIe  siècles.  —  1873, 
Paris.  i 

—  Lettre  à  M.  P.  Quicherat  sur  une  découverte  d'objets  gau- 
lois en  or  faite  en  1879  dans  l'étang  de  Nesmy  (Vendée).  — 
1879,  la  Roche-sur-Yon. 

—  Description  de  quelques  monnaies  mérovingiennes  décou- 
vertes en  Provence,  B.  Fillon  et  F.  Ritter.  — 1849,  Nantes  ». 

M.  Fillon  a  en  outre  donné  de  nombreux  articles  à  la  Gazette 
des  Beaux- Arts,  aux  Archives  de  l'Art  français,  à  la  Revue  des 
Provinces  de  l'Ouest,  etc.,  etc. 

Comme  on  le  voit,  M.  Fillon  laisse  une  œuvre  considérable  et 
malheureusement  inachevée.  Ses  belles  études  sur  le  Poitou,  son 
traité,  sur  la  céramique  et  ses  nombreuses  monographies  sur  des 
questions  d'art,  de  littérature  ou  d'archéologie,  sont  de  véritables 
trésors  que  nous  avons  le  regret  de  ne  pouvoir  passer  en  revue 
dans  ces  trop  courtes  lignes.  Disons  seulement  qu'après  avoir 
tour  à  tour  mis  en  relief,  avec  un  rare  bonheur,  les  côtés  les 
plus  curieux  de  la  Vendée,  il  avait  concentré  toutes  ses  recher- 
ches sur  le  pays  du  Talmondais  et  sur  la  commune  de  Saint-Cyr. 
Réunissant  sur  un  seul  point  tout  ce  que  le  génie  du  savant  et  du 
chercheur  peut  créer  de  lumière,  il  avait  entrepris  de  mettre  en 
plein  jour  le  passé  de  ce  coin  de  terre,  et  de  le  suivre  jusqu'eût 
limites  les  plus  lointaines.  Il  est  impossible  de  prévoir  ce  qu'eût 
été  cette  œuvre,  la  plus  remarquable  peut-être,  et  à  coup 
sûr  la  plus  chèrement  aimée  de  celui  dont  nous  regrettons  la 
triste  mort. 

P.  DE  L. 


1  Voir  la  liste  publiée  dans  le  Bulletin  de  la  Société  des  Bibliophiles  bre- 
tons, 4e  année,  p.  65  et  suivantes. 


—  234  - 

SÉANCE  DU  MARDI  5  JUILLET  1881. 

Présidence  de  M.  le  docteur  Anizon. 

Présents  :  MM.  Verger,  Léon  Maître,  Seidler,  Van  Iseghem  père, 
Blanchard,  Riardant,  A.  Leroux,  Anizon,  Gainer,  de  Lisle. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Sur  la  demande  de  M.  le  Président,  M.  A.  Leroux,  qui  vient  d'assis- 
ter au  congrès  de  la  Société  française  d'archéologie  à  Vannes,  nous 
rend  compte  des  différentes  excursions  qui  ont  eu  lieu  pendant  cette 
session.  Les  grandes  nécropoles  de  Locmariaker  et  de  Garnac,  les 
galeries  couvertes  de  Plouharnel,  les  pierres  gravées  du  Mané-Lud, 
de  Kercado  et  de  Gavriniz,  ont  été  successivement  visitées.  Le  lundi 
4  juillet,  dernier  jour  du  congrès,  deux  tombelles  situées  dans  la 
commune  d'Ambon  ont  été  fouillées  en  présence  des  sociétaires. 
Une  brèche,  carrément  ouverte  dans  ces  buttes,  de  façon  à  les  éven- 
trer  par  le  milieu,  a  montré  une  série  do  couches  superposées  de 
différente  nature  : 

1»  Une  forte  épaisseur  de  terre  argileuse  ; 

2o  Une  couche  de  terre  noire,  de  peu  de  profondeur,  et  mêlée  de 
fragments  de  charbons  et  de  débris  organiques  ; 

3o  Au-dessous  de  cette  couche,  une  argile  onctueuse  et  noircie  par 
le  contact  avec  le  foyer  funéraire  ; 

Enfin,  la  terre  amoncelée  à  la  base  du  tumulus  et  semblable  au 
sol  environnant. 

Gomme  on  le  voit,  le  résultat  de  ces  fouilles  a  été  à  peu  près  né- 
gatif, puisqu'on  n'a  trouvé  aucun  objet  qui  permît  de  déterminer  la 
période  à  laquelle  appartiennent  ces  buttes.  Toutefois  la  présence 
de  charbons  au  centre  de  ces  tombelles  et  la  nature  des  terres  noires 
qui  avoisinent  ces  débris  de  foyer  indiquent  bien  la  place  d'une  sé- 
pulture. 

Une  des  questions  les  plus  intéressantes  qui  aient  été  traitées  de- 
vant le  Congrès,  est  celle  du  changement  de  niveau  de  la  baie  du 
Morbihan.  On  sait,  en  effet,  que  le  sol  de  cette  baie  s'est  affaissé  d'une 
manière  assez  sensible,  et  qu'un  des  monuments  des  îles  morbihan- 
naises,  le  double  cromlek  d'Er-lanik,  est  maintenant  en  partie  sous 
les  eaux.  De  récents  calculs  permettent  d'évaluer  l'affaissement  du 


—  235  - 

terrain  à  3  ou  4  mètres.  Ce  changement  de  niveau  est-il  suffisant 
pour  donner  gain  de  cause  aux  archéologues  qui  placent  le  grand 
combat  naval  de  Brutus  et  des  Venètes  dans  la  baie  du  Morbihan  ? 
Gela  n'est  point  certain  :  la  profondeur  des  eaux  qui  séparent  les  îles 
de  ce  golfe  est  assez  considérable  pour  que  3  ou  4  mètres  de  moins 
ne  transforment  pas  en  bas-fond  les  découpures  à  pic  creusées  entre 
ces  langues  de  terre. 

M.  Leroux  s'excuse  d'avoir  été  pris  un  peu  à  l'improviste  pour  ces 
différentes  communications,  et  nous  promet  une  relation  plus  corn- 
plète  à  notre  prochaine  séance. 

M.  le  Président  prend  note  de  cette  bonne  promesse,  et  remercie 
notre  collègue  des  intéressants  détails  qu'il  a  bien  voulu  nous  trans- 
mettre. 

Notre  archiviste,  M.  Blanchard,  annonce  qu'il  a  obtenu  pour  la  So- 
ciété la  série  complète  (sauf  le  tome  I)  des  bulletins  archéologiques 
de  l'Orléanais  ;  de  plus,  douze  volumes  de  la  Société  française  d'ar- 
chéologie ont  été  adressés,  ces  jours  derniers,  à  M.  de  la  Laurencie, 
notre  président. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  lecture  des  notes  de  M.  Leroux 
sur  son  voyage  en  Orient. 

C'est  en  Phénicie  que  nous  transporte  l'attachante  narration  de  notre 
collègue.  Mais  ce  pays,  jadis  le  centre  et  le  point  de  départ  du  com- 
merce méditerranéen,  cette  côte  d'où  sont  parties  tour  à  tour  les 
plus  riches  colonies  de  l'antiquité,  n'est  plus  maintenant  qu'une  terre 
épuisée  et  sans  vie.  En  vain  cherche-t-on  quelques  restes  de  cette  reine 
delà  mer  inférieure,  de  Tyr,  l'envie  des  cités  contemporaines  :  elle  s'est 
si  bien  effacée  de  la  surface  du  sol  que  le  voyageur  cherche  vainement 
la  place  que  couvraient  les  18  milles  de  son  enceinte.  Ce  prodigieux 
anéantissement  frappe  l'esprit  de  stupeur.  On  se  demande  si,  égaré 
par  de  fausses  indications,  on  est  réellement  arrivé  au  lieu  où  s'éle- 
vaient les  palais  et  les  temples  de  l'orgueilleuse  cité.  Alors  retentis- 
sent dans  la  pensée  les  terribles  menaces  du  Prophète  :  «  Je  t'effa- 
cerai du  niveau  de  la  terre,  et  je  ferai  de  toi  une  pierre  polie  pour 
sécher  les  filets  des  pêcheurs.  » 

A  peine  retrouve-t-on  cà  et  là,  parmi  des  monceaux  de  pierres  bri- 
sées, quelques  débris  de  colonnes  à  demi  ensevelies  sous  les  sables  : 


—  236  — 

et  la  déception  que  causent  ces  tristes  restes  est  cruelle  à  la  fois  pour 
le  voyageur  et  pour  l'archéologue. 

Le  beau  récit  de  M.  Leroux,  écouté  avec  une  attention  profonde, 
est  malheureusement  interrompu  par  l'absence  des  derniers  feuillets  ; 
mais  nous  espérons  bien  que  notre  collègue  voudra  revoir  avec  nous 
ces  pays  qu'il  a  si  heureusement  parcourus  et  qu'il  sait  décrire  avec 
tant  de  charme. 

Le  second  article  porté  à  l'ordre  du  jour  est  intitulé  :  «  Une  arme 
historique  en  pierre  polie,  »  par  M.  Pitre  de  Lisle.  Cette  arme,  qui 
réunit  deux  termes  si  souvent  en  opposition,  est  taillée  dans  un  jade 
d'un  beau  vert  clair,  usé  en  forme  de  lentille  et  tranchant  sur  les 
bords  comme  les  haches  morbihannaises.  Deux  trous  coniques,  percés 
à  la  base  de  la  pierre,  servent  à  faire  passer  les  cordelettes  en  poil 
de  chauve-souris  qui  assujettissent  l'arme  dans  son  manche.  Malgré 
son  aspect  tout  primitif,  cette  pierre  a  servi  en  plein  XIXe  siècle  contre 
les  détachements  français  envoyés,  en  1853,  contre  les  Nouveaux- 
Calédoniens  ;  elle  appartenait  alors  à  un  chef  des  tribus  canaques, 
Aliki-kaï,  dont  la  bravoure  féroce  est  restée  légendaire  parmi  ses 
contemporains. 

Nous  tenons  ces  renseignements  de  M.  le  Dr  André  Canolle,  attaché, 
comme  chirurgien  de  marine,  à  l'armée  expéditionnaire,  et  qui  rap- 
porta cette  arme  de  la  Nouvelle-Calédonie,  en  1862. 

En  terminant  la  lecture  des  notes  qui  accompagnent  l'envoi  du  casse- 
tête  calédonien,  M.  de  Lisle  insiste  sur  le  rapprochement  facile  à  éta- 
blir entre  les  armes  de  luxe  de  certains  chefs  sauvages  et  les  belles 
armes  de  pierre  des  tumulus  vannetais. 

Une  discussion  s'engage  à  ce  sujet.  M.  A.  Leroux  est  d'avis,  d'accord 
en  cela  avec  la  majorité  des  membres  du  Congrès  de  Vannes,  que  les 
grands  celtes  en  pierre  verte  des  dolmens  bretons  n'ont  jamais  été 
des  armes  de  combat  ;  c'étaient  plutôt  des  simulacres,  des  emblèmes 
destinés  à  rappeler  la  l'orme  des  armes  primitives,  que  l'usage  des 
métaux  avait  fait  abandonner  depuis  longtemps.  M.  Maître  ajoute 
qu'il  est  singulier,  en  effet,  que  ces  grandes  lames  de  pierre  soient 
restées  si  intactes,  après  avoir  servi  à  la  guerre  ou  à  la  chasse.  M.  de 
Lisle  répond  à  ces  objections  en  faisant  remarquer  que  la  hache  du 
chef  canaque  est  aussi  parfaitement  intacte  que  les  plus  belles  pièces 
du  musée  de  Vannes,  et  d'une  roche  également  précieuse  ;  cependant, 


—  237  — 

elle  a  incontestablement  servi  entre  les  mains  d'un  guerrier  qui  ne 
ménageait  pas  ses  coups. 

Les  pierres  du  musée  de  Vannes  nous  paraissent  trop  belles  pour 
avoir  été  des  armes;  mais  si  ce  disque  de  jade  vert  nous  était  pré- 
senté sans  son  manche,  si  la  note  historique  de  M.  le  Dr  Canolle  ne  ve- 
nait nous  renseigner  sur  l'emploi  tout  récent  de  cette  pierre,  nous  se- 
rions également  très  embarrassés  pour  dire  à  quel  usage  elle  a  servi. 

M.  Van  Iseghem  remercie  l'auteur  de  cette  communication  pour  les 
belles  armes  qu'il  a  exposées  devant  ses  collègues  ;  puis,  l'ordre  du 
jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  neuf  heures  un  quart. 

Le  secrétaire  général, 

P.  de  Lisle. 


SÉANCE  DU    VENDREDI  6  DÉCEMBRE    1881. 

Présidence  de  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie. 

Présents  :  MM.  H.  de  Cornulier,  Seidler,  abbé  Gallard,  Anizon, 
Petit,  G.  Blanchard,  marquis  de  Brémont  d'Ars,  G.  Marionneau,  Le- 
quen  d'Entremeuse,  Riardant,  Montfort,  Bastard,  abbé  Grégoire, 
baron  de  Wismes,  F.  Bougouin,  comte  de  FEstourbeillon,  Verger, 
Viau,  marquis  de  Surgères,  A.  Leroux,  de  Lambilly,  Evellin,  Maugras, 
Blanchard,  de  Lisle. 

On  procède  à  l'élection  de  deux  membres  du  Comité.  M.  L'abbé  Ca- 
hours  et  M.  Ch.  Seidler  sont  appelés  à  prendre  part,  pendant  deux  ans, 
aux  réunions  du  Comité  central. 

Après  la  lecture  du  procès-verbal,  M.  le  Président  remet  une  liste 
des  ouvrages  reçus  depuis  la  dernière  séance,  accompagnée  des  notes 
suivantes  : 

Ouvrages  adressés  a  la  société. 

1.  La  baronnie  de  Poiroux. 

(Hommage  de  M.  Constant  Verger,  de  Nantes.) 

2.  Du  mont  Papua. 

(Hommage  de  M.  Papier,   président  de  la  Société  arch.  d'Hippone.) 


—  Ïà6  — 

;;.  Répertoire  de  la  société  de  statistique  de  Marseille.  Tome  IV. 
année  1880. 

4.  Bulletin  de  la  Société  archéol.  de  l'Orléanais  (avec  lettre  expl.). 
Tome  VII,  n°  108.  1er  trim.  1881.  (L'envoi  annoncé  n'est  pas  parvenu.) 

Statuts  {nouveaux)  de  l'Académie  des  sciences  et  belles-lettres 
d'Angers  (Ancienne  société  académique.) 

6.  Bulletin  de  la  Société  de  statistique,  sciences,  etc.,  des  Deux- 
Sèvres.  3  fascicules,  d'octobre  1880  à  juillet  1881. 

Le  troisième  fascicule  contient  un  extrait  du  chartrier  du  duc  de 
la  Trémoille,  relatant  les  droits  de  prévôté  de  la  ville  de  Thouars  en 
1559:  document  assez   curieux.  (Droits  de  place  et   octrois   actuels.) 

Mémoires  de  la  Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  de  la 
Marne.  1880-1881. 

Le  menhir  de  la  foret  du  Gault,  G.  Aubrion  ;  — le  mal  du  siècle, 
Paul  Charpentier  ;  —  rapport  de  M.  Guillet;  —le  cimetière  des 
Varennes  ;  —  la  grotte  dolmen  de  Verneuil  (âge  de  la  pierre  polie) . 

L'époque  du  bronze  dans  le  département  de  la  Marne  ;  —  la  dé- 
couverte d'objets  gallo-romains  et  du  XHIe  siècle  —  en  4  mémoires 
dus  à  M.  Aug.  Nicaise. 

8.  Bulletin  de  la  Société  archéol.,  scientif.  cl  hislor.  de  la  Cor- 
réze.  Tome  III,  2e  et  3°  livraison. 

A  signaler:  les  notes  de  M.  E.  Rupin:  sur  une  croix  en  cuivre 
doré  du  XHIe  siècle  (2°  liv.)  ;  —  sur  une  tenture  en  cuir  doré  du 
XVIII0  siècle  ;  —  sur  une  crosse  eucharistique  de  l'église  de  Beau- 
lieu,  XVIIe  siècle  (3e  liv.)  ;  —  de  M.  A.  de  Barthélémy,  sur  une 
monnaie  gauloise;  —  de  M.  l'abbé  Pau,  sur  un  anneau  gallo-romain 
en  or  avec  pierre  gravée  ;  —  sur  un  humérus  humain  présentant 
des  anomalies,  par  le  D.  Roujou  ;  —  le  règlement  de  police  de  la  vi- 
comte de  Turenne  en  1772  ;  —  les  dispositions  du  neveu  du  cardinal 
Dubois  ;  —  trois  lettres  inédites  de  Turgot,  1773  ;  —formation 
des   grottes  des  environs  de  Brives,  par  M.  E.  Massenat. 

9.  Mémoires  de   V Académie  de  Nîmes.  7e   série,  tome  II.    187'.». 
Contient  une  belle  étude  de  M.  Gh.  Lenthéric  sur  la  Vénus  de  Nîmes. 

10.  Société  archéologique  de  Rambouillet.  Mémoires  et  docu- 
ments, tome  V.  1879-80. 

Ouvrage  exclusivement  consacré  au    nobiliaire  et  à  l'armoriai  de 
Montfort-l'Amaury. 

11.  Mémoire  de  la  Société  Ëduenne.  Nu«  série,  tome  IX,  1880, 


—  239  — 

où  nous  trouvons  :  Notes  sur  la  formation  du  terrain  crétacé  à  Sémur 
en  Brionnais,  abbé  Barraud  ;  —  bronzes  antiques  trouvés  à  la  Gomelle- 
sous-Beuvray,    Harold  ;  —  la  Vénerie  et  la  fauconnerie  des  ducs  de 
Bourgogne,  E.  Picard;  —  les  fouilles  du  temple  de  Janus  et  du  quar- 
tier de  la  Genesole,   Bullio. 

42.  Bulletin  de  la  Société  des  sciences  de  l'Yonne.  31e  vol. 
1880-81. 

A  signaler,  de  M.  G.  Cotteau,  sa  relation  du  congrès  international 
d'archéologie  de  Lisbonne  ;  —  le  catalogue  du  cartulaire  concernant 
les  pays  du  département  de  TYonne,  par  M.  Max.  Quantin. 

13.  Bulletin  delà  Société  archéolog ique  de  la  Charente,  année  1880. 

Ce  volume  est  un  des  plus  attrayants  de  cette  longue  série  d'ou- 
vrages ;  il  est  à  lire  en  entier.  Signalons  entre  autres  travaux  :  l'ab- 
baye royale  de  Saint-Etienne  de  Bassac,  par  J.  Denyse.  —  La  Boixe  ou 
l'histoire  d'une  forêt,  de  F.  Lièvre.  —  Les  notes  d'archéologie  préhis- 
torique, de  G.  Ghauvet,  etc.,  etc. 

14.  Bulletin  de  la  Socèitê  d'agricult.,  sciences  et  arts  de  la 
Sarthe.  Tome  20.  Année  1879-80, 3e  fasc.  1881-82,  1er  fasc.  2e  série.  On 
y  peut  lire  : 

Observations  agricoles  et  météorologiques  sur  les  années  remarqua- 
bles de  1544  à  1789,  dans  la  province  du  Mans,  par  R.  Triger —  et 
le  rapport  de  MM.  Guerrier  et  Launay  sur  l'action  du  froid  pendant 
l'hiver  de  1879-80. 

Bien  que  sans  relations  avec  les  études  de  notre  société,  ces  ob- 
servations et  ce  rapport  offrent,  sous  une  apparence  de  monotonie, 
un  intérêt  réel  pour  les  météorologistes  et  les  agriculteurs.  Il  en  res- 
sort que  tout  n'est  pas  pour  le  mieux  dans  le  monde,  et  ce,  avec  preu- 
ves à  l'appui. 

15.  Revue  historique  et  archéologique  du  Maine.  Tome  9. 
3  livraisons. 

Voir  dans  la  Ire  iiv.  «  l'enceinte  gallo-romaine  du  Mans  »,  par  l'abbé 
R.  Charles,  dessins  artistiques  de  M.  Bouet  :  avec  suite  dans  la  3e  liv.; 
—  l'essai  sur  la  Fronde  dans  le  Maine  et  le  siège  du  Mans  en  1652. 
de  M.  Menjot  d'Elbenne. 

16.  Mémoires  de  la  Société  académique  d,e  S.-Quentin.  4e  série, 
tome  III,  de  juillet  1879  à  juillet  1880.  A  signaler  :  Fouilles  du  cime- 
tière du  Jardin-Dieu-de-Cugny  (Aisne),  par  J.  Pilloy. 


—  240  — 

17.  Balle  H  n  de  la  Conférence  littéraire  et  scientifique  de  Pi- 
cardie, 1881.  3e  année,  mars,  avril,  mai  et  juin,  2  fascicules. 

A  citer,  un  mémoire  de  M.  L.  Fournier  sur  les  Etats-Généraux, 
résumé  bien  curieux  des  principales  délibérations  de  ces  assemblées  si, 
peu  connues  aujourd'hui.  Par  M.  G.  Lecoq,  —  l'historique  de  la  lutte 
soutenue  par  la  ville  d'Amiens  contre  le  duc  de  Ghaulnes,  gouverneur 
de  la  province,  lutte  fertile  en  incidents  autant  qu'honorable  pour  le 
corps  de  ville,  et  où  apparaissent,  presqu'-avec  leur  organisation  ac- 
tuelle, les  grèves  ouvrières,  163G.  —  Enfin,  pour  les  amateurs  des 
aridités  grammaticales,  l'essai  courageux  de  M.  G.  Couttolenc  sur  le 
verbe  français. 

18.  Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Picardie,  tome 
IXe.  Documents  inédits. 

Il  s'agit  de  l'histoire  de  l'abbaye  et  de  la  ville  de  Saint-Riquier,  tomel, 
par  M.  l'abbé  Hernoque.  Ce  volumineux  travail,  orné  de  belles  plan- 
ches, ne  serait  pas  désavoué  par  l'ordre  de  S. -Benoît,  même  limité  à 
ce  seul  tome.  C'est  l'histoire  consciencieuse  et  vivante  d'un  passé 
de  12  siècles,  de  celui  d'un  monastère  qui  a  «  produit,  abrité  et  formé 
plusieurs  saints  et  un  grand  nombre  d'hommes  justement  célèbres.  » 

19.  Annuaire  de  Numismatique  et  d'Archéologie,  2e  année, 
1867.  Splendide  travail  dans  lequel  je  ne  puis  signaler  qu'un  mémoire 
remarquable  de  M.  J.  Roman,  sur  l'organisation  militaire  de  l'empire 
romain,  et  les  médailles  légionnaires.  Cette  étude,  l'une  des  plus  com- 
plètes qui  aient  été  faites  sur  ce  sujet,  nous  découvre  une  foule  de 
particularités  trop  ignorées,  et  ménage  de  nombreuses  surprises  aux 
admirateurs  exclusifs   des  aimées  modernes. 

20.  Journal  des  Savants,  de  mai  à  octobre  1881,  en  6  fascicules. 
Un  titre  bien  justifié,  il  faut  le  reconnaître,  par  la  nature  et  le  style 

des  travaux  dont  cette  publication  garde  la  spécialité.  Je  me  bornerai 
à  noter  :  les  études  sur  la  religion  et  les  moeurs  des  Soubbas,  par  M.  F. 
de  Saulcy.  —  L'histoire  du  matérialisme,  par  M.  Ch.  Levèque  ;  et 
celle  de  la  divination  dans  l'antiquité,  par  M.  Al.  Maury. 

21.  Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France,  du  tome 
28e  au  tome  39e,  soit  12  volumes. 

Notons  .-  1°  Dans  le  tome  28e, 

Les  inscriptions  du  revers  de  plaques    du  palais  de  Khorsabadd.  par 


—  241  — 

J.  Menant.  —  Les  trois  Saint-Germain  de  Paris,   par  M.  L.  Quiche- 
rat. 

2o  Dans  le  tome  29e, 

De  la  connaissance  de  la  ferrure  à  clous  chez  les  anciens,  par  M. 
Pol.  Nicart.  —  La  formation  du  Civitates  de  la  Gaule,  par  F.  Bour- 
guelof.—  Le  pilum  de  l'infanterie  romaine,  par  J.  Quicherat  .  —  Enfin, 
pour  MM.  nos  archivistes,  une  charte  d'Agius,  évoque  d'Orléans  en  874, 
par  M.  Vergnaud  Romagnesi. 

3o  Dans  le  tome  30e, 

Une  note  de  M.  Vallet  de  Viriville  sur  les  anneaux  ou  bagues  qu'af- 
fectionnait Jeanne  d'Arc. 

4o  Dans  le  tome  31e, 

Recherches  sur  l'accusation  de  magie  dirigée  contre  les  premiers 
chrétiens,  L.  Le  Blant.  —Jetons municipaux  delà  villede  Paris,  auXVe 
siècle  ;  J.  Rouyer.  —  Note  sur  un  vase  de  terre  décoré  de  reliefs, 
M.  de  Witte. 

5o  Dans  le  tome  32e, 

Trésor  de  l'abbaye  de  Saint -Maurice  d'Agaune,  par  M.  E.  Aubert. 

Description  de  quelques  refuges  des  anciens  Helvètes,  par  M.  Keller, 
avec  suite  dans  le  tome  33e.  — Ce  travail,  bien  que  topique,  nous  sem- 
ble de  nature  à  faciliter  l'étude  delà  découverte  de  localités  analogues 
dans  nos  montagnes   de  France. 

6e  Dans  le  tome  33e, 

Les  monuments  celtiques  et  Scandinaves  des  environs  d'Inverness 
(Ecosse),  par  J.  Mariotti.  —  L'émaillerie  gauloise  et  l'oppidum  du 
Mt.-Beuvray,  M.  Bulliot.  —  Un  sénatus-consulte  romain  contre  les  in- 
dustriels qui  spéculent  sur  la  démolition  des  édifices,  par  M.  Egger. 
—  Les  jours  égyptiens  et  leurs  variations  dans  les  calendriers  du 
moyen  âge,  par  M.  Loiseleur.  —  Enfin,  un  sarcophage  chrétien  de 
Salone,  par  A.  Dumont. 

7o  Dans  le  tome  34e, 

Les  tumulus  gaulois  delà  commune  de Magny-Lambert  (Côte-d'Or), 
par  A.  Bertrand. 

8o  Dans  le  tome  35e, 

Le  costume  de  guerre  et  d'apparat  d'après  les  sceaux  du  moyen 
âge,  G.  Demay.  —  La  pierre  sacrée  d' Antipolis,  L.  Hauzet.  —  Sur 
une  pierre  tumulaire  portant  les   mots  «   Hic   Christus  est  »,  M.  Le 

1881  16 


—  242  — 

Blant.  —  Projectiles  creux  en    terre   cuite,  île  fabrication   arabe,  et 
destinés  à  être  lancés  à  la  main,  M.  de  Sauley. 

9o  Dans  le  tome  36e, 

Des  dépouilles  religieuses,  enlevées  à  Constantinople  au  XMe 
siècle,  et  des  documents  historiques  nés  de  leur  transport  en  Occi- 
dent, par  le  comte  Riant.  —  De  la  peinture  à  l'huile  en  France,  au 
commencement  du  XIVe  siècle,  par  G.  Demay.  —  Sur  les  permutations 
de  la  consonne  initiale  dans  les  langues  néo-celtiques,  et  sur  les  éty- 
mologies  gauloises,  H.  d'Arbois  de  Jubainville.  —  Fouilles  du  cime- 
tière franc  d'Oyes  (Marne),  J.  de  Raye. 

10o  Dans  le  tome  27", 

Chantoceaux.  Siège  d'un  évôché  et  résidence  royale  sous  Pépin 
le  Bref,  par  A.  Longnon.  —  Le  marbre  de  Torigny,  par  le  Dr  Greuly.  — 
Le  blason  d'après  les  sceaux  du  moyen  âge,  G.  Demay. 

llo  Dans  le  tome  38e, 

Notice  sur  l'oppidum  de  Boviollec  (Meuse),  L.  Maxe-Werly. 

12o  Dans  le  tome  39e, 

Notice  sur  quelques  représentations  allégoriques  de  l'Eucharistie,  F* 
de  Lasteyrie.  —  Sur  quelques  lampes  égyptiennes  en  forme  de  gre- 
nouilles, E.  Le  Blant.  —Bronzes  trouvés  à  Reims  en  1878,  E.  Guil- 
laume. —  Enfin,  topographie  de  la  ville  d'Acre  au  XIIIe  siècle,  G.  Rey. 

M.  Montfort  demande  ensuite  la  parole  pour  annoncer  à  la  Société 
que  notre  éminent  collègue,  M.  Bourgerel,  vient  d'être  nommé  mem- 
bre correspondant  de  l'Institut.  Une  nouvelle  distinction  vient  aussi 
d'être  accordée  à  M.  Ch.  Marionneau,  notre  ancien  président,  pour 
son  ouvrage  sur  l'architecte  Louis  :  M.  Marionneau  vient  d'être  nom- 
mé lauréat  de  l'Académie. 

M.  le  Président,  au  nom  de  toute  l'assistance,  témoigne  hautement 
la  part  que  notre  Société  prend  à  ces  heureuses  nouvelles. 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  lecture  du  travail  de  M.  Blan- 
chard sur  les  Venètes,  Nannètes  et  Samnites. 

Il  y  a  un  an,  nous  écoutions  ici  le  beau  travail  de  M.  Orieux,  César 
citez  les  Venètes.  L'auteur  se  basait,  pour  combattre  la  théorie  gué- 
randaise  du  combat  naval  de  Brutus,  sur  un  examen  critique  do  la  to- 
pographie. Ses  hautes  compétences  on  pareilles  matières,  son  savoir 
et  le  charme  de  sa  plume  ont  donné  à  son  travail  un  véritable  éclat. 

Aujourd'hui  les  tenants  du  système  guérandais  entrent  de  nouveau 
dans  la  lice. 


—  243  — 

M.  Blanchard,  dans  un  savant  mémoire  écrit  avec  un  charme  tout 
particulier,  et  écouté  avec  le  plus  vif  intérêt,  combat  les  objections  de 
M.  Orieux  en  s' armant  surtout  des  textes  des  anciens  écrivains. 

Analyser  le  travail  de  M.  Blanchard,  ce  serait  lui  ôter  toute  sa 
force,  basée,  avant  tout,  sur  l'exactitude  des  citations.  Nous  don- 
nerons donc  quelques  passages  de  cette  belle  étude,  pour  représenter 
ici  les  arguments  les  plus  saillants  de  sa  thèse. 

Après  nous  avoir  décrit  l'étendue  du  territoire  des  Venètes,  limités  à 
l'occident  parle  promontoire  de  Gobbée,  c'est-à-dire  la  pointe  de  Saint- 
Mathieu  (le  point  de  départ  delà  longitude  de  la  Gaule,  d'après 
Marcien  ) ,  M.  Blanchard  expose  les  sérieuses  raisons  qui  lui  font 
admettre  la  présence  des  Venètes  sur  la  rive  droite  de  la  basse 
Loire. 

La  Loire   était  un  des  grands  chemins  de  l'antiquité.  Au  dire  de 
Strabon,   les  marchandises  arrivaient  de  la  mer   intérieure  au  pays 
des  Arvernes  et,  de  là,  descendaient  le  cours  de  la  Loire  pour  arriver 
à  l'Océan.  L'embouchure   du  fleuve   était,  par  conséquent,  tête  de 
ligne  de  cette  route  à  travers  la  Gaule. 

Les  Venètes  pouvaient-ils  négliger  une  station  de  cette  importance, 
la  seule  qui  assurât  leur  suprématie  maritime  et  commerciale  ? 
Poser  la  question,  dit  M.  Blanchard,  c'est  aussi  la  résoudre.  César 
ne  dit-il  pas  que  les  Venètes  «  possèdent  sur  une  mer  vaste  et  ora- 
geuse le  petit  nombre  de  ports  qui  y  sont  disséminés,  et  qu'ils  ont 
pour  tributaires  presque  tous  ceux  qui  naviguent  dans  cette  mer.  » 
Ici  M.  Blanchard  fait  porter  les  mots  fere  omnes  non  pas  sur  les 
ports  de  mer,  mais  sur  les  navigateurs. 

Après  avoir  constaté  l'autorité  des  Venètes  sur  leurs  voisins,  César 
énumère  les  causes  qui  l'ont  produite  ;  et  une  des  principales  est 
qu'ils  possèdent  sur  une  mer  vaste  et  orageuse  le  peu  de  ports 
qui  s'y  trouvent.  Cette  mer  vaste  et  orageuse,  c'est  l'Océan  Atlan- 
tique, dont  le  contraste  avec  la  Méditerranée  (conclusum  mare)  est 
signalé  plus  loin  par  César. 

Or,  comme  les  Venètes  possèdent  dans  la  Péninsule  tous  les  ports 
de  l'Atlantique,  on  est  bien  forcé  d'admettre  que  leur  domination  em- 
brassait le  pays  de  Guérande  et  ne  s'arrêtait  qu'aux  côtes  Piétonnes. 
—  Impossible  de  trouver  sur  tout  co  littoral  un  point  libre  quel- 
conque pour  y  établir  des  Samnites  ,  et  dans  la  presqu'île  guérandaise 


—  244  — 

• 

moins  qu'ailleurs,  puisqu'â  l'embouchure  de  la  Loire  se  trouvait, 
d'après  Strabon,  un  des  quatre  ports  de  la  Gaule  où  l'on  s'embar- 
quait pour  l'île  de  Bretagne,  et  que  ce  port  ne  pouvait  appartenir 
qu'aux  Venètes  qui  avaient  le  monopole  du  commerce  avec  l'île. 

Ces  Samnites  ont  d'ailleurs  si  peu  d'importance  qu'ils  ne  sont  pas 
seulement  nommés  une  seule  fois  dans  les  Commentaires  où  César 
exalte  à  un  si  haut  point  la  puissance  des  Venètes. 

Pline  ne  nous  parle  pas  plus  des  Samnites  que  l'auteur  des  Com- 
mentaires. Après  avoir  nommé  les  Venètes  comme  le  dernier  peuple 
maritime  avant  l'embouchure  de  la  Loire  :  «  Au  delà,  dit-il,  sont  les 
Nannètes  »  ;  est-il  possible  de  mieux  préciser  la  position  de  ceux-ci 
sur  la  droite  du  fleuve  ? 

Mais,  objecte-t-on,  que  parlez-vous  de  Nannètes  sur  la  rive  droite  de 
la  Loire?  Strabon,  lui-même,  y  place  des  Samnites.  Pour  l'auteur  de 
César  chez  les  Vénôtes  Samnites  et  Nannètes  sont  tout  un.  Et  voyez 
à  quelle  conséquence  il  est  forcé  d'aboutir  :  tandis  qu'à  ses  yeux  ces 
Samnites  forment  un  peuple  assez  important  pour  occuper,  du  fond 
delà  presqu'île  guérandaise  jusqu'à  l'Anjou,  un  territoire  de  quatre 
à  cinq  mille  kilomètres  carrés,  leurs  femmes,  avec  les  enfants  à  la 
mamelle,  tiennent  toutes  à  l'aise  dans  une  petite  île,  «  un  infime  îlot, 
d'un  quart  de  lieue  carrée  »,  suivant  l'évaluation  de  M.  Orieux  lui- 
même. 

La  phrase  de  Strabon  ne  se  prête  à  aucune  ambiguité  :  ««  les  femmes 
des  Samnites  »,  et  non  pas  .-  «  des  femmes  samnites.  » 

M.  Blanchard  critique  ensuite  la  traduction  du  texte  de  Ptolémée, 
où  l'on  fait  dire  à  cet  auteur  que  «  les  Samnites  s'étendent  jusqu'à 
la  Loire  »,  au  lieu  de  :  «  avoisinent  le  fleuve  de  Loire.  »  Appropin- 
quantes  Ligeri  Fluvio,  sur  la  traduction  latine.  Du  reste  Ptolémée, 
écrivant  deux  siècles  après  la  conquête,  n'a  pas  toute  l'autorité  dési- 
rable sur  ce  sujet. 

En  tout  cas,  en  concédant  qu'au  Ile  siècle  de  notre  ère,  les  Sam- 
nites eussent  une  station  sur  la  Basse-Loire,  et  une  autre  près  des 
Andes,  il  est  impossible  d'admettre  que,  parce  qu'ils  étaient  établis 
sur  ces  deux  points,  ils  dussent  posséder,  à  l'exclusion  des  Namnètes 
de  Pline  et  des  Namnites  de  Strabon,  tout  le  pays  compris  entre 
l'Anjou  et  la  Basse-Loire,  et  de  plus  encore,  toute  la  presqu'île  gué- 
randaise.    . 


—  245  — 

Avec  ce  système,  les  Venètes,  à  qui  César  attribuait  les  ports  de 
la  côte,  en  eussent  été  réduits  à  l'unique  port  Vendand, 

Des  textes  précis,  dit  M.  Blanchard  en  finissant,  établissent  que  la 
presqu'île  guérandaise  continue  à  faire  partie  de  la  Vénétie,  même 
après  la  chute  du  pouvoir  romain. 

Restituons  donc  aux  anciens  possesseurs  de  cette  côte  leur  litto- 
ral jusqu'à  la  Loire  et  ces  nombreuses  îles  citées  par  Pline.  Avant  de 
chercher  pour  la  lutte  des  Venètes  un  théâtre  qui  ait  de  la  gran- 
deur, il  importe  de  ne  pas  les  amoindrir  dans  leurs  îles,  dans  leurs 
ports,  dans  leur  territoire,  en  un  mot  dans  tous  les  éléments  consti- 
tutifs de  cette  puissance  qui  leur  permit  de  tenir  en  échec  César,  ses 
légions  et  sa  flotte. 

La  parole  est  ensuite  donnée  à  M.  Marionneau,  ancien  président  de 
notre  Société. 

Les  recherches  entreprises  par  notre  collègue  sur  le  territoire  du 
canton  de  Vertou  ont  déjà  produit  un  résultat  considérable  ;  sans 
compter  les  précieux  documents,  les  notes  manuscrites  recueillies 
avec  une  patience  et  une  science  bénédictines  sur  toutes  les  com- 
munes dépendant  de  cette  circonscription,  M.  Marionneau  a  rassem- 
blé dans  sa  collection  cantonale  de  très  nombreux  objets  qui  repré- 
sentent, à  toutes  les  époques,  l'industrie  locale  de  ce  coin  de  notre 
département.  Notre  savant  confrère  est  donc  armé  de  toutes  pièces 
pour  mener  à  bien  son  entreprise. 

Depuis  la  publication  de  son  catalogue  dans  le  bulletin  de  1876, 
M.  Marionneau  a  recueilli  des  haches  en  pierre  polie,  des  silex  tra- 
vaillés et  bon  nombre  de  pièces  d'un  véritable  intérêt. 

Une  trouvaille  extrêmement  curieuse,  et  qui  remonte  déjà  à 
quelques  années,  a  été  faite  sur  la  terre  même  de  la  Salmonière,  ha- 
bitée par  notre  collègue.  C'est  une  cachette  ou  fonderie  de  haches 
en  bronze,  du  type  des  haches  à  talon. 

Parmi  les  trouvailles  de  ce  genre  observées  dans  toute  la  France, 
M.  G.  de  Mortillet,  dans  un  travail  publié  récemment,  n*a  cité  qu'un 
seul  exemple  de  cachette  où  cette  forme  de  hache  ait  été  rencontrée 
sans  être  mélangée  avec  d'autres  types  ;  c'est  donc  là  une  très  heu- 
reuse découverte. 

Une  large  brique,  décorée  à  l'une  de  ses  extrémités  de  rinceaux  gra- 
cieusement enlacés  et  ornés  de  pommes  de  pin,  est  soumise  à  l'exa- 


—  246  — 

men  des  assistants.  Cette  brique,  qui  provient  de  l'ancienne  église  de 
Vertou,  devait  être  englobée  dans  une  maçonnerie  de  façon  à  ne  lais- 
ser dépasser  que  la  partie  ornementée.  Une  pierre  de  même  prove- 
nance, et  formant  l'angle  du  tympan  de  quelque  édifice  très  primitif, 
est  décorée  d'un  oiseau  grossièrement  gravé,  dont  le  dessin  rappelle 
assez  le  style  un  peu  barbare  des  poteries  néo-chrétiennes  trouvées  à 
Nantes. 

Une  petite  rectification  ou  plutôt  un  point  de  doute  doit  être  placé 
maintenant  devant  le  no  37  du  catalogue  de  la  collection  cantonale  de 
Vertou.  Le  bas-relief  décrit  à  cet  article  et  représentant  «  une  jeune 
femme  assise  sur  un  escabeau,  le  bras  gauche  tombant  le  long  du 
corps,  »  a  bien  réellement  été  trouvé  sur  l'emplacement  de  l'ancien 
prieuré  de  Saint-Pierre  de  Vertou  ;  mais  M.  de  Boury,  propriétaire  de 
ce  lieu;  émet  quelques  doutes  sur  l'origine  de  ce  dépôt.  Cette  pièce  au- 
rait été  rapportée  de  Grèce  par  un  de  ses  parents  (?)  Il  resterait  à  savoir 
pourquoi  et  comment  ce  bas-relief  aurait  été  enfoui  à  la  place  où  on 
l'a  découvert. 

Après  un  compte  rendu  d'une  excursion  à  la  Villa  gallo-romaine 
des  Cléons,  M.  Marionneau  termine  sa  communication  en  faisant 
lcirculer  différents  croquis  et  des  vues  de  l'église  de  Basse-Gou- 
aine. 

La  séance  est  levée  à  dix  heures. 

Le  secrétaire  général, 

Pitre  de  Lisle. 


SÉANCE  DU    MARDI  20  DÉCEMBRE  1881. 

Présidence  de  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie. 

Présents  :  MM.  Lemeignen,  abbé  Cahours,  Seidler,  Petit,  des  Jamo- 
nières,  Anizon,  Perthuis,  baron  de  Wismes,  Léon  Maître,  Bacqua, 
Kerviler,  F.  Bougoiiin,  Le  Quen  d'Entremeuse,  Laurent,  de  Lam- 
billy,  abbé  Gallard,  Riardant,  Blanchard,  Evellin,  Bastard,  comte  de 
l'Estourbeillon,  abbé  Grégoire,  Montfort,  Verger,  G.  Blanchard,  Gainer, 
de  Lisle  et  plusieurs  autres  membres. 


-  247  - 

On  procède  à  l'élection  de  M.  le  docteur  Génuit,  présenté  par  M.  le 
baron  de  Wismes  et  M.  le  vicomte  de  la  Laurencie.  M.  le  docteur  Gé- 
nuit est  admis  à  l'unanimité  comme  membre  résidant  de  notre  Société. 

Le  procès-verbal  de  la-  dernière  séance  est  lu  et  adopté.  Puis  les 
ouvrages  suivants  sont  déposés  sur  la  table  du  bureau  pour  faire 
partie  de  la  bibliothèque  : 

10  Bulletin  de  la  Société  des  Antiquaires  de  l'Ouest,  &  trim. 
de  1881. 

2o  Etude  de  l'abbé  Richard  sur  la  ville  de  Bressuire.  (Berso- 
rium.) 

L'ordre  du  jour  appelle  ensuite  la  lecture  du  travail  de  M.  Kerviler  : 
«  Les  Yenètes,  César  et  Brivates  Portus.  » 

Avant  de  donner  la  parole  à  M.  Kerviler,  M.  le  Président  remercie 
notre  honorable  collègue  d'avoir  bien  voulu  quitter  Saint-Nazaire, 
où  l'attachent  de  si  importants  travaux,  pour  venir  assister  à  notre 
réunion. 

L'étude  de  M.  Kerviler  se  divise  en  3  parties  : 

Dans  la  première,  l'auteur  expose,  d'après  les  anciens  historiens  et 
géographes,  l'étendue  du  territoire  vénétique.  —  Arrivant  à  la  situa- 
tion du  peuple  samnite,  M.  Kerviler  fait  remarquer  que  la  contra- 
diction apparente  entre  les  textes  de  Strabon,  de  César  et  de  Ptolémée, 
n'existe  pas  en  réalité.  —  Strabon  parle  des  Samnites  d'après  Pythéas 
qui  avait  visité  notre  littoral  trois  siècles  avant  la  conquête.  César, 
dans  sa  campagne  en  Armorique,  ne  fait  aucune  mention  des  Samni- 
tes, absorbés  sans  doute  par  l'immense  puissance  des  Venètes.  Puis, 
lorsque  les  Venètes  sont  amoindris  par  leur  défaite  et  par  le  dur  trai- 
tement du  vainqueur,  les  Samnites  reparaissent  de  nouveau  ;  aussi  les 
trouvons-nous  mentionnés  dans  Ptolémée  deux  siècles  plus  tard. 

11  n'y  a  là  aucune  contradiction  :  il  faut  seulement  prendre  chacun 
des  anciens  géographes  à  sa  date  respective  ou  à  celle  des  autorités 
dont  il  se  sert,  et  ne  pas  raisonner  sur  leurs  indications  comme  si 
elles  étaient  contemporaines. 

Le  récit  de  Y  expédition  de  César  et  une  étude  sur  le  Brivates 
Portus  terminent  le  savant  mémoire  de  M.  Kerviler. 

Nous  ne  voulons  pas  analyser  ici  ce  remarquable  travail  ;  nos  bul- 
letins le  publieront  en  entier.  Disons  seulement  qu'il  a  été  chaleu- 
reusement applaudi  par  l'auditoire. 


—  248  — 

M.  l'abbé  Gahour,  que  nous  sommes  tous  heureux  de  revoir  parmi 
nous,  remercie  la  Société  archéologique  de  son  dernier  vote.  Il  se 
félicite  d'assister  de  nouveau  à  nos  séances  au  moment  où  la  grande 
question  des  guerres  vénétiques,  étudiée  avec  un  génie  tout  parti- 
culier par  notre  savant  collègue,  M.  Orieux,  vient  donner  à  nos  réu- 
nions un  intérêt  exceptionnel.  M.  l'abbé  Gahours  rappelle  en  quelques 
mots  le  travail  de  M.  de  Kersabiec  sur  Corbilon,  le  point  de  départ  de 
la  campagne  soutenue  en  ce  moment  par  MM.  G.  Blanchard  et  KeB- 
viler. 

M.  Léon  Maître  transmet  à  la  Société  les  regrets  de  M.  Orieux  que 
son  état  de  santé  empêche  d'assister  à  notre  séance.  Puis  il  demande 
à  M.  Kerviler  si  le  sol  des  marais  de  Donges  et  de  Montoir  n'a  pas 
subi  un  affaissement  relativement  récent.  Les  troncs  d'arbres 
que  l'on  trouve  enfouis  dans  la  tourbe  ne  témoignent-ils  pas  que  là 
existait  autrefois  une  forêt,  engloutie  ou  entraînée  par  quelque  cata- 
clysme ? 

M.  Kerviler  répond  que  le  fond  du  golfe  de  la  Brière  présente  un 
niveau  très  uniforme,  sauf  dans  la  partie  qui  avoisine  les  terres  au 
nord,  l'épaisseur  de  la  couche  tourbeuse  est  régulièrement  de  2  mètres. 
C'est  dans  la  partie  haute  de  cette  tourbe,  dans  le  second  mètre,  que 
se  trouvent  les  troncs  d'arbres.  Leur  base  est  encore  enracinée  dans 
la  tourbe  et  ce  sont  en  général  des  chênes  de  100  à  120  ans  pour 
le  plus,  ayant  en  coupe  un  diamètre  de  30c.  Les  troncs  ne  sont  pas 
orientés  de  la  même  façon,  mais  au  contraire  abattus  dans  toutes  les 
directions  possibles. 

M.  G.  Blanchard  apporte  une  excellente  preuve  à  l'appui  de  l'an- 
cienneté du  golfe  de  la  Brière.  Les  voies  romaines  de  cette  région 
contournent  le  bord  de  la  Brière.  Il  est  bien  évident  que  si  le  sol  avait 
été  praticable  les  Gallo-Romains,  si  amis  de  la  ligne  droite,  n'eussent 
pas  ainsi  allongé  inutilement  leur  tracé. 

M.  le  comte  de  l'Estourbeillon  donne  ensuite  lecture  d'une  char- 
mante étude  sur  les  Légendes  du  pays  d'Avessac-,  puis  la  séance 
est  levée  à  neuf  heures  et  demie. 

Le  secrétaire-général, 
Pitre  de  Lisle. 


TABLE  DES  MATIÈRES 

PAR  ORDRE  ALPHARÉTIQUE  ET  TABLE  ANALYTIQUE 
DES  PROCÈS-VERBAUX 


ANNÉE    1881 


*  Abbaye  de  Saint-Gildas.  Notice  par  M.  Ledoux XII 

Allocution  de  M.  le  baron  de  Wismes,  président  sortant.  XXVII 
Allocution  de  M.  le  vicomte   Jules   de  la    Laurencie, 

président XLV 

Arme   (une)   historique  en  pierre  polie,   par  M.  Pitre 

de  Lisle 69 

*  Artois  (1'),  souterrain,  par  M.  Ternink,  communication 

de  M.  Bacqua XX 

Cabinet  (le)  de  travail  d'un  seigneur  breton  en  1625,  par 

M.  le  comte  R.  de  l'Estourbeillon 1 

*  Catalogue  du  musée  cantonal  de  Vertou,  par  M.  Ch. 

Marionneau.  —  Additions  et  rectification 245 

*  Congrès  de  Vannes.  Compte  rendu  par  M.  A.  Leroux. .        234 

*  Étude  sur  les  localités  portant  le  nom  de  Paradis,  par 

M.  Léon  Maître XVIII 

B.  Fillon,  nécrologie,  par  M.  Pitre  de  Lisle 231 

Fouilles  du  tumulus  de  la  Roche,  commune  de  Donges, 

par  M.  Pitre  de  Lisle 75 

*  Fouilles  àRezé,  par  MM.  Léon  Maître  et  R.  de  l'Estour- 

beillon     XXIII 

*  Installation  du  nouveau  bureau V 

Monasticon  nantais,  par  M.  l'abbé  P.  Grégoire 119 


-  250  — 
Notes  sur  différentes  armes  de  pierre  et  de  bronze  trou- 
vées aux  environs  de  Donges,  par  MM.  G.  et  P. 
de  Lisle 89 

Odin    l'homme.    Étude    historique     et    littéraire,    par 

M.  l'abbé  Dominique 49 

*  Ouvrages  reçus  pour  la  Société.  Compte  rendu  par 

M.  le  vicomte  J.  de  la  Laurencie 237 

Paradis  (les)  sont-ils  des  cimetières  mérovingiens  ?  par 

M.  Léon  Maître 103 

*  Trésor  archéologique  de  l'Armorique  occidentale XXIV 

*  Troglodytes  (les)  de  la  Gartempe,  par  M.  Raoul  de 

Rochebrune XIV  et  XVIII 

Trouvères    (les)    guérandais,    par    M.    l'abbé    Gallard 

(2e  article) 291 

Venètes,  Nannètes  et  Samnites,  par  M.  G.  Blanchard 194 

*  Venètes  (les),  César  et  le  Brivates  Portus,  par  M.  René 

Kerviler 247 

*  Voyage  en  Syrie,  par  M.  Alcide  Leroux VII 

*  Visite  (une)  à  la   Salmonnière,  par  M.  le  baron  de 

Wismes IX 


Les  articles  marqués  d'un  {*)sont  extraits  des  procès-verbaux. 


TABLE  DES  MATIÈRES 

PAR  NOMS  D'AUTEURS 


ANNEE    1881 


Blanchard  (G).  —  Venètes,  Nannètes  et  Samnites 193 

Dominique  (l'abbé). —  Odin  l'homme,   étude  historique 

et  littéraire. ...» 49 

De  l'Estourbeillon  (Comte  Régis).— Lecabinet  de  travail 

d'un  seigneur  breton  en  1625  (Samuel  d' 'Avaugour, 

seigneur  de  Saffré) 1 

Gallard  (l'abbé).  —  Les  Trouvères   Guérandais  en   la 

fête  de  Saint-Nicolas,  au  XIV*  siècle  (2e  article). . .        91 

P.  Grégoire  (l'abbé).  —  Monasticon  Nantais  {4790) 119 

De  laLaurencie  (Vicomte  J.) — Allocution  présidentielle  XLV 
De  Lisle  (Pitre).—  Une  arme  historique  en  pierre  polie.       69 

—  Fouilles  du  tumulus  de    la  Roche, 

commune  de  Donges 75 

—  Benjamin  Fillon.  Nécrologie 231 

Léon  Maître.—  Les  Paradis  sont-ils  des  cimetières  mé- 
rovingiens ? 103 

De  Wismes  (Baron). —  Allocution  à  la  séance  dHnstal- 

lation  du  bureau XXVII 

Procès-verbaux,  pages  V  à  XXV  et  234  à  248. 


Nantes.  —  Imp.  Vincent  Forcst  et  Emile  Grimaud,  place  du  Commerce,  4. 


?J>-\  J 


s  » 


V^x* 


>  >  >  r» 


.>P» 


>?> 


>} 


î% 


> 


?y.?    J£>. 


$   > 


'v  ^?€>^â^ 


>  ) 


»  > 


uïsm 


^  i 


2>  t> 


^     j3rjp^>>    J»2>        >' 


■,^..j3j^- 


>    ^>  1&  >  »    ^>V> 


JL»J 


:>^*">>i 


>    > 


>?**& 


2SS&    ?;>■>.   ù¥>  11?   > 


3>iJ> 


\>  >>    J5. 


^> 


JP'lP 


■  "  V   -JÊTV 


^      -^  >■>> 


>^>    X 


^3^ 


jk  >  ->  '">■■ 


-^>1XV» 

■>  i»:X;>   >  > 


>'  j'y 


.^^9;J0 


y  ii»  3 


:*» 


_3»  j  ^  y  » 


>  "> 


:X  ^>  :»x>" 


%> 


3  ,  ! 


<>js»  ->>  >»     y)  x>  3 


^^X^*^ 


>JZ2~ 


3»>    J8>J»  5J>  if 


J£t2Jl 


^L>JfJ^ 


^?>^ÏV 


>1>>^^         X 

xb  >;»;»  J 


3x>  ^>  à>  > 


>0>   ^3>  ^>    > 


m 


u